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10/02/2011 | FRANCE | N°08MA02853

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 10 février 2011, 08MA02853


Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2008, présentée pour Mme B A demeurant ..., par Me Gontard-Quintric ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600179 en date du 7 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales et des pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

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Vu le code gé...

Vu la requête, enregistrée le 10 juin 2008, présentée pour Mme B A demeurant ..., par Me Gontard-Quintric ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600179 en date du 7 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales et des pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

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Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'État du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisées à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n°2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2011 :

- le rapport de M. Maury, rapporteur ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

- et les observations de Me Gontard-Quintric pour Mme A ;

Considérant que Mme A relève appel du jugement du 7 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur revenu, aux contributions sociales et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision en date du 17 février 2009, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux des Bouches-du-Rhône a prononcé le dégrèvement, à concurrence de la somme de 35 627 euros des droits et pénalités, des cotisations aux contributions sociales auxquelles elle avait été assujettie au titre des années 1996, 1997 et 1998 ; que les conclusions de la requête de Mme A sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, que Mme A soutient comme en première instance que l'administration a mis en oeuvre, implicitement mais nécessairement, la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, sans respecter les garanties qui y sont attachées ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen qui ne comporte aucun élément de fait ou droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le Tribunal administratif de Marseille ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ;

Considérant que les notifications de redressements qui ont été adressées à Mme A précisent le total des encaissements bancaires mais n'en indiquent pas le détail et indiquent notamment que les ratios chiffre d'affaires sur salaires s'élèvent à 1,90 en prenant en compte les salaires productifs déclarés et à 2,75 en prenant en compte les salaires productifs comptabilisés et que pour l'exercice 1997 le ratio retenu sera de 2,20 et en précisant que cette méthode de reconstitution fondée sur les salaires serait appliquée en l'absence de certitude quant à la prise en compte de l'intégralité des recettes sur le compte bancaire ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'elle soutient, cette motivation qui était suffisante lui permettait de formuler ses observations ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L.80 CA du livre des procédures fiscales : La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard. Elle prononce la décharge de l'ensemble lorsque l'erreur a eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ou lorsqu'elle est de celles pour lesquelles la nullité est expressément prévue par la loi ou par les engagements internationaux conclus par la France. ; qu'il résulte du second alinéa qu'il impose d'accorder la décharge des droits en principal, pénalités et intérêts de retard lorsque l'erreur a eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ou lorsqu'elle est de celles pour lesquelles la nullité est expressément prévue par la loi ou un engagement international conclu par la France ;

Considérant, que s'il incombe à l'administration, lorsqu'elle envisage de modifier les bases d'imposition d'un contribuable, d'informer celui-ci de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a pu obtenir auprès de tiers dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, afin qu'il soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les pièces concernées soient mises à sa disposition, cette obligation ne porte que sur les renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements et n'implique pas que le vérificateur soit tenu de faire part au contribuable, lors de ses interventions sur place, de ce qu'il a demandé des renseignements et des informations obtenues en réponse à ces investigations ; que le moyen tiré de ce que Mme A n'a pas eu communication au cours de la vérification des réponses apportées aux demandes d'information adressées par le vérificateur est par suite sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors que les informations recueillies n'ont pas été utiles pour conduire aux redressements ; que, par suite, les droits de la défense n'ont pas été méconnus ;

Considérant, en quatrième lieu, que le contribuable fait valoir que l'administration ne pouvait lui notifier les revenus qu'elle regardait comme distribués au sens des dispositions de l'article 109-1 du code général des impôts avant d'avoir invité, conformément aux dispositions de l'article 117 du même code, la SARL A2M à lui fournir des indications sur l'identité des bénéficiaires des distributions ;

Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 117 du code général des impôts que, si l'administration s'abstient d'inviter une personne morale à lui faire parvenir des indications sur les bénéficiaires d'un excédent de distribution qu'elle constate, cette abstention a seulement pour effet de la priver de la possibilité d'assujettir ladite personne morale à l'amende prévue par les dispositions de l'article 1759 du code général des impôts, mais est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard des personnes physiques qui ont bénéficié de la distribution et que l'administration, compte tenu des renseignements dont elle dispose, est en mesure d'identifier ; que l'intéressée n'a donc pas été imposée selon une procédure irrégulière ; que, par suite, le moyen tiré par la requérante de l'irrégularité de la procédure d'imposition doit être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, d'une part, que les avis d'imposition ne sont adressés, en vertu du premier alinéa de l'article L. 253 du code général des impôts, qu'aux contribuables inscrits au rôle des impôts directs ; que, par suite, l'émission des avis d'imposition établis au nom de M. et Mme A, lesquels avis ne constituent d'ailleurs que des documents d'information, implique nécessairement que le rôle emportant mise en recouvrement des impositions contestées ait fait au préalable l'objet d'une homologation pour le rendre exécutoire et fixer la date de mise en recouvrement des impositions ; que l'administration a produit à l'instance la décision d'homologation des rôles concernant les impositions en litige ; que le moyen soulevé par la requérante manque donc en fait ;

Considérant, d'autre part, que les rôles sont rendus exécutoires par un arrêté pris par le préfet du département dans le ressort duquel se situe le lieu d'imposition ou, sur délégation, par un fonctionnaire de la direction des services fiscaux territorialement compétente ; que la requérante soutient, en se référant aux mentions portées sur les avis d'imposition, que la direction du contrôle fiscal sud-est aurait incompétemment homologué les rôles emportant mise en recouvrement des cotisations d'impôt sur le revenu litigieuses ; qu'il ressort toutefois des pièces produites à l'instance que les rôles dont il s'agit ont été homologués par un agent de la direction des services fiscaux d'Aix-en-Provence possédant le grade de directeur divisionnaire et ayant reçu délégation ; que le moyen soulevé par la requérante doit par suite être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'année 1996 :

Considérant qu'aucun rappel n'a été notifié à Mme A au titre des salaires qu'elle avait elle-même mentionnés sur sa déclaration des revenus qu'elle a déposée pour l'année 1996 ; que le moyen tiré de ce que l'administration devait justifier du montant des salaires qu'elle entendait retenir n'est pas assorti de précision suffisante permettant d'en apprécier la pertinence ;

Considérant que le montant de la facture personnelle de téléphone de Mme A a été acquitté par la SARL A2M et déduit des charges de cette dernière ; que le vérificateur a seulement réintégré dans les résultats de ladite société une part estimée à 25 % du montant des factures comme correspondant à sa consommation personnelle ; qu'en conséquence, l'administration doit être regardée comme établissant le montant des bénéfices réalisés par la société ainsi que la distribution et l'appréhension de ces sommes par Mme A en 1996 ;

En ce qui concerne les années 1997 et 1998

Considérant que l'administration a reconstitué le chiffre d'affaires de la SARL A2M en appliquant aux salaires productifs un coefficient de 2,2 qu'elle a tiré de l'année 1996 au cours de laquelle une comptabilité a été tenue ; que si la requérante fait valoir que, s'agissant de cette année de référence, le coefficient multiplicateur n'aurait été que de 1,9, l'administration démontre qu'après avoir exclu des charges les salaires non justifiés au titre de ladite année et qui ont par ailleurs fait l'objet de redressements, le ratio recettes sur salaires productifs qui ressort de l'année 1996 est de 2,75 ; que l'administration a retenu les éléments tirés des modalités d'exploitation de l'entreprise qui n'ont pas varié entre les deux années concernées et qui sont conformes à celles constatées dans la profession ; que si la requérante soutient que l'administration aurait dû prendre en compte, à titre de recettes, les seules sommes créditées sur le compte bancaire de la société, la méthode appliquée pour reconstituer les recettes de la société en l'absence de toute comptabilité et de toute pièce justificative, et qui repose sur un calcul des recettes déterminé selon un coefficient de rendement à partir des salaires n'impose pas une telle limitation ; qu'ainsi la méthode suivie par le vérificateur n'est ni excessivement sommaire ni radicalement viciée ; qu'en conséquence, l'administration doit être regardée comme établissant le montant des bénéfices réalisés par la société ;

Considérant qu'en l'absence de tout élément concernant les salaires versés au cours de l'année 1998, le service était fondé à en évaluer le montant à partir des sorties bancaires constaté sur le compte de la société et qui ne correspondaient pas à d'autres catégories de charges ; que si Mme A soutient que la société aurait cessé toute activité à partir du mois de février 1998, elle ne l'établit pas, alors que des versements, sont effectués jusqu'en octobre de la même année ; que si la requérante estime que l'administration aurait dû faire usage de son droit de communication pour établir qu'il s'agissait de salaires, une telle obligation ne pèse pas sur l'administration ; que pour les même motifs, en raison même de la méthode de reconstitution pratiquée, l'administration pouvait écarter les recettes déterminées à partir des seules entrées bancaires et appliquer le coefficient de rendement à partir des salaires comme précédemment ;

Considérant, enfin, que Mme A invoque la méconnaissance des instructions du 4 août 1976 et du 15 décembre 1983 ; que ces instructions qui précisent que, le cas échéant, les bases imposables du contribuable sont reconstituées selon plusieurs méthodes de reconstitution, ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale, au sens et pour l'application de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée a se prévaloir de ces instructions sur le fondement de ces dispositions ;

Sur les revenus de capitaux mobiliers

Considérant que Mme A détient directement ou indirectement la totalité du capital et dispose de la signature sur le compte bancaire et assure les relations avec les clients et les fournisseurs ; qu'elle est ainsi gérant de fait de la SARL A2M et a été regardée à bon droit comme étant le seul maître de l'affaire, sans que puisse y faire obstacle la circonstance que la gérante de droit a disposé aussi d'une signature sur le compte bancaire ni que l'administration ce soit abstenue d'interroger la société sur l'identité des bénéficiaires de la distribution ; qu'en conséquence le service, qui doit être regardé comme ayant suffisamment justifié sur ce point l'existence d'une gérance de fait, a apporté la preuve qu'elle avait appréhendé les revenus distribués, sans qu'il ait été nécessaire de démontrer au préalable l'enrichissement personnel de l'intéressée ;

Sur l'application des pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvre frauduleuse ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales (...) ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ;

Considérant que l'administration a infligé à la requérante des pénalités pour manoeuvres frauduleuses en raison de la situation de gérance de fait, de l'absence de tenue de documents comptables et de déclarations fiscales ; que si ces comportements révèlent l'absence de bonne foi du contribuable, l'administration n'établit pas, en revanche, qu'en l'espèce le contribuable se soit livré à des manoeuvres frauduleuses passibles des pénalités au taux de 80 % ; que pour l'année 1996 l'administration ayant seulement mis en recouvrement les pénalités de mauvaise foi, la requérante n'est pas fondée à demander la décharge des pénalités pour manoeuvres frauduleuses qui n'ont pas été appliquées nonobstant leur notification de redressement en date du 7 juin 2000 ; qu'elle est par contre fondée à demander la décharge desdites pénalités pour les années 1997 et 1998 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A est seulement fondée, dans la limite des dégrèvements accordés, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

DECIDE

Article 1er : A concurrence de la somme de 35 627 euros en droits et pénalités, correspondants aux cotisations de contributions sociales auxquelles Mme A avait été assujettie au titre des années 1996, 1997 et 1998, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête.

Article 2 : Mme A est déchargée des pénalités pour manoeuvres frauduleuses auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1997 et 1998.

Article 3 : Le jugement du Tribunal Administratif de Marseille en date du 7 avril 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à MmeB et au ministre budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Copie en sera adressée à Me Gontard-Quintric et au directeur de contrôle fiscal sud-est.

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08MA02853


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA02853
Date de la décision : 10/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. André MAURY
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : GONTARD-QUINTRIC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-02-10;08ma02853 ?
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