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14/12/2010 | FRANCE | N°08MA05048

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 14 décembre 2010, 08MA05048


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 9 décembre 2008, régularisée le 10 décembre 2008, présentée par Me Auby, avocat, pour Mme Monique A, demeurant ... ; Mme Monique A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603463-0604121 du 7 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant :

- à l'annulation de la décision du 15 mars 2006 du ministre de l'environnement lui infligeant une exclusion temporaire de fonctions de quinze jours sans solde et à la condamnation de l'Etat à lui verser l'

intégralité du salaire qui a fait l'objet de cette amputation ;

- à l'annula...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour par télécopie le 9 décembre 2008, régularisée le 10 décembre 2008, présentée par Me Auby, avocat, pour Mme Monique A, demeurant ... ; Mme Monique A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603463-0604121 du 7 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant :

- à l'annulation de la décision du 15 mars 2006 du ministre de l'environnement lui infligeant une exclusion temporaire de fonctions de quinze jours sans solde et à la condamnation de l'Etat à lui verser l'intégralité du salaire qui a fait l'objet de cette amputation ;

- à l'annulation de la décision implicite du ministre de l'environnement rejetant sa demande indemnitaire du 15 mars 2006 et à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de

80 000 euros ;

- à ce que l'Etat supporte ses frais exposés et non compris dans les dépens ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ladite sanction et d'enjoindre à l'Etat de lui reverser l'intégralité du salaire amputé ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 80 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la loi modifiée n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu le décret modifié n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre exceptionnel, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 2010 :

- le rapport de M. Brossier, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;

Considérant que Mme A a été recrutée en qualité d'agent contractuel à compter du 15 juin 1982 par le ministre chargé de l'environnement et affectée à la direction régionale du Languedoc-Roussillon, direction régionale à l'architecture et l'environnement (DRAE) devenue direction régionale de l'environnement (DIREN) ; qu'elle a été classée en première catégorie, 2ème classe, au titre du règlement intérieur national à compter du 1er juillet 1992, puis promue en première classe en 1995 ; qu'après avis du 28 juin 2005 de la commission consultative paritaire compétente à l'égard des personnels non titulaires statuant en matière disciplinaire, elle a fait l'objet d'une exclusion temporaire de fonctions de quinze jours sans solde ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cette sanction et à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 80 000 euros en réparation du harcèlement moral qu'elle estime avoir subi ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la sanction en litige :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant que l'appelante invoque pour la première fois des vices de procédure en appel ; que ces moyens sont toutefois recevables devant la Cour, dès lors qu'ils ont trait à la même cause juridique que le moyen déjà soulevé en première instance tiré d'une incompétence du signataire de la décision attaquée ;

Considérant qu'aux termes des articles 43 et 44 du décret susvisé du 17 janvier 1986 dans leur rédaction applicable à la date de la décision attaquée : 43 - Les sanctions disciplinaires susceptibles d'être appliquées aux agents non titulaires sont les suivantes : 1. L'avertissement 2. Le blâme 3. L'exclusion temporaire des fonctions avec retenue de traitement pour une durée maximale d'un mois 4. Le licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement. 44 - Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité ayant le pouvoir de procéder au recrutement. La délégation du pouvoir de procéder au recrutement emporte celle du pouvoir disciplinaire. Toutefois, le pouvoir disciplinaire peut, en ce qui concerne les sanctions de l'avertissement et du blâme, être délégué indépendamment du pouvoir de procéder au recrutement, et le pouvoir de procéder au recrutement indépendamment du pouvoir disciplinaire. L'agent non titulaire à l'encontre duquel une sanction disciplinaire est envisagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous documents annexes et à se faire assister par les défenseurs de son choix. L'administration doit informer l'intéressé de son droit à communication du dossier. ;

Considérant, en premier lieu, que l'appelante soutient que le rapport remis aux membres de la commission consultative paritaire statuant en matière disciplinaire serait irrégulier, dès lors qu'il vise à tort le décret du 17 janvier 1983 au lieu du décret du 17 janvier 1986, et cite de façon erronée son article 43 en faisant état d'une exclusion d'une durée minimale d'un mois au lieu d'une durée maximale d'un mois ; que ces deux erreurs matérielles sont toutefois sans influence sur la régularité de la procédure et par suite la légalité externe de la décision attaquée, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier que les membres de ladite commission, qui ont été saisis d'une demande relative à une exclusion temporaire de fonctions, ont été mis à même de se prononcer à ce titre sur les faits qui étaient reprochés à l'intéressée et qui ont constitué le support de la sanction finalement prise ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'appelante soutient qu'elle n'a finalement été sanctionnée que neuf mois après la réunion de la commission consultative paritaire statuant en matière disciplinaire, laquelle ne s'est pas prononcée en faveur d'une sanction, et qu'elle n'a pas eu communication de l'avis de cette commission ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire applicable aux agents non titulaires de l'Etat n'impose toutefois à l'administration, d'une part, de suivre l'avis de la commission et de communiquer cet avis à l'agent concerné, d'autre part, de rendre sa décision disciplinaire dans un délai déterminé ;

Considérant, en troisième lieu, que l'appelante soutient que la commission consultative paritaire statuant en matière disciplinaire aurait été irrégulièrement composée ; qu'en n'étayant son moyen d'aucune autre précision, elle ne met pas la Cour en mesure d'apprécier le bien-fondé de son allégation ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant qu'en 2003 et 2004, parmi les missions de l'appelante, placées sous l'autorité du chef de service aménagement, site, paysage et nature à la direction de l'environnement du Languedoc-Roussillon, figuraient l'instruction des demandes de financement dans le cadre des fonds européens et l'instruction des permis d'importation et d'exportation d'espèces figurant aux annexes de la convention internationale de Washington (CITES) ; qu'il est reproché à l'intéressée d'avoir refusé d'exécuter ces deux tâches et par suite d'avoir méconnu le devoir d'obéissance qui s'imposait à elle ; qu'il ressort effectivement des pièces du dossier que l'intéressée, par courriel du 20 février 2003 adressé à son supérieur hiérarchique, confirmé le 13 mai 2003, a indiqué ne plus vouloir assumer l'instruction des permis CITES ; que par note du 15 juin 2004 adressée à son supérieur hiérarchique, elle a indiqué ne plus vouloir assumer l'instruction des demandes de financement dans le cadre de fonds européens ; qu'à l'issue de chacune de ses prises de position, bien que son autorité hiérarchique, le 20 mai 2003 dans le premier cas et le 24 juin 2004 dans le second, lui ait rappelé son obligation de service au regard de l'ensemble des missions confiées, l'appelante a maintenu sa position ;

Considérant que l'appelante, qui ne conteste pas sérieusement la matérialité de ces faits, demande à en être exonérée sur le plan disciplinaire en invoquant, d'une part et de façon générale, les difficultés organisationnelles au sein de la DIREN depuis l'arrivée d'une nouvelle directrice en 1998, d'autre part et de façon plus personnelle, la dégradation de ses propres conditions de travail et le harcèlement moral qu'elle estime subir ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de plusieurs attestations d'agents et de représentants syndicaux, qu'à la date des faits en litige, la gestion locale de la DIREN du Languedoc-Roussillon présentait des carences sérieuses, à titre principal en termes de communication interne entre la direction et ses agents, à titre secondaire en termes d'organisation interne, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'une partie des tâches en litige confiées à l'intéressé relevaient d'un emploi de catégorie B et lui posaient en outre des difficultés d'emploi du temps, compte tenu de son autre mission d'agent chargé des fonctions d'ACMO exercées à 50 % depuis janvier 2004 ;

Considérant toutefois que ces circonstances n'étaient pas de nature à exonérer Mme A de ses obligations de service et notamment de son devoir d'obéissance, dès lors que les réponses susmentionnées qui lui ont été adressées, lui demandant de continuer à assumer les deux tâches en litige qui lui avaient été confiées, ne peuvent être regardées comme des ordres manifestement illégaux et de nature à compromettre gravement un intérêt public ; que l'intéressée devait dès lors se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique malgré son désaccord, et que son refus est dans ces conditions qualifiable de faute disciplinaire ; que les circonstances invoquées qu'elle avait auparavant accepté lesdites tâches de façon volontaire et les avait réalisées avec la satisfaction, tant de son ancienne direction que de tiers concernés, est sans influence sur la qualification disciplinaire de ses refus d'obéir ;

Considérant enfin, compte tenu du niveau de responsabilité de l'intéressée, que le ministre de l'environnement a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, infliger à l'appelante la sanction portant exclusion de fonctions de quinze jours sans solde ;

Sur les conclusions à fin de d'indemnisation :

Considérant que pour soutenir qu'elle a fait l'objet d'un harcèlement moral, Mme A invoque, depuis l'arrivée de la nouvelle directrice régionale, des attitudes et remarques désobligeantes de la part de sa hiérarchie et plus généralement un manque de reconnaissance de son travail qui s'est traduit, outre la sanction susmentionnée, par une baisse de notation par rapport aux années précédentes, une diminution de l'allocation de sa prime et un refus de promotion ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si l'appelante soutient sans être contredite qu'elle a reçu une remarque désobligeante d'un directeur adjoint concernant son travail accompli relatif à l'instruction des permis CITES et si, ainsi qu'il a été dit, elle a travaillé dans un contexte organisationnel et relationnel dégradé au sein de la DIREN mettant en cause l'ensemble de la direction, concernant plusieurs agents et dénoncé par les représentants syndicaux auprès de la médecine du travail, toutefois, l'appelante n'apporte aucun élément suffisamment probant de nature à démontrer qu'elle aurait été victime, à titre personnel, de comportements répétés au caractère humiliant et menaçant destinés à porter atteinte à ses droits et à sa dignité, à altérer sa santé physique ou mentale et à compromettre son avenir professionnel ; qu'elle n'établit pas non plus les rumeurs qu'elle allègue tendant à la discréditer auprès de ses collègues et dont elle aurait été victime ; que, dans ces conditions, Mme A, n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été l'objet, de la part de son employeur, d'un harcèlement moral constitutif d'une faute de

nature à engager sa responsabilité, nonobstant la gestion locale regrettable de la DIREN du

Languedoc-Roussillon ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'absence tant d'un harcèlement moral démontré que d'une illégalité établie dans l'édiction de la sanction en litige, l'appelante n'est pas fondée à soutenir que la responsabilité de l'Etat serait engagée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la partie intimée, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamnée à payer à l'appelante la somme demandée demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Monique A et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

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N° 08MA050482


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA05048
Date de la décision : 14/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : SELARL CABINET AUBY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-12-14;08ma05048 ?
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