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14/12/2010 | FRANCE | N°07MA01671

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 14 décembre 2010, 07MA01671


Vu l'ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en date du 26 avril 2007 attribuant à la Cour de céans le jugement de la requête enregistrée au greffe du Conseil d'Etat le 22 mai 2006 présentée par Me Monod, avocat, pour M. Jean-Michel A, demeurant ..., ensemble le mémoire ampliatif enregistré au greffe du Conseil d'Etat le 22 septembre 2006 ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0100143 du 8 février 2006 notifié le 23 mars 2006 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la conda

mnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 13 568,64 euros (89 004,48 ...

Vu l'ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en date du 26 avril 2007 attribuant à la Cour de céans le jugement de la requête enregistrée au greffe du Conseil d'Etat le 22 mai 2006 présentée par Me Monod, avocat, pour M. Jean-Michel A, demeurant ..., ensemble le mémoire ampliatif enregistré au greffe du Conseil d'Etat le 22 septembre 2006 ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0100143 du 8 février 2006 notifié le 23 mars 2006 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 13 568,64 euros (89 004,48 francs) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat ladite indemnité de 13 568,64 euros (89 004,48 francs) ;

3°) subsidiairement et avant dire droit, d'ordonner une expertise ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la loi n° 72-662 de la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ;

Vu le décret du 26 janvier 1921 modifiant le décret du 20 mai 1903 sur l'organisation et le service de la gendarmerie ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 2010,

- le rapport de M. Brossier, rapporteur,

- les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;

Considérant que M. A, gendarme titulaire, interjette appel du jugement n° 0100143 rendu le 8 février 2006 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 13 568,64 euros (89 004,48 francs) en réparation des conséquences dommageables du défaut d'inscription au registre des constatations des blessures, infirmités ou maladies, de l'accident de service qu'il a subi le 18 janvier 1974 lors de l'explosion d'une grenade lacrymogène, cette omission fautive de l'administration lui ayant fait perdre selon lui une chance sérieuse d'apporter la preuve du lien de causalité entre cet accident et l'aggravation de son état de santé constatée à compter de l'année 1996 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-13 du code de justice administrative : Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue en audience publique (...) : (...) 2° sur les litiges relatifs à la situation individuelle des agents publics, à l' exception de ceux concernant l'entrée au service, la discipline et la sortie du service ; (...) 7° Sur les actions indemnitaires, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 (...) ; qu'aux termes de l'article R. 222-14 du même code alors en vigueur : Les dispositions du 7° de l'article précédent sont applicables aux demandes dont le montant n'excède pas 10 000 euros ;

Considérant qu'il résulte des dispositions dérogatoires précitées, lesquelles sont d'interprétation stricte, que la compétence du magistrat-délégué ne s'étendait pas au présent litige indemnitaire, d'un montant supérieur à 10 000 euros, tendant à obtenir la réparation des préjudices consécutifs au défaut d'inscription au registre des constatations des blessures, infirmités ou maladies de l'accident dont a été victime le requérant le 18 janvier 1974 ; que, dès lors, le magistrat-délégué du tribunal administratif de Montpellier n'était pas compétent pour statuer sur la demande indemnitaire de M. A ; qu'ainsi, le jugement attaqué doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande indemnitaire présentée par M. A devant le tribunal administratif de Montpellier ;

Sur le bien-fondé de ladite demande indemnitaire :

Considérant qu'il est constant que M. A, gendarme à la brigade de gendarmerie de Castelnaudary, a été victime le 18 janvier 1974 de l'explosion d'une grenade lacrymogène ; qu'en raison de douleurs persistantes au mollet qu'il impute à la présence d'un éclat de la grenade, il a demandé à ce titre le 9 septembre 1996 le versement d'une nouvelle pension d'invalidité, bénéficiant par ailleurs depuis l'année 1985 d'une pension d'invalidité au taux global de 40% au titre des séquelles de contusion du rachis cervical et d'un traumatisme de l'épaule gauche, consécutives à un accident de la circulation en service survenu le 16 février 1975 ; que lors de l'instruction du dossier, le constat provisoire des droits à pension daté du 8 septembre 1997 mentionne, pour l'infirmité nouvelle en litige de la jambe, un constat du 18 janvier 1974 sur le livret médical de l'intéressé mais un rapport non contemporain du 23 avril 1996 ; que par décision du 26 octobre 1998, le ministre de la défense a rejeté la demande de révision de la pension au motif que l'infirmité nouvelle invoquée résulte d'un accident survenu le 18 janvier 1974 dont la constatation administrative n'est pas contemporaine des faits et que, dès lors, elle n'est pas imputable au service ; que le 6 juillet 2000, M. A a adressé au ministre de la défense une demande en réparation de son préjudice en invoquant la perte de chances d'obtenir la concession de la pension militaire d'invalidité demandée du fait du défaut d'inscription au registre de constatation des blessures, infirmités ou maladies, à l'époque des faits, de l'accident qu'il a subi le 18 janvier 1974 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 26 janvier 1921 modifiant l'article 29 du décret du 20 mai 1903 sur l'organisation et le service de la gendarmerie, non abrogé au 18 janvier 1974 : Lorsqu'un militaire de la gendarmerie est atteint de blessures ou infirmités ouvrant droit à pension (...) ; et qu'aux termes de l'article 2 dudit décret du 26 janvier 1921 modifiant l'article 30 du même décret du 20 mai 1903 sur l'organisation et le service de la gendarmerie, non abrogé au 18 janvier 1974 : Pour faciliter l'application des dispositions qui précèdent et pour sauvegarder les droits réciproques de l'Etat et de l'intéressé, toute blessure, infirmité ou maladie survenue chez un militaire de la gendarmerie doit être constatée par une inscription sur un registre spécial, dit 'registre des constatations' ; que l'absence de mention pourtant obligatoire en janvier 1974 sur ce registre des constatations de l'accident en litige constitue une faute imputable à l'administration de nature à engager sa responsabilité, dès lors qu'il est constant que l'accident a eu lieu pendant le service lors d'une séance d'instruction collective et que le livret médical de l'intéressé mentionne, à la date du 18 janvier 1974, un passage à l'hôpital civil de Macon avec une suture sans extraction d'un éclat de grenade ;

Considérant que l'appelant soutient que si cet accident avait été inscrit en 1974 sur ledit registre administratif, la pension sollicitée ne lui aurait pas été refusée au motif de l'absence de lien avec le service ; qu'il est exact que le défaut d'inscription de l'accident sur un registre administratif distinct du seul livret médical de l'intéressé a été un élément déterminant ayant conduit le ministre à rejeter la demande de révision de la pension militaire d'invalidité ; que, toutefois, l'état du dossier ne permet pas à la Cour de déterminer si la survenance des douleurs en 1996 est effectivement consécutive à la seule présence d'un éclat de la grenade qui a explosé et qui n'a pas été retiré, compte tenu notamment du délai s'étant écoulé entre l'année 1974 et la date d'apparition des douleurs au mollet et du fait que le ministre soutient que l'intéressé a subi en outre un traumatisme au genou le 13 décembre 1995 ; qu'il y a lieu, dans ces conditions, de prescrire une expertise médicale aux fins précisées ci-après ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0100143 rendu le 8 février 2006 par lequel le tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Il sera, avant de statuer sur la demande indemnitaire de M. A, procédé à une expertise médicale.

Article 3 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira ses missions dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à 621-14 du code de justice administrative.

Article 4 : Il aura pour mission :

- de décrire l'évolution au cours du temps de la présence dans la jambe de M. A d'un éclat de la grenade en litige non retiré lors de l'explosion du 18 janvier 1974 ;

- de se prononcer sur l'origine de l'état actuel de ladite jambe en recherchant si des évènements postérieurs à l'explosion ont pu influencer cet état ;

- de décrire la nature et l'étendue des séquelles dont se plaint de M. A et d'évaluer le déficit fonctionnel qui en résulte.

Article 5 : L'expert, pour l'accomplissement de sa mission, se fera communiquer tous documents relatifs à l'état de santé de M. A et pourra entendre toute personne lui ayant donné des soins.

Article 6 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Michel A et au ministre de la défense et des anciens combattants.

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N° 07MA016712


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA01671
Date de la décision : 14/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS MONOD - COLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-12-14;07ma01671 ?
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