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08/11/2010 | FRANCE | N°08MA03206

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 08 novembre 2010, 08MA03206


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 juillet 2008, sous le 08MA03206, présentée pour la SCEA DOMAINE DE BUZARENS représenté par M. Hartman, à Assas (34820), par la SELARL d'avocats Lysias Partners ;

Le SCEA DOMAINE DE BUZARENS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601940 du 22 avril 2008 en tant que le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant l'annulation de la décision du Premier ministre refusant implicitement de réformer la décision de la commission nationale de désendetteme

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 7 juillet 2008, sous le 08MA03206, présentée pour la SCEA DOMAINE DE BUZARENS représenté par M. Hartman, à Assas (34820), par la SELARL d'avocats Lysias Partners ;

Le SCEA DOMAINE DE BUZARENS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601940 du 22 avril 2008 en tant que le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant l'annulation de la décision du Premier ministre refusant implicitement de réformer la décision de la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée du 9 novembre 2005 le déclarant inéligible au bénéfice du dispositif prévu par le décret du 4 juin 1999 en faveur de certaines catégories de rapatriés ;

2°) d'annuler cette décision implicite et d'enjoindre au Premier ministre de lui accorder le bénéfice de ce dispositif dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé ce délai ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu l'ordonnance en date du 6 août 2010 fixant la clôture de l'instruction au 20 août 2010, en application des articles R. 613.1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 61-1439 du 26 décembre 1961 relative à l'accueil et à la réinstallation des Français d'Outre-Mer ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi de finances rectificative n° 86-1318 du 30 décembre 1986 ;

Vu la loi n° 2002-73 du 14 janvier 2002 relative à la modernisation sociale ;

Vu le décret n° 99-469 du 4 juin 1999 relatif au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée modifié par le décret n° 2002-492 du 10 avril 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2010 :

- le rapport de Mlle Josset, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant que la société civile d'exploitation (SCEA) DOMAINE DE BUZARENS représentée par M. Hartmann, fait appel du jugement du Tribunal administratif de Montpellier en date du 22 avril 2008 en tant qu'il a rejeté son recours en annulation dirigé contre la décision du Premier ministre refusant implicitement de réformer la décision de la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée du 9 novembre 2005 la déclarant inéligible au bénéfice du dispositif prévu par le décret du 4 juin 1999 en faveur de certaines catégories de rapatriés ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative imposent que les jugements contiennent l'analyse des conclusions et des moyens ; qu'il ressort du dossier de première instance que la minute du jugement attaqué est accompagnée de l'analyse des conclusions et des moyens contenus dans la requête et dans les mémoires produits devant le tribunal ; qu'ainsi, l'absence du visa de ces moyens dans la copie du jugement notifiée aux requérants n'est pas de nature à entacher ce dernier d'irrégularité ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'examen des fiches requête et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que les mémoires en défense du Premier ministre des 6 décembre 2006 et 22 août 2007 ont été transmis à l'intéressée ; que, dans ces conditions, la SCEA DOMAINE DE BUZARENS n'est pas fondée à soutenir que l'absence de visa dans le jugement qui lui a été notifié ne lui permettrait pas de connaître les moyens invoqués par l'administration et porterait atteinte ainsi aux droits de la défense ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des écritures de première instance et notamment pas du mémoire enregistré le 14 juin 2007 que la société aurait invoqué le moyen tiré de la longueur excessive de la procédure devant la commission ; qu'au demeurant, un tel moyen, par lui-même est sans influence sur la légalité de la décision contestée ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en jugeant, d'une part, que la décision du Premier ministre s'était substituée à celle de la Commission nationale de désendettement des rapatriés, laquelle avait disparu de l'ordonnancement juridique et que, d'autre part, en l'absence de motivation de sa décision, le Premier ministre devait être regardé comme ayant repris à son compte les motifs de la commission, le tribunal n'a entaché son jugement d'aucune contradiction de motifs ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des écritures de première instance que la société requérante n'a soulevé que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi le tribunal qui s'est prononcé sur la régularité de la procédure suivie devant l'administration au regard de ces stipulations conventionnelles n'avait pas à examiner le moyen, non soulevé devant lui, tiré de la méconnaissance des droits de la défense ;

Considérant, en sixième et dernier lieu, que le tribunal qui a jugé que la société n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions du décret du 4 juin 1999 susvisé n'a, ce faisant, ni procédé d'office à une substitution de motifs, ni statué ultra petita ;

Sur le bien-fondé du jugement :

Sur la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 5 de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : Une décision implicite intervenue dans le cas où une décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront être communiqués dans le mois suivant sa demande ; que si la société soutient qu'elle aurait adressé au Premier ministre, dans le délai de recours contentieux, une demande de communication des motifs de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le Premier ministre sur son recours gracieux, elle n'établit pas que cette correspondance aurait été effectivement notifiée au Premier ministre dans le délai de recours contentieux ; que, dans ces conditions, la SCEA DOMAINE DE BUZARENS n'est pas fondée à soutenir que cette décision serait illégale, faute d'être motivée ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier d'appel que, par un courrier en date du 12 décembre 2009, la société a demandé au Premier ministre les motifs de sa décision implicite de rejet de sa demande, et que ce dernier n'a pas répondu ; qu'il n'est pas contesté qu'aucun accusé de réception de sa demande n'a été délivré à l'intéressé ; que, toutefois, la formation d'un recours juridictionnel tendant à l'annulation d'une décision administrative établit que l'auteur de ce recours a eu connaissance de cette décision au plus tard à la date à laquelle il a formé ce recours ; que dans ce cas, le délai de recours contentieux court à compter de la date de la saisine du tribunal administratif ; qu'en l'espèce, la SCEA DOMAINE DE BUZARENS a introduit un recours, enregistré au greffe du Tribunal administratif de Montpellier le 30 mars 2006, tendant à l'annulation de la décision implicite en litige ; que dans ces conditions, la demande de communication des motifs de cette décision implicite, intervenue plus de deux mois après la date de saisine du tribunal, a été présentée après l'expiration des délais de recours contentieux ; que par suite, l'absence de réponse du Premier ministre à une telle demande est sans incidence sur la légalité de sa décision implicite de rejet ; que dès lors la SCEA DOMAINE DE BUZARENS ne peut valablement soutenir que la décision attaquée serait entachée d'un défaut de motivation ;

Considérant, en deuxième lieu, que c'est à bon droit que le tribunal a estimé que le Premier ministre, en prenant une décision implicite de rejet sur le recours de l'intéressé, devait être regardé comme s'étant approprié les motifs de la décision de la Commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ; que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision de la Commission ne peut être utilement invoqué à l'encontre de la décision du Premier ministre, dans la mesure où il s'agit d'un vice propre à la décision initiale qui a nécessairement disparu avec elle ; que la société ne peut donc utilement invoquer le défaut de motivation alléguée de la décision de la commission à l'encontre de la décision implicite de rejet attaquée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en application de l'article 4 du décret du 4 juin 1999, La commission peut entendre le demandeur qui dispose alors de la faculté de se faire assister ou représenter par un avocat, par une personne exerçant une activité professionnelle réglementée ou par un mandataire choisi sur une liste arrêtée par le ministre chargé des rapatriés ; qu'il résulte clairement de ces dispositions que la SCEA DOMAINE DE BUZARENS pouvait se faire assister ou représenter notamment par l'avocat de son choix et n'était nullement tenue de prendre un mandataire choisi sur la liste arrêtée par le ministre chargé des rapatriés ; qu'en outre, la décision de la Commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée fait suite à une demande présentée par la SCEA DOMAINE DE BUZARENS et ne constitue pas une sanction ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe général des droits de la défense doit être écarté ; que par voie de conséquence, le moyen tiré de ce que la décision du Premier ministre serait illégale en raison des vices de procédure entachant la procédure suivie devant la commission ne peut être qu'écarté ;

Considérant, en dernier lieu, que la commission concernée, qui doit statuer administrativement sur les demandes de désendettement qui lui sont soumises, ne dispose d'aucune compétence juridictionnelle et n'entre donc pas dans le champ des stipulations de l'article 6-1 de la convention susmentionnée ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu'à l'appui de son recours contre la décision implicite en cause, la SCEA DOMAINE DE BUZARENS excipe de l'illégalité du décret du 4 juin 1999 en ce qu'il prévoit que les rapatriés ne disposent que d'une voix sur quatre au sein de la Commission nationale de désendettement des rapatriés chargée d'examiner les demandes d'aides ; que toutefois, aucune disposition législative, ni aucun principe général du droit n'imposent que cette commission soit composée pour moitié de représentants des rapatriés ; que dès lors l'exception d'illégalité ainsi soulevée n'est, en tout état de cause, pas fondée ;

Considérant que pour déclarer inéligible la demande de la SCEA DOMAINE DE BUZARENS la Commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée s'est fondée sur la circonstance qu'elle n'apportait pas la preuve d'un surendettement professionnel ; qu'en rejetant le recours administratif formé à l'encontre de cette décision, par une décision implicite qui s'est substituée à celle-ci, le Premier ministre doit être regardé comme s'étant approprié ce motif ;

Considérant que la SCEA DOMAINE DE BUZARENS qui n'a apporté tant dans son recours administratif devant le Premier ministre, que devant la juridiction administrative, aucune pièce à l'appui de ses allégations, n'établit pas la réalité d'un tel surendettement professionnel ; qu'en conséquence, le Premier ministre a pu, sans erreur de droit, ni erreur manifeste d'appréciation, rejeter le recours de la société à l'encontre de la décision de la Commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cette autorité se serait cru à tort liée par la décision de ladite commission et qu'elle aurait ainsi méconnu l'étendue de ses compétences ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCEA DOMAINE DE BUZARENS n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 8 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution ; que par suite, les conclusions susvisées doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SCEA DOMAINE DE BUZARENS demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er: La requête de la SCEA DOMAINE DE BUZARENS est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA DOMAINE DE BUZARENS et au Premier ministre.

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N° 08MA032062


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA03206
Date de la décision : 08/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Melle Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL LYSIAS PARTNERS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-11-08;08ma03206 ?
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