Vu la requête, enregistrée le 8 septembre 2008, présentée pour Mme Hatice A, élisant domicile ... (75004), par Me Ottan ; Mme Hatice A demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 23 mai 2008 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes dirigées d'une part contre la décision du 16 novembre 2006 par laquelle le maire de la commune de Serviers et Labaume a accordé à M. Daniel B un permis de construire une maison neuve d'une surface hors oeuvre nette de 142,5 m², sur une parcelle sise rue du Village, cadastrée section AB n° 343 et, d'autre part, contre la décision du 13 septembre 2007 par laquelle le maire de la commune de Serviers et Labaume a délivré à M. Daniel B un permis de construire modificatif concernant les ouvertures est, ouest et nord ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces permis de construire ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Serviers et Labaume la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré au greffe de la cour le 17 décembre 2008, le mémoire présenté pour M. et Mme Daniel B par La SCP Delran ; M. et Mme Daniel B concluent au rejet de la requête ; ils demandent la condamnation de Mme Hatice A à leur payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 3 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu, enregistré au greffe de la cour le 23 avril 2010, le mémoire présenté pour la commune de Serviers et Labaume par Me Coudurier ; la commune de Serviers et Labaume conclut au rejet de la requête et demande la condamnation de Mme Hatice A à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n°2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;
Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le vice-président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 2010 :
- le rapport de M. Massin, rapporteur ;
- les conclusions de M. Bachoffer, rapporteur public ;
- et les observations de Me Ottan pour Mme A et de Me Redaud pour M. B ;
Considérant que par deux demandes distinctes, Mme Hatice A a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler, d'une part, la décision du 16 novembre 2006 par laquelle le maire de la commune de Serviers et Labaume a accordé à M. Daniel B un permis de construire une maison neuve d'une surface hors oeuvre nette de 142,5 m², sur une parcelle sise rue du Village, cadastrée section AB n° 343 et, d'autre part, la décision du 13 septembre 2007 par laquelle le maire de la commune de Serviers et Labaume a délivré à M. Daniel B un permis de construire modificatif concernant les ouvertures est, ouest et nord ; que par un jugement du 23 mai 2008 statuant sur les deux demandes, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté au fond la première demande ; qu'il a rejeté la seconde demande pour tardiveté ; que Mme Hatice A interjette appel de ce jugement ;
Sur la recevabilité de la demande dirigée contre le permis de construire modificatif :
Considérant qu'aux termes de l'article R.421-39 du code de l'urbanisme : Mention du permis de construire doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de la décision d'octroi et pendant toute la durée du chantier (...)./ En outre, dans les huit jours de la délivrance expresse ou tacite du permis de construire, un extrait du permis ou une copie de la lettre visée à l'alinéa précédent est publiée par voie d'affichage à la mairie pendant deux mois (...) ; qu'aux termes de l'article A.421-7 du même code : L'affichage du permis de construire sur le terrain est assuré par les soins du bénéficiaire du permis sur un panneau rectangulaire dont les dimensions sont supérieures à 80centimètres./ Ce panneau indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale dudit bénéficiaire, la date ou le numéro du permis, la nature des travaux et, s'il y a lieu, la superficie du terrain, la superficie du plancher autorisé ainsi que la hauteur de la construction exprimée en mètres par rapport au sol naturel et l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté./ Ces renseignements doivent demeurer lisibles de la voie publique pendant toute la durée du chantier. ; qu'aux termes de l'article R.490-7 du même code : Le délai de recours contentieux à l'encontre d'un permis de construire court à l'égard des tiers à compter de la plus tardive des deux dates suivantes : /a)Le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées, selon le cas, au premier ou au deuxième alinéa de l'article R.421-39 ; /b) Le premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage en mairie des pièces mentionnées au troisième alinéa de l'article R.421-39. ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des constats d'huissiers en date des 25 septembre 2007 et 29 novembre 2007 produits par M. et Mme Daniel B, que, contrairement aux allégations de la requérante, le permis de construire modificatif du 13 septembre 2007 était affiché le 25 septembre 2007 sur un mur de l'immeuble en construction qui est situé dans une impasse dont l'accès est ouvert au public ; qu'il était toujours affiché le 29 novembre 2007 sur le même mur de l'immeuble en construction ; que les photographies jointes aux constats d'huissier montrent au surplus que le panneau affiché sur l'immeuble en construction était visible depuis l'angle de la rue du Village, perpendiculaire à l'impasse, à une distance d'environ 10 mètres ; que, par suite, l'affichage sur le terrain, visible de l'extérieur, ne méconnaît pas les dispositions citées ci-dessus ; qu'il ressort des mêmes constats d'huissier et d'une attestation établie le 3 janvier 2008 par un agent de la commune de Serviers et Labaume et signée par le maire, que le permis de construire modificatif a été affiché à la mairie à compter du 14 septembre 2007 et, au moins jusqu'au 3 janvier 2008 ;
Considérant qu'en application des dispositions citées ci-dessus, le délai de recours contentieux à l'encontre du permis de construire modificatif a couru à l'égard des tiers à compter du 25 septembre 2007 ; que la demande de Mme Hatice A dirigée contre ce permis de construire modificatif n'a été enregistrée au greffe du tribunal que le 30 novembre 2007 ; que cette demande présentée tardivement n'était, par suite, pas recevable ;
Sur la légalité du permis de construire initial :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article R.111-21 du code de l'urbanisme : Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ;
Considérant que la construction objet du permis en litige est située au coeur du village ancien de Serviers, dans un secteur où l'habitat, composé de maisons de village serrées les unes contre les autres, est très dense ; qu'il ressort de la note de présentation que les observations du conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement du Gard auquel le projet de construction a été présenté ont été prises en compte ; que la demande de permis de construire a fait l'objet le 30 octobre 2006 d'un avis favorable avec réserve de l'architecte des bâtiments de France ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des photographies et des plans joints à la demande de permis de construire, que le projet qui prend la place d'un précédent immeuble démoli en raison de sa ruine et qui ressemble aux constructions qui l'entourent, n'est pas de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants ; que le permis de construire n'est, par suite, pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation sur l'insertion du projet dans le site ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article UA3 du règlement du plan d'occupation des sols : Les constructions doivent être desservies par des voies publiques ou privées dont les caractéristiques correspondent à leur destination, notamment quand elle entraîne des manoeuvres de véhicules lourds et encombrants. Ces caractéristiques doivent également répondre aux exigences de la sécurité, de la défense contre l'incendie et de la protection civile. ; qu'aux termes de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors en vigueur : Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. ;
Considérant que la parcelle AB 343, terrain d'assiette du projet, est desservie par une petite impasse uniquement accessible à pied qui dessert également les parcelles 344 et 137 ; que les dimensions et la destination de cette impasse ne permettent pas la circulation automobile, notamment celle des engins de lutte contre l'incendie ; que, toutefois, l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie est possible à partir de la rue du Village et de la rue des Ecoliers situées à proximité immédiate de cette impasse ; qu'eu égard à la situation particulière du projet et de son environnement, le permis de construire ne méconnaît pas les dispositions citées ci-dessus ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article UA 10 du règlement du plan d'occupation des sols : La hauteur des constructions à édifier ou à surélever ne doit pas être supérieure à celle de la construction de même nature la plus élevée existante dans l'îlot. ; que pour l'application de cet article, un îlot doit être regardé comme étant constitué par un bloc de constructions, encerclé par des rues ; que, par suite, l'îlot à prendre en compte est composé d'un bloc d'une vingtaine de constructions, isolé par la rue des Ecoliers, la rue de l'Horloge, la rue du Village et l'ancienne Calade ; que la construction la plus haute de l'îlot est située sur la parcelle 137 dont l'accès se fait par l'impasse qui dessert également le terrain d'assiette ; que la hauteur du projet autorisé par le permis de construire en litige est inférieure à celle de la construction érigée sur la parcelle 137 ; que, dès lors, l'article UA 10 du règlement du plan d'occupation des sols n'est pas méconnu ;
Considérant, enfin, que Mme Hatice A qui fait valoir qu'elle avait dû solliciter en 2004 l'intervention du préfet pour qu'un arrêté de péril sur le terrain d'assiette en litige soit entièrement exécuté, soutient que la délivrance de ce permis de construire serait motivée par la volonté du maire de lui nuire ; que le détournement de pouvoir ainsi allégué n'est toutefois étayé par aucun élément tangible ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme Hatice A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions indemnitaires présentées par M. et Mme Daniel B :
Considérant que M. et Mme Daniel B demandent la condamnation de Mme Hatice A à leur payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en faisant valoir que l'acharnement procédurier de Mme Hatice A leur cause un préjudice, dû essentiellement au retard dans la construction ; qu'en raison de la nature particulière du recours pour excès de pouvoir, des conclusions reconventionnelles tendant à ce que le demandeur soit condamné à verser à une personne mise en cause des dommages intérêts ne peuvent être utilement présentées dans une instance en annulation pour excès de pouvoir ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Serviers et Labaume, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande Mme Hatice A au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme Hatice A une somme de 1 500 euros à payer respectivement à la commune de Serviers et Labaume et à M. et Mme Daniel B au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme Hatice A est rejetée.
Article 2 : Mme Hatice A versera respectivement à la commune de Serviers et Labaume et à M. et Mme Daniel B une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. et Mme Daniel B est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Hatice A, à la commune de Serviers et Labaume, à M. et Mme Daniel B et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
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N° 08MA041242