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18/10/2010 | FRANCE | N°08MA04743

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2010, 08MA04743


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA04743, le 13 novembre 2008, présentée par Mme Elsa A, demeurant ...;

Mme A demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0702658, 0703595 du 10 juin 2008 par lequel le magistrat délégué du Tribunal administratif de Marseille l'a, à la demande de l'établissement public Voies Navigables de France, condamnée à payer une amende de 1 000 euros, en application des articles L. 2122-1 et L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques, pour stationnement sans aut

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA04743, le 13 novembre 2008, présentée par Mme Elsa A, demeurant ...;

Mme A demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0702658, 0703595 du 10 juin 2008 par lequel le magistrat délégué du Tribunal administratif de Marseille l'a, à la demande de l'établissement public Voies Navigables de France, condamnée à payer une amende de 1 000 euros, en application des articles L. 2122-1 et L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques, pour stationnement sans autorisation du bateau dénommé Oui sur une dépendance du domaine public fluvial ;

Elle soutient, en premier lieu, que, contrairement à ce qui est mentionné dans le jugement attaqué, elle n'a pas été régulièrement avertie du jour de l'audience et qu'il est inéquitable qu'elle n'ait pas été entendue dans cette affaire ;

Elle soutient, en deuxième lieu, que pendant toute la période où le bateau Oui a occupé le canal d'Arles à Bouc, elle s'est acquittée du loyer convenu pour les deux emplacements d'Arles ; qu'elle a sollicité, dès novembre 2006, le renouvellement de la convention temporaire d'occupation du domaine public venant à expiration en décembre 2006 ; qu'après un premier refus de renouvellement notifié par courrier, elle a été encouragée à refaire sa demande auprès d'un autre service ; qu'une amende lui a été infligée, le 6 mars 2007, sans mise en demeure préalable de quitter l'emplacement en litige ; que, dès réception du courrier adressé le 20 août 2007 par le Directeur du Service de la Navigation de Rhône Saône lui demandant de libérer ledit emplacement, elle a obtempéré et a ramené le bateau dénommé Oui à l'emplacement du port de Gallician comme cela lui était demandé ; que ce dernier emplacement ayant été attribué à un autre occupant, le propriétaire du bateau Oui a été contraint de le vendre ; qu'elle a quitté sa région d'origine pour un emploi qui lui avait été proposé à Arles et que c'est pour cette raison qu'elle résidait sur le bateau Oui ; qu'elle est actuellement au chômage et qu'elle perçoit une allocation mensuelle de 731 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2009, présenté par l'établissement public Voies Navigables de France, représenté par le directeur des affaires juridiques et de la commande publique en vertu d'une délégation du 3 mars 2009, qui conclut au rejet de la requête ;

L'établissement public Voies Navigables de France fait valoir que le Tribunal administratif a régulièrement convoqué Mme A à l'adresse qu'elle avait indiquée dans sa requête, enregistrée le 19 avril 2007 et dans son mémoire, enregistré le 23 juillet 2007 ; que la mention, dans les visas du jugement, de la convocation des parties fait foi par elle-même jusqu'à preuve du contraire ; qu'ainsi le moyen tiré du défaut de convocation de l'intéressée ne pourra être retenu ; que la circonstance que Mme A se soit acquittée des indemnités d'occupation sans titre du domaine public fluvial ne lui donnait aucun droit ou titre à l'occupation dudit domaine ; que si la requérante soutient avoir entrepris des démarches pour obtenir le renouvellement de son permis de stationnement, cette circonstance est sans influence sur l'existence d'une contravention de grande voirie, les seules causes exonératoires en cette matière étant la force majeure et la faute de l'administration assimilable à un cas de force majeure, non établies en l'espèce ; qu'aucune disposition n'impose à l'établissement d'adresser une mise en demeure préalablement à la mise en oeuvre d'une procédure de contravention de grande voirie ; qu'en tout état de cause, en l'espèce, Mme A a été destinataire d'un courrier recommandé avec accusé de réception en date du 12 décembre 2006 lui demandant d'évacuer son bateau du domaine public fluvial dans un délai de quinze jours à compter de la réception dudit courrier ; que Mme A reste redevable de l'amende nonobstant la vente du bateau, effectuée en août 2008 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu la loi n° 91-1385 du 31 décembre 1991 ;

Vu le décret n° 60-1441 modifié du 26 décembre 1990 portant statut des Voies Navigables de France ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2010 :

- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Mme Elsa A ;

Considérant que Mme A a sollicité auprès de Voies Navigables de France une convention d'occupation temporaire pour faire stationner le bateau dénommé Oui sur le domaine public fluvial en rive droite du canal d'Arles à Bouc, au PK 1,460, sur le territoire de la commune d'Arles, jusqu'en novembre 2006, date à laquelle prenait fin son contrat de travail ; que, le 13 juillet 2006, une convention d'occupation temporaire du domaine public fluvial a été conclue entre Mme A et Voies Navigables de France, avec une prise d'effet au 15 juillet 2006 et une échéance au 14 décembre suivant ; que, le 23 novembre 2006, Mme A a sollicité une prolongation de la convention d'occupation temporaire qui a été refusée par Voies Navigables de France ; que, le 6 mars 2007, Voies Navigables de France a dressé à l'encontre de Mme A, qui s'était maintenue irrégulièrement sur le domaine public fluvial, un procès-verbal de contravention de grande voirie notifié à l'intéressée le 2 avril 2007, pour infraction aux dispositions des articles L. 2122-1 et L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques ; que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille, saisi à la fois par Mme A d'une demande tendant à ce que le tribunal prononce la relaxe des poursuites engagées à son encontre et par Voies Navigables de France du procès-verbal de contravention de grande voirie, a, après avoir joint ces deux demandes, par un jugement en date du 10 juin 2008, d'une part, condamné Mme A au paiement d'une amende de 1 000 euros ainsi qu'aux frais d'établissement du procès-verbal de contravention de grande voirie, qu'il a ramenés à la somme de 50 euros et, d'autre part, prenant acte de ce que Mme A avait, postérieurement à l'introduction des instances, procédé à la libération et à la remise en son état initial du domaine public fluvial, prononcé un non lieu à statuer sur l'action domaniale introduite par Voies Navigables de France ; que, par la présente requête, Mme A relève appel du jugement dont s'agit en tant qu'il a prononcé lesdites condamnations à son encontre ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 774-2 du code de justice administrative : Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal./ La notification est faite dans la forme administrative, mais elle peut également être effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception./ La notification indique à la personne poursuivie qu'elle est tenue, si elle veut fournir des défenses écrites, de les déposer dans le délai de quinzaine à partir de la notification qui lui est faite./ Il est dressé acte de la notification ; cet acte doit être adressé au tribunal administratif et y être enregistré comme les requêtes introductives d'instance ; qu'aux termes de l'article L. 774-4 du même code : Toute partie doit être avertie du jour où l'affaire sera appelée à l'audience (...) ;

Considérant que les dispositions précitées n'ont pas pour effet d'imposer à la personne poursuivie de faire connaître au tribunal ses éventuels changements d'adresse ; que, par suite, lorsque les courriers relatifs à des actes de la procédure sont retournés avec la mention selon laquelle le destinataire n'habite pas à l'adresse indiquée, le principe du respect des droits de la défense implique nécessairement, eu égard au caractère répressif de la contravention de grande voirie qu'on lui demande de prononcer, que le juge saisi recherche, le cas échéant en sollicitant à cet effet l'autorité par laquelle il a été saisi, l'adresse à laquelle ces actes peuvent être utilement notifiés ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A a été convoquée à l'audience du Tribunal administratif de Marseille du 3 juin 2008, où les deux instances en cause étaient appelées, par un avis remis par pli recommandé, à l'adresse indiquée dans sa requête par Mme A et retourné au Tribunal administratif par les services postaux avec la mention non réclamé ; qu'ainsi, Mme A, qui s'est abstenue de réclamer le pli adressé par le Tribunal administratif, a été régulièrement convoquée à l'audience du 3 juin 2008 ; que, par suite, Mme A n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait intervenu à la suite d'une procédure irrégulière ;

Sur l'action publique :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous. ; qu'aux termes de l'article L. 2132-9 du même code relatives aux atteintes portées au domaine public fluvial : Les riverains, les mariniers et autres personnes sont tenus de faire enlever les pierres, terres, bois, pieux, débris de bateaux et autres empêchements qui, de leur fait ou du fait de personnes ou de choses à leur charge, se trouveraient sur le domaine public fluvial. Le contrevenant est passible d'une amende de 150 à 12 000 euros, de la confiscation de l'objet constituant l'obstacle et du remboursement des frais d'enlèvement d'office par l'autorité administrative compétente. ; qu'aux termes de l'article L. 2132-27 dudit code : Les contraventions définies par les textes mentionnés à l'article L. 2132-2, qui sanctionnent les occupants sans titre d'une dépendance du domaine public, se commettent chaque journée et peuvent donner lieu au prononcé d'une amende pour chaque jour où l'occupation est constatée, lorsque cette occupation sans titre compromet l'accès à cette dépendance, son exploitation ou sa sécurité. ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 6 mars 2007, et qu'il est constant que Mme A a, postérieurement à l'expiration de la convention d'occupation temporaire dont elle était titulaire, laissé stationner le bateau Oui sur le domaine public fluvial sans disposer d'aucun titre d'occupation du domaine public ; que, ce fait, dont la matérialité n'est pas discutée, est constitutif d'une contravention de grande voirie, prévue et réprimée par les dispositions précitées de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques et qu'en application desdites dispositions, Mme A était passible d'une amende à raison de cette occupation irrégulière du domaine public fluvial ; que, si Mme A fait valoir qu'elle s'est acquittée du loyer convenu pour les deux emplacements du bateau Oui à Arles tant sur l'emplacement provisoire que sur l'autre emplacement situé dans le port de Gallician, durant toute la période où ce bateau a occupé le canal d'Arles à Bouc et qu'elle a fait des démarches pour obtenir le renouvellement de sa convention d'occupation temporaire avant son échéance, ces circonstances ne lui donnaient aucun droit ni titre pour occuper le domaine public fluvial et sont, par suite, sans influence sur le bien-fondé des poursuites engagées à son encontre ainsi que sur l'amende à laquelle l'intéressée s'exposait de ce fait ; que le stationnement irrégulier d'un bateau sur le domaine public fluvial constituant un empêchement au sens des dispositions de l'article L. 2132-9 du code précité, la circonstance selon laquelle le bateau ne gênait pas la navigation est sans incidence sur l'existence de la contravention de grande voirie ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A fait valoir qu'aucune mise en demeure de quitter l'emplacement en litige ne lui a été adressée avant qu'une amende ne lui soit infligée le 6 mars 2007 ; qu'il résulte de l'instruction que le moyen ainsi invoqué manque, en tout état de cause, en fait dès lors que, par un courrier, transmis par lettre recommandée avec accusé de réception, du 12 décembre 2006, reçu par l'intéressé le 13 décembre suivant, Voies Navigables de France a, d'une part, refusé le renouvellement de la convention d'occupation temporaire dont l'échéance était au 14 décembre 2006 et, d'autre part, demandé à Mme A de libérer le domaine public fluvial, dans un délai de quinze jours à compter de la réception de ce courrier ; que, par suite, le moyen invoqué ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, que Mme A soutient que, dès réception du courrier adressé le 20 août 2007 par le directeur du Service de la Navigation de Rhône Saône lui demandant de libérer ledit emplacement, elle a obtempéré et a ramené le bateau Oui à l'emplacement du port de Gallician comme cela lui était demandé ; que, toutefois, une telle circonstance est sans incidence sur la condamnation à amende du contrevenant dès lors qu'aucune disposition ne permet au juge de dispenser le contrevenant de l'amende prévue par les dispositions précitées en cas de contravention de grande voirie ;

Considérant, en outre, que si Mme A fait valoir que le propriétaire du bateau Oui a été contraint de le vendre, que sa résidence dans ce bateau était justifiée par des raisons professionnelles, qu'elle est actuellement au chômage et qu'elle perçoit une allocation mensuelle de 731 euros, ces circonstances sont sans influence sur le prononcé d'une amende dès lors que la contravention de grande voirie est, en l'espèce, constituée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le premier juge l'a condamnée au paiement d'une amende de 1 000 euros ;

Sur les frais d'établissement du procès-verbal de contravention de grande voirie :

Considérant que l'évaluation à 50 euros des frais d'établissement du procès-verbal par le jugement en litige n'est pas contestée par Mme A ni par Voies Navigables de France ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 10 juin 2008, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille l'a condamnée au paiement d'une amende de 1 000 euros ainsi qu'aux frais d'établissement du procès-verbal de contravention de grande voirie, ramenés à la somme de 50 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A et à Voies Navigables de France.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2010, où siégeaient :

- M. Moussaron, président de chambre,

- Mme Buccafurri, président assesseur,

- Mme Lefebvre-Soppelsa, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 octobre 2010.

Le rapporteur,

I. BUCAFFURRILe président,

R. MOUSSARON

Le greffier,

V. DUPOUY

La République mande et ordonne au préfet de la région Provence Alpes Côte d'Azur en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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N° 08MA047438


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA04743
Date de la décision : 18/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-10-18;08ma04743 ?
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