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30/09/2010 | FRANCE | N°07MA01205

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 30 septembre 2010, 07MA01205


Vu la requête, enregistrée le 6 avril 2007, présentée pour Mme Dina A, demeurant ..., par Me Ginter ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0303177 en date du 12 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 et des pénalités qui les ont assorties ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) d'ordonner en tant que de besoin la produ

ction des documents utilisés par l'administration pour fonder les redressements ;

4°) de m...

Vu la requête, enregistrée le 6 avril 2007, présentée pour Mme Dina A, demeurant ..., par Me Ginter ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0303177 en date du 12 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 et des pénalités qui les ont assorties ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) d'ordonner en tant que de besoin la production des documents utilisés par l'administration pour fonder les redressements ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2010 :

- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

Considérant que l'administration a procédé en 1998 à la vérification de comptabilité de l'entreprise individuelle de brocante exploitée au nom de Mme A sous l'enseigne Troc de Gardanne ; qu'à la suite de ce contrôle et d'un examen contradictoire d'ensemble de situation fiscale personnelle de M. et Mme A mené la même année, l'administration a relevé que M. Pieracci était le gérant de fait de l'entreprise individuelle de brocante et qu'il retirait en outre des recettes d'une activité occulte de placement de machines à sous dans des bars et cafés ; que des redressements ont été notifié aux contribuables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; que les contribuables ont également été taxés à raison de revenus d'origine indéterminée ; que M. Pieracci est décédé le 7 juillet 1999 ; que Mme A demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 12 février 2007 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie, à la suite des contrôles menés en 1998, au titre des années 1996 et 1997 et des pénalités qui les ont assorties ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décisions en date du 5 novembre 2007, du 12 février 2008 et du 29 avril 2010, postérieures à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux d'Aix-en-Provence a prononcé les dégrèvements, à concurrence de la somme de 81 925,59 euros de droits et de 55 420,69 euros de pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme A a été assujettie au titre de l'année 1996 et à concurrence de la somme de 256 024,26 euros de droits et de 48 004,69 euros de pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme A a été assujettie au titre de l'année 1997 ; que la requête de l'intéressée est, dans cette mesure, devenue sans objet ;

Sur le surplus des conclusions de la requête :

En ce qui concerne le montant et l'origine des impositions restant à la charge de Mme A :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la fraction des impositions procédant des rehaussements apportés aux bénéfices industriels et commerciaux retirés par M. et Mme A de l'entreprise individuelle de brocante exploitée sous l'enseigne Troc de Gardanne et par M. Pieracci de son activité occulte de placement de machines à sous a été dégrevée en intégralité par les décisions susrappelées du 5 novembre 2007 et du 12 février 2008 du directeur des services fiscaux d'Aix-en-Provence ; que seule demeure en litige la fraction des impositions procédant des revenus d'origine indéterminée portés à la connaissance de M. et Mme A par notification de redressement datée du 30 novembre 1999, chiffrés à la somme de 129 103 francs au titre de l'année 1996 et à la somme de 852 422 francs ; qu'une fraction de cette dernière somme, d'un montant de 455 250,96 francs, a été ensuite taxée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers par décision d'admission partielle en date du 26 mars 2003 de la réclamation de la requérante, la taxation du solde de la somme de 852 422 francs étant maintenue au titre des revenus d'origine indéterminée ; qu'il résulte des calculs de l'administration tels que retracés dans le bordereau de communication de pièces qu'elle a transmis, enregistré au greffe de la Cour le 4 février 2010, que les impositions restant à la charge de Mme A en matière d'impôt sur le revenu s'élèvent, au titre de l'année 1996, à 37 528 francs de droits et 25 425 francs de pénalités et, au titre de l'année 1997, à la somme de 227 253 francs de droits et 43 780 francs de pénalités ;

Considérant que Mme A conteste ces calculs en soutenant que l'administration aurait omis de prononcer des dégrèvements en matière de contributions sociales et de pénalités ; que, toutefois, l'administration était fondée à maintenir les contributions sociales afférentes à la taxation de la somme de 455 250,96 francs dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ainsi que les intérêts de retard ayant assorti ces contributions sociales ; qu'en outre, la requérante ne conteste pas utilement le calcul des pénalités en faisant référence à des actes de recouvrement, antérieurs aux derniers calculs de l'administration et qui prennent en compte des frais de recouvrement étrangers au calcul de l'assiette de l'impôt ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment des termes de la notification de redressement datée du 30 novembre 1998 que les revenus d'origine indéterminée restant en litige procèdent de la seule imposition des sommes portées au crédit des comptes bancaires ouverts au nom de Mme A et de son époux, que l'administration a obtenus dans le cadre de son droit de communication ; qu'il résulte des termes de la même notification de redressement que les soldes inexpliqués de balances d'espèce établies par le vérificateur ont été initialement taxés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, lesquels ont, ainsi qu'il a été dit, été intégralement dégrevés ; que, dans ces conditions, le moyen par lequel Mme A soutient que la garantie tenant à l'existence d'un débat oral et contradictoire entre le vérificateur et le contribuable n'a pas été respectée au cours des opérations de vérification de comptabilité notamment au sujet des documents obtenus par l'administration fiscale auprès des autorités judiciaires et conservés dans différents scellés ne peut qu'être écarté comme inopérant ;

Considérant, en second lieu, qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que, lorsque le contribuable en fait la demande à l'administration, celle-ci est tenue de lui communiquer les documents ou copies de documents contenant les renseignements obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés ;

Considérant, d'une part, que la notification de redressement du 30 novembre 1999 mentionne que les impositions supplémentaires que l'administration envisage de mettre à la charge de Mme A ont pour origine les renseignements obtenus auprès des établissements détenteurs de ses comptes bancaires et de ceux de son époux ; que la contribuable a ainsi été suffisamment informée de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis par l'administration dans l'exercice de son droit de communication ; que, d'autre part, si Mme A, dans sa lettre d'observations en date du 3 janvier 2000 à la notification de redressement du 30 novembre 1999, souligne que les informations figurant sur les comptes bancaires dont le vérificateur a obtenu communication ne lui ont pas été transmises, indique qu'elle a sollicité des organismes bancaires gérant ses comptes les justificatifs de chaque encaissement et demande au vérificateur de surseoir aux redressements dans l'attente de la réponse des banques, cette lettre ne peut être regardée comme une demande de l'intéressée par laquelle elle aurait sollicité du vérificateur lui-même les relevés bancaires en possession du service ; que, de même, la lettre du 13 septembre 2000 par laquelle Mme A demande à l'administration avec un grand degré de précision l'ensemble des documents à partir desquels l'activité occulte de M. Pieracci a pu être mise en évidence ne peut être regardée comme comportant une demande des relevés bancaires en possession du service ; qu'en outre, la requérante n'est pas fondée à se prévaloir des termes de l'instruction administrative référencée 13 L-6-06 du 21 septembre 2006 qui, relative à la procédure d'imposition, ne comporte aucune interprétation formelle de la loi fiscale ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable (...) des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ; qu'enfin, l'article L. 193 du même livre dispose que : Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ;

Considérant, en premier lieu, que l'administration a imposé en tant que revenus d'origine indéterminée, selon la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, divers crédits apparaissant sur les comptes bancaires de M. et Mme A ; qu'à l'appui de son moyen selon lequel ces sommes correspondraient à des revenus de l'activité occulte de placement de machines à sous exercée par son époux, Mme A produit en annexe à son mémoire enregistré au greffe de la Cour le 11 janvier 2010 des extraits du carnet sur lequel son époux tenait une comptabilité occulte, conservés dans un scellé portant le numéro 73 et de la notification de redressement du 30 novembre 1999 retraçant les sommes portées en chèques au crédit des comptes bancaires de son foyer fiscal ; que, compte tenu de la corrélation entre les sommes, même parfois indiquées en anciens francs et les dates apparaissant sur ces documents, Mme A doit être regardée comme établissant que les sommes de 69 309,76 francs et 2 298,13 francs en 1996 et de 65 000 francs et 50 000 francs en 1997 sont des produits de l'activité occulte de son époux et ne pouvaient, de ce fait, être légalement imposées en tant que revenus d'origine indéterminée ; qu'elle est donc fondée à demander la décharge de la fraction des impositions correspondant à une diminution de 71 607,89 francs en 1996 et de 115 000 francs en 1997 des bases des revenus d'origine indéterminée ;

Considérant, en deuxième lieu, que si Mme A indique que, si elle avait disposé de tous les scellés et de tous les documents saisis par les autorités judiciaires, elle aurait pu mieux organiser sa défense et apporter d'autres preuves de l'exagération des impositions, elle n'établit ni même ne soutient qu'elle aurait sollicité, ainsi que le permettent les dispositions de l'article 97 du code de procédure pénale, l'accès aux documents conservés par ces autorités et qu'un refus lui aurait été opposé ; que, pour le surplus des revenus d'origine indéterminée, elle n'établit donc pas l'exagération des impositions ;

Considérant, en troisième lieu, que le moyen par lequel Mme A soutient que l'action en recouvrement de l'administration serait prescrite est inopérant à l'appui d'une contestation relative à l'assiette de l'imposition ;

Sur l'application des pénalités de mauvaise foi :

Considérant que la fraction des impositions restant à la charge de Mme A, qui procède des revenus d'origine indéterminée réintégrés aux revenus de 1996 et de 1997 de son foyer fiscal, a été assortie des majorations pour mauvaise foi prévues à l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable ;

Considérant que, pour contester les pénalités pour mauvaise foi restant à sa charge, Mme A soutient qu'elle n'a pris aucune part aux activités occultes de son mari et qu'elle ne dispose que de faibles ressources ; que ces deux moyens sont inopérants dès lors que, d'une part, que la requérante n'établit pas que les revenus d'origine indéterminée dont le bien-fondé est confirmé par le présent arrêt correspondraient à des revenus de l'activité occulte de placement de machines à sous exercée par son époux, et que, d'autre part, la modicité alléguée de ses ressources ne pourrait le cas échéant justifier une remise des pénalités qu'à titre gracieux et non dans le cadre d'une demande contentieuse ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A est seulement fondée à demander la décharge de la fraction des impositions correspondant à une diminution de 71 607,89 francs en 1996 et de 115 000 francs en 1997 des bases de ses revenus d'origine indéterminée ainsi que la réformation en ce sens du jugement du Tribunal administratif de Marseille ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : A concurrence des sommes de 81 925,59 euros de droits et de 55 420,69 euros de pénalités, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme A tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1996. A concurrence des sommes de 256 024,26 euros de droits et de 48 004,69 euros de pénalités, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la même requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales de l'année 1997.

Article 2 : Les bases des revenus d'origine indéterminée de Mme A sont réduites de la somme de 10 916,55 euros (71 607,89 francs) au titre de l'année 1996 et de la somme de 17 531,64 euros (115 000 francs) en 1997.

Article 3 : Mme A est déchargée, en droits et pénalités, de la différence entre les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1996 et 1997 et celles résultant de l'application de l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 12 février 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à Mme A la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Dina A, et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Copie en sera adressée à Me Ginter et au directeur de contrôle fiscal sud-est.

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N° 07MA01205


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA01205
Date de la décision : 30/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : ERIC GINTER CABINET SARRAU THOMAS COUDERC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-09-30;07ma01205 ?
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