Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la cour les 12 avril 2010 et 30 avril 2010 pour M. Sébastien A, demeurant ..., par la SCP Monod - Colin, avocat ; M. A demande au juge des référés de la cour :
1°/ d'annuler l'ordonnance n°1001053 en date du 25 mars 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a, sur déféré du préfet de l'Hérault, suspendu l'exécution de la décision valant permis de construire tacite née le 21 février 2008 du silence gardé sur sa demande par le maire de la commune de Garrigues ;
2°/ de rejeter la demande de suspension présentée par le préfet de l'Hérault ;
3°/ de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant régulièrement été averties du jour de l'audience ;
Après avoir, en séance publique le 8 juillet 2010, présenté son rapport et entendu :
- les observations de Me Schneider du cabinet Margall pour la commune de Garrigues qui rappelle que M. A ne peut être regardé comme un exploitant agricole ;
Considérant que M. A demande l'annulation de l'ordonnance du 25 mars 2010 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a, sur déféré du préfet de l'Hérault, suspendu l'exécution de la décision valant permis de construire tacite en date du 22 février 2008 née du silence gardé sur sa demande par le maire de la commune de Garrigues ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.554-1 du code de justice administrative : Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3e alinéa de l'article L.2131-6 du code général des collectivités territoriales (...) ; que cet alinéa dispose qu'il est fait droit à la demande de suspension du représentant de l'Etat si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
Considérant que, pour suspendre l'exécution du permis de construire tacite de M. A, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, qui a écarté l'ensemble des fins de non-recevoir soulevées par l'intéressé, s'est fondé, après avoir cité notamment le troisième alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales auquel renvoie l'article L. 554-1 du code de justice administrative, sur ce qu'en l'état de l'instruction, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article NC1 du plan d'occupation des sols était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; qu'en mentionnant ainsi la violation d'une règle d'urbanisme précise, applicable au terrain d'assiette du permis litigieux, le juge des référés a suffisamment motivé son ordonnance ;
Sur la recevabilité de la demande de suspension présentée par le préfet de l'Hérault devant le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales : Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. ; qu'aux termes de l 'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales : Sont soumis aux dispositions de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales les actes suivants : (...) 6° Le permis de construire et les autres autorisations d'utilisation du sol et le certificat d'urbanisme délivrés par le maire ; qu'aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement ; qu'aux termes de l'article L.424-8 du code de l'urbanisme : Le permis tacite et la décision de non-opposition à une déclaration préalable sont exécutoires à compter de la date à laquelle ils sont acquis ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si le permis tacitement délivré devient exécutoire à la date à laquelle il est acquis, il reste néanmoins soumis au contrôle de légalité du représentant de l'Etat ; que le préfet ne peut utilement exercer le contrôle d'un permis tacite que s'il a pu avoir connaissance de l'existence de cette autorisation par l'intermédiaire de l'autorité administrative qui l'a prise ; que, par suite, le délai pendant lequel le préfet peut déférer le permis court à compter de la date à laquelle il a pu ainsi avoir connaissance de l'autorisation accordée ; que le point de départ de ce délai peut d'ailleurs être prorogé jusqu'à la date de transmission du dossier complet de la demande si le représentant de l'Etat en a besoin pour exercer pleinement son contrôle de légalité ;
Considérant, en l'espèce, que M. A est devenu titulaire d'un permis de construire tacite le 21 février 2008 ; que le délai ouvert au préfet pour déférer cette autorisation au tribunal administratif a commencé à courir à compter du 19 janvier 2010, date à laquelle lui a été notifiée l'existence de ce permis ; que le préfet de l'Hérault était donc recevable à déférer le permis de construire tacite le 4 mars 2010 et d'accompagner sa demande d'annulation d'une demande de suspension, formulée en application des dispositions de l'article L.554-1 du code de justice administrative ; qu'ainsi M. A n'est pas fondé à soutenir que le déféré préfectoral présenté par le préfet de l'Hérault devant le tribunal administratif de Montpellier serait irrecevable ;
Considérant, en outre, que les dispositions de l'article L.554-1 du code de justice administrative ne subordonnant pas la demande de suspension préfectorale à la condition de l'urgence, M. A ne soulève pas utilement son absence en l'espèce ;
Sur le bien-fondé de la demande de suspension :
Considérant que la parcelle terrain d'assiette de la construction projetée est située en zone NC qui est caractérisée par le règlement du plan d'occupation des sols comme une zone de richesse économique dans laquelle les terrains doivent être réservés à l'exploitation agricole, l'élevage, l'exploitation de ressources du sous-sol ou de la forêt ; qu'aux termes de l'article NC 1 du plan d'occupation des sols de Garrigues, les seules occupations des sols admises sont, notamment, (...) les constructions des bâtiments d'exploitation destinés au logement des récoltes animaux et matériels agricoles / les constructions à usage d'habitation directement liées et nécessaires à l'exploitation agricole motivées par le transfert ou la création du siège d'exploitation et implantées dans un rayon de 50 mètres autour des bâtiments existants constituant le corps d'exploitation, à l'exclusion de toute habitation isolée et séparée des bâtiments d'exploitation (...) ;
Considérant que selon la demande de permis de construire présentée par M. A, le projet en litige consiste dans la réalisation d'un bâtiment comprenant un entrepôt et une maison d'habitation, pour une surface hors oeuvre nette supérieure à 711 m² ; que M. A, chef d'entreprise d'une exploitation de travaux publics agricole et forestier, n'établit pas, dans sa demande, l'existence d'un lien entre ladite construction et une exploitation agricole personnelle ; qu'ainsi, en l'état de l'instruction, le moyen articulé par le préfet de l'Hérault dans son déféré et tiré de la contrariété du projet avec l'article NC1 du règlement du plan d'occupation des sols, paraît à lui seul, de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité du permis construire tacite du 21 février 2008 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance attaquée, le juge du référé du tribunal administratif de Montpellier a fait droit à la demande de suspension présentée par le préfet de l'Hérault ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A la somme demandée par la commune de Garrigues au titre des frais de même nature ;
O R D O N N E :
Article 1er : La requête présentée par M. A est rejetée.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la commune de Garrigues est rejeté.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A, à la commune de Garrigues et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
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N° 10MA01437 2