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01/07/2010 | FRANCE | N°07MA04436

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 01 juillet 2010, 07MA04436


Vu la requête, enregistrée le 15 novembre 2007, présentée pour Mme , agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'administratrice légale de son fils alors mineur , demeurant ..., par Me Cirera ;

Les consorts demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'article 4 du jugement n° 0204555 du 5 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier, après avoir condamné la commune de Saint-Martin-Lalande à leur verser la somme de 2 637,50 euros en réparation des désordres affectant leur propriété, a mis à sa charge les frais d'expertise, et la somme de 1 500

euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrati...

Vu la requête, enregistrée le 15 novembre 2007, présentée pour Mme , agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'administratrice légale de son fils alors mineur , demeurant ..., par Me Cirera ;

Les consorts demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'article 4 du jugement n° 0204555 du 5 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier, après avoir condamné la commune de Saint-Martin-Lalande à leur verser la somme de 2 637,50 euros en réparation des désordres affectant leur propriété, a mis à sa charge les frais d'expertise, et la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a rejeté le surplus de leurs conclusions ;

2°) de condamner la commune à leur payer la somme de 38 000 euros, majorée des intérêts au taux légal et d'une somme de 500 euros par mois jusqu'au jour où les infiltrations et venues d'eau auront cessé, en réparation de troubles liés aux venues d'eau dont ils souffrent ;

3°) de condamner la commune à leur payer la somme de 10 000 euros, majorée d'une somme de 100 euros par mois jusqu'au jour où la commune aura mis en place un mur écran de caractéristiques suffisantes pour mettre un terme à la vue irrégulière sur leur terrain ;

4°) de mettre à leur charge de la commune la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) de condamner la commune aux entiers dépens ;

...................................................................................................

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2010 :

- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteur ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public,

- et les observations de Me Riciotti, substituant Me Labry, pour la commune de

Saint-Martin-Lalande ;

Considérant que la maison d'habitation propriété des consorts se situe en contrebas d'un terrain communal sur lequel la commune de Saint-Martin-Lalande a fait édifier une maison des jeunes au cours de l'année 1998 ; que les consorts relèvent appel du jugement du 5 juillet 2007 du Tribunal administratif de Montpellier, en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leurs conclusions tendant à la réparation des désordres résultant de ces travaux ; que la commune pour sa part demande l'annulation du jugement en tant qu'il a partiellement fait droit à leurs prétentions, et le rejet de ces dernières ;

Considérant que la responsabilité de la commune de Saint-Martin-Lalande est susceptible d'être engagée à raison des dommages anormaux et spéciaux présentant un lien de causalité direct avec les travaux publics réalisés ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que lors de l'exécution des travaux dont elle était le maître d'ouvrage, la collectivité défenderesse a fait réaliser un mur de soutènement d'une hauteur de trois mètres en limite de propriété, celui-ci s'interrompant au droit du mur pignon Est de l'immeuble considéré et fait remblayer ce terrain jusqu'à la même hauteur, l'apport de terres se faisant ainsi en appui direct sur le mur affecté par les désordres constatés ; que, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, lors de l'exécution de sa mission, l'expert désigné par le tribunal a pu relever d'importantes traces d'humidité affectant le mur pignon Est de la maison d'habitation des consorts ; que si ce même expert a estimé que, avant même que ne soient réalisés les travaux en litige, la propriété était affectée par des infiltrations liées à la topographie des lieux, les éléments du rapport établissent que le phénomène d'infiltration a été nettement aggravé par lesdits travaux, ceux-ci contribuant aux venues d'eau contre le mur pignon du fait, à la fois de l'accumulation d'un remblai de terre d'une hauteur de trois mètres sur une longueur de dix mètres contre le mur pignon de la maison, du revêtement de bitume dont il a été recouvert, de l'insuffisance du drainage réalisé lors de la construction du mur séparatif et de la mauvaise conception des travaux de reprise des écoulements d'eau effectués en 2001 sur le terrain communal, le phénomène d'infiltration étant aggravé par le fonctionnement du dispositif d'arrosage automatique installé sur ce terrain, de sorte que l'humidité du mur pignon demeure apparente, même en période sèche ; que si, pour contester le principe même de sa responsabilité, la commune fait valoir que des problèmes d'humidité affectaient dès l'origine la maison d'habitation des consorts , bâtie sur une parcelle grevée par une servitude naturelle d'écoulement des eaux, il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, que l'humidité découlant de l'écoulement naturel des eaux provenant du fonds dominant a été nettement aggravée par les travaux réalisés par la commune, l'expert notant que le débit standard de ruissellement a été aggravé dans un rapport de 1 à 2,5 ou 3, et que les consorts demandent réparation des seuls préjudices résultant de cette aggravation ;

Considérant, en deuxième lieu, que la commune conteste sa condamnation à réparer le coût du traitement fongicide des poutres du plancher au-dessus du garage de la propriété ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, il ne résulte pas de l'instruction que ce type de traitement relève de l'entretien normal d'une maison d'habitation, mais il résulte au contraire de l'instruction que ce traitement a été requis du fait des désordres constatés ; que la contestation de la commune doit, par suite, être écartée ;

Considérant, en troisième lieu, que l'expert désigné par les premiers juges a relevé dans son rapport qu'au rez-de-chaussée, sur toute la longueur du mur Est, la valeur d'humidité était de 100 %, que le mur ruisselait pratiquement lorsqu'il a effectué ses mesures, par temps pluvieux, et qu'à l'étage, cette valeur était, malgré la présence d'une contre cloison en lambris, de 85 % ; que si l'expert a indiqué n'avoir pas réalisé d'essais destructifs des murs des pièces comportant contre-cloisons et faux-plafonds, cette circonstance faisait seulement obstacle à ce qu'il se prononce sur un éventuel risque de déstabilisation de l'immeuble, mais ne l'a pas empêché de constater l'existence de nuisances hydriques ; qu'il a rappelé, en page 25 de son rapport les conséquences néfastes d'une atmosphère humide, sans mentionner que cette humidité serait circonscrite au rez-de-chaussée de l'immeuble ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction que le rez-de-chaussée de la maison d'habitation ne se limitait pas à un simple garage, mais comportait également une salle de bains, des toilettes et une buanderie ; que si les premiers juges ont considéré que l'immeuble était, avant que ne soient réalisés les travaux publics en litige, affecté par des venues d'eau et que les modifications apportées sur ledit immeuble avant exécution de ces travaux avaient pu contribuer au maintien de l'humidité dans ses murs, il résulte de l'instruction ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que l'humidité préexistante était sans commune mesure avec les nuisances hydriques qui affectent désormais la propriété, seules en cause en l'espèce ; qu'il sera fait, dans les circonstances de l'espèce, une juste appréciation du préjudice résultant pour Mme et pour son fils des désordres liés aux nuisances hydriques qui affectent leur maison en leur allouant, à chacun, une somme de 10 000 euros ;

Considérant, en troisième lieu, que les requérants ont également demandé réparation au titre du préjudice résultant des vues créées sur leur propriété par l'exécution des travaux en litige ; qu'il résulte des pièces du dossier qu'avant l'exécution des travaux, un fossé végétal relativement dense séparait la propriété du fonds voisin, alors que, après réalisation du mur de soutènement édifié en limite de propriété, celui-ci ne comportait aucun dispositif de protection contre les vues désormais plongeantes sur la propriété ; que toutefois, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, des documents photographiques établissent que la commune a fait procéder à l'installation d'un écran visuel et fait réaliser des plantations venant protéger cette propriété contre les vues directes ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que le dispositif mis en place est partiellement insuffisant, dès lors qu'il n'est que semi opaque et ne s'étend pas jusqu'au bout de la parcelle ; que les pièces du dossier permettent seulement de constater que la haie végétale protectrice était plantée en 2007, au moment de la rédaction du rapport d'expertise, mais qu'aucun dispositif n'avait été encore mis en place en août 2002, quatre ans après la réalisation des travaux ; qu'il sera fait une juste appréciation des préjudices subis par les consorts à ce titre en condamnant la commune de Saint-Martin-Lalande à leur payer la somme de 2 000 euros chacun en réparation des vues directes qu'ils ont subies ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts sont fondés, dans la mesure qui résulte de la motivation sus exposée, à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté le surplus de leur demande, et que la commune de

Saint-Martin-Lalande n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le même tribunal l'a condamnée à réparer les désordres affectant la propriété ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des consorts , qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Saint-Martin-Lalande une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par les consorts et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le montant de la somme que la commune de Saint-Martin-Lalande est condamnée à verser à Mme est majoré d'une somme de 12 000 euros.

Article 2 : Le montant de la somme que la commune de Saint-Martin-Lalande est condamnée à verser à M. est majoré d'une somme de 12 000 euros.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Montpellier du 5 juillet 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : La commune de Saint-Martin-Lalande versera aux consorts une somme totale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des consorts et les conclusions de la commune de Saint-Martin-Lalande sont rejetés.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme , à M. , et à la commune de Saint-Martin-Lalande.

Copie en sera adressée à Me Cirera et à Me Labry.

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N°07MA04436


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA04436
Date de la décision : 01/07/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : SCP BOURLAND - CIRERA - CABEE - BIVER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-07-01;07ma04436 ?
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