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22/06/2010 | FRANCE | N°07MA04553

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 22 juin 2010, 07MA04553


Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2007, présentée pour la SOCIETE LE PECHEUR, dont le siège est 15 rue Sade à Antibes (06600), représentée par son gérant en exercice, par Me Roussin ; la SOCIETE LE PECHEUR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401421 0401422 du 27 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution de 10 % auxquelles elle été assujettie au titre des exercices 1996, 1997 et 1998, ainsi que des péna

lités y afférentes, et, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajou...

Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2007, présentée pour la SOCIETE LE PECHEUR, dont le siège est 15 rue Sade à Antibes (06600), représentée par son gérant en exercice, par Me Roussin ; la SOCIETE LE PECHEUR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401421 0401422 du 27 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et à la contribution de 10 % auxquelles elle été assujettie au titre des exercices 1996, 1997 et 1998, ainsi que des pénalités y afférentes, et, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés par avis de mise en recouvrement en date du 19 juin 2000 ;

2°) de prononcer la décharge des taxes et impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juin 2010,

- le rapport de Mme Mariller, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Emmanuelli, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué, que le tribunal statuant sur la demande de la SARL LE PECHEUR tendant à la prise en compte de charges supplémentaires, a jugé que lorsque l'administration intègre dans une reconstitution de recettes des achats non comptabilisés, il lui appartient de prendre en compte ces achats dans les charges de la société ; qu'après avoir énoncé ce principe, les premiers juges ont constaté que ce montant ne pouvait être calculé en l'état du dossier et ont renvoyé à l'administration l'évaluation des achats à déduire des recettes, sans même fixer les principes pouvant conduire à leur détermination ; que le jugement est, pour ce motif, irrégulier ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par la SARL LE PECHEUR devant le Tribunal administratif de Nice ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision en date du 19 octobre 2007, postérieure à l'introduction de la demande devant le Tribunal administratif, le Directeur des services fiscaux des Alpes-Maritimes a accordé à la société requérante la décharge en droits et pénalités d'un montant de 639,01 euros sur la cotisation d'impôt sur les sociétés afférente à l'exercice clos le 30 juin 1996, d'un montant de 1 117,55 euros sur la cotisation d'impôt sur les sociétés afférente à l'exercice clos le 30 juin 1997, d'un montant de 1 295, 73 euros sur la cotisation d'impôt sur les sociétés afférente à l'exercice clos le 30 juin 1998 ; que, par la même décision, le directeur a accordé à la SOCIETE LE PECHEUR la décharge, en droits et pénalités, de 49 euros, 83,86 euros et 104,30 euros au titre de la contribution de 10 % perçue sur les trois exercices en litige ; que la demande est, dans cette mesure, devenue sans objet ;

Sur le surplus des conclusions de la SARL LE PECHEUR :

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que la SARL LE PECHEUR, qui exploite un restaurant à Antibes, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période comprise entre le 1er juillet 1995 et le 30 juin 1998 ; que le vérificateur a écarté la comptabilité de la SARL LE PECHEUR au motif qu'elle n'était pas probante et a reconstitué les recettes selon la méthode dite des vins ;

En ce qui concerne le caractère sincère et probant de la comptabilité :

Considérant que le vérificateur a écarté la comptabilité de la SARL LE PECHEUR au premier motif que les achats comptabilisés de vins au cours de l'exercice augmentés des bouteilles figurant dans le stock d'ouverture et diminués de celles figurant dans le stock de clôture faisaient apparaître sur chacun des exercices vérifiés des achats revendus négatifs, dont il n'est pas établi qu'ils s'expliqueraient par des erreurs dans la comptabilisation des stocks ; que l'existence d'achats sans factures est corroborée par d'importantes discordances entre les achats revendus et les vins identifiés sur les notes clients ; que le vérificateur a, en outre, constaté l'existence d'apports en espèces au compte caisse dont l'origine n'a pu être justifiée sur les trois exercices ; qu'il est encore établi que les recettes de la société n'étaient pas ventilées journellement selon le mode de règlement, que les doubles des notes délivrées aux clients, qui n'étaient pas numérotées ne permettaient pas de vérifier leur comptabilisation régulière ; qu'en raison de l'ensemble de ces irrégularités et incohérences, l'administration établit le caractère non sincère et probant de la comptabilité ;

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires :

Considérant qu'en l'absence de saisine de la Commission départementale des impôts et en l'absence d'acceptation des redressements, il appartient à l'administration d'établir le bien-fondé des redressements notifiés à la SARL LE PECHEUR ;

Considérant, en premier lieu, que pour reconstituer le chiffre d'affaires de la société, le vérificateur a utilisé la méthode des vins ; que pour mesurer la part des vins dans le chiffre d'affaires, il a dépouillé la totalité des notes clients présentées et calculé le chiffre d'affaires par type de vin ; que le chiffre obtenu résulte de la somme, d'une part, du montant des quantités retrouvées lorsque celles-ci sont supérieures aux achats revendus, et d'autre part des achats revendus lorsque les achats sont supérieurs aux ventes déclarées ; que la SARL LE PECHEUR conteste cette méthode au motif qu'il existerait des compensations entre les deux catégories reconstituées de vins, et qu'il s'agit en fait d'erreurs dans la rédaction des notes ; que, toutefois, en l'absence de toute justification, la société requérante ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que les notes qu'elle a établies porteraient la mention vin de pays alors qu'il se serait agit de vins d'une autre dénomination ; qu'au surplus, cette allégation est dénuée de toute justification ;

Considérant, en second lieu, que pour retenir l'existence d'achats sans factures de vins, le vérificateur a, d'une part, constaté que compte tenu de la variation des stocks, la SOCIETE LE PECHEUR avait globalement vendu plus de bouteilles de vin qu'elle n'en avait acheté ; qu'il a d'autre part découvert d'importantes discordances entre les achats revendus et les vins identifiés sur les notes clients ; qu'en l'absence d'explication plausible et vérifiable de la société requérante sur ces incohérences, l'administration doit être regardée comme établissant la réalité d'achats de vin sans factures ;

Considérant, en troisième lieu, qu'au titre des pertes et des offerts, le vérificateur a retenu un coefficient de pertes de 1,66 % sur l'exercice 1996, de 1,18 % sur l'exercice 1997 et de 1,31 % sur l'exercice 1998, correspondant à trente bouteilles cassées et trente bouteilles offertes sur chaque exercice ; que si ce taux résulte des indications fournies par le gérant au cours de la vérification, il ne prend pas en compte l'ensemble des causes de perte des bouteilles et est très inférieur aux taux habituellement constatés pour ce type d'établissement, sans que l'administration établisse que les conditions particulières de fonctionnement du restaurant justifient l'application d'un taux minoré ; qu'il y a lieu dès lors de fixer, pour chaque exercice en litige, ce taux à 5 % du chiffre d'affaires TTC reconstitué et d'accorder à la société requérante les dégrèvements correspondants d'impôt sur les sociétés et taxe sur la valeur ajoutée ;

En ce concerne la prise en compte de charges supplémentaires :

Considérant que la société requérante demande la prise en compte au titre des charges d'achats sans facture, calculés d'après le coefficient de bénéfice brut reconstitué par le vérificateur ; qu'il résulte de l'instruction que postérieurement à l'introduction de la requête, l'administration a admis en charge les achats de vins non comptabilisés retenus par le vérificateur, soit la somme de 7 421,59 francs au titre de l'exercice clos en 1996, de 13 723,45 francs au titre de l'exercice clos en 1997 et de 18 141 francs au titre de l'exercice clos en 1998 ; que ladite société ne peut prétendre aux dégrèvements complémentaires qu'elle sollicite, résultant de l'application du coefficient de bénéfice brut aux minorations de recettes, qui conduirait à admettre en déduction des charges évaluées forfaitairement et non appuyées de justifications probantes ; qu'à défaut pour la société de chiffrer et de justifier des charges dont elle sollicite la déduction, sa demande ne peut qu'être rejetée ;

Sur les pénalités :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, alors applicable : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti (...) d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L.80 D du livre des procédures fiscales : Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable (...) ; que ces dispositions imposent à l'administration d'énoncer les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision d'infliger une sanction fiscale ;

Considérant, qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressements du 14 décembre 1999 adressée à la SARL LE PECHEUR indique qu'il sera fait application de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts, en raison des graves irrégularités comptables révélées par la comptabilité matière des vins, de l'importance des minoration de recettes, du renouvellement des dissimulations sur chaque exercice vérifié, du caractère nécessairement conscient des infractions commises et de la circonstance, au demeurant non contestée, que les mêmes infractions ont déjà été relevées lors d'une précédente vérification de comptabilité ; que ce document mentionne ainsi, de façon suffisamment, précise les considérations de droit et de fait ayant conduit à l'application de la pénalité en litige, laquelle était, dès lors, suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L.80 D du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE LE PECHEUR est seulement fondée à demander que le coefficient de pertes et offerts soit fixé à 5 % sur chacun des exercices vérifiés et à demander la décharge correspondante des impositions et taxes en litige ;

Sur les conclusions de la SOCIETE LE PECHEUR tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, soit condamné à payer à la SOCIETE LE PECHEUR la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 27 septembre 2007 est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SARL LE PECHEUR, en droits et pénalités, à hauteur de la somme de 639,01 euros sur la cotisation d'impôt sur les sociétés afférente à l'exercice clos le 30 juin 1996, de la somme de 1 117,55 euros sur la cotisation d'impôt sur les sociétés afférente à l'exercice clos le 30 juin 1997, de la somme de 1 295,73 euros sur la cotisation d'impôt sur les sociétés afférente à l'exercice clos le 30 juin 1998, des sommes de 49,83, 86 et 104,30 euros au titre de la contribution de 10 % perçue sur les trois exercices en litige.

Article 3 : Le coefficient de pertes et offerts est fixé à 5 % du chiffre d'affaires TTC reconstitué sur les exercices clos en 1996, 1997 et 1998.

Article 4 : Il est accordé à la SOCIETE LE PECHEUR la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution de 10 %, de rappel de taxe sur la valeur ajoutée correspondant à la réduction des bases d'imposition visée à l'article 3 ci-dessus.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE LE PECHEUR est rejeté.

Article 6: Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE LE PECHEUR et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

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N° 07MA04553


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA04553
Date de la décision : 22/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Cécile MARILLER
Rapporteur public ?: M. EMMANUELLI
Avocat(s) : SCP TANDONNET ROUSSIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-06-22;07ma04553 ?
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