Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2008, présentée pour la SCI LA BERGERIE, dont le siège est chez M. Michel 16, avenue Pierre Sémard à Carcassonne (11000), représentée par son gérant, par la SCP Coulombié-Gras-Crétin-Becquevort-Rosier ; la SCI LA BERGERIE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 mai 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre la délibération en date du 6 février 2007 par laquelle le conseil municipal d'Aragon a approuvé le plan local d'urbanisme ;
2°) à titre principal, d'annuler pour excès de pouvoir cette délibération ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler la délibération en date du 6 février 2007, ensemble le plan local d'urbanisme en tant qu'il classe la parcelle de la SCI LA BERGERIE en zone Uap inconstructible ;
4°) de mettre à la charge de la commune d'Aragon la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;
Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le vice-président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juin 2010 :
- le rapport de M. Massin, rapporteur ;
- les conclusions de M. Bachoffer, rapporteur public ;
- et les observations de Me Chopin, pour la SCI LA BERGERIE ;
- et les observations de Me Dunyach, pour la commune d'Aragon ;
Considérant que par jugement du 29 mai 2008, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la SCI LA BERGERIE dirigée contre la délibération en date du 6 février 2007 par laquelle le conseil municipal d'Aragon a approuvé le plan local d'urbanisme ; que la SCI LA BERGERIE interjette appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que la SCI LA BERGERIE soutient que le jugement attaqué ne précise pas les motifs pour lesquels le classement du terrain lui appartenant en zone Uap n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation et ne répond pas au moyen tiré de ce que la présence d'un site ou d'un monument protégé n'induit jamais de principe d'inconstructibilité ; que si le jugement cite les dispositions applicables du plan local d'urbanisme, en revanche, il ne donne aucune indication relative à la situation particulière du secteur en cause et n'explique pas en quoi cette situation rend légal un classement en zone Uap ; qu'ainsi, le jugement qui est insuffisamment motivé doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur la demande présentée par la SCI LA BERGERIE devant le tribunal administratif de Montpellier ;
Sur la légalité du plan local d'urbanisme :
Considérant, en premier lieu, que la SCI LA BERGERIE soutient que la délibération en date du 6 février 2007 par laquelle le conseil municipal d'Aragon a approuvé le plan local d'urbanisme est entachée d'illégalité externe en raison des conditions de convocation à la séance du conseil municipal l'ayant adoptée et de l'information insuffisante des conseillers municipaux appelés à délibérer sur le projet de plan local d'urbanisme ; qu'elle invoque par voie d'exception l'illégalité de la délibération du 26 juin 2003 prescrivant l'élaboration du plan local d'urbanisme et l'illégalité de la délibération du 4 novembre 2005 arrêtant le projet de plan local d'urbanisme ; qu'elle fait valoir, enfin, la méconnaissance des articles L.123-9, R.123-19, R.123-2, R.123-7 du code de l'urbanisme et des articles R.123-13 et R.123-14 du code de l'environnement ; que la SCI LA BERGERIE se borne à procéder par affirmation sans apporter aucun élément utile au soutien des critiques qu'elle formule ; que, par suite, ces moyens doivent être écartés ;
Considérant, en deuxième lieu, que la SCI LA BERGERIE soutient que les terrains situés en zone urbaine sont, par principe, constructibles et que le classement en zone Uap du terrain lui appartenant est entaché d'erreur de droit ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.123-4 du code de l'urbanisme : Le règlement délimite les zones urbaines, les zones à urbaniser, les zones agricoles et les zones naturelles et forestières. Il fixe les règles applicables à l'intérieur de chacune de ces zones dans les conditions prévues à l'article R.123-9. ; qu'aux termes de l'article R.123-5 du code de l'urbanisme : Les zones urbaines sont dites zones U . Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter. ; qu'aux termes de l'article R.123-9 du code de l'urbanisme : Le règlement peut comprendre tout ou partie des règles suivantes : 1° Les occupations et utilisations du sol interdites ; 2° Les occupations et utilisations du sol soumises à des conditions particulières (...). ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient aux auteurs du plan local d'urbanisme de déterminer pour chaque zone les éventuelles restrictions au droit de propriété rendues nécessaires par la maîtrise de l'occupation des sols et du développement urbain ; que les lois et règlements prévoient un certain nombre de restrictions au droit de construire ; que celles-ci n'étant pas limitées, il n'existe pas de principe selon lequel il serait impossible en zone U d'interdire toute nouvelle construction, sous réserve que le parti d'urbanisation ainsi défini soit conforme au projet d'aménagement et de développement durable ; que, dès lors, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ; que leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts ;
Considérant qu'Aragon est un village médiéval dont l'architecture a été conservée, bâti sur un éperon rocheux, autour de l'église et du château ; que le secteur situé à l'ouest du village d'Aragon au sein duquel est implanté l'hôtel-restaurant la Bergerie est un espace étroit, constituant un col entre deux reliefs, dont l'accès est peu aisé ; que contrairement à ce que soutient la SCI LA BERGERIE, le secteur Uap n'est pas largement urbanisé, dès lors qu'hormis l'hôtel-restaurant qu'elle exploite, seuls quelques garages y sont implantés ; que les enjeux territoriaux dégagés par le projet d'aménagement et de développement durable reposent essentiellement sur la volonté de conserver la silhouette médiévale du village, dont la perception depuis un point de vue situé au sud serait altérée par la multiplication de constructions neuves ; qu'à cet effet, la décision de limiter dans le secteur Uap le droit de construire à l'entretien des constructions existantes, (...) sans changement de destination pour les bâtiments à usage de garage, et ou d'entrepôts dans ce secteur. n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de la SCI LA BERGERIE doit être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Aragon, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande la SCI LA BERGERIE au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCI LA BERGERIE une somme de 1 500 euros à payer à la commune d'Aragon au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 29 mai 2008 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SCI LA BERGERIE devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : La SCI LA BERGERIE versera à la commune d'Aragon une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI LA BERGERIE, à la commune d'Aragon et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.
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N° 08MA035082
RP