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11/05/2010 | FRANCE | N°07MA04783

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 11 mai 2010, 07MA04783


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, le 10 décembre 2007, sous le n° 07MA04783, présentée pour la société civile professionnelle (SCP) BONNET ET TEISSIER, représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis 6, rue de l'Espérance à Mende (48000), par la SCP d'avocats Delmas- Rigaud-Levy-Balzarini ;

La SCP BONNET ET TEISSIER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503369 du 20 septembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Nîmes, d'une part, l'a condamnée à verser à

la commune de Mende une indemnité de 44 850 euros en réparation des désordres su...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, le 10 décembre 2007, sous le n° 07MA04783, présentée pour la société civile professionnelle (SCP) BONNET ET TEISSIER, représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis 6, rue de l'Espérance à Mende (48000), par la SCP d'avocats Delmas- Rigaud-Levy-Balzarini ;

La SCP BONNET ET TEISSIER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503369 du 20 septembre 2007 par lequel le tribunal administratif de Nîmes, d'une part, l'a condamnée à verser à la commune de Mende une indemnité de 44 850 euros en réparation des désordres survenus sur le parquet flottant d'un bâtiment annexe de la mairie de Mende, outre une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, d'autre part, a mis à sa charge les frais de l'expertise judiciaire et a, enfin, condamné la société Corriges à la garantir à concurrence de 20 % de l'indemnité de 44 850 euros ainsi que du montant des frais d'expertise ;

2°) de rejeter toute action en responsabilité contractuelle dirigée à son encontre ;

3°) de condamner la société Corriges, M. A et la société Solonet à la relever et garantir de toutes les condamnations, en principal et intérêts et frais, à hauteur respectivement de 60 % pour la première et 10 % pour chacun des deux derniers ;

4°) de condamner la commune de Mende et, subsidiairement, la société Corriges, M. A et la société Solonet au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 avril 2010 :

- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur ;

- les conclusions de Mlle Josset, rapporteur public ;

- les observations de Me Vallet, avocat de SCP Coste-Berger-Pons-Daudé, pour AGF ;

Considérant, qu'en vue de la construction d'un bâtiment annexe à l'hôtel de ville, à usage de bureaux et de parking, la commune de Mende a confié à la SCP BONNET ET TEISSIER la maîtrise d'oeuvre des travaux en cause, par un acte d'engagement conclu le 15 juillet 1998 ; que, par un acte d'engagement conclu le 9 octobre 1998, la société Corriges a été chargée de l'exécution des travaux relatifs au lot n° 20 Revêtements de sols minces collés sur chape , pour une surface de 420 m² ; que la société A a été chargée de l'exécution du lot n° 3 cloisons amovibles aluminium et l'entretien des locaux a été confié à la société Solonet ; qu'à la suite d'un changement de matériau décidé en cours de construction, le revêtement du sol de type parquet flottant a été posé par la société Corriges en mai 2000 et la commune de Mende a pris possession de l'ouvrage le 9 juin 2000 ; que les travaux afférents au lot n° 20 ont fait l'objet d'une réception sans réserve, le 4 décembre 2000 ; que des désordres, consistant en un soulèvement et un tuilage des lames du parquet, étant apparus, la commune de Mende a recherché devant le Tribunal administratif de Montpellier la responsabilité des constructeurs, à titre principal, au titre de la garantie décennale et, à titre subsidiaire, sur le fondement de leur responsabilité contractuelle ainsi que la responsabilité contractuelle de la société Solonet ; que, par un jugement en date du 20 septembre 2007, le Tribunal administratif de Nîmes, auquel cette affaire avait été transférée, a, d'une part, condamné la SCP BONNET ET TEISSIER à verser à la commune de Mende, l'indemnité de 44 850 euros réclamée par cette collectivité en réparation des désordres en litige, a, d'autre part, mis à sa charge les frais de l'expertise judiciaire ordonnée par voie de référé par le président du Tribunal administratif de Montpellier, outre une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a, enfin, condamné la société Corriges à garantir la SCP BONNET ET TEISSIER, à hauteur de 20 %, de l'indemnité de 44 850 euros et des frais d'expertise ; que, la SCP BONNET ET TEISSIER relève appel de ce jugement ; que, par la voie d'un appel incident, la société Corriges demande à la Cour de réformer le jugement dont s'agit en ce qu'il l'a condamnée à garantir, à concurrence de 20 %, la SCP BONNET ET TEISSIER des condamnations prononcées à son encontre ; que, la Commune de Mende conclut, à titre principal, au rejet de l'appel principal et a présenté, à titre subsidiaire, des conclusions d'appel incident et provoqué ;

Sur l'intervention en appel de la Compagnie d'assurances AGF :

Considérant que le mémoire produit en appel par la Compagnie d'assurances AGF, laquelle n'a pas été mise en cause par la Cour de céans, doit être regardé comme un mémoire en intervention volontaire à l'instance d'appel ; que sont seules recevables à former une intervention, dans les recours, qui, comme en l'espèce, ressortissent au contentieux de pleine juridiction, les personnes qui se prévalent d'un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier ; que la Compagnie AGF, assureur de la société Corriges, ne se prévaut pas d'un droit de cette nature ; que, par suite, son intervention n'est pas recevable ;

Sur l'appel principal :

Considérant que, pour condamner la SCP BONNET ET TEISSIER à indemniser la commune de Mende du préjudice résultant des désordres affectant le bâtiment annexe à la mairie, le Tribunal administratif de Nîmes, après avoir rejeté les conclusions présentées, à titre principal, fondées sur la responsabilité décennale des constructeurs au motif que les vices en cause étaient apparents lors de la réception des travaux, a fait droit, en revanche, à ses conclusions présentées, à titre subsidiaire, en retenant la responsabilité contractuelle de la maîtrise d'oeuvre à raison du manquement à son obligation de conseil du maître de l'ouvrage lors de la réception des travaux ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise établi par la société SMACL, assureur de la commune de Mende, que les désordres en litige affectant le revêtement du sol du premier et du deuxième étage du bâtiment annexe, se sont déclarés peu après l'inauguration de cet ouvrage qui s'est déroulée le 9 juin 2000 ; que si ce document mentionne que les désordres n'ont pris toute leur ampleur qu'au cours de l'année de la garantie de parfait achèvement, il résulte des mentions figurant dans le rapport de l'expertise judiciaire que, le 12 décembre 2000, soit 8 jours seulement après la réception sans réserves des travaux du lot n° 20 intervenue le 4 décembre 2000, le maître d'oeuvre a transmis au maître de l'ouvrage une liste de réserves, laquelle mentionnait, s'agissant de la société Corriges Déposer le parquet existant et reposer sol neuf, aucune autre solution envisageable ; que les mentions en cause sont de nature à démontrer qu'à la date du 12 décembre 2000, les désordres étaient généralisés ; que ces faits sont corroborés par le courrier adressé, le 21 décembre 2000, par le maître d'oeuvre à la société Corriges, dans lequel sont évoquées les nombreuses malfaçons affectant le revêtement du sol des deux étages du bâtiment annexe ainsi que les déformations des lames du parquet ; que, compte tenu de l'ensemble de ces éléments, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'à la date de la réception, sans réserve, des travaux afférents au lot n° 20, les vices affectant le parquet étaient nécessairement apparents et que leur évolution était aisément prévisible ; que, par suite, la SCP BONNET ET TEISSIER n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a considéré que les désordres, apparents lors de la réception sans réserve des travaux, n'étaient pas susceptibles de ce fait d'engager la responsabilité décennale des constructeurs ;

Considérant, en deuxième lieu, que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve et qu'elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage ; que si elle interdit, par conséquent, au maître de l'ouvrage d'invoquer, après qu'elle a été prononcée, et sous réserve de la garantie de parfait achèvement, des désordres apparents causés à l'ouvrage ou des désordres causés aux tiers, dont il est alors réputé avoir renoncé à demander la réparation, elle ne met fin aux obligations contractuelles des constructeurs que dans cette seule mesure ; qu'ainsi la réception demeure, par elle-même, sans effet sur les droits et obligations financiers nés de l'exécution du marché, à raison notamment de retards ou de travaux supplémentaires, dont la détermination intervient définitivement lors de l'établissement du solde du décompte définitif ; que seule l'intervention du décompte général et définitif du marché a pour conséquence d'interdire au maître de l'ouvrage toute réclamation à cet égard ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites en appel par la commune de Mende à la demande de la Cour, que, comme le fait valoir la société appelante, le décompte général du marché dont était titulaire la SCP BONNET ET TEISSIER a été signé par le maître de l'ouvrage sans aucune réserve, en avril 2001, date à laquelle les désordres en litige étaient connus dans toute leur ampleur par le maître de l'ouvrage ; que, par suite, le décompte général du marché de maîtrise d'oeuvre conclu entre la commune de Mende et la SCP BONNET ET TEISSIER est devenu définitif, et ce, nonobstant l'existence d'un litige pendant devant le tribunal administratif ; que le caractère irrévocable de ce décompte faisait obstacle à ce que la commune de Mende recherche, sur le fondement contractuel, la responsabilité de la SCP BONNET ET TEISSIER ; que, contrairement à ce que soutient la commune de Mende, les stipulations de l'article 26 du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre, selon lesquelles la mission de la maîtrise d'oeuvre ne s'achevait qu'à l'expiration de la garantie de parfait achèvement, sont sans incidence sur le caractère irrévocable du décompte général et définitif ; que, dès lors, la SCP BONNET ET TEISSIER est fondée à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif l'a condamnée à verser à la commune de Mende, d'une part, une indemnité de 44 850 euros en réparation des désordres survenus sur le parquet flottant du bâtiment annexe de la mairie de Mende, d'autre part, a mis à sa charge les frais de l'expertise judiciaire, outre une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dès lors, le jugement attaqué, en tant qu'il prononce lesdites condamnations, doit être annulé ;

Sur l'appel incident de la société Corriges :

Considérant, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, que, c'est à tort que le Tribunal administratif a prononcé la condamnation de la SCP BONNET ET TEISSIER ; que, par voie de conséquence, le jugement attaqué doit également être annulé en tant qu'il a condamné la société Corriges à garantir la SCP BONNET ET TEISSIER, à concurrence de 20 %, les condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière société ;

Sur les appels incident et provoqués, présentées, à titre subsidiaire, par la commune de Mende :

Considérant, en premier lieu, que la commune de Mende recherche, sur le fondement de la garantie décennale, la responsabilité de la SCP BONNET ET TEISSIER, par la voie d'un appel incident, ainsi que la responsabilité sur le même fondement de la société Corriges et de l'entreprise A, par la voie d'appels provoqués ;

Considérant, qu'ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, les désordres affectant les ouvrages en cause étaient apparents lors de la réception sans réserve des travaux et ne sont pas ainsi susceptibles d'engager la responsabilité décennale des constructeurs ; que, par suite, l'appel incident et les appels provoqués, dirigés contre les constructeurs, doivent être rejetés ;

Considérant, en deuxième lieu, que la commune de Mende, par la voie d'un appel provoqué, recherche la responsabilité contractuelle de la société Solonet ;

Considérant que, s'il résulte de l'instruction que la société Solonet a procédé à des nettoyages à grande eau du parquet, il est constant que ladite entreprise n'est intervenue dans les locaux en cause que le 11 septembre 2000, alors que les désordres affectant le parquet se sont déclarés peu après l'inauguration du bâtiment intervenu le 9 juin 2000, soit plus de trois mois avant l'intervention de la société Solonet dans le bâtiment en cause ; que, d'ailleurs, ladite société n'avait reçu aucune information sur les conditions d'exécution des travaux de revêtement du sol et sur son corollaire tenant aux précautions particulières auxquelles étaient soumis le nettoyage et l'entretien du parquet ; que, dans ces conditions, la commune de Mende n'établit pas le comportement fautif de la société Solonet ; que, dès lors, son appel provoqué dirigé contre ladite société doit être rejeté ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de mettre les frais de l'expertise décidée par les premiers juges à la charge de la commune de Mende ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande présentée à ce titre par la Compagnie AGF, laquelle n'a pas la qualité de partie à l'instance au sens des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'enfin, dans les circonstances de l'espèce, il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties au litige la charge des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'intervention de la compagnie AGF n'est pas admise.

Article 2 : Le jugement n° 0503369 du 20 septembre 2007 du tribunal administratif de Nîmes est annulé.

Article 3 : Les conclusions d'appel incident et les appels provoqués de la commune de Mende sont rejetés.

Article 4 : Les conclusions présentées par la SCP BONNET ET TEISSIER, la commune de Mende, la société Corriges, la société Solonet et la Compagnie AGF sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Les frais de l'expertise judiciaire décidée par les premiers juges taxés à la somme de 2 972,78 euros sont mis à la charge de la commune de Mende.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SCP BONNET ET TEISSIER, à la commune de Mende, à la société Corriges, à la société Solonet, à la Compagnie AGF, à M. A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

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N° 07MA04783 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA04783
Date de la décision : 11/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: Melle JOSSET
Avocat(s) : SCP DELMAS RIGAUD LEVY BALZARINI SAGNES SERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-05-11;07ma04783 ?
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