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21/01/2010 | FRANCE | N°08MA02247

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 21 janvier 2010, 08MA02247


Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2008 au greffe de la Cour Administrative d'Appel de Marseille, sous le n° 08MA02247, présentée pour M. Mohamed A, demeurant chez M. Driss B ..., par Me Donati ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701459 du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse en date du 22 novembre 2007 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoind

re au préfet de la Haute-Corse de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 20 jour...

Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2008 au greffe de la Cour Administrative d'Appel de Marseille, sous le n° 08MA02247, présentée pour M. Mohamed A, demeurant chez M. Driss B ..., par Me Donati ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701459 du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse en date du 22 novembre 2007 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Corse de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 20 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le conseil du requérant déclarant renoncer à la part contributive de l'Etat en cas de condamnation ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la loi n°2006-911 du 24 juillet 2006 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2009 :

- le rapport de Mme Jorda-Lecroq, rapporteur,

- les conclusions de M. Dieu, rapporteur public ;

Considérant que M. Mohamed A, de nationalité algérienne, fait appel du jugement en date du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté son recours contre l'arrêté en date du 22 novembre 2007 du préfet de la Haute-Corse portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que M. A soutient que le jugement attaqué a été rendu en violation du principe d'impartialité des juridictions, dès lors qu'un assistant de justice lié à l'administration défenderesse serait intervenu dans l'élaboration du rapport et du projet du jugement attaqué, sans que les magistrats n'aient eu à connaître des pièces du dossier ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 227-1 du code de justice administrative, les assistants de justice recrutés par les juridictions administratives en application des dispositions de l'article L. 227-1 du même code apportent leur concours aux travaux préparatoires réalisés par les membres du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; que ces personnels sont, conformément aux dispositions de l'article R. 227-4 dudit code, nommés par le vice-président du Conseil d'Etat sur proposition du chef de la juridiction auprès de laquelle ils sont affectés, et perçoivent, en vertu de l'article R. 227-10 du même code, une indemnité de vacation fixée par un arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, du ministre du budget et du ministre chargé de la fonction publique, en date du 27 février 2003 ;

Considérant, d'une part, qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que l'assistant de justice affecté au Tribunal administratif de Bastia, à supposer qu'il soit intervenu dans la préparation du rapport et du projet du jugement attaqué, aurait outrepassé les missions qui peuvent être confiées aux assistants de justice en vertu des dispositions susmentionnées de l'article R. 227-1 du code de justice administrative ; qu'il n'est pas établi, compte tenu notamment des modalités de nomination et de rémunération des assistants de justice ci-dessus rappelées, que l'assistant de justice en fonction au Tribunal administratif de Bastia serait lié à l'administration défenderesse ; qu'il n'est pas davantage démontré que les membres de la formation de jugement se seraient abstenus de prendre en considération les pièces du dossier ; que, par suite, M. A n'établit pas que le jugement attaqué aurait été rendu en violation du principe d'impartialité des juridictions ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. A a demandé au Tribunal d'ordonner la production par le préfet de la Haute-Corse du dossier de sa demande de titre de séjour dont cette autorité administrative disposait ; que le Tribunal administratif, qui dirige seul l'instruction, n'était pas tenu de répondre auxdites conclusions dès lors que le dossier soumis aux premiers juges contenait tous les éléments d'informations nécessaires leur permettant de statuer en toute connaissance de cause sur le litige qui leur était soumis ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité en raison du défaut d'injonction au préfet de la Haute-Corse de produire son dossier ;

Considérant enfin que, contrairement à ce que soutient M. A, les premiers juges, qui ont retenu qu'il ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour juger que la commission prévue par l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'avait pas à être saisie, ont suffisamment motivé leur jugement et ne se sont pas substitués au préfet pour justifier a posteriori et par des motifs non fondés la décision contestée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que le jugement querellé serait entaché d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'examen de la décision contestée que le préfet de la Haute-Corse a rappelé les considérations de droit, tant au regard des dispositions internes que des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui en constituent le fondement, en particulier l'article 8 de ladite convention ; que la décision précise également les éléments concernant la situation personnelle de l'intéressé, relatifs, en particulier, à l'absence d'établissement de la date de son entrée en France et aux circonstances qu'il est âgé de 32 ans, célibataire et sans enfant et qu'il n'a pas d'attaches particulières en France ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail (...) ; que le requérant ne justifie pas avoir formulé de demande de carte de séjour temporaire portant la mention salarié antérieurement à l'arrêté en litige ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'alors qu'il ne justifiait ni d'un contrat de travail visé par l'autorité administrative, ni d'une autorisation de travail, il n'était, en tout état de cause, pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur le fondement desquelles le préfet n'était pas saisi et dans les prévisions desquelles il n'entrait pas ; que, par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. La Commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour exprime un avis sur les critères d'admission exceptionnelle au séjour mentionnés au premier alinéa. (...). L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ;

Considérant que M. A soutient qu'il réside sur le territoire national depuis plus de dix ans ; que, d'une part, si, antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006, le 3° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyait la délivrance de plein droit, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, de la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant, ces dispositions n'étaient plus en vigueur à la date de la décision attaquée ; que, d'autre part, il appartient à l'étranger qui entend se prévaloir du caractère habituel de son séjour en France depuis plus de dix ans d'apporter la preuve de ses allégations ; que le requérant se borne à produire diverses attestations émanant d'amis et de commerçants qui ne présentent pas un caractère probant, ainsi qu'une attestation émanant d'un médecin et des licences sportives, dont une seule, relative à la saison 2003-2004, est établie à son nom, qui présentent un caractère insuffisant ; qu'il ne peut dans ces conditions être regardé comme établissant l'ancienneté et le caractère habituel de son séjour sur le territoire national, lesquels ne sauraient être considérés comme étant démontrés du seul fait de l'absence de contestation expresse du préfet ; que, par ailleurs, la circonstance que M. A dispose d'une promesse d'embauche ne permet pas plus d'établir que son admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels ; que le requérant n'est, dès lors, fondé à soutenir ni que sa situation relève des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni que le préfet aurait dû saisir la commission mentionnée à l'article L. 312-1 de ce code ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que le requérant soutient qu'il réside depuis l'âge de dix-neuf ans sur le territoire national et y travaille ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, M. A, âgé de 32 ans, célibataire et sans enfant, n'établit ni, ainsi que cela a été dit précédemment, l'ancienneté et le caractère habituel de son séjour en France, ni l'existence et l'intensité de liens familiaux en France, ni enfin être isolé en Algérie ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues ; qu'eu égard à ce qui précède, la décision attaquée n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de M. A ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse en date du 22 novembre 2007 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation contenues dans la requête, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions du requérant aux fins d'injonction et d'astreinte doivent donc être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Me Donati la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mohamed A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie en sera transmise au préfet de la Haute-Corse.

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N° 08MA02247

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA02247
Date de la décision : 21/01/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. DIEU
Avocat(s) : DONATI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-01-21;08ma02247 ?
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