La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/01/2010 | FRANCE | N°08MA00393

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 07 janvier 2010, 08MA00393


Vu la requête enregistrée le 28 janvier 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA00393, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) A.N.T.S., représentée par son gérant en exercice, dont le siège social est sis 9 rue Pourtoules à Orange (84100), par Me Macary, avocat ;

La SARL A.N.T.S. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0528015 du 26 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recette émis à son encontre, le 14

septembre 2005, par le directeur du centre hospitalier d'Orange pour un montant d...

Vu la requête enregistrée le 28 janvier 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 08MA00393, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) A.N.T.S., représentée par son gérant en exercice, dont le siège social est sis 9 rue Pourtoules à Orange (84100), par Me Macary, avocat ;

La SARL A.N.T.S. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0528015 du 26 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nîmes a, d'une part, rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recette émis à son encontre, le 14 septembre 2005, par le directeur du centre hospitalier d'Orange pour un montant de 13 976,11 euros correspondant à l'indemnité d'occupation sans titre de locaux appartenant au domaine public de cet établissement et, d'autre part l'a condamnée à payer au centre hospitalier d'Orange une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler le titre de recette émis le 28 septembre 2005 ou de surseoir à statuer jusqu'à ce que la juridiction civile actuellement saisie ait définitivement statué sur l'applicabilité du décret du 30 septembre 1953 au bail conclu le 1er janvier 1996 ;

...........................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code du commerce ;

Vu le code du domaine de l'Etat ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 53-960 du 30 septembre 1953 réglant les rapports entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux à loyers d'immeubles ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 décembre 2009 :

- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur ;

- les conclusions de M. Dieu, rapporteur public ;

- les observations de Me Bourgois, avocat du centre hospitalier Louis Giorgi d'Orange ;

Considérant que, par un bail commercial conclu le 1er janvier 1996 pour une durée de neuf ans, en application du décret susvisé n° 53-960 du 30 septembre 1953, le centre hospitalier Louis Giorgi d'Orange a donné en location à la SARL A.N.T.S. des locaux à usage de boutique et de rangement, situés dans le hall d'entrée de l'hôpital, en vue de l'exploitation d'un commerce de distribution et ventes de boissons, de produits de restauration rapide et de presse et, d'autre part, de la location de téléviseurs pour les malades hospitalisés ; que, par un courrier du 6 janvier 2004, le directeur du centre hospitalier a informé la SARL A.N.T.S. que, conformément au bail ainsi conclu, il lui donnait congé au 31 décembre 2004 ; que, par une délibération du 9 décembre 2004, le conseil d'administration du centre hospitalier Louis Giorgi d'Orange a décidé de confier, à compter du 1er janvier 2005, les services assurés dans les locaux en cause à un délégataire de service public ; que, par un courrier en date du 29 novembre 2004, la SARL A.N.T.S. a sollicité le renouvellement de son bail, sur le fondement de l'article L. 145-10 du code du commerce ; que, par un courrier du 28 décembre 2004, le directeur du centre hospitalier a mis en demeure la SARL A.N.T.S. de libérer les locaux concernés au plus tard le 31 décembre 2004 ; que ladite société n'ayant pas obtempéré à cette injonction, le juge des référés du Tribunal administratif de Marseille, saisi à cette fin par le centre hospitalier, a enjoint à la SARL A.N.T.S. d'évacuer les locaux concernés, par une ordonnance du 18 juillet 2005 ; que, la SARL A.N.T.S. a quitté les lieux le 28 juillet 2005 ; que, le directeur du centre hospitalier a émis à l'encontre de ladite société, un état rendu exécutoire le 14 septembre 2005, en vue du recouvrement d'une somme de 13 976,11 euros pour l'occupation sans titre de son domaine public entre le 1er janvier et le 27 juillet 2005 ; que la SARL A.N.T.S. relève appel du jugement en date du 26 novembre 2007 du Tribunal administratif de Nîmes, en tant que par ledit jugement, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre rendu exécutoire le 14 septembre 2005 et l'ont condamnée au paiement au profit du centre hospitalier Louis Giorgi d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que le centre hospitalier Louis Giorgi d'Orange, doit être regardé comme sollicitant, par la voie d'un appel incident, la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a rejeté les conclusions reconventionnelles qu'il avait présentées devant le Tribunal administratif ;

Sur les conclusions aux fins de sursis à statuer présentées par la SARL A.N.T.S. :

Considérant que la SARL A.N.T.S. demande à la Cour de surseoir à statuer jusqu'à ce que la juridiction judiciaire, saisie par ses soins, se soit prononcée sur l'applicabilité au bail commercial conclu avec le centre hospitalier Louis Giorgi d'Orange des dispositions du décret n° 53-960 du 30 septembre 1953 réglant les rapports entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux à loyers d'immeubles ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des pièces produites en appel par le centre hospitalier Louis Giorgi que, par un arrêt en date du 29 juin 2009, la Cour d'appel de Nîmes a confirmé l'ordonnance par laquelle le juge de la mise en état du Tribunal de grande instance de Carpentras a retenu l'exception d'incompétence de l'ordre judiciaire pour connaître de la demande de la SARL A.N.T.S. tendant à ce que soit prononcée la nullité de la résiliation du bail en litige et à ce que le centre hospitalier Louis Giorgi soit condamné à lui verser une indemnité d'éviction ; que, par suite, les conclusions aux fins de sursis à statuer ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

Considérant qu'il résulte de l'examen du contrat conclu entre le centre hospitalier Louis Giorgi et la SARL A.N.T.S. que les locaux en cause n'étaient pas uniquement destinés à la mise à disposition des malades hospitalisés d'appareils de télévision mais avaient pour fonction d'offrir aux usagers de l'hôpital, notamment aux personnels, personnes extérieures et malades hospitalisés pouvant y accéder, des produits de restauration et de presse ; qu'en tant qu'ils avaient cet objet, les locaux en litige, situés dans le hall de l'hôpital, étaient affectés à l'usage du public et étaient spécialement aménagés à cet effet ; qu'ainsi les locaux concernés constituaient des dépendances du domaine public du centre hospitalier Louis Giorgi et le contrat en cause présentait le caractère d'un contrat portant occupation du domaine public ; qu'est sans effet sur cette qualification, la double circonstance que le contrat en litige ne comportait pas de clause exorbitante de droit commun et qu'il aurait, selon la société requérante, été conclu sous la forme d'un bail commercial régi par les dispositions du décret précité du 30 septembre 1953 ; qu'il suit de là que le présent litige relatif à un titre exécutoire, ayant pour objet d'assurer le recouvrement de sommes dues à raison de l'occupation sans titre d'une dépendance du domaine public, présentant ainsi le caractère d'une créance de nature administrative, ressortit à la compétence de la juridiction administrative ;

Sur l'appel principal :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir, réitérées en appel, opposées par le centre hospitalier Louis Giorgi à la demande de première instance :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le contrat par lequel la SARL A.N.T.S. a été autorisée à exercer ses activités sur les dépendances du domaine public, a été conclu, à compter du 1er janvier 1996, pour une durée de neuf ans sans clause de renouvellement et prenait fin à la date prévue, soit le 31 décembre 2004 ; qu'ainsi, à compter du 1er janvier 2005, la SARL A.N.T.S. se trouvait dans la situation d'un occupant sans titre du domaine public ainsi que l'a à juste titre estimé le Tribunal administratif qui n'a pas entaché son jugement d'une contradiction dans ses motifs ; que le contrat litigieux comportant occupation du domaine public, la société appelante, pour soutenir qu'elle occupait régulièrement les locaux en cause, ne peut utilement se prévaloir des dispositions du décret précité du 30 septembre 1953, et notamment des dispositions de l'article 6 dudit décret, désormais reprises à l'article L. 145-10 du code du commerce, et de la circonstance que le centre hospitalier n'aurait pas donné une suite régulière, au regard de ces dispositions, à sa demande de renouvellement de ce contrat formulée par son courrier du 29 novembre 2004 ; que, par suite, la SARL A.N.T.S., qui s'est maintenue dans les lieux au-delà de la date du 1er janvier 2005 et ne les a libérés que le 28 juillet suivant, était redevable, en sa qualité d'occupante sans titre du domaine public, d'une indemnité due à raison de cette occupation irrégulière ;

Considérant, en deuxième lieu, que le contrat comportant occupation du domaine public étant arrivé à son terme le 31 décembre 2004, la société appelante ne peut, pour contester le montant de l'indemnité d'occupation mise à sa charge, soutenir que ladite indemnité devait être établie sur la base du loyer fixé par ce contrat ; qu'elle n'établit pas, ni même n'allègue, que l'indemnité d'occupation, calculée par référence au loyer réclamé au délégataire chargé, à compter du 1er janvier 2005, de l'exploitation desdits locaux, présenterait un caractère excessif ; qu'en tout état de cause, conformément au principe fixé par les dispositions de l'article L. 28 du code du domaine de l'Etat, alors en vigueur, et applicable au domaine public de l'ensemble des collectivités et établissements publics, le centre hospitalier Louis Giorgi était en droit de lui réclamer, en sa qualité d'occupante sans titre du domaine public, une indemnité d'occupation correspondant aux redevances dont cet établissement public a été frustré du fait de cette occupation irrégulière ;

Considérant, enfin, qu'en se bornant à faire valoir qu'il n'y avait pas matière à appliquer, au profit du centre hospitalier Louis Giorgi , les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la société appelante, qui avait la qualité de partie perdante dans ladite instance, n'établit pas que le Tribunal administratif aurait fait une inexacte application de ces dispositions en la condamnant au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés, en première instance, par le centre hospitalier et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL A.N.T.S. n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre rendu exécutoire le 14 septembre 2005 et l'a condamnée à payer une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur l'appel incident :

Considérant que les collectivités et établissement publics sont recevables à demander au juge de prononcer la condamnation d'un occupant sans titre du domaine public au paiement des indemnités dues à raison de cette occupation irrégulière alors même que ces collectivités et établissements publics auraient eu le pouvoir d'émettre un titre exécutoire à l'effet de fixer le montant des sommes dues ; que, toutefois, dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, un établissement public a décidé d'émettre un titre exécutoire pour assurer le recouvrement des indemnités d'occupation du domaine public qui lui sont dues et que le juge administratif, saisi de conclusions aux fins d'annulation du titre exécutoire, a confirmé la légalité du titre en question, il appartient à cet établissement public de poursuivre jusqu'à son terme la procédure de recouvrement d'office qu'il a choisie de mettre en oeuvre ; qu'en revanche, il ne peut, dans le même temps, demander au juge de condamner l'occupant sans titre au paiement de la somme correspondant au titre exécutoire ;

Considérant que, si le centre hospitalier Louis Giorgi demande à la Cour de condamner la SARL A.N.T.S. au paiement d'une somme en principal de 13 976,11 euros, ladite somme correspond au montant du titre exécutoire contesté ; que le présent arrêt rejetant comme non fondées les conclusions aux fins d'annulation du titre en question, il appartient au centre hospitalier de prendre les mesures nécessaires pour assurer l'exécution matérielle de cette procédure de recouvrement d'office ; que, par suite, les conclusions aux fins de condamnation présentées, à ce titre, doivent être rejetées ;

Considérant, en revanche, que le centre hospitalier est recevable à demander devant la Cour de céans que la créance en principal soit assortie des intérêts au taux légal et à ce que ces intérêts soient capitalisés ; que la date de notification du titre exécutoire par lequel le montant en principal a été réclamé à la SARL A.N.T.S. ne ressortant pas des pièces du dossier, le centre hospitalier Louis Giorgi a droit aux intérêts au taux légal portant sur la créance en principal de 13 976,11 euros, non pas à compter de la date d'émission du titre exécutoire comme il le réclame, mais à compter du 10 février 2006, date d'enregistrement devant le Tribunal administratif du mémoire par lequel cet établissement a présenté ses conclusions reconventionnelles, lequel constitue la première sommation de payer ; que le centre hospitalier a demandé, pour la première fois devant la Cour, la capitalisation des intérêts, par son mémoire, enregistré le 11 octobre 2009 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, par suite, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à cette date et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ; qu'il y a lieu de réformer le jugement attaqué, dans cette mesure ; qu'en revanche, le centre hospitalier n'est, en tout état de cause, pas fondé à demander que les intérêts soient capitalisés à la date du 14 septembre 2006, date à laquelle il n'était pas dû une année d'intérêts ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la SARL A.N.T.S. à payer au centre hospitalier Louis Giorgi d'Orange une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL A.N.T.S. est rejetée.

Article 2 : La somme de 13 976,11 euros, correspondant à l'indemnité d'occupation due par la SARL A.N.T.S., portera intérêt au taux légal à compter du 10 février 2006. Les intérêts échus le 11 octobre 2009 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 3 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nîmes du 26 novembre 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire avec l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : La SARL A.N.T.S. versera au centre hospitalier Louis Giorgi d'Orange une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Article 5 : Le surplus des conclusions incidentes du centre hospitalier Louis Giorgi d'Orange est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL A.N.T.S., au centre hospitalier Louis Giorgi d'Orange et à la ministre de la santé et des sports.

''

''

''

''

N° 08MA00393 2

kp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA00393
Date de la décision : 07/01/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. DIEU
Avocat(s) : MACARY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-01-07;08ma00393 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award