Vu la requête, enregistrée par télécopie le 26 juillet 2007et régularisée le 27 juillet 2007, présentée pour Mme Marie Noëlle A, élisant domicile ..., par la SELARL d'avocats Masquelier Garcia ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0202986 rendu le 1er juin 2007 par le tribunal administratif de Nice en tant qu'il a limité à 2 000 euros la somme qu'il a condamné l'Etat à lui payer en réparation du préjudice ayant résulté pour elle du comportement de l'administration à la suite de l'agression avec prise d'otage dont elle a été victime dans l'exercice de ses fonctions au tribunal de grande instance de Nanterre le 22 juillet 1997 alors que le préjudice peut être évalué à la somme de 152 449 euros ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 152 449 euros ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-116 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'état ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;
Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2009 :
- le rapport de Mme Fedi, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Brossier, rapporteur public ;
Considérant que, par jugement en date du 1er juin 2007, le tribunal administratif de Nice a annulé la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de la justice sur la demande présentée par Mme A le 2 août 1999 tendant à la réparation du préjudice résultant du comportement de l'administration à la suite de l'agression dont elle a été victime le 22 juillet 1997 et a condamné l'Etat à payer à Mme A une somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts ; que Mme A interjette appel de ce jugement en tant qu'il a insuffisamment évalué son préjudice ; que le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande à la Cour d'annuler le jugement en tant qu'il a annulé la décision implicite sus-mentionnée et a condamné l'Etat à payer à Mme A une somme de 2 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 22 juillet 1997, Mme A, alors greffière au tribunal de grande instance de Nanterre, a été victime de violences de la part d'un détenu qui comparaissait devant le juge d'instruction ; que, par jugement du 3 septembre 1997, ce détenu a été condamné à une peine de huit mois d'emprisonnement pour ces faits puis, par jugement de ce même tribunal du 23 juin 1999, confirmé par un arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 18 octobre 1999, condamné à réparer le préjudice subi par Mme A ;
Considérant qu'aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 : Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. ; qu'aux termes du troisième alinéa de cet article : La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. ;
Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que le 12 février 1998, le garde des sceaux, ministre de la justice a accordé la protection juridique à l'intéressée ; qu'en outre, l'Etat a pris en charge ses frais d'avocats ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard aux fonctions exercées par l'appelante, et dès lors qu'elle était présente sur son lieu de travail dès le 23 juillet 1998 et a pu se faire représenter par un avocat lors de la comparution immédiate de son agresseur deux jours après les faits, l'Etat n'a pas méconnu les obligations qui s'imposaient à lui en application de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 en ne faisant pas spontanément représenter et assister l'appelante au cours de ladite audience ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mme A n'établit pas que le temps mis par l'Etat pour régler les frais d'expertise liés aux procédures juridictionnelles dirigées contre son agresseur en aurait retardé le terme et lui aurait ainsi causé un préjudice ;
Considérant, en troisième lieu, que l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 n'impose pas à l'autorité administrative d'apporter un soutien psychologique aux agents victimes d'une agression dans l'exercice de leurs fonctions ; qu'au demeurant, le président du tribunal de grande instance de Nanterre et le greffier en chef de cette juridiction ont reçu Mme A après son agression ; que, dans ces conditions, l'Etat n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ; qu'enfin, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir répondu à la lettre que lui a adressée Mme A le 14 mai 1998 dans laquelle elle lui faisait part de la détresse psychologique dans laquelle elle se trouvait ;
Considérant, enfin, que dans un premier temps, l'Etat a illégalement déterminé la pension d'invalidité dont devait bénéficier Mme A du fait de l'agression dont elle a été victime le 22 juillet 1997 sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 10 % alors qu'elle aurait dû l'être sur celle de 13 % ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Paris le 11 mai 2000 ; qu'en outre, il n'est pas contesté qu'en 2001, le montant de la pension de l'appelante a été irrégulièrement réduit de 756,80 francs à 584,61 francs jusqu'à ce qu'un arrêté du 8 juillet 2002 la rétablisse dans ses droits ; que, dès lors, et même si Mme A a récupéré les sommes perdues, ces illégalités constituent des fautes de nature à lui ouvrir droit à réparation ; que le tribunal administratif de Nice n'a fait une appréciation ni excessive, ni exagérée des troubles dans les conditions d'existence qui en ont résulté pour Mme A en fixant à 2 000 euros l'indemnité à laquelle elle pouvait prétendre ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de la justice n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé sa décision implicite de rejet de la demande préalable d'indemnité présentée par Mme A ; qu'en outre, ni Mme A, ni le ministre de la justice ne sont fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont fixé à 2 000 euros le montant de l'indemnité due à l'appelante ; qu'enfin, doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de Mme A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : L'appel incident du garde des sceaux, ministre de la justice est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Marie Noëlle A et au garde des sceaux, ministre de la justice.
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N° 07MA03676 2