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28/07/2009 | FRANCE | N°07MA00002

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 28 juillet 2009, 07MA00002


Vu la requête, enregistrée le 2 janvier 2007, présentée pour Mlle Camille X, demeurant ..., par Me Tsangari ;

Mlle X demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0300825 en date du 10 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 166 160 euros en réparation du préjudice lié aux troubles neurologiques dont elle est atteinte et qu'elle estime imputables à la vaccination contre l'hépatite B qu'elle a reçue ;

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Vu le jugement attaqué ;

Vu le mé...

Vu la requête, enregistrée le 2 janvier 2007, présentée pour Mlle Camille X, demeurant ..., par Me Tsangari ;

Mlle X demande à la Cour d'annuler le jugement n° 0300825 en date du 10 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 166 160 euros en réparation du préjudice lié aux troubles neurologiques dont elle est atteinte et qu'elle estime imputables à la vaccination contre l'hépatite B qu'elle a reçue ;

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Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 février 2007, présenté par la caisse primaire d'assurance maladie du Var, qui déclare ne pas intervenir dans l'affaire ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2007, présenté par le ministre de la santé et des solidarités, qui conclut au rejet de la requête ;

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Vu le mémoire, enregistré le 16 mars 2007, présenté pour Mlle X ;

Mlle X demande à la Cour :

1°) de prononcer une expertise ;

2°) de condamner l'Etat à lui allouer à titre de provision la somme de 182 200 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le mémoire, enregistré le 15 octobre 2008, présenté pour Mlle X, aux fins de communication de pièces ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2009 :

- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

- et les observations de Me Tsangari, pour Mlle X ;

Considérant que Mlle X, en sa qualité d'étudiante en médecine soumise à une obligation de vaccination, a reçu trois injections de vaccin contre l'hépatite B le 17 septembre, le 18 octobre et le 20 novembre 1991 suivies d'un rappel le 30 novembre 1992 ; qu'imputant à cette vaccination la sclérose en plaques dont elle est atteinte, elle a demandé au Tribunal administratif de Nice de l'indemniser des troubles dont elle est victime sur le fondement des dispositions de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique instituant un régime de responsabilité sans faute de l'Etat du fait des vaccinations obligatoires ; que Mlle X relève appel du jugement du 10 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur la recevabilité de l'appel de Mlle X :

Considérant que, même sommairement motivée, la requête d'appel de Mlle X comporte des conclusions par lesquelles elle déclare relever appel du jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 10 novembre 2006 et des moyens par lesquels elle soutient que le tribunal a refusé à tort de l'indemniser sur le fondement de la responsabilité sans faute de l'Etat dès lors que la proximité chronologique existant entre la vaccination et les troubles dont elle est victime prouverait l'existence d'un lien de causalité entre ces deux événements et qu'elle ne présentait aucun antécédent familial ; qu'en outre, en relevant appel du jugement, Mlle X doit être regardée comme reprenant ses conclusions de première instance tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 166 160 euros ; que, par suite, le ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative n'est pas fondé à soutenir que la requête de Mlle X serait irrecevable ;

Sur le principe de la responsabilité de l'Etat :

Considérant qu'aux termes de l'article L.3111-4 du code de la santé publique : Une personne qui, dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention ou de soins, exerce une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination doit être immunisée contre l'hépatite B (...) Tout élève ou étudiant d'un établissement préparant à l'exercice des professions médicales et des autres professions de santé dont la liste est déterminée par arrêté du ministre chargé de la santé, qui est soumis à l'obligation d'effectuer une part de ses études dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention ou de soins, doit être immunisé contre les maladies mentionnées à l'alinéa premier du présent article (...) ; et qu'aux termes de l'article L.3111-9 du même code dans sa rédaction applicable à la date de la décision rejetant la demande d'indemnisation de la requérante : Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation d'un dommage imputable directement à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est supportée par l'Etat (...) ;

Considérant que la responsabilité de l'Etat peut être engagée en raison des conséquences dommageables d'injections vaccinales contre l'hépatite B réalisées dans le cadre d'une activité professionnelle ou assimilée eu égard, d'une part, au bref délai ayant séparé l'injection de l'apparition du premier symptôme cliniquement constaté d'une pathologie ultérieurement diagnostiquée et, d'autre part, à la bonne santé de la personne concernée et à l'absence, chez elle, de tous antécédents à cette pathologie antérieurement à sa vaccination ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des conclusions du rapport d'expertise établi le 2 mai 2001 pour l'information de la commission de règlement amiable des accidents vaccinaux que les premiers symptômes, prenant la forme de paresthésies avec douleurs intercostales, pouvant être interprétés comme une première manifestation de la sclérose en plaques dont est atteinte Mlle X ont été cliniquement constatés en décembre 1992, alors que la dernière des injections auxquelles l'intéressée impute les troubles dont elle est atteinte a été effectuée le 30 novembre précédent ; que le même rapport d'expertise relève que Mlle X ne présentait aucun antécédent personnel ou familial d'affection neurologique ; que, dans ces conditions, le lien de causalité entre la vaccination de la requérante et la sclérose en plaques dont elle est atteinte doit être regardé comme établi eu égard au bref délai séparant la vaccination de la constatation des symptômes et à l'absence d'antécédents de la victime ;

Considérant qu'il s'ensuit que Mlle X est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Nice a jugé que la responsabilité de l'Etat n'était pas engagée sur le fondement de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique ;

Sur la demande d'expertise :

Considérant que l'état du dossier ne permet pas à la Cour de se prononcer sur les droits à réparation de Mlle X ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'ordonner une expertise, aux fins mentionnées dans le dispositif du présent arrêt ;

Sur la demande de provision :

Considérant qu'en l'état du dossier, il y a lieu d'accorder à la requérante une provision de 50 000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 10 novembre 2006 est annulé.

Article 2 : L'Etat (ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative) est déclaré responsable des préjudices subis par Mlle X à la suite de sa vaccination contre l'hépatite B.

Article 3 : L'Etat (ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative) versera à Mlle X la somme de 50 000 euros à titre de provision.

Article 4 : Il sera procédé à une expertise contradictoire en présence de Mlle X, du ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative et de la caisse primaire d'assurance maladie du Var.

L'expert aura pour mission :

- en premier lieu, de prendre connaissance de l'ensemble des dossiers médicaux de Mlle X et notamment du rapport d'expertise établi le 2 mai 2001 pour l'information de la commission de règlement amiable des accidents vaccinaux ainsi que des résultats des autres examens médicaux disponibles ;

- en deuxième lieu, de décrire l'état de santé de Mlle X ;

- en troisième lieu, de préciser si l'état de santé de Mlle X peut être considéré comme consolidé et dans l'affirmative d'en fixer la date ;

- en quatrième lieu, de rechercher et de quantifier tous les éléments de préjudice susceptibles de découler de la pathologie dont Mlle X est victime (dépenses de santé laissées à sa charge, frais liés au handicap laissés à sa charge, perte de revenus, incidence professionnelle du dommage corporel, autres dépenses lies au dommage corporel, préjudices personnels tels que les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément et les divers troubles dans les conditions d'existence) ;

- en cinquième lieu, de dire si Mlle X peut poursuivre une activité professionnelle, et dans quelles conditions, et de dire si son état de santé nécessite l'assistance d'une tierce personne.

Article 5 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R.621-2 à R.621-14 du code de justice administrative. L'expert déposera son rapport au greffe de la cour en quatre exemplaires dans le délai de trois mois à compter de la date de notification du présent arrêt.

Article 6 : Tous droits, moyens et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 7 : Les frais d'expertise sont mis provisoirement à la charge de l'Etat (ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative).

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Camille X, au ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative et à la caisse primaire d'assurance maladie du Var.

Copie en sera adressée à Me Tsangari et au préfet du Var.

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N° 07MA0002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA00002
Date de la décision : 28/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : TSANGARI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-07-28;07ma00002 ?
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