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30/06/2009 | FRANCE | N°06MA03256

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 30 juin 2009, 06MA03256


Vu le recours, enregistré le 23 novembre 2006, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler et réformer le jugement n° 0201543 0201544 du 13 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nice a déchargé la société X International de la retenue à la source et des pénalités afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996 et 1997 ;

2°) de rétablir la société X International au rôle de la retenue à la source au titr

e des années 1995, 1996 et 1997 à raison de l'intégralité des cotisations supplémentair...

Vu le recours, enregistré le 23 novembre 2006, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler et réformer le jugement n° 0201543 0201544 du 13 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Nice a déchargé la société X International de la retenue à la source et des pénalités afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996 et 1997 ;

2°) de rétablir la société X International au rôle de la retenue à la source au titre des années 1995, 1996 et 1997 à raison de l'intégralité des cotisations supplémentaires et des pénalités y afférentes ;

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative et l'arrêté d'expérimentation du vice-président du Conseil d'Etat en date du 27 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2009,

- le rapport de M. Malardier, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Emmanuelli , rapporteur public ;

Considérant que la société X International a obtenu, le 30 juin 1987, le statut fiscal de quartier général pour trois sociétés sises en Allemagne, en Grande-Bretagne et en France ; que la société ayant fait l'objet d'une vérification de comptabilité sur la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997, le service, après avoir considéré comme des charges non déductibles certaines dépenses exposées pendant les trois exercices en cause, les a, d'une part, réintégrées dans le bénéfice imposable et a soumis, à ce titre, la société à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et, d'autre part, lui a réclamé, sur le fondement des dispositions de l'article 119 bis-2 du code général des impôts, le paiement d'une retenue à la source due sur les revenus considérés comme distribués au profit du dirigeant de l'entreprise et de son épouse domiciliés hors de France ; que le Tribunal administratif de Nice, par un jugement en date du 13 juillet 2006, a accordé une décharge totale de l'impôt sur les sociétés et de la retenue à la source ; que le ministre fait appel de ce jugement mais seulement en tant qu'il a prononcé la décharge de la retenue à la source ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que si le ministre soutient que le tribunal aurait omis de statuer sur sa demande de maintien des impositions supplémentaires mises à la charge de la société au titre de la retenue à la source sur les revenus qualifiés de distribués, il ressort de l'instruction qu'il n'a pas exposé une telle demande dans son seul mémoire en défense enregistré le 13 novembre 2002 devant le tribunal administratif ; qu'en tout état de cause, le tribunal, après avoir rappelé l'article 39-1 du code général des impôts relatif à la déductibilité des charges, a jugé que les dépenses en cause dans le présent litige ne pouvaient pas être regardées comme n'ayant pas été engagées dans l'intérêt de la société requérante ; qu'il en résultait necessairement que lesdites sommes ne pouvaient dès lors être regardées comme des revenus distribués à M. Frank X, associé-gérant de la société X International et à son épouse, et soumis, à ce titre, à la retenue à la source ; qu'à supposer même que le tribunal ait sommairement motivé son jugement sur ce point, le ministre n'est toutefois pas fondé à soutenir qu'il se serait abstenu de statuer sur le maintien de la retenue à la source, ni à demander, pour ce motif, l'annulation dudit jugement ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 108 du code général des impôts : Les dispositions des articles 109 à 117 fixent les règles suivant lesquelles sont déterminés les revenus distribués par : 1° Les personnes morales passibles de l'impôt prévu au chapitre II du présent titre ; ; qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts: Sont notamment considérés comme revenus distribués : c. Les rémunérations et avantages occultes ; qu'aux termes de l'article 119 bis 2 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : Sous réserve des dispositions de l'article 239 bis B, les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. Un décret fixe les modalités et conditions d'application de cette disposition ; que si sont réputés distribués, les bénéfices compris dans les bases de l'impôt sur les sociétés, les dispositions précitées de l'article 111 c permettent de comprendre valablement lesdits bénéfices dans le revenu des personnes auxquelles ils ont été octroyés alors même qu'il n'en aurait pas été tenu compte dans le bénéfice imposable de la société qui les a consentis ;

Considérant, en premier lieu, que la convention du 30 juin 1987 conclue entre l'administration et la société X International, stipule explicitement que ladite société est passible de l'impôt sur les sociétés, quand bien même cet impôt serait calculé dans des conditions dérogatoires ; que la circonstance que l'administration ne tienne pas compte des sommes distribuées, pour le calcul de l'impôt sur les sociétés ou, comme dans le cas de l'espèce, ait appliqué des modalités dérogatoires de calcul de l'impôt sur les sociétés, ne constitue pas un obstacle à ce que lesdites sommes soient comprises dans l'assiette de l'impôt sur le revenu des personnes auxquelles elles ont été octroyées ; que la société X International n'est dès lors pas fondée à soutenir que les articles 109 à 117 du code général des impôts et, notamment, les articles 111 c et 119 bis 2 ne s'appliqueraient pas au litige ;

Considérant, en second lieu, que le mécanisme de la retenue à la source prévu par les dispositions de l'article 119 bis 2 du code général des impôts précité constitue un mode de paiement, par la personne morale passible de l'impôt sur les sociétés, de l'impôt sur le revenu dû par les bénéficiaires de revenus distribués par ladite personne morale ; que l'agrément en date du 30 juin 1987 accorde à la société X International un statut dit de quartier général , dérogatoire, dont les dispositions doivent être appliquées strictement ; que si cet accord précise les conditions spécifiques d'imposition à l'impôt sur les sociétés, il prévoit expressément que la société restera redevable des autres impôts et taxes ; que la société X International n'est pas fondée à soutenir qu'elle ne serait pas redevable de la retenue à la source, si les conditions d'application de cette imposition sont remplies ; que la décharge par le Tribunal administratif de Montpellier des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés réclamées à la société X International est par elle-même sans effet sur le bien-fondé de la retenue à la source, sous réserve, par ailleurs, que les revenus en cause aient été à juste titre qualifiés de revenus distribués ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société requérante dont M. Franck X est le gérant, dont le siège est à Mouans-Sartoux, a pris en charge diverses dépenses personnelles de M. et Mme X ; qu'au titre de l'année 1996, la société a acquitté le montant de la location d'un appartement situé à Londres, occupé pour moitié par M. et Mme X ; que le montant de l'avantage consenti aux époux X s'élève, à ce titre, à 161 891 F ; qu'au titre des années 1995, 1996 et 1997, elle a également comptabilisé en charges de la société les frais de déplacement de Mme X et des dépenses personnelles de M. et Mme X pour des montants respectifs de 198 273 F, 208 751 F et 221 451 F ; que la société qui dispose de deux véhicules de fonction a également comptabilisé en charges les dépenses d'un véhicule de marque Ferrari pour des montants de 232 969F, 293 799 F et 292 259 F ; que ces dépenses exposées au titre de chaque exercice vérifié ne peuvent, du fait de leur nature, être regardées comme exposées dans l'intérêt de la société X International ; que celle-ci ne conteste pas l'affirmation de l'administration selon laquelle ces dépenses n'ont pas été comptabilisées par elle, sous une forme explicite, comme il est prescrit à l'article 54 bis du code général des impôts au titre de chacun des exercices vérifiés ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration les a regardées comme des rémunérations et avantages à caractère occulte et, à ce titre, comme imposables en tant que revenus de capitaux mobiliers visés à l'article 111 c, passibles de la retenue à la source ; que l'administration, en rappelant les faits précités qui ne sont pas utilement contestés par la société X International, doit être regardée comme justifiant que ces charges n'ont pas été exposées dans l'intérêt de la société X International et constituent des revenus distribués à M. et Mme X au sens de l'article 111 c du code général des impôts ;

Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré de ce que l'article 111 e du code général des impôts ait été reconnu illégal par le Conseil d'Etat est sans effet sur le litige dès lors que l'imposition contestée n'est pas fondée sur cet article ;

En ce qui concerne la doctrine fiscale :

Considérant que l'agrément en date du 30 juin 1987, s'il engage l'administration en ce qui concerne la détermination de l'assiette de l'impôt sur les sociétés dû par la société X International, ne comporte aucun engagement relatif au paiement de l'impôt sur le revenu par le mécanisme de la retenue à la source, qui en est indépendant ainsi que cela a été rappelé ci-dessus ; que la société X International n'est donc pas fondée à soutenir que l'administration aurait méconnu, sur ce point, ses engagements ainsi que les dispositions des articles L.80 A et L.80 B du code général des impôts ;

Considérant que l'instruction administrative 13-G-1-97 du 30 janvier 1997 invoquée par la société X International prévoit explicitement en son article 89 que le quartier général est redevable des autres impôts et taxes dans les conditions de droit commun (... retenue à la source prévue par les articles 115 quinquies et 119 bis 2 du code général des impôts ...) ; que la circonstance que dans son article 38, cette instruction ait relevé qu'une sous-facturation de ses prestations, par le quartier général, révèlerait l'existence d'un revenu distribué, n'a pas pour objet de limiter l'existence d'une distribution au seul cas de sous-facturation envisagé par cet article ; que la société X International n'est donc pas fondée à soutenir que l'administration aurait, sur ce point, méconnu sa propre doctrine ainsi que les dispositions des articles L.80 A et L.80 B du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que le tribunal administratif a entaché son jugement d'erreur de droit en accordant à la société X International la décharge de la retenue à la source mise en recouvrement au titre de chacune des années vérifiées ; qu'il est fondé à demander, pour ce motif, la réformation dudit jugement en date du 13 juillet 2006 ainsi que le rétablissement de la société X International au rôle de cette imposition ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société X International la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 13 juillet 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 2 : La société X International est rétablie au rôle de l'imposition retenue à la source au titre des années 1995,1996 et 1997 à raison de l'intégralité des cotisations supplémentaires et des pénalités relatives aux revenus distribués à M. X et à son épouse.

Article 3 : Les conclusions de la société X International tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à la société X International.

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N° 06MA03256 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA03256
Date de la décision : 30/06/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: M. Dominique MALARDIER
Rapporteur public ?: M. EMMANUELLI
Avocat(s) : TRIPET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-06-30;06ma03256 ?
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