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09/04/2009 | FRANCE | N°07MA04231

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 09 avril 2009, 07MA04231


Vu la requête transmise par télécopie, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 26 octobre 2007 sous le n° 07MA04231 présentée par Me Donati, avocat pour M. Chafik X, demeurant chez ...);

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700733 du 27 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 13 juin 2007 par lequel le préfet de la Haute-Corse a refusé de lui délivrer un titre de séjour et assorti sa décision d'une obligation de quitter le t

erritoire français et à ce que le tribunal enjoigne au préfet de lui délivrer ...

Vu la requête transmise par télécopie, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 26 octobre 2007 sous le n° 07MA04231 présentée par Me Donati, avocat pour M. Chafik X, demeurant chez ...);

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700733 du 27 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 13 juin 2007 par lequel le préfet de la Haute-Corse a refusé de lui délivrer un titre de séjour et assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et à ce que le tribunal enjoigne au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

2°) d'annuler l'arrêté susmentionné du préfet de la Haute-Corse du 13 juin 2007 ;

3°) d'enjoindre à l'Etat de lui délivrer une carte de séjour temporaire sous astreinte de 300 euros par jour de retard après un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté attaqué a été signé par le secrétaire général de la préfecture qui ne justifie d'aucune délégation de signature régulièrement publiée ; que cette décision méconnaît les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 car aucune procédure contradictoire n'a été diligentée malgré l'expiration du délai réglementaire d'instruction de quatre mois ; que l'arrêté attaqué est entaché d'illégalité dès lors qu'il n'est pas une décision confirmative de sa demande initiale, laquelle a été rejetée par une décision implicite de rejet, car les circonstances de droit et de fait ont été modifiées et que le Tribunal ne pouvait rejeter ce moyen en considérant que cet arrêté devait être regardé comme statuant sur une demande ; que la décision d'obligation de quitter le territoire français ne comporte aucune motivation, ni en fait ni en droit alors qu'une telle motivation est obligatoire ; que la motivation du refus de titre de séjour faisant référence aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est purement stéréotypée et par suite illégale ; qu'aucune disposition n'autorise le préfet à prendre de sa propre initiative un arrêté portant obligation de quitter le territoire français ; que le préfet ne pouvait pas non plus retirer la décision implicite de rejet précédente, qui ne concernait qu'un refus de titre de séjour ; que l'arrêté attaqué méconnaît le principe d'égalité dès lors qu'il se trouve dans une situation plus défavorable que s'il n'avait présenté aucune demande de titre de séjour ; qu'il remplit les conditions posées par l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car tous ses liens familiaux sont en France et que toute sa famille habite ensemble ; qu'il ne peut lui être reproché d'être à la charge de ses parents dès lors qu'il ne peut pas travailler en l'absence de titre de séjour ;

Vu l'exemplaire original de la requête susvisée, enregistré le 29 octobre 2007 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 janvier 2008 , présenté par le préfet de la Haute-Corse ; le préfet de la Haute-Corse conclut au rejet de la requête ;

.......................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d 'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2009 ;

- le rapport de Mme Chenal Peter, rapporteur ;

- les conclusions de M. Dieu, rapporteur public ;

Considérant que, par jugement en date du 27 septembre 2007, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de M. X , de nationalité marocaine, tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juin 2007 par lequel le préfet de la Haute-Corse a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti ladite décision d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. X relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de l'arrêté en date du 13 juin 2007 en tant qu'il porte refus de délivrance d'un titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 4 septembre 2006, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du mois de septembre 2006, le préfet de la Haute-Corse a donné à M. Jean-Marc Magda, secrétaire général de la préfecture, délégation à l'effet de signer, tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents à l'exception des réquisitions de la force armée et des arrêtés de conflit ; que ces dispositions lui donnaient par suite compétence pour signer les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; que, dès lors, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait été signée par une autorité incompétente ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'il ressort de l'examen de la décision portant refus de délivrer à M. X un titre de séjour, que le préfet a rappelé les considérations de droit, tant au regard des dispositions internes que des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui en constitue le fondement ; que l'arrêté mentionne également les éléments concernant sa vie familiale pour considérer qu'il ne peut pas bénéficier des dispositions de l'article L 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté ou de son caractère stéréotypé doit être rejeté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. L'autorité administrative n'est pas tenue de satisfaire les demandes d'audition abusives, notamment pas leur nombre, leur caractère répétitif ou systématique ;

Considérant que l'intervention d'une décision implicite de rejet à l'issue du délai de quatre mois, sur la demande de titre de séjour que le requérant a déposée le 1er avril 2005 avait seulement pour effet de lui permettre de lier le contentieux ; qu'elle n'a cependant pas eu pour effet de dessaisir l'administration qui restait compétente pour statuer sur la demande de l'intéressé et prendre la décision explicite de rejet en date du 13 juin 2007, qui confirme implicitement la première décision implicite, laquelle n'était pas créatrice de droits ; qu'ainsi, les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé ;

Considérant , en quatrième lieu, que, contrairement à ce que soutient le requérant, celui-ci ne se trouve pas dans une situation plus défavorable après avoir déposé une demande de titre de séjour que s'il n'en avait pas déposé dès lors que l'irrégularité du séjour en France d'un ressortissant étranger peut être constatée par l'administration au regard de la réglementation en vigueur , alors même que celui-ci n'a pas présenté de demande de titre de séjour ; que par suite, M. X n'est pas fondé à soutenir que le principe d'égalité de traitement aurait été méconnu par l'autorité préfectorale ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code précité : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est entré irrégulièrement en France en septembre 2002, alors qu'il était âgé de 21 ans ; que s'il fait valoir que son père réside sur le territoire national depuis 1981, lequel a été rejoint par sa mère en 2001 dans le cadre d'une procédure de regroupement familial et que son unique frère réside également en France, il n'est pas contesté que son frère est en situation irrégulière ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions du séjour en France de M. X, lequel est célibataire et sans enfant et a vécu, dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 21 ans, le préfet n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et dès lors, n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L.313-11-7° du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile précitées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juin 2007 en tant qu'il refuse de lui délivrer un titre de séjour ;

Sur la légalité de l'arrêté en date du 13 juin 2007 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa./.../ L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration... ; qu'en vertu de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée relative à la motivation des actes administratifs , les décisions individuelles défavorables doivent comporter l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ;

Considérant qu'en se bornant à viser le seul code de l'entrée et du séjour des étrangers, sans viser les dispositions de l'article L 511-1 qui fondent la mesure d'éloignement, le préfet de la Haute-Corse a insuffisamment motivé, en droit, la dite décision ; que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que cet arrêté était suffisamment motivé, et par suite, à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Bastia , en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juin 2007 en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français , et dudit arrêté en tant qu'il a cet objet ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que décision n'implique pas que le préfet de la Haute-Corse délivre à M. X un titre de séjour; que par suite, les conclusions à fin d'injonction de M. X doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1 : L'article 2 de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse en date du 13 juin 2007 qui porte obligation, pour M. X de quitter le territoire français, est annulé.

Article 2 : Le jugement n° 0700733 en date du 27 septembre 2007 du Tribunal administratif de Bastia est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3: L'Etat versera à M. X la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4: Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Chafik X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire .

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Corse.

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N°07MA04231 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA04231
Date de la décision : 09/04/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Anne-Laure CHENAL-PETER
Rapporteur public ?: M. DIEU
Avocat(s) : DONATI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2009-04-09;07ma04231 ?
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