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02/10/2008 | FRANCE | N°07MA02242

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 02 octobre 2008, 07MA02242


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 juin 2007 sous le n° 07MA02242, présentée par la SELARL d'avocats Mayne-Penafiel pour la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, dont le siège social est situé rue de la Brosse à Châteauneuf sur Loire ( 45110 ) ;

La société BAUDIN CHATEAUNEUF demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0701217 du 5 juin 2007 par laquelle le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la désignation d'un expert afin de déterminer les circonstances et les conséquences de l'accid

ent survenu le 20 mars 2007 au cours de travaux de réparation du pont de franch...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 19 juin 2007 sous le n° 07MA02242, présentée par la SELARL d'avocats Mayne-Penafiel pour la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, dont le siège social est situé rue de la Brosse à Châteauneuf sur Loire ( 45110 ) ;

La société BAUDIN CHATEAUNEUF demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0701217 du 5 juin 2007 par laquelle le Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la désignation d'un expert afin de déterminer les circonstances et les conséquences de l'accident survenu le 20 mars 2007 au cours de travaux de réparation du pont de franchissement du canal de Donzère-Montdragon, en exécution d'un marché de travaux qu'elle avait conclu avec le département de Vaucluse ;

2°) de désigner un expert spécialisé en matière de mécanique et de structures métalliques, aux fins de :

- se rendre sur les lieux de l'accident intervenu le 20 mars 2007,

- se faire communiquer toutes pièces, documents, plannings ou dossiers contractuels du marché public et du chantier considérés ;

- décrire les travaux, objet du marché public concerné, exécutés et ceux en cours d'exécution ainsi que les règles de l'art applicables ;

- décrire, au besoin au travers d'auditions de témoins ou de consultations de pièces, les circonstances de l'accident du 20 mars 2007 ;

- établir l'origine et les causes de l'accident du 20 mars 2007, indiquer les responsabilités des parties sur sa survenance ;

- décrire le fonctionnement de la nacelle considérée, sa destination, son historique de construction, ses caractéristiques techniques, ses contraintes d'utilisation, ses règles d'utilisation normale ;

- décrire les travaux qui auraient été éventuellement effectués sur la nacelle ;

- évaluer le montant des dommages causés, des préjudices subis du fait de la mise à disposition d'équipements qui se seraient révélés défectueux ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de voirie routière ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2008 :

- le rapport de Mme Chenal Peter, rapporteur ;

- les observations de Me Koubi-Flotte de la SELARL Mayne-Penafiel, avocat, pour la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, de Me Pittalis de la SELARL Racine, avocat, pour le département de Vaucluse et de Me Balique, avocat, pour la Compagnie nationale du Rhône ;

- les conclusions de M. Dieu, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un acte d'engagement du 10 janvier 2007, la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF s'est vue confier par le département de Vaucluse l'exécution d'un marché public de travaux ayant pour objet la réparation d'un ouvrage de franchissement du canal de Donzère-Montdragon, servant de support à la route départementale n° 44; que le 20 mars 2007, pendant l'exécution des travaux, alors que trois agents de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF étaient dans la nacelle de maintenance de cet ouvrage, celle-ci se détache et tombe dans le canal, causant la mort d'un des salariés de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, ce qui a entraîné la suspension de l'exécution du marché ; que par une ordonnance du 5 juin 2007, le juge des référés du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF tendant à la désignation d'un expert afin de déterminer les circonstances de cet accident ; que la SOCETE BAUDIN CHATEAUNEUF relève appel de cette ordonnance ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : «Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction...» ;

Considérant que l'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés du tribunal administratif d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative précité doit être appréciée, au regard des actions contentieuses engagées, ou susceptibles de l'être, par des recours recevables ;

Considérant, en premier lieu, que la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF justifie du caractère utile de sa demande d'expertise par le litige contractuel auquel pourrait donner lieu l'interruption de l'exécution du marché public qu'elle avait conclu avec le département de Vaucluse pendant plusieurs mois ; qu'elle a en particulier été contrainte de prendre à sa charge le remplacement de la nacelle endommagée afin de permettre la reprise des travaux ; que dès lors, la mesure d'expertise demandée par la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF entre dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article R. 532-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'en second lieu, si le département de Vaucluse fait état de l'ouverture d'une information judiciaire à la demande du parquet du tribunal de grande instance de Carpentras, le 20 avril 2007, pour homicide involontaire, au cours de laquelle devrait être diligentée une expertise judiciaire , cette seule circonstance n'est pas de nature à rendre inutile l'institution de l' expertise sollicitée par la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF devant le juge administratif, dès lors qu'en l'état du dossier soumis au juge d'appel, plus d'un an après les faits, elle ne possède toujours aucun élément permettant de déterminer les conséquences financières de l'accident sur les conditions d'exécution du marché suspendu ; qu'en tout état de cause, cette enquête pénale, comme l'enquête qui a pu être diligentée par les services de l'inspection du travail, n'ont pas le même objet que l'expertise sollicitée ; qu'ainsi, cette mesure d'expertise présente un caractère utile pour déterminer les conséquences financières de l'accident sur l'exécution du marché ; que par suite, la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF est fondée à soutenir que c'est à tort que, par son ordonnance du 5 juin 2007, le juge des référés du Tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu d'annuler cette ordonnance et de faire droit à la demande d'expertise, sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, en tant qu'elle devra apporter tous les éléments utiles à la détermination des causes des seuls surcoûts du marché public en cause ; que les opérations d'expertise auront lieu en présence de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF et du département de Vaucluse ; qu'alors même qu'il existe un doute sur le propriétaire du pont de franchissement du canal, il y a lieu d'étendre les opérations d'expertise à la Compagnie nationale du Rhône, cette dernière ayant fait réaliser une inspection détaillée du pont en octobre 2003, en se présentant comme maître d'ouvrage ; qu'en outre, l'expertise devra également être réalisée en présence de l'Etat, dès lors que les centres d'études techniques de l'équipement de Méditerranée et de Bordeaux, ont assuré une mission de maîtrise d'oeuvre des travaux de réparation du pont au cours de laquelle la nacelle s'est détachée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par le département de Vaucluse et la Compagnie nationale du Rhône doivent dès lors être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 0701217 du 5 juin 2007 du juge des référés du Tribunal administratif de Nîmes est annulée.

Article 2 : Il sera procédé, par un expert désigné par le président de la Cour, conformément aux dispositions de l'article R. 621-2 du code de justice administrative, à une expertise contradictoire en présence de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, du département de Vaucluse, de la Compagnie nationale du Rhône et de l'Etat, représenté par les centres d'études techniques de l'équipement de Méditerranée et de Bordeaux.

L'expert aura pour mission de :

- 1°) convoquer les parties ;

- 2°) se rendre sur place et visiter les lieux ;

- 3°) se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission ;

- 4°) examiner les retards et les difficultés rencontrées lors de l'exécution du marché de travaux du 10 janvier 2007 conclu pour la réparation de l'ouvrage de franchissement du canal de Donzère-Montdragon, à la suite de l'accident du 20 mars 2007 et de donner tous éléments utiles de nature à permettre au juge de déterminer les responsabilités des parties sur sa survenance ;

- 5°) décrire le fonctionnement de la nacelle considérée, ses contraintes d'utilisation, ses règles d'utilisation normale et les travaux qui auraient été éventuellement effectués sur ladite nacelle ;

- 6°) fournir tous éléments techniques et de fait justifiant son avis sur l'imputabilité de la charge financière résultant des difficultés rencontrées et susceptibles ainsi de permettre à la juridiction compétente ultérieurement saisie de déterminer les responsabilités encourues et évaluer le montant des préjudices subis, notamment en donnant son avis sur tous les surcoûts, retards et autres préjudices subis par les cocontractants ;

Article 3 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-1 à R. 621-14 du code de justice administrative.

Article 4 : L'expert déposera son rapport en six exemplaires dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5: Les frais et honoraires dus à l'expert seront taxés ultérieurement par ordonnance du président de la Cour administrative d'appel de Marseille, qui désignera la ou les parties qui en assumeront la charge, conformément à l'article R. 621-13 du code susvisé.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 7: Les conclusions du département de Vaucluse et de la Compagnie nationale du Rhône tendant à la condamnation de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, au département de Vaucluse, à la Compagnie nationale du Rhône et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Copie sera transmise aux centres d'études techniques de l'équipement de Méditerranée et de Bordeaux.

N° 07MA02242 2

ss


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA02242
Date de la décision : 02/10/2008
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: Mme Anne-Laure CHENAL-PETER
Rapporteur public ?: M. DIEU
Avocat(s) : SELARL MAYNE PENAFIEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-10-02;07ma02242 ?
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