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16/06/2008 | FRANCE | N°07MA00592

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 16 juin 2008, 07MA00592


Vu la requête, enregistrée le 21 février 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n°07MA00592, présentée par Me Grimaldi, avocat pour la SARL LOU MARSEILLOU, dont le siège est 1 boulevard Garibaldi, angle 70 la Canebière à Marseille (13001) ; La SARL LOU MARSEILLOU demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0300010 du 21 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la constatation de l'illégalité des arrêtés municipaux des 17 janvier et 14 juin 2002, et à l'annulation de l'arrêté du

25 octobre 2002 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé la fe...

Vu la requête, enregistrée le 21 février 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n°07MA00592, présentée par Me Grimaldi, avocat pour la SARL LOU MARSEILLOU, dont le siège est 1 boulevard Garibaldi, angle 70 la Canebière à Marseille (13001) ; La SARL LOU MARSEILLOU demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0300010 du 21 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la constatation de l'illégalité des arrêtés municipaux des 17 janvier et 14 juin 2002, et à l'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2002 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé la fermeture, pour une durée de 15 jours, du débit de boissons qu'elle exploite sous l'enseigne « le Splendid » ;

2°) de constater l'illégalité des arrêtés susmentionnés des 17 janvier et 14 juin 2002 ;

3°) d'annuler l'arrêté susmentionné du 25 octobre 2002 ;

4°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mai 2008 :

- le rapport de Mme Pena, conseiller ;

- les observations de Me Piton substituant Me Grimaldi, avocat de la SARL LOU MARSEILLOU ;

- les observations de Me Gonand substituant Me Laridan, avocat du préfet des Bouches-du-Rhône ;

- et les conclusions de Mme Paix, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant que la SARL LOU MARSEILLOU relève appel du jugement du 21 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la constatation de l'illégalité des arrêtés municipaux des 17 janvier et 14 juin 2002, et à l'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2002 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a prononcé la fermeture, pour une durée de 15 jours, du débit de boissons qu'elle exploite sous l'enseigne « le Splendid » ;

Sur la légalité externe de l'arrêté préfectoral du 25 octobre 2002 :

Considérant que le moyen soulevé par la SARL LOU MARSEILLOU devant les premiers juges tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du municipal du 14 juin 2002 dont elle excipait de l'illégalité à l'encontre de l'arrêté du 25 octobre 2002 attaqué, est, au regard de ce dernier arrêté, un moyen de légalité interne ; que dès lors, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 25 octobre 2002, de son insuffisance de motivation, des vices de procédures et de non-respect du principe du contradictoire dont il serait entaché, sont fondés sur une cause juridique distincte de celle des moyens de légalité interne qui constituaient le seul soutien de la demande de première instance ; que ces moyens, nouveaux en appel, doivent dès lors être écartés comme irrecevables ;

Sur la légalité interne de l'arrêté préfectoral du 25 octobre 2002 :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de l'arrêté municipal du 17 janvier 2002 :

Considérant qu'ainsi que l'a justement relevé le Tribunal administratif de Marseille, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué du 25 octobre 2002 se réfère uniquement à l'arrêté municipal du 14 juin 2002 qui en constitue le fondement ; que dès lors, la SARL LOU MARSEILLOU ne saurait exciper de l'illégalité de l'arrêté du 17 janvier 2002, au demeurant annulé par une décision devenue définitive du même tribunal en date 22 avril 2002 ;

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de l'arrêté municipal du 14 juin 2002 :

Considérant que par un arrêté du 14 juin 2002, le maire de Marseille a interdit les activités de vente à emporter et de restauration rapide exercées par les établissements implantés dans un secteur défini dans une annexe, de 23 heures à 6 heures du matin pendant une période d'essai de six mois, en raison des troubles graves à l'ordre public constatés la nuit dans l'hyper centre de Marseille et du lien direct entre ces troubles et la présence sur la voie publique de la clientèle de ces établissements ;

Considérant que par un arrêté du 27 mars 2001, régulièrement publié au registre des arrêtés de la ville de Marseille, M. Allegrini, adjoint au maire, a reçu délégation concernant notamment la police administrative ; que, par suite, le moyen soulevé pour la première fois en appel, tiré de l'incompétence du signataire dudit arrêté doit être écarté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales : La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : ... 2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les attroupements, les bruits, y compris les bruits de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique ... ; qu'il résulte de ces dispositions que si le maire d'une commune peut, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, imposer des horaires de fermeture à des établissements précisément identifiés dont l'activité est à l'origine de troubles de la tranquillité publique, c'est à la condition, d'une part, que la réalité des troubles auxquels il entend ainsi mettre fin soit établie, et, d'autre part, qu'il soit justifié de ce que la prévention et la répression des nuisances constatées n'auraient pu être assurées par le recours à d'autres mesures de police d'effet équivalent mais moins contraignantes ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du chef de la division centre de la police nationale, qu'il existe une forte délinquance dans le secteur du centre de la ville de Marseille pendant la nuit ; que l'ouverture des établissements de vente à emporter, aux heures concernées par l'interdiction prescrite par l'arrêté querellé, engendre des rassemblements de population dans cette zone sensible qui sont de nature à favoriser des comportements constitutifs de troubles à l'ordre public ; que ces circonstances peuvent légalement justifier l'usage des pouvoirs de police que tient le maire des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales ; que la mesure prescrite par l'arrêté dont il est excipé de l'illégalité, qui ne porte que sur une tranche horaire déterminée, dans une zone circonscrite et pour une période d'expérimentation de six mois, ne présente pas le caractère d'une interdiction générale et absolue, dès lors que le lien entre les troubles constatés et l'ouverture nocturne des établissements en question est établi par l'enquête de police produite au dossier qui a notamment débouché sur la constatation d'une baisse du nombre des interpellations de 3,4 % dans ledit quartier et pendant la tranche horaire en cause, et qu'il n'est pas par ailleurs démontré que la prévention et la répression des nuisances constatées auraient pu être assurées par le recours à d'autres mesures de police moins contraignantes ; que dans ces conditions, l'arrêté du 14 juin 2002 n'a pas porté une atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie disproportionnée au but en vue duquel cette mesure a été édictée ; qu'il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, que la SARL LOU MARSEILLOU n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de l'arrêté du 14 juin 2002 ;

En ce qui concerne l'erreur manifeste d'appréciation et la méconnaissance du principe de la liberté du commerce et de l'industrie :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à trois reprises, les 4, 5 et 6 septembre 2002, des procès-verbaux pour infraction aux dispositions de l'arrêté municipal du 14 juin 2002 prescrivant la fermeture des établissements de vente à emporter situés dans l'hyper centre de la ville entre 23 heures et 6 heures du matin, ont été établis par des agents de police judiciaire à l'encontre de l'établissement « le Splendid » situé sur la Canebière, alors même que le propriétaire dudit établissement avait admis avoir connaissance de la réglementation municipale dont s'agit ; que dès lors, la mesure de fermeture contestée, qui ne porte que sur une période de quinze jours, n'apparaît pas disproportionnée au regard notamment du caractère récidiviste desdites infractions ; qu'elle ne présente pas davantage et pour les mêmes raisons, le caractère d'une interdiction générale et absolue ; que dès lors, en prenant pour ce motif susmentionné l'arrêté attaqué, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a ni commis d'erreur manifeste d'appréciation, ni porté une atteinte illégale à la liberté du commerce et de l'industrie ;

En ce qui concerne la méconnaissance du principe d'égalité :

Considérant qu'ainsi que l'ont exactement relevé les premiers juges, la circonstance alléguée selon laquelle certains établissements situés dans le périmètre de l'interdiction de vente à emporter et de restauration rapide de 23 heures et 6 heures du matin prescrite par l'arrêté municipal du 14 juin 2002 se seraient également affranchis de cette dernière, ne saurait être utilement invoquée pour contester l'arrêté du 25 octobre 2002 ;

Considérant enfin, que si la SARL LOU MARSEILLOU fait en outre état d'un préjudice financier considérable du fait de la fermeture que l'arrêté contesté lui a imposé, elle n'en apporte toutefois aucun justificatif ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL LOU MARSEILLOU n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : «Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme de 1 500 euros que la SARL LOU MARSEILLOU demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de condamner la SARL LOU MARSEILLOU à payer à la commune de Marseille une somme de 1 600 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL LOU MARSEILLOU est rejetée.

Article 2 : La SARL LOU MARSEILLOU versera à la commune de Marseille une somme de 1 600 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL LOU MARSEILLOU, au ministre l'intérieur, de l'outre-mer, et des collectivités territoriales et à la commune de Marseille.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

N° 07MA00592 5

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA00592
Date de la décision : 16/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: Mme Eleonore PENA
Rapporteur public ?: Mme PAIX
Avocat(s) : SCP BRAUNSTEIN - CHOLLET - MAGNAN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-06-16;07ma00592 ?
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