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09/06/2008 | FRANCE | N°07MA04766

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 09 juin 2008, 07MA04766


Vu 1°) la requête enregistrée le 13 décembre 2007 sous le n° 07MA04766 présentée par le PREFET DES ALPES MARITIMES, qui demande à la Cour d'annuler le jugement du 30 novembre 2007 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Nice, en ce qu'il lui a enjoint de délivrer à M. Suphi Mulazim X, de nationalité turque, un récépissé de demande d'asile ;

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Vu 2°) la requête enregistrée le 13 décembre 2007 sous le n° 07MA04810 présentée par le PREFET DES ALPES MARITIMES, qui demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 30 nov

embre 2007 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Nice, en ce qu'il lui a e...

Vu 1°) la requête enregistrée le 13 décembre 2007 sous le n° 07MA04766 présentée par le PREFET DES ALPES MARITIMES, qui demande à la Cour d'annuler le jugement du 30 novembre 2007 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Nice, en ce qu'il lui a enjoint de délivrer à M. Suphi Mulazim X, de nationalité turque, un récépissé de demande d'asile ;

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Vu 2°) la requête enregistrée le 13 décembre 2007 sous le n° 07MA04810 présentée par le PREFET DES ALPES MARITIMES, qui demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 30 novembre 2007 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Nice, en ce qu'il lui a enjoint de délivrer à M. Suphi Mulazim X, de nationalité turque, un récépissé de demande d'asile ;

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Vu 3°) la télécopie reçue le 30 décembre 2007 et la requête enregistrée le 2 janvier 2008 sous le n° 07MA004893, présentée pour M. Suphi Mulazim , demeurant chez M. Y, ..., par Me Andaloussi, avocat ;

M. Suphi Mulazim demande à la Cour d'annuler le jugement du 30 novembre 2007 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Nice, en ce qu'il a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2007 prononçant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays de destination, et d'assortir l'injonction prononcée par le Tribunal d'une astreinte de 200 euros par jour de retard ;

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Vu, reçu par télécopie le 9 mai 2008, le mémoire en défense présenté pour le PREFET DES ALPES MARITIMES, qui conclut au rejet de la requête de M. et à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il prononce une injonction ;

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Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2008 :

- le rapport de M. Guerrive, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Buccafurri., commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur la décision de reconduite à la frontière :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête de M. :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile II. : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants :1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité » ; qu'en application de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Lorsqu'un étranger a demandé à bénéficier de l'asile, l'autorité compétente est tenue de l'admettre provisoirement au séjour jusqu'à la décision de l'OFPRA sauf si sa situation est l'une de celles définis par les 1° à 4° de cet article » ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code, « L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office » ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que lorsqu'un étranger vient d'entrer, irrégulièrement, sur le territoire national, et qu'il fait état de circonstances qui pourraient être invoquées à l'appui d'une demande d'asile, il ne peut légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement avant d'avoir été mis à même de compléter une demande écrite en ce sens ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. , de nationalité turque, est entré irrégulièrement sur le territoire français ; qu'il a été interpellé en gare de Nice, où il était arrivé d'Italie la veille au soir, le 26 novembre 2007 au matin ; qu'un arrêté de reconduite à la frontière a été signé et lui a été notifié le même jour ; qu'il a mentionné, dès son interpellation, ainsi que cela ressort du procès verbal de son audition du 26 novembre, qu'il était revenu en France où résident plusieurs membres de sa famille, malgré le rejet d'une précédente demande d'asile, alors qu'il était recherché en Turquie ; qu'il ne ressort pas de ce procès verbal ni d'aucune autre pièce du dossier qu'il aurait alors été mis à même de présenter une nouvelle demande d'asile, ce qu'il a d'ailleurs fait le 30 novembre 2007, peu avant l'audience du Tribunal administratif au terme de laquelle a été rendu le jugement attaqué ;

Considérant que le PREFET DES ALPES MARITIMES soutient que la situation de M. était celle visée au 4° de l'article L. 741-4, dans lequel « La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente » ; qu'il en déduit que cela l'autorisait à prendre légalement la mesure d'éloignement contestée, dont l'exécution se trouvait seulement suspendue du fait de la présentation ultérieure d'une demande d'asile ; que, toutefois, ce n'est qu'à l'examen d'une demande d'asile, que l'intéressé a eu la possibilité d'argumenter et éventuellement d'assortir de justifications, que le préfet peut utilement apprécier si cette demande relève de la procédure prioritaire applicable dans les cas définis à l'article L. 741-4 et si l'intéressé doit se voir délivrer une autorisation provisoire de séjour ; qu'ainsi, dans le cas où ce dernier n'a pas été mis à même de compléter un dossier de demande d'asile, une telle circonstance ne peut être utilement invoquée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES ALPES MARITIMES ne pouvait légalement, dans de telles circonstances, prononcer la reconduite à la frontière de M. dès son interpellation ; que M. est, par suite, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué du Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du PREFET DES ALPES MARITIMES ordonnant sa reconduite à la frontière ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler ledit jugement ainsi que l'arrêté du PREFET DES ALPES MARITIMES ;

Sur l'injonction et la demande d'astreinte :

Considérant que qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ;

Considérant que M. demande qu'il soit enjoint au PREFET DES ALPES MARITIMES de lui délivrer un récépissé de demande d'asile valant autorisation provisoire de séjour pour la durée de l'instruction de sa demande ;

Considérant qu'il est constant qu'aucun récépissé ne lui a été délivré, et que l'injonction prononcée en première instance en ce sens n'a pas été exécutée ; que cette demande doit être examinée en fonction de la situation de l'intéressé à la date du présent arrêt ; qu'il résulte des pièces du dossier que la demande d'asile présentée le 30 septembre 2007 par M. a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 12 décembre 2007, notifiée à l'intéressé le 18 décembre suivant ; que l'annulation, par le présent arrêt, de la décision d'éloignement de M. n'implique donc plus, en tout état de cause, la mesure d'exécution sollicitée ; que la demande d'injonction doit en conséquence être rejetée ;

Sur les conclusions du Préfet des Alpes Maritimes tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué en tant qu'il lui adresse une injonction :

Considérant que, par voie de conséquence de l'annulation du jugement attaqué, ces conclusions sont devenues sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 30 novembre 2007 du magistrat délégué du Tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 26 novembre 2007 du PREFET DES ALPES MARITIMES prononçant la reconduite à la frontière de M. Suphi Mulazim est annulé.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Suphi Mulazim est rejeté.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête du PREFET DES ALPES MARITIMES tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 30 novembre 2007 en ce qu'il lui a enjoint de délivrer à M. Suphi Mulazim un récépissé de demande d'asile.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Suphi Mulazim et au ministre de l'immigration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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N° 07MA04766, 07MA04810 et 07MA04893


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07MA04766
Date de la décision : 09/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Jean-Louis GUERRIVE
Rapporteur public ?: Mme BUCCAFURRI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-06-09;07ma04766 ?
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