La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/06/2008 | FRANCE | N°06MA01807

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 09 juin 2008, 06MA01807


Vu la requête, enregistrée le 23 juin 2006, présentée pour Mlle Céline X, demeurant ..., par la SCP Auda et associés ;

Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0306979 du 2 mai 2006 du Tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a condamné l'Etat à lui verser des indemnités en réparation du préjudice subi à la suite de l'accident dont elle a été victime le 27 décembre 2001, qu'elle estime insuffisantes ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 33 000 euros au titre de ses préjudice corporel et matériel, ainsi que

les intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2003 ;

3°) de condamner l'Etat à lui ver...

Vu la requête, enregistrée le 23 juin 2006, présentée pour Mlle Céline X, demeurant ..., par la SCP Auda et associés ;

Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0306979 du 2 mai 2006 du Tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a condamné l'Etat à lui verser des indemnités en réparation du préjudice subi à la suite de l'accident dont elle a été victime le 27 décembre 2001, qu'elle estime insuffisantes ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 33 000 euros au titre de ses préjudice corporel et matériel, ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2003 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 septembre 2006, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence, par la SCP Bayetti-Laï qui demande à la Cour :

1°) de déclarer l'Etat entièrement responsable des causes et des conséquences de l'accident dont a été victime Mlle X le 27 décembre 2001 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4.895,50 euros en remboursement des prestations versées à son assurée et la somme de 910 euros au titre de l'indemnité forfaitaire ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 450 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'aux entiers dépens ;

.............

Vu la mise en demeure adressée le 9 janvier 2008 au ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 mai 2008, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, qui conclut au rejet de la requête de Mlle X et au rejet des conclusions présentées pour la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence ;

.............

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu l'arrêté du 7 décembre 2007 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2008 :

- le rapport de Mme Carotenuto,

- et les conclusions de Mme Buccafurri, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mlle Céline X, alors âgée de 21 ans, a été victime d'un accident de la circulation le 27 décembre 2001 à 19 heures 20, alors qu'elle roulait sur le CD 900 en direction de la Condamine ; que Mlle X a été surprise par un gros carton qui volait sur la chaussée et a perdu le contrôle de son véhicule ; que le Tribunal administratif de Marseille, par un jugement du 2 mai 2006 a déclaré l'Etat responsable dudit accident à hauteur d'un quart et l'a condamné à verser à Mlle X la somme de 2.148,50 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence la somme de 2.723,88 euros ; que Mlle X fait appel de ce jugement en tant qu'il a insuffisamment évalué le montant des préjudices qu'elle a subis ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence demande à la Cour de déclarer l'Etat entièrement responsable de l'accident dont s'agit et de le condamner à lui verser la somme de 4.895,50 euros en remboursement des prestations versées à son assurée et la somme de 910 euros au titre de l'indemnité forfaitaire ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des procès-verbaux de la gendarmerie nationale sur lesquels s'appuie la requérante, que le carton incriminé était disposé sur la façade du bâtiment de la direction départementale de l'équipement lors du mouvement de grève du mois de décembre et qu'il en a été arraché par le vent violent pendant une nuit dans les quelques jours précédant l'accident, avant le 21 décembre ; que, selon les déclarations de l'ingénieur de cette direction, les personnels de l'administration ont retrouvé un certain nombre de morceaux de carton, à l'exception de celui en litige qui a été transporté par le vent à une certaine distance et est réapparu sur la voie publique au moment de l'accident sous l'effet, à nouveau, du vent ; que, dans ces conditions, l'Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que, par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que les dommages litigieux auraient été causés par une faute d'inattention de Mlle X ou par un défaut de maîtrise du véhicule par l'intéressée ; que cependant, les conséquences dommageables de l'accident ont été aggravées par le fait que la victime n'avait pas attaché sa ceinture de sécurité, méconnaissant ainsi une obligation qui s'imposait à elle ; que, toutefois, en laissant à la charge de l'intéressée les trois quart de l'ensemble des conséquences dommageables de l'accident, les premiers juges n'ont pas fait une exacte appréciation des circonstances de l'affaire ; qu'il y a lieu de ramener cette part à un tiers ;

Sur les droits à réparation de Mlle X et le recours subrogatoire de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence :

En ce qui concerne le préjudice à caractère matériel :

Considérant que Mlle X justifie d'un préjudice matériel, à la suite de la mise hors d'état de son véhicule, estimé par l'expert de sa compagnie d'assurance à la somme de 2.594 euros ; que compte tenu du partage de responsabilité précédemment opéré, une somme de 1.729,33 euros doit être mise à la charge de l'Etat ; que Mlle X ne fait état d'aucun préjudice de cette nature ;

En ce qui concerne le préjudice corporel :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale applicable aux accidents du travail : « Si la responsabilité du tiers auteur de l'accident est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément. (...) » ; que les dispositions de l'article 31 de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, relatif à l'exercice des recours des tiers payeurs contre les personnes tenues à la réparation d'un dommage telles qu'elles ont été modifiées par le IV de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006, relative au financement de la sécurité sociale pour 2007 s'appliquent aux recours exercés par les caisses de sécurité sociale dans une action engagée par la victime d'un accident du travail sur le fondement de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale ; que selon ces dispositions qui s'appliquent aux événements ayant occasionné des dommages survenus antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la loi du 21 décembre 2006, dès lors que le montant de l'indemnité due à la victime n'a pas été définitivement fixée et, par suite, à la présente affaire : « Les recours subrogatoires des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel./ Conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée. / Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice » ;

Considérant qu'en application de ces dispositions le juge, saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et d'un recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices patrimoniaux et personnels, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime ; qu'il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste de préjudice en tenant compte, s'il a été décidé, du partage de responsabilité avec la victime ; que le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale ;

Considérant qu'en l'absence de dispositions réglementaires définissant les postes de préjudice, il y a lieu, pour mettre en oeuvre la méthode sus-décrite, de distinguer, parmi les préjudices de nature patrimoniale, les dépenses de santé, les frais liés au handicap, les pertes de revenus, l'incidence professionnelle et scolaire et les autres dépenses liées à ce dommage ; que parmi les préjudices personnels, sur lesquels l'organisme de sécurité sociale ne peut exercer son recours que s'il établit avoir effectivement et préalablement versé à la victime une prestation réparant de manière incontestable un tel préjudice, il y a lieu de distinguer, pour la victime directe, les souffrances physiques et morales, le préjudice esthétique et les troubles dans les conditions d'existence, envisagés indépendamment de leurs conséquences pécuniaires ;

Sur le préjudice patrimonial :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute-Provence justifie avoir pris en charge les dépenses de santé résultant de l'état de Mlle X pour un montant de 4.895,50 euros ; que compte tenu du partage de responsabilité précédemment opéré, une somme de 3.263,67 euros doit être mise à la charge de l'Etat ;

Sur le préjudice à caractère personnel de Mlle X :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise ordonné en référé, qu'à la suite de l'accident Mlle X a présenté un traumatisme facial et dorso-lombaire sévère ayant nécessité une hospitalisation et le port d'un corset bi-valve ; que la date de consolidation des blessures a été fixée au 30 octobre 2002 ; que Mlle X a subi une incapacité temporaire totale de deux mois et quatre jours et une incapacité temporaire partielle de 30 % pendant un mois et vingt sept jours sans perte de revenus, une incapacité permanente partielle au taux de 8 % et un préjudice d'agrément ; que le Tribunal administratif n'a pas fait une insuffisante évaluation des dommages subis par Mlle X en allouant, au titre de ces chefs de préjudices y compris au titre des troubles dans ses conditions d'existence une somme de 12.000 euros ; que compte tenu du partage de responsabilité précédemment opéré, une somme de 8.000 euros doit être mise à la charge de l'Etat ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les droits de Mlle X s'élèvent à la somme de 9.729,33 euros et ceux de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence à la somme de 3.263,67 euros ;

Sur l'indemnité forfaitaire demandée par la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale applicable aux accidents du travail : « (...).En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit du fonds national des accidents du travail de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, en fonction du taux de progression de l'indice des prix à la consommation hors tabac prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année considérée. (...) » ; qu'aux termes de l'article 1 de l'arrêté du 7 décembre 2007 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale : « Les montants maximum et minimum de l'indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 941 euros et à 94 euros à compter du 1er janvier 2008 » ;

Considérant qu'il y a lieu de porter à la somme de 941 euros l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions précitées ;

Sur les intérêts :

Considérant que Mlle X a droit aux intérêts au taux légal afférents à la somme de 9.729,33 euros à compter de la date de la réception de la réclamation préalable formée le 5 mai 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante, les sommes de 1.500 euros et 450 euros au titre des frais respectivement exposés par Mlle X et la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 2.148,50 euros (deux mille cent quarante huit euros, cinquante centimes) que le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à Mlle Céline X est portée à 9.729,33 euros (neuf mille sept cent vingt neuf euros, trente trois centimes). Cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la réception de la demande préalable du 5 mai 2003.

Article 2 : La somme de 2.723,88 euros (deux mille sept cent vingt trois euros, quatre vingt huit centimes) que le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence en remboursement des prestations versées est portée à 3.263,67 euros (trois mille deux cent soixante trois euros, soixante sept centimes).

Article 3 : La somme de 907,96 euros (neuf cent sept euros, quatre vingt seize centimes) que le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence au titre de l'indemnité forfaitaire est portée à 941 euros (neuf cent quarante et un euros).

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 2 mai 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à Mlle Céline X une somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : L'Etat versera à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence la somme de 450 euros (quatre cent cinquante euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle Céline X est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mlle Céline X, à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes de Haute Provence et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

N° 06MA01807

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA01807
Date de la décision : 09/06/2008
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme BUCCAFURRI
Avocat(s) : SCP AUDA ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-06-09;06ma01807 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award