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13/05/2008 | FRANCE | N°05MA02395

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 13 mai 2008, 05MA02395


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 septembre 2005 et 18 janvier 2007, présentés pour la SOCIETE SOTRAPE SUD représentée par son liquidateur Me Levasseur Bonardi, dont le siège est 347 rue Paradis à Marseille (13008), par la SCP Bouty et associés ;

La SOCIETE SOTRAPE SUD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0201340 du 5 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que la société Electricité de France (EDF) soit condamnée à lui payer les sommes de 1.901.902 euros HT en ré

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Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 septembre 2005 et 18 janvier 2007, présentés pour la SOCIETE SOTRAPE SUD représentée par son liquidateur Me Levasseur Bonardi, dont le siège est 347 rue Paradis à Marseille (13008), par la SCP Bouty et associés ;

La SOCIETE SOTRAPE SUD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0201340 du 5 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que la société Electricité de France (EDF) soit condamnée à lui payer les sommes de 1.901.902 euros HT en réparation des pertes de revenus subies à la suite d'un marché relatif au traitement de poteaux béton usagés des centres Electricité de France de la région sud et 15.500 euros à titre de dommages et intérêts ;

2°) de condamner la société Electricité de France (EDF) à lui payer les sommes de 1.901.902 euros HT en réparation des pertes de revenus et 15.500 euros à titre de dommages et intérêts ;

3°) de mettre à la charge de la société Electricité de France la somme de 7.500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 4 juin 2007 au cabinet Delcros-Peyrical, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 juin 2007, présenté pour la société Electricité de France par Me Delcros ; EDF conclut à titre principal à l'irrecevabilité de la requête et à titre subsidiaire au rejet de la requête ;

.............

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 19 mars 2008, présenté pour la SOCIETE SOTRAPE SUD, représentée par son liquidateur Me Laure, qui conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

.............

Vu la note en délibéré, enregistrée le 9 avril 2008, présentée pour la SOCIETE SOTRAPE SUD, représentée par son liquidateur Me Laure ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 portant application du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2008 :

- le rapport de Mme E. Felmy, conseiller,

- les observations de Me Suzan représentant la SOCIETE SOTRAPE SUD et Me Claoué représentant la société EDF,

- et les conclusions de Mme Buccafurri, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société Electricité de France (EDF) a conclu avec la SOCIETE SOTRAPE SUD un marché sur appel d'offres en date du 5 juillet 1994 pour le traitement de poteaux en béton usagés de ses vingt centres EDF de la région sud pour une durée de deux ans ; que le 5 décembre 1997, un nouveau marché a été conclu ; qu'à la suite d'une insuffisante quantité de poteaux à traiter, la société a subi des difficultés financières et a fait l'objet d'une mise en liquidation judiciaire ; que Me Levasseur Bonardi, liquidateur de la société, a demandé la condamnation d'EDF au paiement des sommes de 1.901.902 € correspondant aux pertes de revenus de la société et de 15.500 euros à titre de dommages et intérêts ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en réparation du préjudice subi ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel de la société Electricité de France :

Considérant qu'EDF soutient que la requête de la SOCIETE SOTRAPE SUD, représentée par son liquidateur Me Laure, serait irrecevable dès lors qu'elle reproduirait à l'identique les mémoires produits en première instance ; que, toutefois, la requérante a formulé dans sa requête d'appel des critiques contre le jugement attaqué ; que cette fin de non-recevoir doit dès lors être écartée ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que la requérante soutient que les premiers juges auraient omis de statuer sur le moyen tiré du manquement d'EDF à son obligation « précontractuelle » d'information ; que, toutefois, le Tribunal administratif a estimé que ce moyen relevait exclusivement de la responsabilité contractuelle et y a ainsi répondu ;

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne l'exécution du contrat :

Considérant que la lettre de pré-consultation en date du 10 avril 1994, qui présente le projet et le dossier à remplir pour présenter sa candidature, énonce que « à titre indicatif et sauf cas particulier le nombre de poteaux à traiter est en moyenne de l'ordre de 1.000 à 2.000 par an et par centre » ; que le « cahier des clauses et spécifications particulières » daté de juillet 1994 applicable au marché et le « cahier des clauses commerciales et techniques » daté de novembre 1994, joint à chaque contrat signé entre les centres EDF GDF services et la SOCIETE SOTRAPE SUD, précisent en leur article 1er que l'objet du marché est « l'élimination des poteaux béton du centre EDF GDF SERVICES », en leur article 2 que « l'Entreprise s'engage, après accord du centre, à traiter tous les poteaux béton déposés se trouvant sur le territoire du Centre et portés à sa connaissance par les entreprises de travaux de dépose ou par EDF GDF Services », puis respectivement en leur article 5.2 et 6.2 que « EDF GDF établit un bon de dépose de poteaux béton (....) (qui) comprendra les indications suivantes : (...) le nombre de poteaux béton (...) déposés sur ce chantier (...) » et enfin en leur article 5.3 et 6.3 que « L'entreprise de traitement établit mensuellement un bordereau de l'ensemble des poteaux traités » ; que chaque contrat précise que la liste des documents associés est le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux courants de décembre 1991, le cahier des clauses commerciales et techniques particulières, la liste des sites et le modèle de bon de dépose ; que chaque contrat indique un prix unitaire sans qu'aucune quantité de poteaux à traiter ne soit toutefois précisée ;

Considérant qu'il résulte de ces stipulations que les contrats en cause ne déterminaient aucune quantité minimale ou maximale des travaux, ce que ne pouvait ignorer la société co-contractante d'EDF qui les avaient signés, et ne conféraient au co-contractant aucune garantie quant à leur exécution ni ne créaient d'obligation pour EDF de fixer une quantité de poteaux à traiter ou de passer des commandes, qui étaient précisées par le bon de dépose précité, au fur et à mesure de l'exécution des contrats ; que l'obligation légale de traitement des déchets inertes et la capacité de l'adjudicataire à traiter la quantité de poteaux déposée sur le territoire d'un centre d'exploitation, laquelle aurait conditionné la détermination du coût unitaire par la société co-contractante, ne saurait caractériser la commune intention des parties en ce qui concerne le volume des prestations contractuelles ; qu'ainsi, EDF ne peut être regardée comme s'étant engagée sur une quantité de poteaux à traiter, qu'elle n'était en tout état de cause pas en mesure de fixer, et que le caractère indicatif de la lettre précitée ne saurait prévaloir sur les termes mêmes du contrat ; que, dès lors, la SOCIETE SOTRAPE SUD, représentée par son liquidateur Me Laure, ne peut invoquer l'application de l'article 16 du CCAG susvisé, qui prévoit la possibilité d'une indemnisation du co-contractant en cas de diminution de la masse des travaux de plus de 20 % ;

En ce qui concerne la faute :

Considérant, d'une part, que la circonstance que le volume des prestations contractuelles était indéterminé n'est pas de nature à entacher le contrat de nullité, dès lors qu'ainsi qu'il vient d'être dit, EDF ne peut être regardée comme s'étant engagée sur ce point ; que, d'autre part, les dispositions des articles L. 410-1, L. 420-2 et L. 442-6 du code de commerce, entrés en vigueur le 21 septembre 2000, résultent de la codification des dispositions de l'Ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 consolidée, relative à la liberté des prix et de la concurrence ; que celle-ci disposait en son article 53, repris à l'article L. 410-1 du code de commerce que : « Les règles définies à la présente ordonnance s'appliquent à toutes les activités de production, de distribution et de services, y compris celles qui sont le fait de personnes publiques notamment dans le cadre de conventions de délégation de service public.» ; qu'en admettant même que ces dispositions soient applicables aux contrats en cause, ceux-ci n'ont pas mis EDF en situation d'abuser de la position dominante qu'elle occuperait sur ce marché en conduisant une politique de « prix prédateurs » ou en y perturbant de manière significative les conditions d'exercice de la concurrence, de sorte que la nullité du contrat ne peut davantage être constatée sur ce fondement ; qu'ainsi, les conclusions indemnitaires fondées sur la faute de EDF à avoir passé un contrat nul ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE SOTRAPE SUD, représentée par son liquidateur Me Laure, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la réparation de son préjudice ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge la somme que EDF demande sur le même fondement ;

D É C I D E :

Article1er : La requête de la SOCIETE SOTRAPE SUD, représentée par son liquidateur Me Laure, est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Electricité de France tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE SOTRAPE SUD, représentée par son liquidateur Me Laure, à la société Electricité de France et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

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N° 05MA02395


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05MA02395
Date de la décision : 13/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Emilie FELMY
Rapporteur public ?: Mme BUCCAFURRI
Avocat(s) : SCP BOUTY ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-05-13;05ma02395 ?
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