Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2005, présentée pour la SA CHIMITEX, dont le siège social est sis ZI secteur D, 17 chemin des Iscles à Saint Laurent du Var (06700), par la SCP Daniel Beroud, société d'avocats ;
La SA CHIMITEX demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0104261 0104532 du Tribunal administratif de Nice en date du 4 mai 2005 rejetant ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1994 et 1995 et de la contribution de 10 % à laquelle elle a été assujettie au titre de 1995 ;
2°) de la décharger, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1994 et 1995 et de la contribution de 10 % à laquelle elle a été assujettie au titre de 1995 ;
3°) de réduire au taux de l'intérêt légal, le montant des intérêts dont ont été assorties les impositions contestées ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 7 700 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2008,
- le rapport de Mme Fernandez, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Emmanuelli, commissaire du gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision en date du 2 mai 2006, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux du Sud-Est a prononcé d'une part, le dégrèvement, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices 1994 et 1995 et de contribution de 10 % au titre de l'exercice 1995 qui ont été assignées à la SA CHIMITEX résultant des redressements relatifs aux rémunérations de M. Kuhn et d'autre part, le dégrèvement des majorations de mauvaise foi dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés restant en litige ; que les conclusions de la requête de la SA CHIMITEX relatives à ces impositions sont devenues sans objet ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que le moyen de la SA CHIMITEX tiré de ce que les premiers juges n'ont pas répondu à son moyen relatif à l'insuffisance de motivation des notifications de redressements et de la réponse aux observations du contribuable, manque en fait ;
Sur le bien-fondé du jugement :
Considérant que la SA CHIMITEX conteste les redressements qui lui ont été assignés au titre de l'impôt sur les sociétés résultant du refus de l'administration d'admettre l'imputation du déficit de l'exercice 1991 reporté à l'exercice 1994 ;
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit être également motivée » ; que la notification de redressements du 19 décembre 1997 comporte les précisions suffisantes tant en droit qu'en fait, notamment en ce qui concerne la remise en cause du déficit de l'exercice 1991 reporté par la SA CHIMITEX, pour que cette dernière puisse être éclairée sur la nature et les motifs des redressements envisagés et lui permettre d'en discuter utilement avec le service ; que dans sa réponse aux observations du contribuable, le service a répondu suffisamment et de manière compréhensible aux dites observations, notamment en ce qui concerne le report du déficit de l'exercice 1991 ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.48 du livre des procédures fiscales : « A l'issue (...) d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés dans la notification prévue à l'article L.57, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements... » ; qu'il résulte de l'instruction que les droits recouvrés au titre de l'exercice 1994 sont supérieurs à ceux indiqués dans la notification de redressements à hauteur de 39,33 euros (258 F) en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, de 15,85 euros (104 F) en ce qui concerne la majoration au taux de 40 % et de 9,45 euros (62 F) en ce qui concerne les intérêts de retard ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA CHIMITEX est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a refusé de prononcer la réduction des impositions contestées dans cette mesure, à hauteur de la somme totale de 64,64 euros (424 F) ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 223 A dans sa version applicable au litige : « Une société dont le capital n'est pas détenu à 95 % au moins directement ou indirectement par une autre personne morale passible de l'impôt sur les sociétés, peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 % au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire de sociétés du groupe. (...) Seules peuvent être membres du groupe les sociétés qui ont donné leur accord et dont les résultats sont soumis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun (....) Les sociétés du groupe doivent ouvrir et clore leurs exercices aux mêmes dates ; les exercices ont une durée de douze mois. L'option mentionnée au premier alinéa est notifiée avant la date d'ouverture de l'exercice au titre duquel le régime défini au présent article s'applique ; (...) L'option est valable cinq ans (...) la société mère notifie, avant la clôture de chacun des exercices arrêtés au cours de la période de validité de l'option, la liste des sociétés membres du groupe à compter de l'exercice suivant. A défaut, le résultat d'ensemble est déterminé à partir du résultat des sociétés mentionnées sur la dernière liste notifiée au service (...) si ces sociétés continuent à remplir les conditions prévues à la présente section (Groupes de sociétés) ... » ; qu'aux termes de l'article 223 E du même code : « Les déficits retenus pour la détermination du résultat d'ensemble ne sont pas déductibles des résultats de la société qui les a subis ... » ; que l'article 223 Q prescrit « La société mère souscrit la déclaration du résultat d'ensemble de chaque exercice dans les conditions prévues à l'article 223. » ; qu'enfin, en vertu de l'article 223 S relatif à la sortie du groupe et aux conséquences fiscales précise notamment que les dispositions prévues en cas de sortie du groupe d'une société, s'appliquent dans l'hypothèse où la société mère ne renouvelle pas l'option prévue à l'article 223 A ou reste seule membre du groupe ou lorsque le groupe cesse d'exister parce qu'il ne satisfait plus à l'une des conditions prévues par la section « groupe de sociétés » ; qu'il résulte de ces dispositions que le bénéfice du régime de l'intégration fiscale est lié au respect, durant la période concernée, par l'ensemble des membres, des conditions énoncées à l'article 223 A qui portent sur la détention du capital, l'assujettissement des résultats à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun, la concomitance des exercices ainsi que sur la souscription d'une option en ce sens par la société mère du groupe avec l'accord de chaque société du groupe ; que la seule circonstance que la société mère ne dépose pas, pour un exercice concerné par l'application du régime d'intégration fiscale de groupe, la liste des filiales ou n'ait pas souscrit de bilan comptable ou de déclaration de résultats, ne saurait emporter cessation dudit régime et priver le groupe du bénéfice de son option ;
Considérant que la SA CHIMITEX, filiale de la SA compagnie financière Chimitex, a déduit au titre de l'exercice 1994, un déficit reporté d'un montant de 7 178 686 F (1 094 383,60 euros)correspondant à un déficit propre de l'exercice comptable 1991 au motif que ses résultats, au titre de l'exercice 1991, ne devaient plus être intégrés dans ceux de la SA Compagnie financière Chimitex, le régime d'intégration fiscale de groupe ne pouvant plus s'appliquer ;
Considérant toutefois, que la SA CHIMITEX n'établit pas qu'elle avait cessé de remplir en 1991, les conditions d'appartenance au groupe de la SA Compagnie financière Chimitex ; que la liquidation judiciaire de la société mère n'a été prononcée que le 24 juillet 1992, postérieurement à cet exercice 1991 ; qu'il n'est ni soutenu, ni même allégué que les conditions susmentionnées pour l'application de ce régime au groupe en cause n'auraient plus été remplies ; que, par suite, pour contester la remise en cause par l'administration de ce déficit relatif à l'exercice 1991, reporté dans l'exercice 1994, la SA CHIMITEX ne peut utilement invoquer ni l'absence de dépôt à la clôture de l'exercice 1990 par la société mère de la liste des filiales pour l'exercice 1991, ni le défaut de souscription par cette dernière de bilan comptable pour l'exercice 1991 ;
Considérant enfin que la SA CHIMITEX en se prévalant, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine reprise dans l'instruction 4 H-9-88 du 9 mai 1988 selon laquelle l'exercice de cessation du régime de groupe est celui au titre duquel la société mère ne détermine plus un résultat d'ensemble, donne à ces dispositions une interprétation et une portée qu'elles n'ont pas ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner le bien-fondé du déficit dont le report a été refusé, que la SA CHIMITEX n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande de décharge des impositions restant en litige ;
En ce qui concerne les intérêts de retard :
Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts dans sa version applicable au litige : « le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions. (...) le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 % par mois. Il s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé. » ;
Considérant que l'intérêt de retard institué par ces dispositions vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction dès lors que son niveau, notamment pour la période en litige, n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; que, par suite, la SA CHIMITEX ne peut utilement invoquer ni que l'intérêt de retard qui lui a été infligé constituait une accusation en matière pénale au sens de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, par suite, que les dispositions précitées de l'article 1727 du code général des impôts, en ne modulant pas le taux de l'intérêt de retard, méconnaîtraient les stipulations de cet article ; qu'elle ne peut pas plus utilement invoquer la jurisprudence du juge judiciaire qui ne s'impose pas au juge administratif ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA CHIMITEX n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge ou à la réduction de intérêts afférents aux impositions restant en litige ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la SA CHIMITEX tendant au remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : A concurrence de la somme de 191 983,34 euros au titre de l'exercice 1994, en ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, d'une part, en droits et pénalités, résultant des redressements relatifs aux rémunérations de M. Kuhn et d'autre part, en majorations de mauvaise foi, résultant des redressements relatifs du déficit de 1991 reporté, de la somme de 36 072,78 euros au titre de l'exercice 1995, en ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, en droits et en pénalités résultant des redressements relatifs aux rémunérations de M. Kuhn et de la somme de 1 135,28 euros au titre de l'exercice 1995, en ce qui concerne, en droits et en pénalités, la contribution de 10 %, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SA CHIMITEX.
Article 2 : La SA CHIMITEX est déchargée de l'impôt sur les sociétés mis à charge au titre de l'exercice 1994, à concurrence, en droits et pénalités, de la somme de 64,64 euros.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 4 mai 2005 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SA CHIMITEX est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SA CHIMITEX et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
N° 05MA02422 2