Vu, enregistrée au greffe le 3 août 2005 sous le numéro 05MA02065, la requête présentée pour la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC, anciennement dénommée SNC SOLEG, dont le siège se situe route de Lodève - BP 42 - à Juvignac (34990), représentée par son représentant légal en exercice, par la SCP d'avocats Casanova et Associés ;
La société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC demande à la Cour :
1°/ de réformer le jugement n° 9902736 en date du 27 mai 2005 du Tribunal administratif de Montpellier qui a annulé la décision de la commission permanente du conseil général du Gard en date du 18 mars 1999, ensemble la décision d'approbation de l'offre en date du 2 avril 1999, en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;
2°/ de condamner le conseil général du Gard à lui verser une somme de 164 226,06 euros en réparation de son préjudice né de son éviction du marché et 1 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mars 2008 :
- le rapport de M. Duchon-Doris, président assesseur ;
- les observations de Me Bontemps Hesdin, avocat, de la SCP d'avocats Casanova et Associés pour la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC et de Me Grandjean, avocat, pour le conseil général du Gard ;
- et les conclusions de Mme Steck-Andrez, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par jugement du 27 mai 2005, le Tribunal administratif de Montpellier, saisi par la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC, a annulé la décision de la commission permanente du conseil général du Gard en date du 18 mars 1999 retenant l'offre présentée par la société La Méridionale de Travaux, relative au marché de reconstruction du collège Diderot à Alès et la décision d'approbation de l'offre en date du 2 avril 1999, mais a rejeté les conclusions présentées par la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC tendant à la condamnation du conseil général du Gard à lui verser la somme de 1 077 252,43 francs TTC en réparation de son préjudice résultant de son éviction irrégulière du marché ; que la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC demande l'annulation de ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à ses conclusions de première instance ; que le conseil général du Gard d'une part, la société GFC Construction Méridionale de Travaux d'autre part, en demandent également la réformation en tant qu'il a annulé les décisions précitées des 18 mars et 2 avril 1999 ;
Sur la légalité des décisions des 18 mars et 2 avril 1999 et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des conclusions :
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 104-I-3°du code des marchés publics, alors en vigueur, applicables à la collectivité défenderesse en application de l'article 308 du même code, que, dans les cas d'urgence, pour les travaux que l'administration doit faire exécuter au lieu et place de l'entrepreneur défaillant, celle-ci peut recourir à la procédure de marché négocié précédée d'une mise en concurrence ;
Considérant, en premier lieu, que, pour justifier, à la suite de la mise en liquidation judiciaire au cours du mois de mai 1998 de la société ROURE GTP, attributaire du lot «gros-oeuvre » du marché de reconstruction du collège Diderot à Alès, le recours à la procédure de marché négocié précédée d'une mise en concurrence prévue par les dispositions précitées de l'article 104-I-3° du code des marchés publics alors applicables, le conseil général du Gard fait valoir que l'opération de construction en cause portait sur 26 lots faisant l'objet d'un planning complexe et soumise à un délai de livraison précis ; qu'une telle circonstance n'est toutefois pas, à elle seule, de nature à justifier l'urgence qu'il y aurait eu de recourir à une telle procédure au sens de ces dispositions ; que, par suite, le marché est entaché de nullité ;
Considérant, en deuxième lieu et au surplus, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, qu'il ressort des pièces versées au dossier que, en méconnaissance de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, l'acte d'engagement conclu entre la SA La Méridionale et la SEGARD, maître d'ouvrage délégué a été signé le 2 avril 1999, le jour même de la réception en préfecture de la délibération de la commission permanente du conseil général du Gard en date du 18 mars 1999 autorisant à signer le marché, sans que la société GFC Construction Méridionale de Travaux puisse utilement se prévaloir, sans en apporter au demeurant la preuve, d'un délai anormal d'acheminement postal de la délibération ; que, par suite, le marché encourt encore la nullité de ce chef ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le conseil général du Gard et la société GFC Construction Méridionale de Travaux ne sont pas fondés à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé, pour les motifs sus-rappelés, la décision de la commission permanente du conseil général du Gard en date du 18 mars 1999 retenant l'offre présentée par la société La Méridionale de Travaux et la décision d'approbation de l'offre en date du 2 avril 1999 ;
Sur les conclusions à fin indemnitaire de la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC :
Considérant que lorsqu'une entreprise candidate à l'attribution d'un marché public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce dernier, il appartient au juge de vérifier d'abord si l'entreprise était ou non dépourvue de toute chance de remporter le marché ; que, dans l'affirmative, l'entreprise n'a droit à aucune indemnité ; que, dans la négative, elle a droit en principe au remboursement des frais qu'elle a engagés pour présenter son offre ; qu'il convient ensuite de rechercher si l'entreprise avait des chances sérieuses d'emporter le marché ; que, dans un tel cas, l'entreprise a droit à être indemnisée de son manque à gagner, incluant nécessairement, puisqu'ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l'offre qui n'ont donc pas à faire l'objet, sauf stipulation contraire du contrat, d'une indemnisation spécifique ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par arrêt de ce jour rendu dans l'instance n° 05MA01872 - 05MA01983 - 05MA02066, la Cour confirme le jugement n° 9901775 en date du 27 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a indemnisé la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC, anciennement dénommée SNC SOLEG, du préjudice résultant pour elle d'avoir été évincée irrégulièrement de la procédure d'appel d'offres lancée en septembre 1997, relative au marché pour l'attribution du lot n° 3 «gros-oeuvre» de l'opération de reconstruction du collège Diderot à Alès, évalué à hauteur de son manque à gagner ; que, par suite et en tout état de cause, à supposer, comme elle le prétend, que la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC ait pu avoir une chance sérieuse de se voir attribuer le même marché à l'issue de la nouvelle procédure d'appel d'offres lancée en avril 1998, le préjudice dont elle pourrait alors se prévaloir, qui serait limité, par application des principes précités, à son manque à gagner, ne peut que se confondre, en l'absence de démonstration contraire, avec celui déjà indemnisé ; que par suite, ses conclusions à fins indemnitaires ne peuvent être que rejetées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ni le conseil général du Gard, ni la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC, ni la société GFC Construction Méridionale de Travaux ne sont fondés à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Sur les conclusions aux fins d'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : «Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation» ;
Considérant qu'il n'y a lieu de faire droit, dans les circonstances de l'espèce, ni aux conclusions du conseil général du Gard, ni à celles des sociétés EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC et GFC Construction Méridionale de Travaux tendant à ce que la partie adverse leur verse une somme au titre des frais supportés et non compris dans les dépens ;
Par ces motifs,
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le conseil général du Gard et par la société GFC Construction Méridionale de Travaux sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société EIFFAGE CONSTRUCTION LANGUEDOC, au conseil général du Gard, à la société GFC Construction Méridionale de Travaux et au ministre chargé de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.
N° 05MA02065 2
SR