Vu la requête, enregistrée le 6 février 2006, présentée pour la société anonyme MONTAUDIS, dont le siège est route départementale 562 à Montauroux (83440), représentée par son président directeur général en exercice, par Me Soares et Me Demange-Boulogne, de la SELARL Audi-Juris ; la société MONTAUDIS demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0500189 du 17 novembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à obtenir la restitution des droits de taxe sur les achats de viande auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003 ;
2°) à titre principal, de lui accorder la restitution des droits en litige, soit la somme de 341 649 euros ;
3°) à titre subsidiaire, de renvoyer le présent litige, en application des stipulations de l'article 234 du traité instituant la Communauté Européenne par voie préjudicielle, à la Cour de justice des communautés européennes ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 050 euros hors taxes au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2007 :
- le rapport de Mme Mariller, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Emmanuelli, commissaire du gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 93 du traité instituant la Communauté Européenne, devenu l'article 88 du même traité : « 1. La Commission procède avec les états membres à l'examen permanent des régimes d'aide existant dans ces états... 2. Si la... Commission constate qu'une aide accordée par un état ou au moyen de ressources d'Etat, n'est pas compatible avec le marché commun, ... elle décide que l'état intéressé doit la supprimer ou la modifier dans le délai qu'elle détermine... 3. La Commission est informée en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l'article 92, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'état membre ne peut mettre à exécution les mesures projetées avant que cette procédure ait abouti à une décision finale » ;
Considérant que la validité des actes des autorités nationales est affectée par la méconnaissance des obligations que leur imposent la première et la dernière phrase du paragraphe 3 de l'article 93 du traité instituant la Communauté Européenne, devenu l'article 88 du même traité, de ne pas mettre à exécution des projets tendant à instituer ou à modifier des aides qu'elles n'auraient pas notifiées préalablement à la Commission ;
Considérant toutefois que la double obligation de notifier et de ne pas exécuter avant la décision de la Commission ne s'étend au mode de financement d'une mesure d'aide que lorsqu'il en fait partie intégrante ;
Considérant qu'une taxe, ou une partie d'une taxe, ne peut être regardée comme faisant partie intégrante d'une mesure d'aide que s'il existe nécessairement un lien d'affectation contraignant entre la taxe et l'aide en vertu de la réglementation nationale pertinente ;
Considérant que par un arrêt du 20 novembre 2003, la Cour de justice des communautés européennes a dit pour droit que « l'article 92, paragraphe 1, du traité CE (devenu après modification, article 87, paragraphe 1, CE) doit être interprété en ce sens qu'un régime tel que celui en cause au principal, qui assure gratuitement pour les éleveurs et les abattoirs la collecte et l'élimination des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs, doit être qualifié d'aide d'Etat » ; que le financement de cette aide d'Etat a été assuré jusqu'au 31 décembre 2000 par une taxe sur les achats de viande et de produits à base de viande, due par les personnes qui réalisent des ventes au détail de ces produits et affectée au financement de l'équarrissage dont le régime avait été codifié à l'article 302 bis ZD du code général des impôts et dont le produit était affecté à un fonds spécialement créé à cet effet, ayant pour objet de financer le service de collecte et d'élimination des cadavres d'animaux et des saisies d'abattoirs reconnus impropres à la consommation humaine et animale, c'est-à-dire les activités définies comme mission de service public par l'article 264 du code rural, ledit fonds étant géré par le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA) ; que l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000 portant loi de finances rectificative pour 2000 a apporté certaines modifications au mécanisme de la taxe, entrées en vigueur le 1er janvier 2001, notamment en ce que le produit de la taxe a été, depuis le 31 décembre 2000, directement affecté au budget général de l'État, au lieu du fonds susmentionné ;
Considérant qu'en adoptant l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000, le législateur n'a pas seulement entendu modifier le régime antérieur de la taxe sur les achats de viande mais abroger l'imposition spécifiquement perçue à l'effet de financer les mesures d'aides jusqu'au 31 décembre 2000 et instituer une nouvelle taxe dépourvue de tout lien avec le service public de l'équarrissage ; que depuis le 1er janvier 2001, aucune disposition législative ou réglementaire n'emporte affectation du produit de la taxe d'équarrissage à une catégorie particulière de dépenses ; que le produit de la taxe, d'ailleurs plus élevé que le montant des dépenses du service public de l'équarrissage, est affecté au budget général de l'Etat ; qu'il n'existe dès lors aucun lien contraignant entre le produit de la taxe et les crédits affectés au service public de l'équarrissage inscrits au budget du ministère de l'agriculture ; que les intentions du gouvernement et du législateur exprimées à l'occasion de débats parlementaires ou de réponses ministérielles, qui étaient de ne pas obérer le budget général de l'Etat des dépenses autrefois supportées par le fonds spécial géré par le CNASEA, ne sont à elles seules pas suffisantes pour établir un tel lien ; qu'ainsi, la taxe instituée par l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000 ne fait pas partie intégrante du dispositif d'aide susdécrit ; que, par suite, la société requérante ne peut utilement invoquer la méconnaissance par les autorités nationales, à l'occasion de la promulgation de l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000, des obligations que leur imposent la première et la dernière phrase du paragraphe 3 de l'article 93 du traité instituant la Communauté Européenne, devenu l'article 88 du même traité ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en l'absence de lien d'affectation contraignant entre la taxe instituée par l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000 et les mesures d'aides accordées par l'Etat, la société MONTAUDIS ne peut utilement soutenir que le régime de la taxe d'équarrissage resterait incompatible avec les stipulations des articles 87, paragraphe 3, point c), du traité et 90 du traité CE après le 31 décembre 2000 ;
Considérant, en troisième lieu, que la taxe sur les achats de viande n'étant pas perçue à l'occasion de l'importation de produits, elle ne peut être regardée comme une taxe équivalant à un droit de douane prohibée par les articles 23 et 25 du traité CE ; qu'enfin, le moyen tiré de la violation du principe « pollueur-payeur » est, en tout état de cause, inopérant ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice des communautés européennes d'une question préjudicielle, que la société appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions de la société MONTAUDIS tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
« Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.» ;
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la société MONTAUDIS la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société MONTAUDIS est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société MONTAUDIS et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
N° 06MA00390 2