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04/10/2007 | FRANCE | N°06MA03486

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 04 octobre 2007, 06MA03486


Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2006, présentée pour M. Paul-Olivier X, élisant domicile au ..., par Me Allemand ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0204614 en date du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge de l'amende d'un montant de 3000 euros, mise en recouvrement par un avis n° 2002 05 M 0001, à laquelle il a été assujetti sur le fondement du 1. de l'article 1740 du code général des impôts pour contravention aux dispositions relatives au droit de communication prévu à

l'article L. 86 du livre des procédures fiscales ;

2°) de prononcer la décharg...

Vu la requête, enregistrée le 18 décembre 2006, présentée pour M. Paul-Olivier X, élisant domicile au ..., par Me Allemand ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0204614 en date du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge de l'amende d'un montant de 3000 euros, mise en recouvrement par un avis n° 2002 05 M 0001, à laquelle il a été assujetti sur le fondement du 1. de l'article 1740 du code général des impôts pour contravention aux dispositions relatives au droit de communication prévu à l'article L. 86 du livre des procédures fiscales ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

…………………………………………………………………………………………..

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance en date du 30 mai 2007, fixant la clôture d'instruction au 29 juin 2007 à 12 heures, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 juin 2007, présenté pour M. X, tendant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens et en outre par le moyen que le tribunal administratif n'a pas répondu à l'argument par lequel il soutenait qu'il était tenu par le secret professionnel de ne pas donner la liste de ses clients ; que l'obligation de secret professionnel interdit dans tous les cas à un avocat, comme à un médecin, de divulguer la liste de ses clients ; que les dispositions de l'article 226-13 du code pénal prévalent sur celles de l'article L. 86 du livre des procédures fiscales ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 juillet 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Vu la lettre en date du 20 août 2007 adressée aux parties par le greffe de la Cour aux fins de communication d'un moyen d'ordre public en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 août 2007, présenté pour M. X, qui prend note de ce que la Cour entend soulever d'office le moyen fondé sur le principe d'application immédiate de la loi pénale plus douce et maintient ses conclusions tendant à la décharge de l'intégralité de l'amende qui lui a été infligée ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 août 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui confirme le principe d'application immédiate de la loi pénale plus douce dans l'affaire qui oppose M. X à l'administration fiscale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992 portant loi de finances rectificative pour 1992 et notamment son article 84-II ;

Vu l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à l'harmonisation et l'aménagement du régime des pénalités ;

Vu le code pénal ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2007 ;

- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

- les observations de Me Allemand, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 2 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge de l'amende d'un montant de 3000 euros, mise en recouvrement par un avis n°2002 05 M 0001, à laquelle il a été assujetti sur le fondement du 1. de l'article 1740 du code général des impôts pour contravention aux dispositions relatives au droit de communication prévu à l'article L. 86 du livre des procédures fiscales ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'en relevant que l'administration fiscale peut légalement accéder, dans le cadre de son droit de communication, à des documents, comptables ou non, fournissant des renseignements sur le paiement des prestations et l'identité des clients d'un membre d'une profession non commerciale soumis au secret professionnel, à la condition que ces documents ne comportent aucune indication, même sommaire, concernant la nature et le contenu des prestations effectuées et que le législateur n'a pas entendu exclure la profession d'avocat de l'exercice d'un tel droit d'accès, les premiers juges ont suffisamment répondu au moyen par lequel M. X soutenait que son refus de communiquer les informations demandées par l'administration fiscale était justifié par l'obligation de secret professionnel à laquelle il était tenu du fait des dispositions de l'article 226-13 du code pénal ; que, par suite, le jugement est suffisamment motivé ;

Sur le bien fondé du jugement :

En ce qui concerne le principe de l'amende :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 86 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : Les agents de l'administration ont un droit de communication à l'égard des membres des professions non commerciales définies ci-après : a. Les professions dont l'exercice autorise l'intervention dans des transactions, la prestation de services à caractère juridique, financier ou comptable ou la détention de biens ou de fonds pour le compte de tiers (...). Le droit prévu au premier alinéa ne porte que sur l'identité du client, le montant, la date et la forme du versement ainsi que les pièces annexes de ce versement (...); qu'aux termes des dispositions de l'article L. 86 A du même livre : La nature des prestations fournies ne peut faire l'objet de demandes de renseignements de la part de l'administration des impôts lorsque le contribuable est membre d'une profession non commerciale soumis au secret professionnel en application des articles 226-13 et 226-14 du code pénal ; qu'aux termes de l'article 226-13 du code pénal : La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende; qu'aux termes de l'article 226-14 du même code : L'article 226-13 n'est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret (...); et, qu'aux termes des dispositions de l'article 1740 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : “1. Toute contravention aux dispositions relatives au droit de communication et, notamment, le refus de communication constaté par procès-verbal, la déclaration que les livres, contrats ou documents ne sont pas tenus ou leur destruction avant les délais prescrits est punie d'une amende de 1 500 euros. Le montant de l'amende est porté à 3 000 euros à défaut de régularisation dans les trente jours d'une mise en demeure (...);

Considérant, en premier lieu, qu'il n'appartient pas au juge administratif de l'impôt de contrôler la compatibilité des dispositions de rang législatif précitées de l'article L. 86 du livre des procédures fiscales avec d'autres normes de droit interne ; qu'en toute hypothèse, les dispositions des articles L. 86 et L. 86 A du livre des procédures fiscales organisent un droit de communication de l'administration fiscale auprès des membres des professions non commerciales qui interdit tout rapprochement entre, d'une part, l'identité des clients, le montant, la date et la forme des versements effectués par ceux-ci et, d'autre part, la nature des prestations qui leur sont fournies, dispositif qui ne contrevient pas aux dispositions protectrices du secret professionnel de l'article 226-13 du code pénal ; qu'en outre, le législateur n'a pas entendu exclure la profession d'avocat, dont l'activité entre dans le champ de celles visées par l'article L. 86 du livre des procédures fiscales, de l'exercice d'un tel droit de communication ; que, par suite, le receveur des impôts de Salon-Nord a pu à bon droit mettre en oeuvre le droit de communication prévu à l'article L. 86 du livre des procédures fiscales afin d'obtenir auprès de M. X, qui exerçait la profession d'avocat, les noms et adresses des clients qui étaient en relation d'affaires avec lui ;

Considérant, en second lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction, que, dans l'exercice du droit de communication qu'il tenait des dispositions de l'article L. 86 du livre des procédures fiscales, le receveur des impôts de Salon-Nord aurait sollicité de M. X des informations autres que celles relatives à l'identité des clients, au montant, à la date et à la forme des versements effectués par ces clients et qu'il aurait excédé les pouvoirs qui lui étaient consentis par cet article ; que M. X, du fait de son refus de délivrer les informations demandées s'est, par suite, trouvé dans la situation où l'administration était en droit de lui infliger l'amende prévue au 1. de l'article 1740 du code général des impôts ;

Sur le montant de l'amende :

Considérant que les dispositions précitées du 1 de l'article 1740 du code général des impôts n'ont pas pour objet la seule réparation du préjudice pécuniaire subi par le Trésor du fait des refus opposés aux demandes de l'administration fiscale dans l'exercice par celle-ci de son droit de communication par les personnes tenues de répondre à ces demandes par les dispositions de l'article L. 86 du livre des procédures fiscales mais instituent une sanction tendant à réprimer de tels agissements et à en empêcher la réitération ; que, par suite, le principe selon lequel la loi pénale nouvelle doit, lorsqu'elle prononce des peines moins sévères que la loi ancienne, s'appliquer aux infractions commises avant son entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à des condamnations passées en force de chose jugée, s'étend à l'amende prévue au 1. de l'article 1740 du code général des impôts ; que les dispositions relatives à cette sanction, transférées par l'article 13 de l'ordonnance n°2005-1512 du 7 décembre 2005 à l'article 1734 du code général des impôts actuellement en vigueur, se bornent à prévoir que « le refus de communiquer les documents soumis au droit de communication de l'administration entraîne l'application d'une amende de 1 500 euros » sans prévoir de majoration du montant de l'amende à défaut de régularisation par le contribuable dans les trente jours d'une mise en demeure ; que, par suite, il y a lieu, par l'effet du principe ci-dessus rappelé d'application de la loi pénale moins sévère, d'accorder à M. X la décharge de la fraction de l'amende correspondant à la différence entre le montant de 3 000 euros qui lui a été infligé sur le fondement des anciennes dispositions de l'article 1740 du code général des impôts et le nouveau montant de l'amende fixé à 1 500 euros, soit de la somme de 1 500 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à demander la réduction dans cette mesure du montant de l'amende qui lui a été infligée ainsi que la réformation en ce sens du jugement du Tribunal administratif de Marseille ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. X est déchargé de la somme de 1 500 euros.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 2 octobre 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt .

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Paul-Olivier X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

Copie en sera adressée à Me Allemand et au directeur des services fiscaux de Marseille

N°03MA03486 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA03486
Date de la décision : 04/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : SELARL ALLEMAND ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2007-10-04;06ma03486 ?
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