Vu la requête, enregistrée le 16 décembre 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille sous le n°05MA03203, présentée par Me Autissier, avocat pour la COMPAGNIE AXA ASSURANCES venant aux droits de la Compagnie UAP, dont le siège est 16-18 avenue des Olympiades à Fontenay-sous-Bois (92722) ; La COMPAGNIE AXA ASSURANCES demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0006322 du 11 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Service d'incendie et de secours des Hautes-Alpes à lui verser la somme de 851 064,61 francs (soit 129 743,96 euros) correspondant aux frais de reconstruction et aux pertes d'exploitation et frais divers résultant de la destruction du bar-restaurant appartenant à la SARL La Chiquette et exploité par la SCI L'Igloo Varsin, sur le territoire de la commune de Vars, assortie des intérêts ;
2°) de condamner la direction départementale des services incendie et secours des Hautes-Alpes au paiement des frais d'expertise ;
3°) de condamner le Service d'incendie et de secours des Hautes-Alpes à lui payer une somme de 4 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2007 :
- le rapport de Mme Pena, conseiller ;
- les observations de Me Baillon-Passe substituant Me Autissier, avocat pour la COMPAGNIE AXA ASSURANCES ;
- les observations de Me Joureau substituant la société d'avocats Plantavin-Otto-Reina, avocat pour le Service d'incendie et de secours des Hautes-Alpes ;
- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par jugement en date du 11 octobre 2005, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de la COMPAGNIE AXA ASSURANCES venant aux droits de la compagnie UAP et agissant en qualité de subrogée dans les droits des sociétés La Chiquette et L'Igloo Varsin, ses assurées, tendant à la condamnation du Service d'incendie et secours des Hautes-Alpes à lui verser la somme de 129 743,96 euros en remboursement des débours qu'elle a exposés pour la réparation des dommages causés par les deux incendies successifs survenus les 7 et 8 décembre 1996 dans le bar-restaurant appartenant à la SARL La Chiquette et exploité par la SCI L'Igloo Varsin, sur le territoire de la commune de Vars ; que la COMPAGNIE AXA ASSURANCES interjette appel de ce jugement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le Service d'incendie et de secours des Hautes-Alpes :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société l'Igloo Varsin a perçu de la COMPAGNIE AXA ASSURANCES une somme de 205 671,75 euros (soit 1 349 118,24 francs) en règlement définitif des conséquences garanties du sinistre survenu les 7 et 8 décembre 1996 ; que la COMPAGNIE AXA ASSURANCES appelante, qui vient aux droits de la compagnie UAP, établit ainsi sa quittance subrogatoire ;
Sur la responsabilité :
Considérant que les sapeurs-pompiers du Service départemental d'incendie et de secours des Hautes-Alpes, appelés le 7 décembre 1996 à 13h35 pour combattre un incendie qui venait de se déclarer dans le bar-restaurant l'Igloo au Col de Vars, ont maîtrisé, dans l'après-midi, le sinistre qui n'a occasionné qu'une détérioration partielle du bâtiment, et ont quitté les lieux à 19h00 ; qu'au cours de la nuit, à 5h08, un nouvel incendie s'est déclaré, que les pompiers, arrivés sur les lieux à 5h29, sont parvenus à maîtriser à 6h42 ; que ce nouveau sinistre a entraîné la destruction quasi-totale de l'établissement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée en référé par le président du Tribunal administratif, que le second incendie est né de la reprise spontanée du premier feu, du fait de la présence de quelque braises cachées dans la double couverture du bâtiment et réactivées par tirage thermique naturel ; que si les pompiers ont quitté les lieux deux heures après avoir maîtrisé le premier feu, laps de temps au cours duquel ils ont effectué des recherches de fumées, procédé à l'élimination des points chauds et à l'arrosage des poutres et parties en bois ainsi que des matériaux brûlés, il n'en demeure pas moins qu'aucun piquet de surveillance chargé de s'assurer de la maîtrise définitive du sinistre dans les heures suivant le départ des pompiers n'a été organisé ; que la seule mesure prévue à ce titre a consisté en une ronde programmée le lendemain matin, à 6 heures, soit près de dix heures après l'extinction du premier incendie et le départ des pompiers des lieux du sinistre ; qu'ainsi, et nonobstant la circonstance que le propriétaire des lieux ainsi que trois employés communaux soient demeurés sur place jusqu'à 21h30, le dispositif de surveillance alors mis en place doit eu égard à la nature et aux particularités de l'établissement, aux circonstances que notamment, la chaudière venait d'y être installée et qu'il avait déjà subi un incendie quelques années auparavant, aux origines et aux conditions du déclenchement de l'incendie, être considéré comme insuffisant, et partant, comme constitutif en tant que tel d'une faute de nature à engager la responsabilité du Service départemental d'incendie et de secours des Hautes-Alpes ;
Considérant toutefois, qu'il résulte également de l'instruction, que contrairement à ce qui est soutenu, aucun indice ne permettait aux sapeurs-pompiers, en l'absence d'indication du propriétaire des lieux lequel s'est révélé être dans l'ignorance totale des techniques de construction de l'immeuble, de soupçonner l'existence de deux charpentes superposées à l'origine de zones cachées suffisamment larges, non accessibles directement à l'arrosage en fin d'intervention des pompiers et qui ont eu le temps de constituer des points chauds dans l'épaisseur de la couverture ; que de surcroît et alors même que l'établissement avait été victime quelques années auparavant d'un sinistre de même nature, la disposition de la chaudière à gaz et du groupe électrogène dans un local de faible hauteur, dans lequel étaient en outre entreposés du matériel et diverses fournitures ont constitué autant de facteurs de risques au déclenchement de l'incendie initial sans lequel le second n'aurait pas pris naissance ; qu'enfin, le rapport d'intervention des pompiers produit au dossier révèle qu'à 21h30, au moment de leur départ du lieu du sinistre, les employés communaux restés sur place avaient constaté une fumerolle sur une poutre du local technique qu'ils ont traitée avec de la neige et en ont informé le propriétaire lequel n'a pas estimé nécessaire de le signaler au Service d'incendie et de secours avant de quitter lui même les lieux ; que ces circonstances, révélatrices de comportements imprudents voire négligents de la victime, sont de nature à atténuer la responsabilité du Service départemental d'incendie et de secours dont il sera fait une juste appréciation en le condamnant à payer à la COMPAGNIE AXA ASSURANCES la moitié de l'indemnité qu'elle réclame soit la somme de 64 872 euros ; que cette somme sera, comme le demande la requérante, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2000, date d'enregistrement de sa demande de première instance ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de mettre les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 12 400,76 euros par ordonnance du président du Tribunal administratif de Marseille en date du 26 novembre 1999 à la charge du Service départemental d'incendie et de secours des Hautes Alpes ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : «Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la COMPAGNIE AXA ASSURANCES, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme de 4 000 euros que le Service départemental d'incendie et de secours demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le Service départemental d'incendie et de secours des Hautes-Alpes à payer à la COMPAGNIE AXA ASSURANCES une somme de 1 600 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1: Le Service départemental d'incendie et de secours des Hautes-Alpes est condamné à payer à la COMPAGNIE AXA ASSURANCES la somme de 64 872 euros. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 décembre 2000.
Article 2 : Les frais d'expertise de première instance, taxés et liquidés à la somme de 12 400,56 euros, sont mis à la charge définitive du Service départemental d'incendie et de secours des Hautes-Alpes.
Article 3 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Marseille en date du 11 octobre 2005 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le Service départemental d'incendie et de secours des Hautes-Alpes versera à la COMPAGNIE AXA ASSURANCES une somme de 1 600 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMPAGNIE AXA ASSURANCES et au Service départemental d'incendie et de secours des Hautes-Alpes.
N° 05MA003203 4
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