Vu la requête enregistrée le 17 mars 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 05MA00626, présentée par la SELARL Donat, avocat, pour M. Carol X et pour la société X, élisant domicile BP 14 à Amélie-Les-Bains (66110) ; Les requérants demandent à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 0105188 du 21 janvier 2005 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur résultant du silence gardé sur sa demande du 26 juillet 2001 à fin d'indemnisation du préjudice résultant du refus de renouveler l'autorisation d'exploiter les jeux du casino d'Amélie-Les-Bains, d'autre part à la condamnation de l'Etat au versement d'une indemnité de trois millions d'euros ;
2°/ d'annuler la décision implicite ci-dessus mentionnée du ministre de l'intérieur et de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 4 905 612 euros augmentée des intérêts au taux légal à capitaliser ;
3°/ de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi du 15 juin 1907 réglementant le jeu dans les cercles et les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, ensemble le décret n° 59-1489 du 22 décembre 1959 ;
Vu la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 février 2007 :
- le rapport de M. Moussaron, président assesseur ;
- les observations de Me Odent, avocat du ministre de l'intérieur ;
- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire :
Considérant que l'article 1er de la loi du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard punit de deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende le fait de participer, y compris en tant que banquier, à la tenue d'une maison de jeux de hasard où le public est librement admis ; que l'article 1er de la loi du 15 juin 1907, dans sa rédaction applicable au litige, dispose toutefois que par dérogation à l'article 1er de la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard il pourra être accordé aux casinos des stations balnéaires, thermales ou climatiques, sous quelque nom que ces établissements soient désignés, l'autorisation temporaire d'ouvrir au public des locaux spéciaux, distincts et séparés où seront pratiqués certains jeux de hasard… ; qu'aux termes de l'article 2 de la même loi Les autorisations sont accordées par le ministre de l'intérieur, après enquête et en considération d'un cahier des charges établi par le conseil municipal. L'arrêté d'autorisation fixe la durée de la concession ; que les dispositions précitées ont pu, à des fins d'ordre public, soumettre à autorisation l'exploitation des jeux de hasard dans les casinos sans méconnaître l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme rappelant le droit de toute personne au respect de ses biens ;
Considérant que la société X a été autorisée à exploiter les jeux de hasard du casino d'Amélie-Les-Bains, en dernier lieu pour la période du 1er novembre 1991 au 31 octobre 1996 ; qu'après que plusieurs autorisations provisoires lui ont été successivement délivrées pendant l'instruction de sa demande de renouvellement, le ministre de l'intérieur a, par la décision du 28 juillet 1997, refusé de renouveler l'autorisation de jeux dont elle était titulaire ;
Considérant que la décision du 28 juillet 1997, fondée sur les motifs tirés de dysfonctionnements dans la gestion administrative et financière de l'établissement, ainsi que de l'absence de transparence dans les comptes de la société et de sa situation financière préoccupante, est suffisamment motivée ;
Considérant qu'eu égard à la nature que présente une mesure de refus de renouvellement d'une autorisation de jeux, qui ne saurait être regardée comme une sanction, ni l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme ni aucun principe général du droit applicable même en l'absence de texte n'imposait à l'administration de provoquer les observations de la société auteur de la demande avant de prendre la décision en litige ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 alors en vigueur du décret susvisé du 28 novembre 1983 Sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, sous réserve des nécessités de l'ordre public et de la conduite des relations internationales, et exception faite du cas où il est statué sur une demande présentée par l'intéressé lui-même, les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé ait été mis à même de présenter des observations écrites ; qu'en l'espèce, dès lors que la décision attaquée a été prise sur une demande de la société X, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut qu'être écarté ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'au cours de la période du 1er novembre 1991 au 31 octobre 1996 couverte par la dernière autorisation qui avait été délivrée à la société X, il a été constaté à plusieurs reprises que d'importants soldes débiteurs de comptes d'associés, dont les dépenses personnelles étaient payées par la société, compromettaient sa situation financière ; qu'ont aussi été constatés des retards dans l'acquittement des dettes fiscales ainsi que des anomalies dans la comptabilité, notamment l'absence de comptabilisation des prêts aux joueurs ; que si la société X fait valoir que ces irrégularités ou anomalies n'existaient plus à la date de la décision portant refus de renouvellement, le ministre pouvait sans commettre d'erreur de droit, pour statuer sur la demande de renouvellement de la société, se fonder sur les modalités de sa gestion pendant l'ensemble de la période couverte par la précédente autorisation ; qu'il n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de renouveler l'autorisation de jeux compte tenu des dysfonctionnements sus indiqués affectant la gestion de la société X ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant que, dès lors qu'il n'est pas établi que le refus de renouvellement d'autorisation du 28 juillet 1997 aurait été fautif, la société X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande à fin d'indemnité ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la société X la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées de ce chef par la commune d'Amélie-Les-Bains ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête susvisée est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Amélie-Les-Bains en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société X, à la commune d'Amélie-Les-Bains, et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
N° 05MA00626 2
mp