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21/12/2006 | FRANCE | N°06MA01256

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des reconduites, 21 décembre 2006, 06MA01256


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 5 mai 2006, sous le n° 06MA01256, présentée pour M. Ismaïl X, élisant domicile ... par Me Marcou, avocat ; M. X demande au président de la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 0601658 en date du 21 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 16 mars 2006 par lequel le Préfet de l'Hérault a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé la Turquie comme pays

de destination ainsi qu'à l'annulation de l'arrêté en date du 16 mars 2006 par...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 5 mai 2006, sous le n° 06MA01256, présentée pour M. Ismaïl X, élisant domicile ... par Me Marcou, avocat ; M. X demande au président de la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 0601658 en date du 21 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 16 mars 2006 par lequel le Préfet de l'Hérault a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé la Turquie comme pays de destination ainsi qu'à l'annulation de l'arrêté en date du 16 mars 2006 par lequel le préfet de l'Hérault a décidé de le maintenir pendant 48 heures dans des locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire ;

2°/ d'annuler ledit arrêté de reconduite à la frontière ;

3°/ de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1.093,97 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision, en date du 27 décembre 2004, par laquelle le président de la Cour a délégué, en application des dispositions de l'article R.776-19 du code de justice administrative, M. Laffet, président, pour statuer sur l'appel des jugements rendus en matière de reconduite à la frontière ;

Les parties ayant été régulièrement averties de l'audience publique ;

Après avoir entendu en séance publique :

- les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : «L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…)» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité turque, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 30 septembre 2004, de la décision du 27 septembre 2004 par laquelle le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a invité à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière pris par le préfet de l'Hérault à l'encontre de M. X vise expressément l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui fixe les conditions dans lesquelles un étranger en situation irrégulière peut être reconduit à la frontière ; qu'en citant cet article dans le jugement attaqué et en rappelant la situation de M. X au regard de la législation sur le séjour des étrangers et les motifs pour lesquels celui-ci pouvait faire l'objet d'une reconduite à la frontière, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Montpellier n'a pas soulevé d'office ce moyen ; qu'en conséquence, M. X n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier et doit être, pour ce motif, annulé ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (…) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (…) » ;

Considérant que M. X fait valoir que plusieurs membres de sa famille, dont certains ont même acquis la nationalité française, résident en France, pays dans lequel il est parfaitement intégré et où il a tissé de nombreux liens amicaux et qu'en conséquence l'arrêté querellé porte une atteinte disproportionnée au respect de son droit à une vie privée et familiale ; que, cependant, le requérant n'établit pas n'avoir plus d'attaches familiales dans son pays d'origine, la Turquie ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée du séjour en France de l'intéressé, célibataire, qui serait entré sur le territoire national en 2002, à l'âge de 25 ans, le préfet de l'Hérault, en prenant l'arrêté de reconduite à la frontière à l'encontre de M. X n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue desquels il a été pris ; que M. X n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et qu'il aurait dû lui être délivré une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L.313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant que M. X fait valoir qu'il serait exposé à une situation dramatique s'il était reconduit dans son pays d'origine, la Turquie ; que, toutefois, ces allégations ne sont corroborées par aucune pièce du dossier, alors que l'office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile politique par décision du 14 mars 2003, confirmée le 31 mars 2004 par la commission des recours des réfugiés ; que, dès lors, le requérant ne saurait se prévaloir de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 16 mars 2006 par lequel le préfet de l'Hérault a décidé sa reconduite à la frontière ; que sa requête doit, dès lors, être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : «Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.» ;

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il résulte de ces mêmes dispositions qu'une collectivité publique qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat ne saurait présenter une demande à ce titre sans se prévaloir de frais spécifiques exposés par elle en indiquant leur nature ; que, par suite, les conclusions présentées au nom de l'Etat par le préfet de l'Hérault ne peuvent qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet de l'Hérault tendant au bénéfice de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X, au préfet de l'Hérault et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

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N°06MA01256

PP


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des reconduites
Numéro d'arrêt : 06MA01256
Date de la décision : 21/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bernard LAFFET
Rapporteur public ?: M. CHERRIER
Avocat(s) : MARCOU

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-12-21;06ma01256 ?
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