Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 2006 :
- le rapport de Mme Busidan, rappporteur,
- les observations de M. Gitard et M. Truchot pour le préfet des Pyrénées-Orientales ;
- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par jugement en date du 30 décembre 2003, le Tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande du préfet des Pyrénées-Orientales, d'une part la délibération en date du 27 juin 2002 par laquelle le conseil municipal de SAINT LAURENT DE LA SALANQUE avait approuvé la troisième modification du plan d'occupation des sols (POS) communal, et d'autre part l'arrêté en date du 9 mai 2003 par lequel le maire de ladite commune avait délivré une autorisation de lotir à la SCI La Méditerranée ; que ladite commune relève appel de ce jugement en tant que ce dernier a annulé comme entachée d'une erreur manifeste d'appréciation la délibération portant modification du POS qui ouvrait à l'urbanisation, en la classant en zone 1Nab, des terrains d'une superficie de 8,1 hectares situés au sud de l'agglomération au lieu-dit «Le Trenc» en zone inondable au plan des surfaces submersibles de l'Agly ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.123-1 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable en l'espèce : «Les plans d'occupation des sols fixent, dans le cadre des orientations des schémas directeurs ou des schémas de secteur, s'il en existe, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire. // Les plans d'occupation des sols doivent, à cette fin, (…) : 1° Délimiter des zones urbaines ou à urbaniser (...). La délimitation de ces zones prend en considération... l'existence de risques naturels prévisibles (...)» ;
Considérant en premier lieu que la circonstance que les juges de référés, de première instance et d'appel, n'aient pas décelé l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation dans la délimitation de la zone du POS en cause, ne fait pas obstacle à ce que le juge du fond, dont l'office est d'une nature différente, relève une telle erreur, étant rappelé que les ordonnances de référé ne sont pas revêtues de l'autorité de la chose jugée ;
Considérant en second lieu qu'il ressort des pièces du dossier que la zone ouverte à l'urbanisation par la délibération en cause a été inondée en septembre 1999 lors d'une crue de l'Agly qui avait causé une brèche dans la digue du fleuve précité au niveau de la station d'épuration de la COMMUNE DE SAINT LAURENT DE LA SALANQUE ; que si la commune soutient que les travaux de consolidation de la digue réalisés depuis sous le contrôle de l'Etat rendent très improbable l'inondation de la ville par rupture de la digue, il ressort d'une étude réalisée en 2002 par la société BRL ingénierie que les travaux de renforcement sus-évoqués n'excluent pas le risque de rupture desdites digues après des débordements du fleuve, alors que, selon les affirmations non contredites du préfet, le calibrage du cours d'eau en cause a été dimensionné pour une crue trentennale seulement, et non pour des événements de récurrence supérieure ;
Considérant qu'en outre, le préfet affirme aussi sans être contredit que toute la longueur des digues au droit de l'agglomération de SAINT LAURENT DE LA SALANQUE n'a pas été renforcée, et que, par suite, une très forte probabilité existe qu'en cas de crue de l'Agly, une brèche se produise en un lieu situé à 1.500 mètres en amont de l'endroit où la digue a cédé lors de la crue de novembre 1999 ; qu'il n'est pas contesté alors que, dans l'hypothèse d'une rupture de digue, causée ou non par des débordements du fleuve, à la suite d'une crue comparable à celle subie en 1999, les bassins de rétention envisagés par la commune seraient remplis en moins de trois minutes alors que la crue peut durer plusieurs heures ou jours ; qu'il en résulte, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, que la menace d'inondation de la station d'épuration des eaux de la commune, située entre l'Agly et la zone en cause ouverte à l'urbanisation par la délibération en litige n'est pas écartée ni, par suite, le risque de débordement des eaux usées vers les constructions qui pourraient être édifiées à l'intérieur de ladite zone ;
Considérant que la circonstance que les prescriptions de hauteur et d'emprise imposées par le règlement du POS aux futures constructions protègeraient en tout état de cause lesdites constructions, n'est pas de nature, par elle-même, à légitimer l'urbanisation de la zone en cause, dans la mesure où d'autres dommages que des atteintes aux biens pourraient survenir en cas d'inondation de la zone ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi par les pièces du dossier que les mesures de protection prises par la commune - travaux, constitution d'une bande inconstructible d'une largeur de 100 mètres le long de la rive gauche de l'Agly, prescriptions - soient suffisantes pour justifier l'urbanisation de la zone en cause au regard du risque prévisible d'inondation ;
Considérant par ailleurs que, pour assurer son développement, la commune ne conteste pas disposer de terrains constructibles situés dans des zones moins exposées au risque d'inondation ; que si la commune fait valoir que seule l'urbanisation de la zone en cause permettrait, dans le cadre des plans d'aménagement d'ensemble approuvés en 1995 et 1997, le financement des importants aménagements hydrauliques nécessaires à la mise hors d'eau du bâti ancien qui reste exposé aux inondations pluviales, cet argument ne peut être retenu dès lors, d'une part, qu'il n'est pas contesté que les travaux des zones habitées très vulnérables sont largement subventionnés par le ministère de l'écologie et du développement durable, et d'autre part, qu'il est peu logique de rechercher le financement indispensable par l'implantation de nouveaux résidents dans les zones les plus exposées aux risques ;
Considérant, dès lors, que le conseil municipal de SAINT LAURENT DE LA SALANQUE ne pouvait adopter la délibération en cause portant modification du POS sans commettre une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions sus-rappelées de l'article L.123-1 du code de l'urbanisme ;
Considérant enfin qu'il ressort de la lecture même des pièces du dossier que le préfet n'a pas cédé à un parti pris méthodologique lorsqu'il a examiné la légalité de la délibération qui lui était transmise et a déféré ladite délibération au tribunal administratif ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas procédé à l'étude des circonstances de droit et de faits propres à l'affaire doit être rejeté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SAINT LAURENT DE LA SALANQUE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 30 décembre 2003, le Tribunal administratif de Montpellier a annulé la délibération du 27 juin 2002 par laquelle son conseil municipal avait approuvé la troisième modification du plan d'occupation des sols ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SAINT LAURENT DE LA SALANQUE est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SAINT LAURENT DE LA SALANQUE, au préfet des Pyrénées-Orientales, à la SCI Méditerranée et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
N° 04MA00420
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