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18/12/2006 | FRANCE | N°04MA02186

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 18 décembre 2006, 04MA02186


Vu, enregistrée le 28 septembre 2004 sous le n°04MA02186, la requête transmise par télécopie et conforme à l'original reçu le 30 septembre suivant au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée par Me Delattre, avocat, pour la COMMUNE DE DRAGUIGNAN, représentée par son maire en exercice ;

La commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à réparer les conséquences dommageables de l'erreur commise par le service du c

adastre lors des opérations de révision effectuées dans la commune en 1972 ;
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Vu, enregistrée le 28 septembre 2004 sous le n°04MA02186, la requête transmise par télécopie et conforme à l'original reçu le 30 septembre suivant au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille, présentée par Me Delattre, avocat, pour la COMMUNE DE DRAGUIGNAN, représentée par son maire en exercice ;

La commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à réparer les conséquences dommageables de l'erreur commise par le service du cadastre lors des opérations de révision effectuées dans la commune en 1972 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de :

- 75.570,50 euros correspondant au prix payé à M ;

- 5.865,25 euros au titre des sommes versées à M. en exécution de décisions du juge judiciaire ;

- 3.074,67 euros au titre des dépens mis à la charge de la commune par le juge judiciaire ;

- 5.208,88 euros au titre des frais d'avocats et d'avoués exposés devant le juge judiciaire ;

- 1.500 euros au titre des frais exposés dans la présente instance et non compris dans les dépens ;

……………………..

Vu les mémoires, enregistrés au greffe de la Cour le 7 avril 2005 et 31 août 2006, présentés pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête ;

……………………..

Vu le mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 14 septembre 2005, présenté par Me Delattre, avocat, pour la COMMUNE DE DRAGUIGNAN, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

………………………..

Vu le mémoire, enregistré au greffe de la Cour le 14 septembre 2006, présenté par Me Delattre, avocat, pour la COMMUNE DE DRAGUIGNAN, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens et porte en outre à 2.000 euros la somme réclamée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le 16 novembre 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

………………….

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 55-471 du 30 avril 1955 ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2006:

- le rapport de M. Brossier, premier conseiller,

- et les conclusions de Mlle Josset, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 1er juin 1977, la commune de DRAGUIGNAN a acquis des héritiers Y une parcelle de terrain d'une superficie de 2ha 30a 90ca, cadastrée section BH n°156, afin d'y implanter une base de loisirs ; qu'en 1990, M. , propriétaire de la parcelle contiguë BH 190, a revendiqué une partie de la propriété de cette parcelle BH 156 en engageant une action auprès des juridictions de l'ordre judiciaire ; que le Tribunal de grande instance de Draguignan a reconnu son droit de propriété, ce qu'a confirmé la Cour d'appel d'Aix-en-Provence par arrêt du 5 mai 1998 ; que la commune de DRAGUIGNAN se prévaut de l'erreur commise par le service du cadastre à l'occasion de la rénovation de ce dernier en 1972 sur son territoire et demande à être indemnisée des divers préjudices qu'elle estime avoir subis à la suite du litige l'opposant à M. et de l'obligation dans laquelle elle affirme s'être trouvée de devoir acheter à nouveau la parcelle litigieuse à son légitime propriétaire ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 du décret n° 55-471 du 30 avril 1955 relatif à la rénovation et à la conservation du cadastre : « La révision du cadastre est effectuée en comparant les données de celui-ci avec l'état actuel des propriétés et en constatant les changements survenus » ; qu'aux termes de l'article 9 du même décret : « Les résultats de la révision du cadastre sont, par notification individuelle, communiqués au propriétaire... » ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que, lorsqu'elle a procédé à la révision du cadastre, l'administration est tenue d'informer les propriétaires des résultats de cette révision, alors même que le cadastre a pour but d'asseoir les impôts locaux et non de fixer les limites juridiques des propriétés ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que lors de la révision cadastrale opérée en 1972, l'expert désigné par l'administration a commis une erreur dans le report sur le plan cadastral des limites des parcelles de MM. et Y ; que le ministre intimé, en se contentant d'invoquer la destruction accidentelle d'archives et de soutenir que les avis de taxes foncières ont été adressés chaque année aux propriétaires concernés, ne conteste pas sérieusement l'allégation selon laquelle MM. et Y n'ont pas été informés en 1972 de la procédure de révision du cadastre et n'ont pas été mis même d'en contester les résultats ; qu'une telle irrégularité de procédure commise par le service du cadastre est constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que la commune est fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à être indemnisée des conséquences dommageables de cette faute ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que cette négligence procédurale a eu pour conséquence directe le procès intenté par le voisin irrégulièrement dépossédé devant le Tribunal de grande instance de Draguignan, poursuivi devant la Cour d'appel d'Aix-en-Provence et, par suite, les frais de procédure supportés par la commune de DRAGUIGNAN en qualité de partie perdante à ce procès ;

Considérant que la commune appelante établit avoir dû prendre en charge les frais d'expertise de cette instance judiciaire taxés, par ordonnance du 2 avril 1997 de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, à la somme de 19.739,80 F (3.009,31 euros) ; qu'elle établit avoir dû verser à M. , en application du jugement Tribunal de grande instance de Draguignan du 6 janvier 1994 et de l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 5 mai 1998, la somme de 33.428,72 F (5.096,18 euros) incluant 13.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, 58 F de droit de plaidoirie, 185,36 F de frais de signification, 185,36 F de frais d'assignation et 20.000 F de dommages et intérêts ; qu'il résulte enfin de l'instruction, notamment des factures produites, que le commune appelante établit avoir a dû supporter la somme de 21.835,58 F (3.328,81 euros) au titre de ses propres frais d'avocat ; qu'ainsi la somme totale de 11.429,30 euros constitue un préjudice résultant directement de l'erreur de procédure commise en 1972 par le service du cadastre et doit, par suite, être mise à la charge de l'Etat ; qu'en revanche, le préjudice invoqué de 75.570,50 euros correspondant au prix payé à M pour l'achat de son terrain ne peut être regardé comme résultant directement de la faute procédurale susmentionnée, dès lors que l'erreur commise par l'expert affectait les limites figurant sur le plan cadastral, mais non les superficies des parcelles, dont aucun élément versé au dossier ne permet de penser qu'elles n'auraient pas été achetées à leur juste prix ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de DRAGUIGNAN est fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 11.429,30 euros ; que le surplus de sa demande indemnitaire doit en revanche être rejetée ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à la commune de DRAGUIGNAN la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er: Le jugement attaqué du Tribunal administratif de Nice en date du 17 juin 2004 est annulé.

Article 2 : L'Etat (ministère de l'économie, des finances et de l'industrie) versera à la commune de DRAGUIGNAN une indemnité de 11.429,30 euros.

Article 3 : L'Etat (ministère de l'économie, des finances et de l'industrie) versera à la commune de DRAGUIGNAN la somme de 1.500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 4 : Le surplus de la requête n°04MA02186 est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de DRAGUIGNAN et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N°04MA02186 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 04MA02186
Date de la décision : 18/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: Melle JOSSET
Avocat(s) : DELATTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-12-18;04ma02186 ?
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