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07/09/2006 | FRANCE | N°04MA01637

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 07 septembre 2006, 04MA01637


Vu le recours, enregistré le 28 juillet 2004, présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0105367 en date du 1er juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a notamment condamné l'Etat à verser à Mme X une somme de 115 000 euros en réparation de son préjudice, ainsi qu'une rente annuelle de 16 425 euros ;

2°) de rejeter les demandes de Mme X ;

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Vu le

jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique et le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrati...

Vu le recours, enregistré le 28 juillet 2004, présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE qui demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0105367 en date du 1er juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a notamment condamné l'Etat à verser à Mme X une somme de 115 000 euros en réparation de son préjudice, ainsi qu'une rente annuelle de 16 425 euros ;

2°) de rejeter les demandes de Mme X ;

……………………………………………………………………………………………………..

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique et le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 juin 2006 :

- le rapport de Mme Bader-Koza, rapporteur ;

- les observations de Me Raynaud-Bremond pour Mmes X et Y ;

- les observations de Me Dejardin, substituant Me Allegrini, pour la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône ;

- et les conclusions de M. Trottier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme Mireille X, employée à la maison de retraite « résidence Saint-Antoine » à Grans entre le 1er juillet 1989 et le 31 décembre 1994, a, en application de l'article L.10 du code de la santé publique qui impose la vaccination contre l'hépatite B à toute personne qui, dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention ou de soins, exerce une activité professionnelle l'exposant à des risques de contamination, reçu les premières injections du vaccin le 4 octobre, 6 novembre et 9 décembre 1991, puis deux rappels le

25 décembre 1992 et le 10 octobre 1997 ; que des examens neurologiques réalisés en 1998 compte tenu de l'apparition de troubles neurologiques, ont révélé qu'elle était atteinte de sclérose en plaques ; qu'estimant que cette affection était directement imputable à ces vaccinations obligatoires, Mme X a présenté une demande, sur le fondement de la responsabilité sans faute prévue par les dispositions précitées de l'article L.10, tendant à ce que l'Etat l'indemnise des préjudices subis du fait de ces vaccinations ; qu'après examen de sa demande par la commission de règlement amiable des accidents vaccinaux placée auprès du ministre chargé de la santé dans sa séance du 22 février 2001, le directeur général de la santé a, par décision du

13 juillet 2001, reconnu la responsabilité de l'Etat et fait offre d'indemnisation sous la forme d'une rente viagère de 9 146,94 euros ; que Mme X, estimant cette offre insuffisante, a saisi le Tribunal administratif de Marseille d'une action en indemnité dirigée contre l'Etat ; que par un jugement avant dire droit en date du 5 novembre 2002, le tribunal a d'une part, estimé que l'état était entièrement responsable des dommages subis par Mme X et, d'autre part, ordonné une expertise afin de déterminer le préjudice de l'intéressée ; que le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE relève appel du seul jugement en date du 1er juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser diverses indemnités aux consorts X ;

Sur l'étendue de la réparation :

Considérant qu'en demandant seulement à la Cour de supprimer le terme « entièrement » du dispositif du jugement avant dire droit en date du 5 novembre 2002, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a déclaré l'Etat entièrement responsable des conséquences de la vaccination contre l'hépatite B subie par Mme X, le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE doit être regardé comme ne contestant pas le principe de la responsabilité de l'Etat mais seulement l'étendue de la réparation à accorder à la victime ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par les premiers juges, que Mme X est atteinte d'une incapacité permanente partielle de 70 % ; qu'elle a subi une période d'incapacité temporaire partielle de 50 % de

mars 1998 à octobre 1999, puis de 60 % à compter de cette date jusqu'en mars 2003 ; que contrairement aux affirmations du MINISTRE, Mme X a ainsi subi des troubles dans ses conditions d'existence dont l'intéressée est même fondée à soutenir, par la voie de l'appel incident, que le tribunal en a fait une appréciation insuffisante ; qu'il en sera fait une juste appréciation en les évaluant à la somme de 150 000 euros ;

Considérant que l'état de l'intéressée justifie, ainsi que l'ont estimé les premiers juges, l'aide d'une tierce personne chaque jour pendant trois heures soit une rente annuelle de 16 425 euros ; que les experts ayant évalué, sur une échelle de 7, les souffrances physiques à 5 et le préjudice esthétique à 3, le tribunal a fait une juste appréciation en les indemnisant respectivement à hauteur de 10 000 et 5 000 euros ;

Considérant que si Mme X soutient qu'en l'absence de maladie, elle aurait pu occuper un emploi de secrétaire à temps plein, percevoir ainsi un salaire au moins égal au SMIC et acquérir des droits pour sa retraite, ce chef de préjudice ne présente par un caractère certain susceptible d'ouvrir droit à réparation ;

Considérant qu'en allouant à l'époux de Mme X, désormais décédé une somme de 6 000 euros et à chacune de ses filles une somme de 3 000 euros, le tribunal a fait une juste appréciation de leur préjudice moral ;

Considérant enfin, que la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône justifiant elle aussi de débours en relation avec les conséquences de la vaccination, c'est à bon droit que les premiers juges ont condamné l'Etat à lui rembourser une somme de 150 511,86 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu de rectifier le dispositif de jugement avant dire droit du 5 novembre 2002 dès lors que le terme « entièrement » n'emporte aucune conséquence, que le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en date du

1er juin 2004, le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à indemniser

Mme X de l'ensemble des préjudices dont elle a pu justifier ;

Sur les conclusions de Mme X tendant à la condamnation de l'Etat pour appel dilatoire :

Considérant en revanche que Mme X n'est pas fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 10 000 euros pour procédure abusive, le MINISTRE DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE s'étant borné à utiliser les voies de droit qui lui sont ouvertes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : «Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.» ;

Considérant qu'il y a lieu, en application des dispositions précitées, de condamner l'Etat à verser à Mme X la somme de 2 000 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône une somme de 1 500 euros, au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'indemnité accordée par le jugement en date du 1er juin 2004 du Tribunal administratif de Marseille est portée à la somme de 165 000 euros.

Article 2 : Le jugement en date du 1er juin 2004 du Tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire avec les dispositions de l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : L'Etat versera, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros à Mme X et une somme de 1 500 euros à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.

Article 4 : Le recours du ministre de la santé et de la protection sociale et le surplus de conclusions de l'appel incident de Mme X sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X, à Mme Y, à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et au MINISTRE DE LA SANTE ET DES SOLIDARITES.

Copie sera adressée à Me Allegrini, à Me Raynaud-Brémond et au préfet des Bouches-du-Rhône.

N° 0401637 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 04MA01637
Date de la décision : 07/09/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Sylvie BADER-KOZA
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : ALLEGRINI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-09-07;04ma01637 ?
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