Vu la requête, enregistrée le 5 août 2004, présentée pour M. Jonathan X, domicilié ..., par Me Olive ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0002412 du 2 avril 2004 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur à lui verser 595 032,26 F (90 712,08 euros) et de le condamner à lui verser la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
2°) de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur à lui verser la somme de 62 356,56 euros en application du protocole signé le 23 mai 1996, la somme de 9 146,94 euros au titre du préavis de 3 mois non respecté, la somme de 914,69 euros au titre des congés payés sur préavis, la somme de 9 146,94 euros en réparation de son préjudice professionnel, la somme de 9 146,94 euros en réparation de son préjudice moral, sommes qui porteront intérêts au taux légal à compter du 11 septembre 1997, date de la demande préalable de M. X, ainsi que la capitalisation de ces intérêts ;
3°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur une somme de 2 286,73 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mai 2006,
- le rapport de Mme Lorant, président assesseur ;
- les observations de Me Expert substituant Me Rouillot pour la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur ;
- et les conclusions de Mme Paix, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X demande la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur à réparer le préjudice résultant selon lui des fautes commises par la chambre d'une part en le licenciant illégalement et d'autre part en négligeant de vérifier la régularité de sa situation avant son recrutement ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'attestation de maintien d'affiliation à la sécurité sociale de l'employeur de M. X aux Etats-Unis, validée par la signature d'un notaire, n'aurait pas de valeur juridique en l'absence de signature dudit employeur ; qu'ainsi ce seul motif ne pouvait justifier le licenciement de M. X ;
Mais considérant qu'aux termes de l'article L.341-2 du code du travail dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : « Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger doit présenter, outre les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur, un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail et un certificat médical. », et qu'aux termes de l'article L.341-6 du même code : « Nul ne peut, directement ou par personne interposée, engager, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. » ; que ces dispositions sont d'ordre public ; que par suite, la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur était tenue de mettre fin au contrat de M. X à raison de ce qu'il ne disposait pas d'un titre de séjour l'autorisant à travailler en France ni du visa de long séjour qui aurait pu lui permettre d'obtenir la délivrance de ce titre ; que par suite le licenciement de M. X sur ce fondement n'est entaché d'aucune illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de la chambre de commerce et d'industrie ; que la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur ayant compétence liée pour ce faire, l'ensemble des autres moyens de M. X sont inopérants ;
Considérant cependant qu'il appartenait à la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur, préalablement au recrutement de M. X, sinon de l'accompagner dans ses démarches, à tout le moins de vérifier s'il était titulaire du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France, titre pour l'obtention duquel la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur aurait dû fournir une attestation selon laquelle elle était disposée à le recruter ; que ce faisant, en fournissant à M. X des informations incomplètes ou erronées, la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'azur a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, que la propre négligence fautive de M. X, qui avait par ailleurs, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, produit une attestation de maintien d'affiliation à la sécurité sociale auprès de son employeur rédigée par lui mais validée par la signature d'un notaire et dont la chambre de commerce n'établit pas qu'elle serait frauduleuse, atténue à proportion de 50 % ;
Considérant que, s'agissant de la perte de revenus, M. X n'établit pas qu'il n'aurait pas perçu de revenus pendant la période couvrant la fin de son contrat ; que dans les circonstances de l'espèce, compte tenu des frais engagés par M. X, et des troubles dans les conditions d'existence de toute nature qu'il a subis du fait de la brutalité de la rupture de son contrat, il sera fait une juste appréciation de son préjudice en l'évaluant à 30 000 euros ; que compte tenu du partage de responsabilité ci-dessus mentionné, il y a lieu de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur à verser à M. X une somme de 15 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté intégralement sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur à verser à
M. X une somme de 1 500 euros au titre de ces dispositions ; que la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur étant la partie perdante, ses conclusions présentées de ce chef ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 2 avril 2004 est annulé.
Article 2 : La chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur versera à M. X une somme de 15 000 (quinze mille) euros.
Article 3 : La chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur versera à M. X une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jonathan X, à la chambre de commerce et d'industrie de Nice Côte d'Azur et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
N° 04MA01625 4