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20/06/2006 | FRANCE | N°03MA02070

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 20 juin 2006, 03MA02070


Vu la requête, enregistrée le 6 octobre 2003, présentée pour Mme Monique X, domiciliée ..., par Me Clauzade ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0003116 du 2 juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du

19 mai 1998 admettant sa mise à la retraite pour invalidité et de la décision du 29 mai 2000 portant refus d'attribution d'une rente viagère d'invalidité ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre à l'ad

ministration sur le fondement de l'article L.911-1 du code de justice administrative de reconstitu...

Vu la requête, enregistrée le 6 octobre 2003, présentée pour Mme Monique X, domiciliée ..., par Me Clauzade ;

Mme X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0003116 du 2 juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du

19 mai 1998 admettant sa mise à la retraite pour invalidité et de la décision du 29 mai 2000 portant refus d'attribution d'une rente viagère d'invalidité ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre à l'administration sur le fondement de l'article L.911-1 du code de justice administrative de reconstituer sa carrière depuis le 15 septembre 1998 et de lui allouer les sommes en découlant ;

4°) d'enjoindre à l'administration de saisir la commission de réforme afin qu'elle statue sur l'origine professionnelle de sa maladie en vue de l'attribution d'une rente viagère d'invalidité ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, une somme de 1.000 euros au titre de l'article L.744-5 et L.761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 9 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2006,

- le rapport de Mme Lorant, président assesseur ;

- les observations de Mme X ;

- les observations de Me Berthard substituant Me Clauzade pour Mme X ;

- et les conclusions de Mme Paix, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de la décision du 19 mai 1998 admettant Mme X à la retraite pour invalidité :

Considérant qu'aux termes de l'article 27 du décret du 14 mars 1986 susvisé : « Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, un fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir.

Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical : en cas d'avis défavorable il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par le ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, que la commission de réforme ne s'est pas réunie avant que ne soit prise la décision d'admettre à la retraite

Mme X ; que si le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche soutient que le décret précité ne prévoit de saisir la commission de réforme qu'à l'issue d'un congé de 12 mois, alors que l'intéressée n'était en congé que depuis 6 mois, d'une part Mme X, en congé depuis le 17 septembre 1997, n'a été admise à la retraite qu'à compter du 18 septembre 1998, et d'autre part la circonstance que Mme X n'aurait pas pu bénéficier de la totalité de ses congés de maladie ordinaire n'aurait pu avoir pour effet, en tout état de cause, de dispenser l'administration de la saisine de la commission de réforme ; que si le ministre invoque les circulaires 98-125 et FP4 n° 1711 qui dispensent dans certaines conditions particulières l'administration de la saisine de la commission de réforme, ces circulaires sont illégales, en ce qu'une autorité incompétente a modifié le décret précité par la privation d'une garantie qu'il a instituée ; qu'ainsi la décision admettant Mme X à la retraite et entachée d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ladite décision ;

Sur la légalité de la décision refusant l'attribution d'une rente viagère d'invalidité :

Considérant qu'aux termes de l'article L.55 du code des pensions civiles et militaires de retraite : « La pension et la rente viagère d'invalidité sont définitivement acquises et ne peuvent être révisées ou supprimées à l'initiative de l'administration ou sur demande de l'intéressé que dans les conditions suivantes : A tout moment en cas d'erreur matérielle ; dans un délai d'un an à compter de la décision de concession initiale de la pension ou de la rente viagère en cas d'erreur de droit (...) » ;

Considérant que l'annulation de la décision admettant Mme X à la retraite pour invalidité implique nécessairement que l'administration prenne une nouvelle décision qui en tout état de cause, même si cette décision l'admet de nouveau à la retraite, ne peut produire effet à une date antérieure à celle de sa notification ; qu'ainsi la décision liquidant la pension de

Mme X est nécessairement entachée d'erreur de fait sur la date de cette décision d'admission et que par suite la forclusion prévue par les dispositions précitées n'est pas opposable à Mme X ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.31 du code des pensions civiles et militaires de retraite, article qui fait partie des dispositions communes relatives à l'invalidité des fonctionnaires civils : « La réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions sont appréciés par une commission de réforme selon des modalités qui sont fixées par un décret en Conseil d'Etat.

Le pouvoir de décision appartient, dans tous les cas, au ministre dont relève l'agent et au ministre des finances.» ;

Considérant qu'il est constant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, seul le comité médical a été consulté lors de l'admission à la retraite de Mme X, en méconnaissance des dispositions précitées l'article L.31 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que par suite la décision liquidant sa pension, et notamment lui refusant une rente viagère d'invalidité, est entachée d'illégalité ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. » ;

Considérant que l'annulation des décisions litigieuses implique comme obligation pour l'administration de reprendre la procédure d'admission à la retraite de Mme X de manière régulière en soumettant le cas de l'intéressée à la commission de réforme et de prendre une nouvelle décision dont elle devra tirer toutes les conséquences en reconstituant la carrière de Mme X depuis le 19 septembre 1998 jusqu'à la date d'effet de la nouvelle mesure, qui en tout état de cause ne pourra être postérieure à l'âge limite auquel Mme X était tenue de prendre sa retraite, en procédant à une nouvelle liquidation de sa pension et en soumettant la demande de rente viagère d'invalidité de Mme X à la commission de réforme aux fins pour cette dernière d'apprécier si la maladie de Mme X est ou non d'origine professionnelle ; qu'en revanche l'indemnisation du préjudice subi par Mme X à raison de sa mise à la retraite illégale n'est pas la conséquence nécessaire des annulations dont s'agit ; que par suite lesdites conclusions ne peuvent qu'être rejetées dans le cadre de la présente injonction ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, à verser à Mme X la somme de 1.000 euros qu'elle demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice du 2 juillet 2003 est annulé.

Article 2 : La décision du 19 mai 1998 admettant Mme X à la retraite et la décision du 29 mai 2000 lui refusant l'attribution d'une rente viagère d'invalidité sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de reprendre la procédure de manière régulière en soumettant le cas de l'intéressée à la commission de réforme et de prendre une nouvelle décision dont elle devra tirer toutes les conséquences en reconstituant la carrière de Mme X depuis le 19 septembre 1998 jusqu'à la date d'effet de la nouvelle mesure, qui en tout état de cause ne pourra être postérieure à l'âge limite auquel Mme X était tenue de prendre sa retraite puis de procéder à une nouvelle liquidation tenant compte de cette nouvelle date et de l'assortir éventuellement, après consultation de la commission de réforme d'une rente viagère d'invalidité.

Article 4 : Le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche versera à Mme X une somme de 1.000 (mille) euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme X est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Monique X, au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 03MA02070 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03MA02070
Date de la décision : 20/06/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GOTHIER
Rapporteur ?: Mme Nicole LORANT
Rapporteur public ?: Mme PAIX
Avocat(s) : BOYER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-06-20;03ma02070 ?
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