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10/01/2006 | FRANCE | N°02MA02084

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 10 janvier 2006, 02MA02084


Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2002, présentée pour M. Michel X, élisant domicile ..., par la SCP Le Sergent-Roumier-Faure ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9703678 du 16 mai 2002 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamées au titre des années 1989, 1990, 1991 et 1993 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des imp...

Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2002, présentée pour M. Michel X, élisant domicile ..., par la SCP Le Sergent-Roumier-Faure ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9703678 du 16 mai 2002 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamées au titre des années 1989, 1990, 1991 et 1993 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2005,

- le rapport de Mme Mariller, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Bonnet, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision en date du 7 avril 2003, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux du Gard a prononcé le dégrèvement, à concurrence d'une somme de 1 051 euros de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à la charge de M. X au titre de l'année 1991 et correspondant à la différence entre le montant de l'intérêt de retard notifié et le montant effectivement mis en recouvrement ; que les conclusions de la requête de M. X relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article L.48 du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes de l'article L.48 du livre des procédures fiscales : « À l'issue d'un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la notification prévue à l'article L.57 du livre des procédures fiscales, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements. (...) » ; que, d'autre part, en vertu de l'article 8 du code général des impôts : « les associés des sociétés civiles de droit ou de fait sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société » ;

Considérant, en premier lieu, que M. Michel X est détenteur avec son épouse de la totalité des parts sociales de la SARL la Saint-Gilloise, laquelle a opté, en application des dispositions de l'article 239 bis AA du code général des impôts, pour le régime fiscal des sociétés de personnes mentionné à l'article 8 précité du code ; qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la SARL La Saint-Gilloise portant sur les années 1989 à 1991, l'administration a réintégré dans les bases de l'impôt sur le revenu de M. et Mme X afférent à ces mêmes années les déficits qu'ils avaient déduits provenant de ladite société ; que la notification de redressement en date du 24 décembre 1992, adressée à la société la Saint-Gilloise, qui n'entraîne pour cette dernière aucun rehaussement d'imposition, n'avait pas à indiquer le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements ; qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'impose à l'administration de notifier aux associés les conséquences financières des redressements résultant de la vérification de comptabilité avant l'expiration du délai imparti à la société pour présenter ses observations sur les redressements ; que le requérant qui a conservé la possibilité de contester les redressements après la notification de redressement qui lui a été adressée le 1er juillet 1993 et qui comportait les mentions exigées par l'article L.48 n'est donc pas fondé à soutenir que ces dispositions ont été méconnues ;

Considérant, en second lieu et d'une part, que M. X ne peut utilement se prévaloir de ce que le montant des pénalités qui lui ont été notifiées au titre des années 1989, 1990 et 1991 était inférieur à celui mis en recouvrement dès lors que l'administration a prononcé le dégrèvement total des pénalités mises à sa charge au titre des années 1989 et 1990 et lui a accordé en ce qui concerne l'année 1991 le dégrèvement de la différence entre le montant notifié et le montant mis en recouvrement ; qu'il est, d'autre part, constant que les droits mis en recouvrement au titre des années 1989 et 1990 sont supérieurs de 1 673 et de 4 638 francs à ceux indiqués à M. X dans la notification de redressements du 1er juillet 1993, ce qui représente un écart de 2% au titre de 1989 et de 4,46% en 1989 ; que l'erreur ainsi commise dans la notification, qui en raison de son caractère modeste n'a pas été de nature à influer sur le comportement du contribuable quant à l'acceptation ou la contestation des redressements, demeure sans influence sur la régularité de l'ensemble de la procédure d'imposition ; que le contribuable est néanmoins en droit d'obtenir la décharge de la somme résultant de la différence entre le montant des droits notifiés et celui mis en recouvrement ;

Considérant, toutefois, qu'en vertu des dispositions de l'article L.203 du livre des procédures fiscales, l'administration peut à tout moment de la procédure demander la compensation entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande ; que sur le fondement de ces dispositions, le ministre est fondé à demander la compensation entre les dégrèvements ainsi justifiés à hauteur de 1 673 et 4 638 francs et le dégrèvement de la totalité des intérêts de retard afférents aux mêmes années d'imposition, et s'élevant respectivement aux sommes de 18 161 et 19 496 francs, qu'il indique, sans être contredit avoir indûment déchargés à l'issue de l'instance devant le tribunal administratif de Montpellier accordant seulement au demandeur la décharge des pénalités de 80% ; que compte tenu de cette compensation, M. X ne peut donc prétendre à aucun dégrèvement complémentaire ;

En ce qui concerne l'application de l'article L.57 du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation... » ; que M. X invoque la violation de ces dispositions au motif que les impositions ont été mises en recouvrement sur une base supérieure à celle notifiée ; que néanmoins, l'erreur commise dans l'indication des bases, et qui concerne seulement l'omission de revenus divers initialement déclarés par M. et Mme X, n'a pas empêché le requérant de produire utilement ses observations sur les redressements envisagés et d'engager la discussion avec l'administration ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que cette notification serait entachée d'une insuffisance de motivation ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne la prescription de l'imposition de l'année 1989 :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L.169 du livre des procédures fiscales : « Pour l'impôt sur le revenu…, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce… jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due… » ; et qu'aux termes de l'article L.189 : « La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement... » ; que, d'autre part, selon l'article L.53 du livre des procédures fiscales : « En ce qui concerne les sociétés dont les associés sont personnellement soumis à l'impôt pour la part des bénéfices correspondant à leurs droits dans la société, la procédure de vérification des déclarations déposées par la société est suivie entre l'administration des impôts et la société elle-même » ; qu'il ressort de la combinaison de ces dispositions et de celles de l'article 8 du code général des impôts relatif à l'imposition des membres des sociétés de personnes que la notification régulière à une société imposable conformément audit article 8, de redressements apportés à ses résultats déclarés, interrompt nécessairement la prescription à l'égard de ses associés, en tant que redevables de l'impôt sur la quote-part des résultats de la société correspondant à leurs droits dans celle-ci ; que, par suite, la notification de redressements du 24 décembre 1992 adressée à la SARL La Saint-Gilloise, qui était régulière au regard des dispositions de l'article L.48, a interrompu la prescription à l'égard de M. X ; que le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que l'imposition afférente à l'année 1989 était prescrite ;

En ce qui concerne l'abus de droit :

Considérant que M. X a déduit de son revenu global déclaré au titre des années 1989, 1990 et 1991 le déficit industriel et commercial enregistré par la SARL La Saint-Gilloise dont son épouse et lui-même étaient les seuls associés ; que suite à la vérification de comptabilité de la société, l'administration a réintégré les sommes correspondantes dans le revenu imposable, estimant que l'intéressé avait constitué cette société dans le seul but d'éluder l'impôt ; qu'au titre de l'année 1993, M. X a présenté une réclamation à l'administration tendant à l'imputation sur son revenu des déficits de ladite société, ce que le service a refusé ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : « Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses... qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus... L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'imposition litigieuse. Si elle s'est abstenue de prendre l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit ou ne s'est pas rangée à l'avis de ce comité, il lui appartient d'apporter la preuve du bien-fondé du redressement » ; qu'en l'espèce, il est constant que l'administration n'a pas consulté le comité consultatif ; que, par suite, elle supporte la charge de la preuve ;

Considérant que la SARL La Saint-Gilloise a été créée par M. et Mme X le 31 juillet 1986 pour exercer l'activité de marchand de biens ; qu'elle a racheté la maison occupée par les requérants le 3 novembre suivant pour la somme de 1 800 000 francs, financée au moyen de la souscription d'un prêt de 1 500 000 francs et par l'inscription d'une somme de 300 000 francs au crédit du compte courant des associés ; qu'il résulte de l'instruction que l'achat de la maison a constitué la seule activité de la société au cours de son existence légale et que malgré son objet social, la société n'a entrepris aucune démarche pour la revendre ; que la partie à usage professionnel de l'immeuble n'a fait l'objet d'aucune location ; que la partie à usage d'habitation a été occupée par les époux X qui n'ont versé aucun loyer en contrepartie ; que les emprunts contractés par la société ont été remboursés par M. X lui-même qui inscrivait ensuite le montant des remboursements au crédit de son compte courant ; qu'ainsi, même si la société a été régulièrement constituée et si elle a eu une existence légale, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère fictif de l'opération ; qu'enfin, si le requérant fait valoir que la création de la société n'obéissait pas à un impératif fiscal mais devait lui permettre de restructurer sa dette immobilière et s'il établit la réalité de ses difficultés financières, il résulte de l'instruction que les époux X étaient les seuls associés de la SARL, qui n'avait pour tout patrimoine que l'immeuble occupé par eux, et qu'ainsi, la création de la société n'a pu avoir pour effet de leur permettre de renégocier plus avantageusement leurs prêts, ce qu'ils auraient pu faire directement et personnellement en dehors de la création de la personne morale ; que l'administration établit ainsi l'intérêt exclusivement fiscal de l'opération ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

DÉCIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 1 051 euros en ce qui concerne le complément d'impôt sur le revenu de l'année 1991 il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X.

Article 2 : les dégrèvements de 1 673 et 4 638 francs auxquels M. X est en droit de prétendre au titre des années 1989 et 1990 sont compensés avec les intérêts de retard de montants supérieurs afférents aux même années et indûment dégrevés.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 02MA02084 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA02084
Date de la décision : 10/01/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. RICHER
Rapporteur ?: Mme Cécile MARILLER
Rapporteur public ?: M. BONNET
Avocat(s) : SCP LE SERGENT-ROUMIER-FAURE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-01-10;02ma02084 ?
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