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30/06/2005 | FRANCE | N°99MA01500

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 30 juin 2005, 99MA01500


Vu la requête transmise par télécopie, enregistrée le 5 août 1999, présentée pour M. Christian X, élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Jean-Claude Sebag et Isabelle Brunschvicg-Sebag ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-6580 du 29 avril 1999 par lequel le tribunal administratif de Marseille n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation de la commune de Trets à lui verser une indemnité de 3 593 104,80 F, assortie des intérêts de droit, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des agissements fau

tifs de la commune ;

2°) de faire droit intégralement à sa demande et d...

Vu la requête transmise par télécopie, enregistrée le 5 août 1999, présentée pour M. Christian X, élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Jean-Claude Sebag et Isabelle Brunschvicg-Sebag ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-6580 du 29 avril 1999 par lequel le tribunal administratif de Marseille n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la condamnation de la commune de Trets à lui verser une indemnité de 3 593 104,80 F, assortie des intérêts de droit, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait des agissements fautifs de la commune ;

2°) de faire droit intégralement à sa demande et de condamner la commune de Trets à lui payer, pour l'ensemble des préjudices subis à ce jour, la somme de 4 374 750 F arrêtée au 31 décembre 1997 outre 49 250 F pour chaque mois écoulé depuis lors jusqu'à l'arrêt à intervenir outre les intérêts au taux légal sur la totalité de cette demande à compter de la demande préalable soit le 3 juin 1996 ;

3°) d'ordonner la capitalisation des intérêts par année ;

4°) de condamner la commune de Trets à lui verser une somme de 25 000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2005,

- le rapport de Mme Buccafurri, rapporteur ;

- les observations de Me Hamdi du cabinet d'avocats Faure et Hamdi pour la commune de Trets ;

- et les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, qui avait été autorisé à créer un lotissement de trois lots réservés à une activité industrielle et commerciale et qui avait été autorisé à procéder à la location des terrains compris dans le lotissement en cause avant d'avoir exécuté les travaux prescrits par l'arrêté de lotir, a obtenu, en vertu d'un arrêté du maire de la commune de Trets en date du 20 juillet 1990, un permis de construire un bâtiment à usage de local commercial d'une surface hors oeuvre nette (SHON) de 1 960 m² sur les trois lots considérés ; que, toutefois, ledit permis de construire a été annulé par un jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 12 avril 1994, confirmé par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 7 novembre 1995 au motif qu'en application des dispositions des articles R. 315-33 et R. 315-39-1 du code de l'urbanisme, l'autorisation de construire en cause ne pouvait être délivrée qu'à compter du 14 mars 1991, soit dans les six mois précédant la date limite fixée par l'article R. 315-33 b du code de l'urbanisme ; qu'estimant avoir subi des préjudices du fait de la délivrance de ce permis de construire illégal et des agissements du maire de la commune de Trets qu'il estimait fautifs, il a saisi le Tribunal administratif de Marseille d'une demande, dirigée contre la commune de Trets, aux fins d'être indemnisé desdits préjudices ; que l'intéressé relève appel du jugement susvisé en date du 29 avril 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille n'a fait droit à sa demande qu'à hauteur d'une somme de 30 000 F ; que, par la voie de l'appel incident, la commune de Trets demande à la Cour de réformer ledit jugement en tant qu'il l'a condamnée au versement de cette indemnité ;

Considérant, en premier lieu, que si M. X soutient que le maire de la commune en opposant des classements sans suite de demandes de permis de construire qu'il a déposées entre le 25 juin 1991 et 22 février 1994, qu'il estime illégaux, aurait commis des agissements fautifs de nature à engager la responsabilité de la commune de Trets, il ne résulte pas de l'instruction, alors que la nature desdites demandes n'est pas précisée, que les pièces complémentaires réclamées par le maire, dont il est constant qu'elles n'ont pas été produites par l'intéressé, n'étaient pas nécessaires à l'instruction desdites demandes ; que, par suite, M. X n'établit pas le caractère illégal des classements sans suite en litige et le caractère fautif des refus qui lui ont été opposés ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. X n'établit pas que le maire de la commune de Trets aurait, comme il le soutient, exercé des pressions sur des candidats à la location des surfaces commerciales situées dans l'immeuble en litige et empêché leur exploitation par ses agissements ; qu'en particulier, le courrier adressé par le maire le 2 septembre 1992 au responsable de l'enseigne « Intermarché », qui avait manifesté son intention de s'installer dans une partie des locaux loués par M. X, n'est pas à lui seul de nature à caractériser un agissement fautif du maire ; que M. X n'établit pas davantage qu'il aurait subi une perte de chance de louer lesdits locaux à d'autres candidats du fait de l'attitude du maire de la commune ;

Considérant, en troisième lieu, que si M. X soutient que le maire de la commune aurait illégalement décidé d'obstruer l'accès du lotissement au chemin départemental (CD) n° 6, il n'établit ni la réalité de la décision du maire d'obstruer l'accès à cette voie ni, à la supposer existante, son caractère fautif, par les documents versés au dossier, et notamment la lettre par laquelle le maire lui a réclamé, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis de construire déposée en 1994, l'autorisation de voirie relative à l'accès au CD 6 ;

Considérant, en quatrième lieu, que si M. X fait valoir que, du fait des limitations apportées à la création de surfaces commerciales par la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 modifiant la loi du 27 décembre 1973, il subirait un préjudice quant aux conditions de location du bâtiment irrégulièrement édifié, il n'établit pas, en tout état de cause, qu'eu égard à ces nouvelles dispositions d'urbanisme, il lui serait impossible de régulariser ladite construction et de l'exploiter dans les conditions qu'il envisageait initialement alors surtout que l'annulation du permis de construire en litige a été prononcée au motif de sa délivrance prématurée ; que si, en appel, il fait valoir qu'il a droit d'être indemnisé du préjudice qu'il a subi entre la date de la délivrance du permis de construire illégal et l'entrée en vigueur des dispositions de la loi du 5 juillet 1996, le caractère certain et direct du préjudice ainsi allégué n'est pas établi dès lors que la décision illégale ici en litige n'est pas un refus de permis de construire, qui aurait été de nature à faire obstacle à l'exploitation du local, mais la délivrance d'un permis de construire qui, par définition, n'a pu empêcher son exploitation ;

Considérant, en cinquième lieu, que si la délivrance illégale du permis de construire du 20 juillet 1990 constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Trets à l'égard de M. X, ce dernier ne peut prétendre à une indemnisation à ce titre que dans la mesure où il justifie d'un préjudice direct et certain ;

Considérant, d'une part, que M. X demande l'indemnisation des pertes locatives qu'il a subies du fait de l'impossibilité de louer en totalité les locaux commerciaux situés dans le bâtiment irrégulièrement édifié ; que, toutefois, le permis de construire dont M. X était titulaire ayant été jugé illégal, l'intéressé doit être regardé comme n'ayant jamais obtenu un droit de construire ; que, par suite, le bénéfice qu'il aurait pu retirer de la construction envisagée serait résulté d'une opération elle-même illégale ; que M. X ne saurait, dès lors, prétendre à être indemnisé d'un manque à gagner ;

Considérant, d'autre part, que M. X fait valoir que, du fait de son impossibilité de louer les locaux situés dans le bâtiment irrégulièrement autorisé, il n'a pu faire face aux échéances de l'emprunt qu'il avait contracté en vue de l'édification dudit bâtiment et qu'il a dû s'acquitter d'intérêts de retard ; que, toutefois, l'intéressé n'établit pas le caractère direct du préjudice ainsi invoqué dès lors qu'il aurait été tenu, en tout état de cause, de faire face aux échéances de l'emprunt en cause, nonobstant l'illégalité du permis en litige ; qu'il n'est, par ailleurs, pas établi que l'impossibilité de louer les locaux en cause résulterait directement de l'illégalité du permis de construire en litige ;

Considérant, en outre, que M. X n'établit pas qu'il aurait subi un préjudice moral résultant directement de l'illégalité dudit permis ;

Considérant, en sixième lieu, qu'il résulte de l'instruction que, par l'arrêté en date du 12 août 1994, le maire de la commune de Trets a illégalement ordonné la fermeture du local exploité par M. Verani au motif de l'absence de consultation de la commission de sécurité, une telle consultation n'étant pas exigée par les dispositions du code de la construction et de l'habitation, pour les établissements qui, comme en l'espèce, appartiennent à la cinquième catégorie ; que, toutefois, si une telle illégalité est de nature à engager la responsabilité de la commune de Trets, M. X ne peut, sur ce fondement, demander l'indemnisation du préjudice né du défaut du paiement des loyers par M. Verani dès lors que, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, il ne peut prétendre à être indemnisé d'un manque à gagner qui résulterait de l'exploitation d'un bâtiment édifié illégalement ;

Considérant, en revanche, que, comme l'ont à bon droit estimé les premiers juges, la correspondance adressée par le maire de la commune de Trets à M. X le 9 juillet 1993, par laquelle cette autorité subordonnait la délivrance d'une autorisation de voirie sur le CD 6 à la renonciation par M. X à ses projets commerciaux, est intervenue dans un but autre que celui qui doit être poursuivi par l'autorité administrative compétente en matière de délivrance d'autorisations de voirie ; que, ce faisant, contrairement à ce que soutient la commune de Trets, par la voie de l'appel incident, le maire de la commune a commis une manoeuvre de nature à engager la responsabilité de la commune ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, et M. X n'établit pas que ce comportement fautif aurait engendré pour lui-même d'autres préjudices que le préjudice moral indemnisé par les premiers juges ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction, qu'en fixant à la somme de 30 000 F ledit préjudice, les premiers juges en auraient fait une insuffisante évaluation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille n'a fait droit à sa demande que dans cette mesure ; que, pour sa part, la commune de Trets n'est pas fondée à demander la réformation dudit jugement en tant qu'il a prononcé à son encontre la condamnation dont il s'agit ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Trets, qui n'est pas la partie qui perd pour l'essentiel dans la présente instance, soit condamnée à payer à M. X une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner M. X à payer à la commune de Trets une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : L'appel incident et les conclusions formulées par la commune de Trets sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, à la commune de Trets et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2005, où siégeaient :

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA01500
Date de la décision : 30/06/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. CHERRIER
Avocat(s) : SEBAG

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-06-30;99ma01500 ?
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