Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 mars 2005, sous le n° 05MA00678, présentée pour Monsieur Redha X, élisant domicile chez Madame X, ..., par Me Djahnine, avocat ; Monsieur X demande au président de la Cour :
1°/ d'annuler l'ordonnance n° 0501250 en date du 28 février 2005 par laquelle le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 février 2005 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé l'Algérie comme pays de destination ;
2°/ d'annuler ledit arrêté ;
3°/ de faire injonction au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour ;
4°/ de condamner l'Etat au versement d'une somme de 2000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu l'ordonnance attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et notamment ses articles 3 et 8 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision, en date du 27 décembre 2004, par laquelle le président de la Cour a délégué, en application des dispositions de l'article R.776-19 du code de justice administrative, M. Laffet, président, pour statuer sur l'appel des jugements rendus en matière de reconduite à la frontière ;
Les parties ayant été régulièrement averties de l'audience publique ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Cherrier, commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant qu'aux termes de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France, repris sous l'article L.776-1 du code de justice administrative : « I. - L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification lorsque l'arrêté est notifié par voie administrative ou dans les sept jours lorsqu'il est notifié par voie postale, demander l'annulation de cet arrêté au président du tribunal administratif (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué a été notifié à M. X le 26 février 2005 à 15 heures ; qu'en vertu des dispositions précitées de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, M. X pouvait donc jusqu'au 28 février 2005 à 15 heures exercer un recours contre ledit arrêté en date du 26 février 2005 ; que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. X dirigée contre l'arrêté qui a décidé sa reconduite à la frontière, par ordonnance en date du 28 février 2005, au motif qu'elle était tardive pour n'avoir été enregistrée au greffe du Tribunal que le 28 février 2005 à 15 heures et 11 minutes ; que, toutefois, il ressort du relevé détaillé des communications établies par télécopie par le conseil du requérant qu'à quatre reprises, entre 14 h 53 et 15 h, le 28 février 2005, des transmissions ont été effectuées vers le numéro de télécopie du Tribunal administratif de Marseille, alors qu'il résulte de l'examen du rapport d'activité du télécopieur de cette juridiction qu'aux mêmes moments des essais de connexions sont restés infructueux ; qu'ainsi, eu égard aux marges d'incertitudes techniques existantes et du faible laps de temps qui sépare l'heure de l'expiration du délai de recours de l'heure d'enregistrement de la requête, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille a rejeté, comme manifestement irrecevable pour tardiveté, la demande présentée par M. X ;
Considérant qu'il y a lieu d'annuler ladite ordonnance, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. X devant le Tribunal administratif de Marseille ;
Sur la légalité de l'arrêté portant reconduite à la frontière :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en vigueur à la date de la décision attaquée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification de la décision du 28 avril 2000 du préfet des Bouches-du-Rhône lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; que cette décision a au demeurant été confirmée par un jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 2 mai 2001 ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. Alain Marc, directeur de cabinet du préfet des Bouches-du-Rhône, avait reçu délégation de signature du préfet des Bouches-du-Rhône en ce qui concerne les arrêtés de reconduite à la frontière par arrêté en date du 30 août 2004, régulièrement publié au recueil des actes administratifs n°2004-98, rendu public le même jour ; que M. Marc a donc pu régulièrement signer l'arrêté du 26 février 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. X ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour de M. Redha X, âgé de 31 ans, célibataire, sans enfant, dont un frère et une soeur résident toujours en Algérie, et nonobstant la circonstance que sa mère et sa soeur soient de nationalité française, l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 26 février 2005 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, enfin, que si M. X soutient qu'il a fuit les menaces et la violence des groupes terroristes sévissant en Algérie, son pays d'origine, ces allégations ne sont corroborées par aucune pièce du dossier ; que dès lors, le requérant ne saurait se prévaloir, en tout état de cause, de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Marseille doit être rejetée ;
Sur les conclusions aux fins de régularisation de la situation administrative de l'intéressé :
Considérant que la présente décision, qui rejette la demande de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. X un titre de séjour doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 0501250 en date du 28 février 2005 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Marseille est annulée.
Article 2 : La demande présentée par Monsieur X devant le Tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X devant la Cour est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Monsieur Redha X, au préfet des Bouches-du-Rhône et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Prononcé en audience publique le 30 juin 2005.
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05MA00678
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