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28/06/2004 | FRANCE | N°00MA02425

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 28 juin 2004, 00MA02425


Vu, I, sous le n° 00MA02425, la télécopie de la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 29 septembre 2000, et l'original de la requête enregistrée le 2 octobre 2000, présentés par Me Lambert, avocat à la Cour, pour la COMMUNE DE NICE, dont le siège est Hôtel de ville 5, rue de l'Hôtel de ville à Nice (06300), représentée par son maire en exercice ;

La COMMUNE DE NICE demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 95 755 en date du 30 juin 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice l'a condamnée à verser à Me X

la somme de 300.000 F avec intérêts de droit à compter du 2 juin 1994 ;

2°/ de ...

Vu, I, sous le n° 00MA02425, la télécopie de la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 29 septembre 2000, et l'original de la requête enregistrée le 2 octobre 2000, présentés par Me Lambert, avocat à la Cour, pour la COMMUNE DE NICE, dont le siège est Hôtel de ville 5, rue de l'Hôtel de ville à Nice (06300), représentée par son maire en exercice ;

La COMMUNE DE NICE demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 95 755 en date du 30 juin 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice l'a condamnée à verser à Me X la somme de 300.000 F avec intérêts de droit à compter du 2 juin 1994 ;

2°/ de rejeter la demande présentée par Me X devant le Tribunal administratif de Nice ;

3°/ de condamner Me X à lui verser la somme de 20.000 F au titre des frais irrépétibles ;

Elle soutient :

- que la demande introductive de première instance ne pouvait être présentée que par l'association Femmes en Réinsertion d'Emploi des Alpes Maritimes ;

- que Me X, représentant des créanciers, n'ayant pas qualité pour agir, la demande était irrecevable ;

- que cette irrecevabilité ne saurait être couverte en cours d'instance, en raison de la déchéance quadriennale ;

- que le caractère exécutoire de la délibération en date du 28 juin 1993 par laquelle le conseil municipal de Nice a accordé une subvention de 300.000 F à l'association n'est pas établi ;

- que les premiers juges se sont prononcés dans l'ignorance de la nature et de l'objet de la subvention en cause et des conditions dont elle pouvait être assortie ;

- que la subvention n'entrait pas dans le cadre d'une convention entre la commune et l'association ;

- que le refus ultérieur de versement ne pouvait être attaqué que dans le cadre de l'excès de pouvoir alors que la demande est un recours de plein contentieux ;

- que le droit acquis au versement d'une subvention ne peut prospérer en cas de fraude, ou lorsqu'elle ne pourra être utilisée aux fins pour lesquelles elle a été accordée ;

- que la légalité d'une subvention est subordonnée à l'activité réelle de l'organisme bénéficiaire, or, l'association était en redressement judiciaire et avait cessé toute activité ;

- que la subvention n'aurait profité qu'aux créanciers privilégiés de l'association ;

- que les subventions versées par les collectivité territoriales ne sont pas susceptibles de porter intérêts moratoires ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 juillet 2002, présenté pour Me X, ès-qualité de liquidateur judiciaire de l'association Femmes en Réinsertion Emploi des Alpes Maritimes, dont le siège social est Les Feuillantines 4bis, avenue Mirabeau à Nice (06000), par la SCP Le Roux- Brin- Moraine, avocat à la Cour ;

Me X demande à la Cour le rejet de la requête, la condamnation de la COMMUNE DE NICE à lui verser la somme de 300.000 F avec intérêts de droit à compter du 2 juin 1994, la capitalisation de ces intérêts, et la condamnation de la commune à lui verser la somme de 3.000 F au titre des frais irrépétibles ;

Elle soutient :

- qu'à la date de l'enregistrement de la demande introductive d'instance elle était liquidatrice judiciaire de l'association et avait en conséquence qualité pour agir ;

- que, le tribunal ne lui ayant pas demandé de régulariser l'erreur de formulation quant à sa qualité, elle est toujours recevable à la corriger ;

- que la condamnation de la commune a en tout état de cause été prononcée en faveur de Me X, sans préciser ses fonctions ;

- que l'existence de la délibération du 28 juin 1993 est attestée par de nombreux courriers dont celui en date du 9 août 1993 de l'adjoint délégué au maire ;

- que la commune n'a jamais remis en question l'existence de cette délibération ;

- que ce moyen est irrecevable pour tardiveté ;

- qu'en refusant de verser la subvention accordée par son conseil municipal, la commune a commis une faute à l'origine de la mise en redressement judiciaire de l'association, suivie de sa liquidation, assortie d'un passif social important ;

- que le motif invoqué pour refuser le versement de la subvention litigieuse manque en fait ;

- que, notamment les services de crèche de l'association étaient toujours en activité ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 10 mars 2003, présenté pour la COMMUNE DE NICE par Me Lambert ;

La commune persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens, et demande en outre à la Cour la condamnation de Me X à lui verser la somme de 3.500 euros au titre des frais irrépétibles ;

Elle soutient en outre :

- que Me X ne justifie pas de sa qualité alléguée de liquidateur judiciaire de l'association ;

- que la délibération du 28 juin 1993 n'avait pas acquis de caractère définitif ;

- que Me X ne justifie pas d'une demande préalable en indemnité ;

- que le lien de causalité entre le refus de versement de la subvention et le dépôt de bilan de l'association n'est pas établi ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 mai 2003, présenté pour Me X par la SCP Le Roux- Brin- Moraine ;

Me X persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens, et évalue son préjudice à 45.734,71 euros ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 mars 2004, présenté pour Me X par la SCP Le Roux- Brin- Moraine ;

Me X persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Vu, II, sous le n° 00MA02360, la télécopie de la requête enregistrée le 29 septembre 2000 au greffe de la Cour administrative de Marseille, et l'original de la requête enregistré le 2 octobre 2000, présentés par Me Lambert, avocat à la Cour, pour la COMMUNE DE NICE, représentée par son maire en exercice ;

La COMMUNE DE NICE demande à la Cour :

1°/ de prononcer le sursis à exécution du jugement en date du 30 juin 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice l'a condamnée à verser à Me X la somme de 300.000 F avec intérêts de droit à compter du 2 juin 1994 ;

2°/ de condamner Me X à lui verser la somme de 20.000 F au titre des frais irrépétibles ;

Elle soutient :

- que l'état d'insolvabilité de la partie demanderesse risque d'entraîner l'impossibilité de recouvrement des deniers publics en cas d'annulation du jugement attaqué ;

- que la demande, présentée par Me X en qualité de représentante des créanciers, était irrecevable ;

- que la délibération litigieuse à l'origine de la condamnation de la commune n'a pas été produite au dossier ;

- qu'il n'est ainsi pas justifié de l'existence d'un droit acquis au versement de la subvention en cause ;

- que l'association n'étant plus en activité, la subvention aurait été détournée de son but ;

- qu'il n'est pas allégué de préjudice subi par l'association ;

- qu'une subvention versée par une collectivité territoriale ne porte pas intérêts moratoires ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2004 :

- le rapport de M. Pocheron, premier conseiller ;

- les observations de Me Chami substituant Me Lambert pour la COMMUNE DE NICE ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées de la COMMUNE DE NICE sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'il ressort du jugement en date du 19 octobre 1994 du Tribunal de grande instance de Nice que Me X avait le 27 février 1995, date de l'enregistrement de la demande de première instance au greffe du Tribunal administratif de Nice, qualité en tant que mandataire liquidateur de l'Association Femmes En Réinsertion Emploi (A.F.E.R.E) des Alpes Maritimes pour représenter cette association en justice ; que, dans la mesure où la COMMUNE DE NICE n'a pas opposé de fin de non recevoir à ce titre en première instance et les premiers juges n'ont pas invité l'intéressée à justifier de sa qualité à agir, la circonstance que Me X établit pour la première fois en appel sa qualité de mandataire liquidateur est sans incidence sur la recevabilité de ladite demande ; que, par courrier du 2 juin 1994, l'association a demandé à la commune le versement de la subvention de 300.000 F qui lui avait été accordée par délibération du conseil municipal de Nice en date du 28 juin 1993 ; que, de surcroît, la COMMUNE DE NICE avait, en répondant au fond en première instance à la demande de l'A.F.E.R.E aux fins d'indemnité, en tout état de cause, lié le contentieux ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la demande présentée par Me X devant le Tribunal administratif de Nice était irrecevable ;

Sur le fond :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par délibération en date du 28 juin 1993, rendue exécutoire le 15 juillet 2003,le conseil municipal de Nice a accordé à l'A.F.E.R.E des Alpes Maritimes une subvention de 300.000 F ; que cette délibération présentait pour cette association, en l'absence de fraude, le caractère d'une décision créatrice de droit ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un courrier en date du 9 août 1993, l'adjoint délégué au maire de Nice chargé de l'aide sociale et de la famille informait le président de l'association de cette décision, du mandatement prochain de la somme considérée et l'invitait à envoyer aux services communaux un formulaire relatif à une demande de subvention pour l'année suivante, mais que cette subvention n'était jamais versée ; que la procédure de redressement judiciaire de l'A.F.E.R.E n'a été ouverte par jugement du Tribunal de grande instance de Nice que le 18 mai 1994, et a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 19 octobre 1994 ; que la date de cessation de paiement a été fixée par le tribunal au 18 mai 1994 ; que l'activité de crèche exercée par l'association s'est poursuivie au moins jusqu'à cette date ;que, dés lors, et malgré les difficultés financières de la crèche, la COMMUNE DE NICE ne pouvait légalement pas décider de ne pas verser la subvention accordée au titre de l'année 1993 ; que ce refus illégal de versement a causé à l'association un préjudice direct et certain d'un montant au moins égal à la somme en litige ; que les premiers juges ont pu à bon droit condamner la requérante à payer des intérêts légaux sur la somme de 300.000 F, représentative du montant de la subvention promise mais qu'elle était condamnée à payer en réparation dudit préjudice, et non à titre de versement d'une subvention versée par une collectivité territoriale ; qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE NICE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice l'a condamnée à verser à Me X, en qualité de mandataire liquidateur de l'A.F.E.R.E des Alpes Maritimes, la somme susmentionnée avec intérêts légaux à compter du 2 juin 1994 ;

Sur les intérêts des intérêts :

Considérant qu'il résulte de l'article 1154 du code civil que la capitalisation peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que Me X, ès qualité de mandataire liquidateur de l'A.F.E.R.E des Alpes Maritimes, a demandé par un mémoire en date du 22 juillet 2002 la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas été encore exécuté, les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y lieu dés lors de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date, sans qu'y fasse obstacle la circonstance qu'il n'a pas ensuite été formulé de nouvelles demandes de capitalisation ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner la COMMUNE DE NICE à payer à Me X ès qualité de mandataire liquidateur de l'A.F.E.R.E des Alpes Maritimes une somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Me X ès qualité de mandataire liquidateur de l'A.F.E.R.E des Alpes Maritimes, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à la COMMUNE DE NICE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE NICE est rejetée.

Article 2 : Les intérêts afférents à l'indemnité de 300.000 F (45.734,70 euros) que la COMMUNE DE NICE a été condamnée à payer à Me X en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de l'Association Femmes En Réinsertion Emploi des Alpes Maritimes, par jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 30 juin 2000, et échus le 22 juillet 2002 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La COMMUNE DE NICE versera à Me X, en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de l'Association Femmes En Réinsertion Emploi des Alpes Maritimes une somme de 1.500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE NICE et à Me X, en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de l'Association Femmes En Réinsertion Emploi des Alpes Maritimes.

Délibéré à l'issue de l'audience du 28 mai 2004, où siégeaient :

Mme Bonmati, président de chambre,

M. Moussaron, président assesseur,

M. Pocheron, premier conseiller,

assistés de Mlle Ranvier, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 28 juin 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Dominique Bonmati Michel Pocheron

Le greffier,

Signé

Patricia Ranvier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

Classement CNIJ : 01-01-06-02-01

C

2

N° 00MA02425 00MA02360

MP


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA02425
Date de la décision : 28/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : LAMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-06-28;00ma02425 ?
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