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28/05/2004 | FRANCE | N°00MA01654

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 28 mai 2004, 00MA01654


Vu la requête enregistrée le 27 juillet 2000 sous le n° 00MA01654 présentée par Me Maillot, avocat, pour M. Mario X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 96626 du 30 mars 2000 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 juillet 1991 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de délivrer à la société anonyme de gestion du casino de Mandelieu La Napoule l'autorisation d'exploiter des machines à sous ensemble du rejet de son recours gracieux contre c

ette décision, d'autre part à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une i...

Vu la requête enregistrée le 27 juillet 2000 sous le n° 00MA01654 présentée par Me Maillot, avocat, pour M. Mario X, demeurant ... ;

M. X demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 96626 du 30 mars 2000 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 25 juillet 1991 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de délivrer à la société anonyme de gestion du casino de Mandelieu La Napoule l'autorisation d'exploiter des machines à sous ensemble du rejet de son recours gracieux contre cette décision, d'autre part à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une indemnité de 54.971.001 F en réparation des conséquences dommageables de ces décisions ;

Classement CNIJ : 63-02

C+

2'/ d'annuler les décisions susmentionnées du ministre de l'intérieur et de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 54.566.101 F avec intérêts à compter du 23 septembre 1991 à capitaliser ;

3°/ de condamner l'Etat à lui verser une somme de 30.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Il soutient :

- que le jugement n'a pas visé ses mémoires enregistrés les 21 juin 1996 et 11 février 2000 et n'en a pas non plus tenu compte dans ses visas de conclusions et dans sa motivation ;

- qu'il n'a pas statué sur les moyens contenus dans ces mémoires ni sur le moyen tiré du détournement de pouvoir ; que ses motifs sont entachés de contradiction ;

- qu'au fond il se réfère à ses écritures de première instance ;

- qu'en outre la décision du 25 juillet 1991 a été prise sans procédure contradictoire préalable et n'est pas motivée de façon suffisamment précise ;

- qu'elle est fondée sur des faits inexacts, ce que le tribunal a d'ailleurs admis sans en tirer de conséquence ;

- que le ministre a pris une décision arbitraire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 30 décembre 2002 présenté par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que la circonstance que l'expédition du jugement ne comporte pas l'intégralité des visas est sans incidence sur sa régularité ;

- que les écritures de première instance ne comportent pas de conclusions relatives à un détournement de pouvoir ;

- que le moyen tiré de l'omission à statuer sur les moyens invoqués dans les mémoires enregistrés les 21 juin 1996 et 11 février 2000 n'est pas assorti de précisions suffisantes ;

- que le jugement ne comporte pas de contradiction dans ses motifs ;

- que les moyens dirigés contre la décision du 25 juillet 1991 devront être rejetés par les motifs retenus par les premiers juges ;

Vu le mémoire enregistré le 6 novembre 2003 présenté pour M. X qui conclut aux mêmes fins que la requête ;

Il se prévaut des mêmes moyens et soutient en outre :

- que le défaut de procédure contradictoire préalablement à la décision du 25 juillet 1991 méconnaît l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme ;

- que cette décision est entachée de détournement de pouvoir ;

- que le tribunal devait annuler la décision dès lors qu'il admettait que les mauvais renseignements recueillis sur sa personne étaient inexacts ;

- que le motif de la décision tiré de ce qu'il gardait une influence sur la société anonyme de gestion du casino de Mandelieu La Napoule est inexact ;

- que la décision, qui avait pour objet de diminuer la valeur de sa participation dans cette société, est entachée de détournement de pouvoir ;

- qu'il y a lieu le cas échéant pour la cour de demander la production du dossier au vu duquel s'est prononcée l'administration ;

- que son préjudice moral s'élève à 0,15 euros et son préjudice financier à 8.318.548,32 euros ;

Vu l'ordonnance en date du 16 octobre 2003 par laquelle le président de la formation de jugement a fixé la clôture de l'instruction de l'affaire au 7 novembre 2003 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi du 15 juin 1907 réglementant le jeu dans les cercles et les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mai 2004 :

- le rapport de M. Moussaron, président assesseur ;

- les observations de Me Scemla substituant Me Maillot pour M. Mario X ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que M. X, au soutien de sa demande formée devant le tribunal administratif de Nice tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur refusant à la société anonyme de gestion du casino de Mandelieu La Napoule l'autorisation d'exploiter des machines à sous, a expressément invoqué, tant dans le mémoire introductif d'instance que dans les mémoires complémentaires, le moyen tiré du détournement de pouvoir ; que le jugement attaqué a omis de statuer sur ce moyen ; qu'il est par suite irrégulier et doit être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif ;

Sur la légalité de la décision du ministre de l'intérieur en date du 25 juillet 1991 :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 15 juin 1907 dans sa rédaction applicable au litige Par dérogation à l'article 1er de la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard il pourra être accordé aux casinos des stations balnéaires, thermales ou climatiques, sous quelque nom que ces établissements soient désignés, l'autorisation temporaire d'ouvrir au public des locaux spéciaux, distincts et séparés où seront pratiqués certains jeux de hasard... ; qu'en vertu de l'article 2 de la même loi l'autorisation mentionnée à l'article 1er est délivrée après enquête par le ministre de l'intérieur ;

Considérant que, par décision notifiée le 30 mars 1991, le ministre de l'intérieur a refusé de renouveler l'autorisation d'exploitation de machines à sous dont était titulaire la société anonyme de gestion du casino de Mandelieu La Napoule, qui arrivait à expiration le 31 mars 1991, motif pris, notamment, des mauvais renseignements recueillis sur M. X, principal actionnaire de cette société ; que, nonobstant la convention du 15 mai 1991 par laquelle M. X a cédé à la société SPIC (Société de Participations et d'Investissements dans les Casinos) ses actions dans la société exploitant le casino, le ministre de l'intérieur, saisi d'une nouvelle demande, a maintenu son refus d'autorisation par la décision en litige du 25 juillet 1991 ;

Considérant que la décision du 25 juillet 1991, qui est fondée sur des motifs tirés de ce que les clauses de la convention du 15 mai 1991 ne garantissent pas le retrait de M. X du capital de la société anonyme de gestion du casino de Mandelieu La Napoule, est suffisamment motivée et répond aux prescriptions de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

Considérant qu'eu égard à la nature que présente une mesure de refus de renouvellement d'une autorisation de jeux, qui ne saurait être regardée comme une sanction, ni l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme ni aucun principe général du droit applicable même en l'absence de texte n'imposait à l'administration de provoquer les observations de la société auteur de la demande avant de prendre la décision en litige ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 alors en vigueur du décret susvisé du 28 novembre 1983 Sauf urgence ou circonstances exceptionnelles, sous réserve des nécessités de l'ordre public et de la conduite des relations internationales, et exception faite du cas où il est statué sur une demande présentée par l'intéressé lui-même, les décisions qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé ait été mis à même de présenter des observations écrites ; qu'en l'espèce, dès lors que la décision attaquée a été prise sur une demande de la société anonyme de gestion du casino de Mandelieu La Napoule, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées n'est pas fondé ;

Considérant, en ce qui concerne la décision ci-dessus mentionnée notifiée le 30 mars 1991, que le ministre pouvait pour l'application des dispositions précitées de la loi du 15 juin 1907, eu égard aux finalités intéressant l'ordre public poursuivies par ces dispositions, retenir sans commettre d'erreur de droit un motif tiré des renseignements défavorables dont il disposait concernant le principal actionnaire de la société auteur de la demande ; qu'au cas particulier, alors même que les faits imputés à M. X, énoncés notamment dans le rapport d'une commission d'enquête parlementaire portant sur la pénétration de la mafia en France, ne sont pas établis de façon certaine et n'ont pas donné lieu à condamnation pénale, il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre, usant de son pouvoir d'appréciation, aurait commis une erreur manifeste en retenant le motif tiré des mauvais renseignements recueillis sur M. X ; que si, par la convention du 15 mai 1991, M. X a cédé à la société SPIC ses actions dans la société anonyme de gestion du casino de Mandelieu La Napoule ainsi que ses créances en compte courant sur cette société sous condition suspensive d'obtention des autorisations de jeux, cette convention comporte de nombreuses clauses résolutoires ainsi qu'une promesse de rachat par M. X sur simple demande de la société SPIC pouvant être exercée jusqu'au 1er novembre 1992 ; qu'en estimant, pour motiver la décision en litige, que cette convention ne garantissait pas le retrait de M. X du capital de la société exploitant le casino, le ministre n'a pas non plus commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que si M. X soutient que la décision attaquée est entachée de détournement de pouvoir, et aurait notamment eu pour objet de diminuer la valeur des actions de la société anonyme de gestion du casino de Mandelieu La Napoule, le moyen n'est assorti d'aucune justification ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'annulation de la décision du ministre de l'intérieur en date du 25 juillet 1991 et du rejet du recours gracieux contre cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'indemnité :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'indemnisation des conséquences dommageables de la décision du ministre de l'intérieur en date du 25 juillet 1991 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice n° 96626 du 30 mars 2000 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Nice et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 3 mai 2004, où siégeaient :

Mme Bonmati, président de chambre,

M. Moussaron, président assesseur,

M. Alfonsi, premier conseiller

assistés de Mme Ranvier, greffier.

Prononcé à Marseille, en audience publique le 28 mai 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Dominique Bonmati Richard Moussaron

Le greffier,

Signé

P. Ranvier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N°'''MA01654


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA01654
Date de la décision : 28/05/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. Richard MOUSSARON
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : MAILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-05-28;00ma01654 ?
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