La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/05/2004 | FRANCE | N°99MA02090

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 06 mai 2004, 99MA02090


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 octobre 1999, sous le n° 99MA02090, présentée par la Société Civile Immobilière LE PRE SAINT-MICHEL ayant son siège social ... ;

La société demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 956013 du Tribunal administratif de Marseille en date du 19 avril 1999 en tant qu'il a rejeté sa demande de décharge des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1990, par un avis de mise en recou

vrement en date du 19 novembre 1993 ;

2'/ de la décharger desdites impositions ;...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 octobre 1999, sous le n° 99MA02090, présentée par la Société Civile Immobilière LE PRE SAINT-MICHEL ayant son siège social ... ;

La société demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 956013 du Tribunal administratif de Marseille en date du 19 avril 1999 en tant qu'il a rejeté sa demande de décharge des droits complémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1990, par un avis de mise en recouvrement en date du 19 novembre 1993 ;

2'/ de la décharger desdites impositions ;

3°/ de lui accorder une somme de 3 618 francs au titre des frais irrépétibles outre une somme de 100 francs correspondant au droit de timbre et de condamner le directeur des services fiscaux aux entiers dépens ;

Classement CNIJ : 19-06-02

C

Elle soutient :

- que pour évaluer le coût de revient de l'immeuble en litige à la date de la cession, il convient de retenir la somme de 160.074 francs pour le prix du terrain, la somme de 709.206 francs au titre des diverses taxes et factures, la somme de 19.620,83 francs au titre des frais financiers et la somme de 5.819 francs au titre du raccordement EDF ; qu'ainsi, le coût de revient s'élève à la somme de 894.719 francs et non de 1.000.000 francs comme l'a fait valoir l'administration ; que l'acte anormal de gestion doit être distingué des simples erreurs de gestion car il implique une volonté délibérée d'avantager un tiers ; que tel n'est pas le cas en l'espèce dans la mesure où la société LE PRE SAINT-MICHEL n'avait aucune intention de léser le trésor public et que ladite vente s'est réalisée dans un but de saine gestion ; que cette vente a permis à la société Locsan de dégager entre 1991 et 1995 des bénéfices réguliers atteignant la somme de 310.000 francs sur cette période ;

- que la SCI LE PRE SAINT-MICHEL n'a pas appliqué de marge de vente lors de la cession du bâtiment en cours de construction ce qui a permis à la société acquéreur de dégager des bénéfices réguliers ; qu'aucun texte n'impose de pratiquer de marge commerciale et n'interdit la vente à prix coûtant ; qu'enfin, lorsque le prix de la vente est suffisamment proche du prix de revient du bien, l'opération ne peut être analysée comme un acte anormal de gestion et que tel est le cas en l'espèce compte tenu du faible écart entre le prix de vente et le coût de revient réel de l'immeuble ; qu'en dernier lieu, la commission départementale des impôts a rejeté toutes les méthodes d'évaluation retenues par les services fiscaux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour de rejeter la requête de la SCI LE PRE SAINT-MICHEL ;

Il soutient :

- que l'évaluation de l'immeuble litigieux doit intégrer la valeur du terrain qui ne saurait être inférieure à celle fixée par le vérificateur et acceptée par la requérante au stade de la réclamation initiale, soit la somme de 213.910 francs HT, divers éléments du coût de revient non contestés comme le montant de la taxe locale d'équipement ou la taxe de raccordement à l'égout, le raccordement EDF, les frais de financement, ce qui représente une somme totale à la date de la vente de l'ordre de 1.000.000 francs ; que le rapport produit en première instance conforte cette estimation ;

- que la finalité d'une société de construction-vente étant de réaliser des profits, l'intégration d'une marge commerciale dans la détermination de la valeur vénale d'un bien vendu par un professionnel est parfaitement fondée et que l'application d'un coefficient de marge de 1,20 au prix de revient de l'immeuble inachevé n'est pas arbitraire ; que les marges pratiquées par l'entreprise lors de ventes de villas sont de l'ordre de 27,52% du prix de revient ;

- que la vente de l'immeuble à la société Locsan n'a pas généré de bénéfice pour la SCI LE PRE SAINT-MICHEL ; que dans ces conditions, ladite vente constituait un acte anormal de gestion sauf à démonter l'intérêt pour la société venderesse et la circonstance que les deux sociétés n'avaient aucune intention de frauder est inopérante ; que la différence entre le prix de vente (885.329 francs) et la valeur vénale évaluée par la commission (1.200.000 francs) est suffisamment importante pour justifier l'intégration de cette somme au résultat de la SCI PRE SAINT-MICHEL ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 23 juin 2000, présenté par la SCI LE PRE SAINT-MICHEL ;

La requérante persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens en versant aux débats un rapport d'expertise réalisé par M. X..., expert immobilier rattaché au conseil supérieur des notaires pour la formation des notaires à l'expertise immobilière, démontrant l'absence de sous évaluation du prix de vente de l'immeuble à la date de cession ;

Vu le mémoire enregistré le 23 août 2000, présenté par le ministre ;

Le ministre persiste dans ses précédentes écritures en faisant valoir que le rapport établi par l'expert immobilier n'est pas de nature à modifier l'évaluation retenue par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui, si elle a écarté la troisième méthode présentée par le vérificateur, s'est néanmoins implicitement fondée sur la deuxième méthode pour fixer le prix de la valeur vénale de l'immeuble à 1.200.000 francs ; que l'expert a confirmé qu'une marge de 20% n'était pas abusive en matière de vente immobilière ; que la méthode retenue par l'expert pour déterminer la valeur vénale est totalement inadéquate dans la mesure où il s'agit au cas d'espèce d'un bien immobilier inachevé à la date de la vente dans lequel aucune activité n'était exercée à la date de la cession ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 25 septembre 2000 par lequel la SCI LE PRE SAINT-MICHEL persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens en se fondant notamment sur des analyses complémentaires du même expert immobilier en date du 2 septembre 2000 qui précisent que la marge commerciale ne revêt aucun caractère systématique et que le ministre n'apporte aucune justification de nature à démontrer le caractère erroné de la méthode hôtelière ;

Vu le mémoire enregistré le 15 janvier 2001, par lequel le ministre persiste dans ses précédentes écritures en faisant valoir, en outre, que l'expert immobilier a confondu deux avis rendus par la commission départementale des impôts et que l'avis auquel l'expert se réfère ne concerne pas la société requérante ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 2 mars 2001, présenté par la SCI LE PRE SAINT-MICHEL qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2004 :

- le rapport de Mme MASSE-DEGOIS, conseillère ;

- et les conclusions de M. TROTTIER, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société civile immobilière LE PRE SAINT-MICHEL, société de construction-vente détenue à plus de 95% par Mme Y..., a vendu le 27 février 1990 un immeuble inachevé à usage d'hôtel et de restaurant pour un prix hors taxe de 882.329 francs à la société de gestion Locsan, société civile immobilière détenue à 60% par Mme Y... et à 40% par ses enfants ; que l'administration fiscale à l'occasion d'une vérification de la comptabilité de la société LE PRE SAINT-MICHEL a considéré que le prix de vente ainsi stipulé dans l'acte de vente était sous-évalué par rapport à sa valeur vénale réelle ; que la société conteste la somme de 1.200.000 francs ainsi arrêtée comme servant de base de calcul de la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.17 du livre des procédures fiscales : En ce qui concerne les droits d'enregistrement et la taxe de publicité foncière ou la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elle est due au lieu et place de ces droits ou taxe, l'administration des impôts peut rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception d'une imposition lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations. La rectification correspondante est effectuée suivant la procédure de redressement contradictoire prévue à l'article L.55, l'administration étant tenue d'apporter la preuve de l'insuffisance des prix exprimés et des évaluations fournies dans les actes ou déclarations ;

Considérant que pour justifier l'évaluation de la valeur de l'immeuble litigieux à usage d'hôtel-restaurant d'une surface inscrite au permis de construire de 914m² comprenant 18 chambres avec bains réparties sur deux bâtiments, l'administration a utilisé trois méthodes différentes qui ont toutes mis en évidence une sous-évaluation du prix de cession ; que l'administration, en l'absence de comparaison possible avec d'autres biens semblables compte tenu de la spécificité de l'immeuble qui était inachevé, a fixé la valeur vénale de celui-ci à la somme de 1.200.000 francs conformément à l'avis rendu par la commission départementale des impôts ; qu'en retenant ce montant, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration fiscale aurait retenu un prix exagéré ; que si la requérante fait valoir qu'aucune disposition légale ne lui imposait d'inclure dans un prix de vente une marge commerciale, il n'est cependant pas contesté que le pourcentage de marge afférent à son programme de villas réalisé peu avant la vente de l'immeuble litigieux s'est élevé à 27,52% ; que par suite, l'administration a pu ainsi à bon droit majorer le prix de revient d'une marge commerciale de 20% qui aurait dû être normalement incluse ;

Considérant que la société requérante soutient que le prix ne se justifiait pas par une volonté de léser le trésor public mais avait été déterminé dans un but de saine gestion ; que toutefois, la société LE PRE SAINT-MICHEL ne fournit aucun élément de preuve à l'appui de ces allégations ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SCI LE PRE SAINT-MICHEL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SCI LE PRE SAINT-MICHEL la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de SCI LE PRE SAINT-MICHEL est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI LE PRE SAINT-MICHEL et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal Sud-est.

Délibéré à l'issue de l'audience du 8 avril 2004, où siégeaient :

M. DARRIEUTORT, président de chambre,

M. GUERRIVE, président assesseur,

Mme MASSE-DEGOIS, conseillère,

assistés de Mlle MARTINOD, greffière.

Prononcé à Marseille, en audience publique le 6 mai 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Jean-Pierre DARRIEUTORT Christine MASSE-DEGOIS

La greffière,

Signé

Isabelle MARTINOD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

6

N° 99MA02090


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA02090
Date de la décision : 06/05/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. TROTTIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-05-06;99ma02090 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award