La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/05/2004 | FRANCE | N°00MA00948

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5eme chambre - formation a 3, 03 mai 2004, 00MA00948


Vu I) la requête enregistrée le 9 mai 2000 sous le n° 00MA00948 et le mémoire complémentaire enregistré le 28 février 2002 présentés par Maître Choque, avocat, pour le SYNDICAT CONFEDERE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, dont le siège est ... ;

Le requérant demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 988601/988602 du 20 janvier 2000 du Tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 octobre 1998 par lequel le préfet des Hautes-Alpes a approuvé le règlement d'un cabinet dentaire mutu

aliste créé à Briançon par l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes...

Vu I) la requête enregistrée le 9 mai 2000 sous le n° 00MA00948 et le mémoire complémentaire enregistré le 28 février 2002 présentés par Maître Choque, avocat, pour le SYNDICAT CONFEDERE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, dont le siège est ... ;

Le requérant demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 988601/988602 du 20 janvier 2000 du Tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 octobre 1998 par lequel le préfet des Hautes-Alpes a approuvé le règlement d'un cabinet dentaire mutualiste créé à Briançon par l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes ;

Classement CNIJ : 04-03-01

C

2'/ d'annuler la décision susmentionnée du préfet des Hautes-Alpes ;

3°/ de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Il soutient :

- que la décision a été prise en application de dispositions de droit interne incompatibles avec les directives européennes, dont la transposition n'a été opérée que postérieurement ;

- que ces directives étaient suffisamment précises et devaient recevoir une application directe en l'absence de transposition ;

- qu'il n'est pas justifié que la responsabilité des mutuelles est limitée aux apports et que ces derniers n'excèdent pas le patrimoine libre ;

- que le règlement approuvé méconnaît le code de la mutualité en ce qu'il énonce que l'établissement créé peut recevoir les assurés sociaux et non les seuls adhérents des mutuelles ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 11 mars 2003 présenté par la SCP d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation Arnaud Lyon-Caen Françoise Fabiani Frédéric Thiriez pour l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes qui demande à la cour de rejeter la requête et de condamner le SYNDICAT CONFEDERE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES à lui verser une somme de 2.000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que la demande de première instance était irrecevable faute d'intérêt pour agir du syndicat et eu égard à ce que l'acte attaqué ne fait pas grief ;

- que le moyen tiré de ce que les soins ne seraient pas réservés aux adhérents des mutuelles manque en fait ;

- que le code de la mutualité dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée ne méconnaissait pas les directives européennes ;

- que l'exposante n'exerce pas une activité d'assurance ;

- que le risque financier supporté par les mutuelles membres est limité à leurs apports, lesquels n'excèdent pas le patrimoine libre ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu II) la requête enregistrée le 10 mai 2000 sous le n° 00MA00958 et le mémoire complémentaire enregistré le 27 décembre 2000 présentés par Maître Fessol, avocat, pour :

- le CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, dont le siège est Résidence du Parc 7 rue Capitaine de Bresson à Gap (05000) ;

- le SYNDICAT DEPARTEMENTAL DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES dont le siège est 6 rue Carnot à Gap (05000) ;

- M. X, demeurant ... ;

Les appelants demandent à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 988703 du 20 janvier 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 octobre 1998 par lequel le préfet des Hautes-Alpes a approuvé le règlement d'un cabinet dentaire mutualiste créé à Briançon par l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes ;

2'/ d'annuler la décision susmentionnée du préfet des Hautes-Alpes ;

3°/ de condamner l'Etat et l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes à leur verser, chacun, une somme de 8.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Ils soutiennent :

- que le conseil de l'ordre, avant d'émettre un avis sur le projet de création de l'établissement, n'a pu obtenir communication du dossier présenté au soutien de la demande, malgré le caractère communicable des documents selon la commission d'accès aux documents administratifs ;

- que la décision en litige méconnaît le droit tant communautaire que national en ce qu'il impose de dissocier les assureurs et ceux qui dispensent les soins ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 10 mars 2003 présenté par la SCP d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation Arnaud Lyon-Caen Françoise Fabiani Frédéric Thiriez pour l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes qui demande à la cour de rejeter la requête et de condamner les appelants à lui verser une somme de 2.000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le moyen tiré de ce que les soins ne seraient pas réservés aux adhérents des mutuelles manque en fait ;

- que le code de la mutualité dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée ne méconnaissait pas les directives européennes ;

- que l'exposante n'exerce pas une activité d'assurance ;

- que le risque financier supporté par les mutuelles membres est limité à leurs apports, lesquels n'excèdent pas le patrimoine libre ;

Vu le mémoire complémentaire enregistré le 23 septembre 2003 présenté pour le CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, le SYNDICAT DEPARTEMENTAL DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, et M. X, ramenant à 1.000 euros les conclusions à fin de remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Ils soutiennent qu'en l'espèce il y a interdépendance financière entre les mutuelles et l'union départementale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive du Conseil 73/239/CE du 24 juillet 1973 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité de l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, et son exercice ;

Vu le code de la mutualité ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mars 2004 :

- le rapport de M. Moussaron, président assesseur ;

- les observations de Maître Fessol pour le CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, le SYNDICAT DEPARTEMENTAL DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES et M. X ;

- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées sont relatives à la même décision administrative et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la recevabilité des demandes de première instance :

Considérant que, contrairement à ce que soutient l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes, la décision en litige par laquelle le préfet des Hautes-Alpes a approuvé le règlement d'un cabinet dentaire mutualiste, qui a pour effet de permettre à une union de mutuelles d'ouvrir et d'exploiter un cabinet dentaire, présente le caractère d'une décision faisant grief ; que le SYNDICAT CONFEDERE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, qui a notamment pour objet en vertu de l'article 5 de ses statuts de défendre les intérêts moraux et matériels de ses membres, justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation de cette décision ;

Sur la légalité de la décision du préfet des Hautes-Alpes :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la directive susvisée du 24 juillet 1973 : L'accès aux activités d'assurance directe est subordonné à l'octroi d'un agrément administratif préalable et qu'aux termes de l'article 8 de la même directive : 1. L'Etat membre d'origine exige que les entreprises d'assurance qui sollicitent l'agrément (...) : b) Limitent leur objet social à l'activité d'assurance et aux opérations qui en découlent directement, à l'exclusion de toute autre activité commerciale ;

Considérant, d'une part, que les dispositions précitées font obstacle à ce que des mutuelles exerçant des activités d'assurance participent à un organisme doté d'une personnalité juridique propre, tel qu'une union de mutuelles, qui exerce d'autres activités commerciales, lorsque leur participation à cet organisme est susceptible, en l'absence de garanties, de méconnaître le principe d'exclusivité et de modifier indirectement leur objet social ; que, par suite, la décision en litige approuvant le règlement d'un cabinet dentaire créé par une union de mutuelles est soumise aux dispositions précitées de la directive du 24 juillet 1973 ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L.411-1 du code de la mutualité dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté du préfet des Hautes-Alpes : Pour la réalisation des objectifs définis à l'article L.111-1, les mutuelles peuvent créer des établissements ou services à caractère sanitaire, médico-social, social ou culturel ; que ni ces dispositions ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne prévoient de limitations à la création de tels services de nature à garantir, dans le cas où ces services sont gérés par une personne morale distincte, que les mutuelles ne seront pas tenues aux obligations de celle-ci dans des conditions de nature à mettre en cause le principe d'exclusivité affirmé par l'article 8 de la directive ; qu'ainsi, les dispositions du code de la mutualité sur lesquelles le préfet s'est fondé pour délivrer l'agrément demandé ne sont pas compatibles avec les objectifs de la directive et ne pouvaient, dès lors, servir de base légale à la décision attaquée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les appelants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hautes-Alpes du 14 octobre 1998 ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les appelants, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, soient condamnés à payer à l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu, d'une part, de condamner de ce chef l'Etat à verser une somme de 800 euros au SYNDICAT CONFEDERE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, d'autre part de condamner l'Etat et l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes à verser chacun une somme globale de 400 euros au CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, au SYNDICAT DEPARTEMENTAL DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES et à M. X ;

D E C I D E :

Article 1er : Les jugements du Tribunal administratif de Marseille n° 988601/988602 et 988703 du 20 janvier 2000 et l'arrêté du 14 octobre 1998 par lequel le préfet des Hautes-Alpes a approuvé le règlement d'un cabinet dentaire mutualiste créé à Briançon par l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 800 euros au SYNDICAT CONFEDERE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : L'Etat et l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes verseront, chacun, une somme globale de 400 euros au CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, au SYNDICAT DEPARTEMENTAL DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES et à M. X en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au SYNDICAT CONFEDERE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, au CONSEIL DEPARTEMENTAL DE L'ORDRE DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, au SYNDICAT DEPARTEMENTAL DES CHIRURGIENS-DENTISTES DES HAUTES-ALPES, à M. X, à l'Union départementale des mutuelles des Hautes-Alpes et au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.

Délibéré à l'issue de l'audience du 29 mars 2004, où siégeaient :

Mme Bonmati, président de chambre,

M. Moussaron, président assesseur,

M. Alfonsi, premier conseiller,

assistés de Mme Ranvier, greffier.

Prononcé à Marseille, en audience publique le 3 mai 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Dominique Bonmati Richard Moussaron

Le greffier,

Signé

Patricia Ranvier

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 00MA00948 N° 00MA00958


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00948
Date de la décision : 03/05/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONMATI
Rapporteur ?: M. Richard MOUSSARON
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : CHOCQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-05-03;00ma00948 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award