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15/04/2004 | FRANCE | N°98MA01233

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 15 avril 2004, 98MA01233


Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 1998 au greffe de la Cour, présentée pour la Société OCREAL, dont le siège est Parc industriel et technologique de la Pompignane, rue de la Vieille Poste à Montpellier (34000), représentée par son président directeur général en exercice, par Me BOIVIN, avocat ;

La société OCREAL demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n°97795-97993-971042 en date du 20 mai 1998 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande de l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT DU LUNELLOIS, l'arrêté

en date du 11 juillet 1996 par lequel le préfet de l'Hérault l'a autorisée à exp...

Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 1998 au greffe de la Cour, présentée pour la Société OCREAL, dont le siège est Parc industriel et technologique de la Pompignane, rue de la Vieille Poste à Montpellier (34000), représentée par son président directeur général en exercice, par Me BOIVIN, avocat ;

La société OCREAL demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n°97795-97993-971042 en date du 20 mai 1998 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande de l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT DU LUNELLOIS, l'arrêté en date du 11 juillet 1996 par lequel le préfet de l'Hérault l'a autorisée à exploiter une installation d'incinération de déchets ménagers et assimilés sur le territoire de la commune de Lunel-Viel ;

2°/ de condamner l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT DU LUNELLOIS à lui verser la somme de 50.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Classement CNIJ : 44-02-02-005-02

C

............................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 75-633 du 15 juillet 1976 ;

Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;

Vu le décret n° 85-453 du 23 avril 1985 ;

Vu le décret n° 93-139 du 3 février 1993 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2004 :

- le rapport de M. CHERRIER, premier conseiller ;

- les observations de Me QUILICHINI substituant Me BOIVIN pour la SA OCREAL ;

- les observations de M. SARAZIN, vice-président de l'A.P.P.E.L. ;

- les observations de M. Claude X ;

- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;

Sur l'objet de la requête :

Considérant que la requête de la société OCREAL tend à l'annulation du jugement en date du 20 mai 1998 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande de l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT DU LUNELLOIS, l'arrêté en date du 11 juillet 1996 par lequel le préfet de l'Hérault l'a autorisée à exploiter une installation d'incinération de déchets ménagers et assimilés sur le territoire de la commune de Lunel-Viel ; que si, par arrêté en date du 18 février 1999, le préfet de l'Hérault a délivré à la société OCREAL une nouvelle autorisation ayant le même objet que l'arrêté du 11 juillet 1996, il résulte de l'instruction que cette autorisation impose des sujétions supplémentaires à ladite société ; que, dès lors, contrairement à ce que soutiennent les défendeurs, la requête n'est pas dépourvue d'objet ;

Sur la légalité de l'arrêté du 11 juillet 1996 :

Considérant que l'article 10-3 de la loi susvisée du 15 juillet 1975, repris à l'article L. 541-15 du code de l'environnement dispose que, dans les zones où les plans départementaux d'élimination des déchets ménagers et assimilés sont applicables, les décisions prises par les personnes morales de droit public et leurs concessionnaires dans le domaine de l'élimination des déchets et, notamment, les décisions prises en application de la loi susvisée du 19 juillet 1976 relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement, doivent être compatibles avec ces plans ; qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 3 février 1993 alors en vigueur : Les plans comportent des inventaires prospectifs, établis à des horizons de temps de cinq et dix ans, des quantités de déchets à éliminer selon leur nature et leur origine ; ils fixent, pour les diverses catégories de déchets qu'ils définissent, les proportions de déchets qui seront à terme de cinq et dix ans respectivement recyclés, valorisés, détruits ou stockés ;

Considérant qu'aux termes de l'article 14 de l'arrêté en date du 1er février 1996 par lequel le préfet de l'Hérault a approuvé le plan départemental des déchets ménagers et assimilés : Pour chaque zone du plan, les communes et leurs groupements conduisent une étude préalable décrivant les modalités de mise en oeuvre de la filière de traitement imposée par le plan en prenant en compte respectivement la collecte générale et sélective, le tri-recyclage, le tri-compostage, l'incinération et le stockage des déchets ultimes ... aucune demande d'autorisation d'installation classée n'est recevable sans que cette étude préalable ne justifie la conformité du projet avec la zone géographique concernée, le tonnage traité en déchets ménagers et en déchets industriels banals, les apports de déchets des secteurs voisins et les capacités complémentaires prévues pour la gestion des arrêts techniques et des dépannages ; qu'aux termes de l'article 15 du même arrêté : A l'issue de l'étude préalable, l'unité de traitement, pour laquelle une autorisation d'exploitation d'installation classée est demandée, doit être dimensionnée pour une quantité limite précise de déchets correspondant à une aire géographique bien délimitée. Aucune quantité supplémentaire provenant d'une autre zone ne peut être traitée dans cette unité, en dehors des dispositions prévues par l'arrêté d'autorisation. Le pétitionnaire s'engage à consulter, sur la base de l'étude préalable définie à l'article 14-1, la totalité des collectivités de la zone avant l'instruction administrative du dossier et il en rend compte lors de la présentation de la demande d'autorisation ;

Considérant qu'à la date du 1er février 1996, à laquelle le préfet de l'Hérault a approuvé le plan départemental d'élimination des déchets ménagers et assimilés, aucune disposition du décret précité du 3 février 1993 ni aucune autre disposition ne conférait à l'auteur de ce plan le pouvoir d'imposer, pour l'instruction des demandes présentées au titre de la législation sur les installations classées, la consultation des collectivités de la zone concernée, ni celui de soumettre ces demandes au respect d'une étude préalable conduite par des communes ou des groupements de communes ; qu'il suit de là que lesdites obligations sont illégales ; que, dès lors et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, leur méconnaissance ne saurait entacher d'illégalité l'arrêté préfectoral du 11 juillet 1996 ;

Considérant que les premiers juges ont en outre accueilli le moyen tiré de ce que la capacité de l'unité de traitement projetée, soit 120.000 tonnes par an, serait surdimensionnée au regard des orientations du plan départemental d'élimination des déchets ; que, pour se prononcer sur le bien-fondé de ce moyen, il y a lieu pour la Cour d'apprécier la compatibilité de l'autorisation accordée le 11 juillet 1996 avec ce plan en fonction des éléments d'information disponibles à la date du présent arrêt ;

Considérant que le plan départemental d'élimination des déchets comporte un objectif de limitation à 55 % en 2006 de la proportion du gisement global de déchets destinée à être incinérée ; que les défendeurs font valoir qu'il ressort de l'avis émis le 20 février 1996 par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt que, compte tenu de l'objectif susmentionné, la quantité de déchets incinérables dans la zone géographique concernée est de l'ordre de 40.000 tonnes par an et que toutes les communes ou groupements de communes de ladite zone n'ont pas confirmé leur association au projet en litige ; que, toutefois, dans son avis rendu le 14 octobre 1998 dans le cadre de l'instruction de la seconde demande d'autorisation déposée par la société OCREAL, la même direction départementale évalue, compte tenu des compléments d'information qui lui ont été fournis, à 100.000 tonnes environ la quantité de déchets incinérables en 2006 dans la zone en question et admet que le tonnage de pointe, résultant d'une très importante augmentation de la population pendant la période estivale, doit être pris en compte dans le mode de fonctionnement de l'installation ; qu'en outre, le plan départemental d'élimination des déchets prévoit un accroissement de la population permanente dans la zone concernée au rythme moyen annuel de 2 % jusqu'en 2010 ; que, dans ces conditions, la société OCREAL est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a regardé l'autorisation critiquée comme non compatible avec les orientations de ce plan ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par les défendeurs ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret susvisé du 21 septembre 1977 : L'étude d'impact présente successivement : ..d) les mesures envisagées par le demandeur pour supprimer, limiter et si possible compenser les inconvénients de l'installation ...Ces mesures font l'objet de descriptifs précisant les dispositions d'aménagement et d'exploitation prévues, leurs caractéristiques détaillées ainsi que les performances attendues, notamment en ce qui concerne ... l'élimination des déchets et résidus de l'exploitation ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le fonctionnement de l'unité de traitement en cause est susceptible de générer des mâchefers non valorisables dont la quantité pourrait atteindre 1250 tonnes par an ; que, dans sa dernière version, l'étude d'impact versée au dossier soumis à l'enquête publique qui a débuté le 11 janvier 1996 se borne à mentionner, en ce qui concerne le mode d'élimination des résidus en question, que ces derniers seront stockés dans l'un des centres d'enfouissement technique de classe 2 autorisés au niveau départemental ; que cette mention ne peut être regardée comme suffisamment détaillée au regard des exigences des dispositions précitées, alors surtout qu'il ressort de l'avis émis le 29 février 1996 par la direction régionale de l'environnement que l'exploitant d'une usine d'incinération entrée en service trois ans plus tôt dans le département de l'Hérault n'avait pas réussi à trouver un lieu de stockage final des mâchefers ; que la société OCREAL ne peut utilement se prévaloir des précisions apportées par elle postérieurement à l'ouverture de l'enquête publique, ni d'accords qui lui ont été donnés en 1998 par divers exploitants de sites de stockage, au demeurant situés en dehors du département de l'Hérault ; qu'ainsi, l'autorisation du 11 juillet 1996 a été accordée au terme d'une procédure irrégulière ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société OCREAL n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Montpellier a annulé cette autorisation ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les défendeurs soient condamnés à verser à la société OCREAL la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la société OCREAL à payer aux défendeurs la somme de 1000 euros au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société OCREAL est rejetée.

Article 2 : La société OCREAL versera à l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT DU LUNELLOIS et autres la somme de 1.000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société OCREAL, à l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT LUNELLOIS, à Mme P. Y et autres, à Les Verts Languedoc-Roussillon, au syndicat Entre Pic et Etang et au MINISTRE DE L'ECOLOGIE ET DU DEVELOPPEMENT DURABLE.

2

N°'''MA01233


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 98MA01233
Date de la décision : 15/04/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: M. Philippe CHERRIER
Rapporteur public ?: M. HERMITTE
Avocat(s) : BOIVIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-04-15;98ma01233 ?
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