La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/03/2004 | FRANCE | N°99MA01117

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 18 mars 2004, 99MA01117


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 18 juin 1999 sous le n° 99MA01117, présentée pour Mme Marie Dominique Y, demeurant ... et M. Dominique Z, demeurant ... par Me GUIN, avocat ;

Mme Y et M. Z demandent à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 97-363 en date du 8 avril 1999 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 avril 1997 par lequel le maire d'Ajaccio a délivré à M. Philippe un permis de construire en vue de l'édification d'une maison in

dividuelle sur un terrain cadastré Section CN, parcelle n° 4 ;

Classement...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 18 juin 1999 sous le n° 99MA01117, présentée pour Mme Marie Dominique Y, demeurant ... et M. Dominique Z, demeurant ... par Me GUIN, avocat ;

Mme Y et M. Z demandent à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 97-363 en date du 8 avril 1999 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 avril 1997 par lequel le maire d'Ajaccio a délivré à M. Philippe un permis de construire en vue de l'édification d'une maison individuelle sur un terrain cadastré Section CN, parcelle n° 4 ;

Classement CNIJ : 68-03-03-01-02

C

2°/ d'annuler ledit arrêté ;

3°/ de condamner la Ville d'Ajaccio à leur verser pour chacun d'entre eux la somme de 5.000 F ;

Ils soutiennent, en premier lieu, que l'avis favorable donné au projet par l'Architecte des Bâtiments de France est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'un tel avis favorable ne pouvait être émis pour un projet localisé dans le site inscrit du Rivage Nord du Golfe d'Ajaccio et qu'en application des articles R.421-38-5 et R.146-1 du code de l'urbanisme ainsi que de l'article 4 de la loi du 2 mai 1930, il importait de préserver un espace remarquable ;

Ils soutiennent, en deuxième lieu, que le maire n'a pas suffisamment motivé son arrêté en motivant l'adaptation mineure par la seule mention de la configuration de la parcelle ;

Ils soutiennent, en troisième lieu, que la parcelle CN4 n'est desservie par aucune voie de nature à satisfaire aux exigences de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme et plus particulièrement en ce qui concerne la circulation et l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie ; que si la demande de permis de construire fait état d'une voie, dite Chemin des Agaves, il n'est pas contestable que cette voie est une voie privée ne desservant que les lots d'un lotissement et qu'ainsi le pétitionnaire ne pouvait se prévaloir d'une servitude permettant d'accéder au terrain d'emprise de la construction dans des conditions conformes aux exigences réglementaires ; qu'en outre, en qualifiant ladite voie de voie communale, le pétitionnaire a délibérément induit en erreur l'autorité administrative ;

Ils soutiennent, enfin, que le permis de construire en litige a été délivré en méconnaissance des dispositions du plan d'occupation des sols (POS) d'Ajaccio, en l'espèce applicable, régissant l'implantation des constructions par rapport aux voies publiques ; qu'en effet, ledit règlement dispose que le recul des bâtiments par rapport aux voies existantes est égal à la hauteur de ceux-ci avec un minimum de quatre mètres ; qu'en l'espèce, si le bâtiment en litige est implanté à 4,30 m de la voie qui borde le terrain à l'Est, sa hauteur mesurée à l'égout du toit atteint 7 mètres au minimum ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 juillet 1999, présenté pour Mme Y et M. Z et par lequel ils transmettent des pièces à la Cour ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 août 1999, présenté pour M. Philippe , par Me PASTOREL, avocat et par lequel il conclut au rejet de la requête et à ce que les appelants soient condamnés à lui payer la somme de 30.000 F sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Il soutient, en premier lieu, que le moyen tiré de l'illégalité de l'avis de l'Architecte des Bâtiments de France (ABF) n'est pas fondé ; qu'en effet, le terrain en litige étant situé dans un site inscrit, le projet n'était soumis qu'à la consultation de cette autorité en vertu de l'article R.421-38-5 du code de l'urbanisme ; qu'en l'espèce, en l'absence de réponse de l'ABF dans le délai d'un mois à compter de la réception par cette autorité de la demande de permis de construire, soit le 14 février 1997, cet avis devait être regardé comme favorable ; qu'un avis formel n'est intervenu que le 18 avril 1997, soit plus de deux mois après la saisine de l'ABF ;

Il soutient, en deuxième lieu, en ce qui concerne le défaut de motivation de l'arrêté contesté en ce qui concerne l'adaptation mineure, que ce moyen n'est pas fondé puisque l'arrêté en cause est suffisamment motivé au regard de l'article L.123-1 du code de l'urbanisme en considération de la configuration de la parcelle ; qu'en effet, le terrain d'assiette est en forte déclivité ; qu'en outre, il s'agissait bien d'une adaptation mineure au regard des dispositions de l'article UC 2-5 du règlement du POS qui impose une surface minimum de 1 000 m2 pour que les terrains soient constructibles dès lors que le terrain en litige a une superficie de 985 m2 ;

Il soutient, en troisième lieu, en ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme, que les requérants ne démontrent pas par des affirmations péremptoires que la desserte du terrain serait insuffisante pour desservir une maison individuelle qui n'est pas de nature à modifier l'intensité du trafic ; qu'en outre, au regard de cet article, la circonstance que la voie d'accès soit publique ou privée est sans incidence ; qu'en tout état de cause, cette voie est désormais classée dans le domaine public ;

Il soutient, en quatrième lieu, concernant le moyen relatif à la règle de prospect que le projet est conforme aux dispositions tant des règles fixées par l'article UC2-6 qu'avec celles de l'article UC2-7 du règlement du POS ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 janvier 2000, présenté pour la commune d'Ajaccio, représentée par son maire en exercice, par Me SALASCA, avocat et par lequel elle conclut au rejet de la requête ;

Elle soutient, en premier lieu, que la requête est irrecevable à défaut pour les appelants de justifier qu'ils ont bien notifié, en application de l'article L.600-3 du code de l'urbanisme, une copie intégrale de leur recours ;

Elle soutient, en deuxième sur le fond, que le règlement du POS approuvé le 24 novembre 1984 et modifié le 16 janvier 1987 était applicable dès lors qu'il n'est pas démontré que ledit POS ait été annulé et que, bien que faisant à l'époque l'objet d'une révision, il était opposable ; que le permis en litige était suffisamment motivé au regard des dispositions de l'article L.123-1 du code de l'urbanisme ; qu'en outre, en l'espèce, l'adaptation avait bien un caractère mineure ; que l'ABF, à défaut d'avoir émis son avis dans le délai qui lui était imparti devait être regardé comme ayant émis un avis favorable ; que le moyen tiré de l'insuffisance de l'accès doit être rejeté ; qu'il en est de même du moyen relatif à la surface ; que sur les moyens relatifs à la densité, à la hauteur et à la qualité du site, elle s'en remet à la sagesse de la juridiction ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 novembre 1999, présenté par M. Z et par lequel il précise à la Cour qu'il entend se désister de sa requête d'appel susvisée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi du 2 mai 1930 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2004 :

- le rapport de Mme BUCCAFURRI, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;

Sur les conclusions aux fins de désistement de M. Z :

Considérant que par un mémoire enregistré au greffe de la Cour de céans le 24 novembre 1999, M. Z, qui a présenté sa requête conjointement avec Mme Y, a déclaré se désister de sa requête d'appel ; que ce désistement étant pur et simple, il y a lieu de lui en donner acte ; qu'en revanche, Mme Y ne s'étant quant à elle pas désistée de ladite instance, il y a lieu d'y statuer ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune à la requête d'appel :

Considérant qu'aux termes de l'article L.600-3 du code de l'urbanisme alors en vigueur : En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un document d'urbanisme ou d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un document d'urbanisme ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol... / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. / Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. ; qu'aux termes de l'article R.600-2 du même code pris pour l'application des dispositions législatives précitées : La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux ;

Considérant, qu'à la suite de la demande de régularisation adressée à l'appelante par les services du greffe de la Cour aux fins de justification des notifications de la requête d'appel conformément aux dispositions législatives et réglementaires précitées, Mme Y a, par un mémoire enregistré au greffe le 26 juillet 1999, produit copie des certificats postaux de dépôt desdites notifications effectuées dans le délai de quinze jours francs de l'enregistrement de la requête d'appel ; que la production des ces documents est de nature à établir à elle seule, ainsi que le précisent expressément les dispositions sus-rappelées de l'article R.600-2 du code de l'urbanisme, l'accomplissement des formalités exigées par l'article L.600-3 du code de l'urbanisme alors même que Mme Y n'avait pas également produit copie de la lettre de notification adressée aux personnes concernées ; qu'à cet égard, la commune n'établit pas ni même n'allègue que les plis recommandés adressés par Mme Y ne contenaient pas copie de la requête d'appel ; que, par suite, cette fin de non-recevoir doit être écartée ;

Sur la légalité de l'arrêté en date du 2 avril 1997 :

Considérant qu'aux termes de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme : Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie... ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet contesté est desservi par une voie dénommée Chemin des Agaves ; qu'il ressort également des pièces du dossier que ce chemin, dont l'emprise appartenait à des propriétaires privés, et qui ne donnait accès qu'à des propriétés privées, n'était pas ouverte à la circulation publique ; qu'elle présentait donc le caractère d'un voie privée ; qu'à cet égard, le courrier en date du 26 juin 1997 du maire d'Ajaccio auquel était annexé un extrait du plan cadastral, produit par M. , n'est pas de nature à établir à lui seul, qu'à la date de la délivrance du permis de construire en litige, ladite voie avait été intégrée dans le domaine public communal ; que M. n'a justifié à l'appui de sa demande de permis de construire d'aucune servitude de passage sur la voie privée en question ; qu'ainsi, le permis de construire en litige a été délivré en méconnaissance des dispositions sus-rappelées de l'article R.111-4 du code de l'urbanisme ; que, par suite Mme Y est fondée à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande ; qu'elle est, dès lors, fondée à demander l'annulation dudit jugement ainsi que du permis de construire délivré le 2 avril 1997 à M. ;

Considérant qu'en l'état du dossier seul l'autre moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée est susceptible d'entraîner également l'annulation dudit permis de construire ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme Y, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à M. une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. présentée à ce titre en tant qu'elle est dirigée à l'encontre de M. Z ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner la commune d'AJACCIO à verser à Mme Y une somme de 700 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de la requête susvisée de M. Z.

Article 2 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Bastia en date du 8 avril 1999 est annulé.

Article 3 : L'arrêté en date du 2 avril 1997 du maire d'Ajaccio délivrant un permis de construire à M. est annulé.

Article 4 : La commune d'AJACCIO est condamnée à payer à Mme Y une somme de 700 euros (sept cent euros) sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions formulées par M. sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Y, à M. Z, à la commune d'AJACCIO, à M. et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Copie en sera adressée au procureur de la République près le Tribunal de grande instance d'Ajaccio.

Délibéré à l'issue de l'audience du 26 février 2004, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. CHERRIER et Mme BUCCAFURRI, premiers conseillers,

assistés de Mme EJEA, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 18 mars 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé signé

Marc ROUSTAN Isabelle BUCCAFURRI

Le greffier,

signé

Françoise EJEA

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 99MA01117 8


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA01117
Date de la décision : 18/03/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. HERMITTE
Avocat(s) : GUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-03-18;99ma01117 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award