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18/03/2004 | FRANCE | N°01MA00164

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 18 mars 2004, 01MA00164


Vu, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 23 janvier 2001, sous le n° 01MA00164, présentée pour la société à responsabilité limitée (S.A.R.L.) X, ayant son siège social Campagne les Acacias - Quartier Pignet de Rohan à LA CIOTAT (13600) par Me FERRAN LECOQ, avocat ;

La société X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 99-5559 en date du 16 novembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 juillet 1999 par lequel le préfet

des Bouches-du-Rhône l'a mise en demeure de procéder à une étude diagnostic du si...

Vu, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 23 janvier 2001, sous le n° 01MA00164, présentée pour la société à responsabilité limitée (S.A.R.L.) X, ayant son siège social Campagne les Acacias - Quartier Pignet de Rohan à LA CIOTAT (13600) par Me FERRAN LECOQ, avocat ;

La société X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 99-5559 en date du 16 novembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 8 juillet 1999 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a mise en demeure de procéder à une étude diagnostic du site Le Mentaure dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêté ;

Classement CNIJ : 44-02-02-01-02

C

2°/ d'annuler ledit arrêté ;

3°/ de condamner l'Etat à lui payer la somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Elle soutient, en premier lieu, que le tribunal administratif n'a pas répondu aux moyens développés dans son mémoire déposé au greffe du tribunal le 20 octobre 2000 et selon lequel elle informait le tribunal que le préfet avait mis en demeure M. X, propriétaire du terrain, de réaliser un programme d'étude technique par un arrêté en date du 22 mars 2000 dont les termes sont identiques à l'arrêté faisant l'objet de la présente procédure ;

Elle soutient, en deuxième lieu, qu'elle n'exploite plus la décharge en question depuis que M. X, propriétaire du terrain, a vendu sa société à M. Y , soit les 29 décembre 1997 et 30 juin 1998 ; que le dépôt de 800 tonnes de pommes de terres dans cette décharge a été effectué non par M. Y mais par M. X ; que n'étant ni propriétaire du terrain, ni locataire et n'exploitant plus cette décharge, elle ne pouvait être destinataire de la mise en demeure qui lui a été adressée par l'arrêté contesté ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2003, présenté au nom de l'Etat, par la ministre de l'écologie et du développement durable et par lequel elle conclut au rejet de la requête ;

Elle soutient que la décharge litigieuse du Mentaure a été exploitée par M. X, dans la cadre des activités de la société X, jusqu'à l'apposition des scellés sur le site par le préfet ; que depuis cette date, la décharge en cause est détenue par M. X qui a vendu sa société le 30 juin 1998 tout en conservant la propriété du terrain sur lequel se trouve la décharge ; qu'ainsi, il apparaît que les obligations de remise en état du site incombent en priorité à M. X ; que ce dernier a pu être mis en cause, en tant que personne physique dès lors qu'il a autorisé, sans respecter la procédure préalable prévue par les dispositions de l'article L.511-1 du code de l'environnement, le dépôt de déchets sur un terrain dont il est propriétaire et dès lors qu'il est seul bénéficiaire du dépôt, ainsi qu'en a jugé la Cour administrative d'appel de Paris dans un arrêt en date du 22 octobre 1998 ; qu'une telle mesure s'imposait également à lui en application des dispositions des articles L.541-2 et L.541-3 du code de l'environnement ;

Vu l'ordonnance du président de la formation de jugement fixant la clôture de l'instruction au 15 avril 2002 ;

Vu les décisions de radiation de l'affaire enrôlées successivement à la date du 17 octobre 2002 et 19 juin 2003 ;

Vu l'ordonnance du président de la formation de jugement fixant la clôture de l'instruction au 2 février 2004 à 16h00 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2004 :

- le rapport de Mme BUCCAFURRI, premier conseiller ;

- les observations de Me FERRAN LECOQ pour la SA.R.L. X ;

- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que la société X soutient que le tribunal administratif n'aurait pas pris en compte les moyens qu'elle avait invoqués dans un mémoire, enregistré au greffe du tribunal administratif le 20 octobre 2000 ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'examen du jugement attaqué, que le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen nouveau invoqué dans ce mémoire, au demeurant non visé dans le jugement contesté, et tiré de ce que la société X n'était pas propriétaire du terrain d'assiette de la décharge litigieuse, ni locataire et n'était plus exploitante de ladite décharge depuis 1998 ; qu'en omettant de statuer sur le bien fondé de ce moyen qui n'était pas inopérant, le tribunal administratif a entaché son jugement d'irrégularité ; que, par suite, la société X est fondée à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société X devant le tribunal administratif :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 30 juin 1997, l'inspecteur des Installations classées a dressé un procès-verbal d'infraction à la législation des installations classées à l'encontre de la société X, qui exploitait une déposante de matières de vidange, sur un terrain sis à LA CIOTAT, au lieu-dit Le Mentaure, appartenant à M. X ; que, ce procès-verbal ayant constaté l'exercice par la société X d'une activité de stockage de déchets de classe II sans que ladite société ait obtenu l'autorisation préalable requise, le préfet des Bouches-du-Rhône a, par un arrêté en date du 8 juillet 1997, enjoint à cette société de cesser toute réception de déchets et de se mettre en conformité, dans un délai de trois mois, avec la législation des installations classées, soit en présentant une demande de régularisation administrative, soit en fermant le site en présentant un programme de réhabilitation ; qu'en vertu d'un arrêté préfectoral du 12 mai 1998, le site en question a été fermé par apposition des scellés ; que, par un arrêté en date du 8 juillet 1999, le préfet, après avoir constaté que les prescriptions de son arrêté susvisé n'avaient pas été exécutées, a mis en demeure la société X d'établir un programme d'études techniques permettant d'évaluer la nature des nuisances et risques encourus par l'environnement du fait de l'activité ancienne sur le site et destiné à déterminer les travaux nécessaires à la réhabilitation du site ; que la société X demande l'annulation de ce dernier arrêté ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'environnement, reprenant les dispositions de l'article 1er de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement : Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publique, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments... ; qu'aux termes de l'article L.514-2 du même code, reprenant les dispositions de l'article 24 de la loi du 19 juillet 1976 : Lorsqu'une installation classée est exploitée sans avoir fait l'objet de la déclaration ou de l'autorisation requise par le présent titre, le préfet met l'exploitant en demeure de régulariser sa situation dans un délai déterminé en déposant, suivant le cas, une déclaration ou une demande d'autorisation. Il peut, par arrêté motivé, suspendre l'exploitation de l'installation jusqu'au dépôt de la déclaration ou jusqu'à la décision relative à la demande d'autorisation. / Si l'exploitant ne défère pas à la mise en demeure de régulariser sa situation ou si sa demande d'autorisation est rejetée, le préfet peut, en cas de nécessité, ordonner la fermeture ou la suppression de l'installation. Si l'exploitant n'a pas obtempéré dans le délai fixé, le préfet peut faire application des procédures prévues aux 1° et 2° du I de l'article L.514-1. ; qu'aux termes de l'article L.514-1 dudit code, reprenant les dispositions du premier alinéa de l'article 23 de la loi du 19 juillet 1976 : Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées et lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si, à l'expiration du délai fixé pour l'exécution, l'exploitant n'a pas obtempéré à cette injonction, le préfet peut :1°/ Obliger l'exploitant à consigner entre les mains d'un comptable public une somme répondant au montant des travaux à réaliser (...) ; qu'aux termes de l'article 34-1 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 : I - Lorsqu'une installation classée est mise à l'arrêté définitif, son exploitant remet son site tel qu'il ne s'y manifeste aucun des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 susvisée. Le préfet peut à tout moment imposer les prescriptions relatives à la remise en état du site, par arrêtés pris dans les formes prévues à l'article 18 ci-dessus. II - L'exploitant qui met à l'arrêt définitif son installation notifie au préfet la date de cet arrêt au moins un mois avant celle-ci. Toutefois, dans le cas des installations classées autorisées pour une durée limitée définies à l'article 17-1, cette notification est adressée au préfet six mois au moins avant la date d'expiration de l'autorisation. III - Dans le cas des installations soumises à autorisation, il est joint à la notification un dossier comprenant le plan à jour des terrains d'emprise de l'installation, ainsi qu'un mémoire sur l'état du site. Le mémoire précise les mesures prises ou prévues pour assurer la protection des intérêts visés à l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 susvisée, et pouvant comporter notamment : 1° L'évaluation ou l'élimination des produits dangereux, ainsi que des déchets présents sur le site ; 2° La dépollution des sols et des eaux souterraines éventuellement polluées ; 3° L'insertion du site de l'installation dans son environnement ; 4° En cas de besoin, la surveillance à exercer de l'impact de l'installation sur son environnement... ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'obligation de remettre en état le site de l'installation pèse sur l'exploitant, à moins qu'il n'ait cédé son installation et que le cessionnaire se soit régulièrement substitué à lui en qualité d'exploitant ; qu'à défaut d'exploitant présent et solvable, cette obligation de remise en état doit être mis à la charge du détenteur de ladite installation ;

Considérant, en premier lieu, que si la société X soutient que la décharge qu'elle exploitait ne constituait pas une décharge de déchets ménagers, le dépôt de déchets ménagers et assimilables a été constaté par deux procès-verbaux d'infraction établis les 30 juin 1997 et 23 avril 1997 par l'inspecteur des installations classées ; que lesdits procès-verbaux font foi jusqu'à la preuve contraire ; qu'une telle preuve n'est pas rapportée par la société appelante ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment des affirmations non contestées formulées en défense par le préfet devant les premiers juges, que les services de lutte contre l'incendie ont dû intervenir entre juillet 1997 et juillet 1998 sur le site exploité par la société X en raison de l'inflammation du dépôt de déchets concerné ; que des évents laissant échapper des gaz chauds, témoins d'une combustion interne du dépôt, ont été également constatés ainsi que la présence de combustibles et de fermentescibles ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la société X, la décharge en cause présentait des dangers pour la sécurité publique et l'environnement et était de nature, par suite, à porter atteinte aux intérêts visés par les dispositions précitées de l'article L.511-1 du code de l'environnement ; qu'il suit de là que la société ne peut utilement se prévaloir du jugement du 3 juin 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille, dans le cadre d'une instance distincte, constaté que le site ne présentait pas de risques pour les eaux souterraines ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que, jusqu'au 12 mai 1998, date de l'apposition des scellés sur le site par décision préfectorale, la décharge incriminée était exploitée, sans aucune autorisation, par la société X ; que si ladite société fait valoir qu'elle n'est plus locataire ni exploitante de ladite décharge depuis la fermeture du site, il est constant que ladite société n'a pas cédé son installation et qu'aucun cessionnaire ne s'est régulièrement substitué à elle en qualité d'exploitant ; que si la société fait, en outre, valoir, qu'elle n'est pas propriétaire du site et que M. X, ledit propriétaire, a cédé le 30 juin 1998 aux consorts Y l'ensemble des parts sociales qu'il détenait dans la société, d'une part il est constant que le propriétaire du site ne s'est pas substitué régulièrement à la société X en qualité d'exploitant et d'autre part il n'est ni allégué ni établi que la société X aurait été dissoute ou ne serait pas solvable ; que, dans ces conditions, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a commis aucune erreur de droit en adressant à la société X, dernier exploitant, les injonctions sus-rappelées ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aussi longtemps que subsiste l'un des dangers ou inconvénients mentionnés à l'article L.511-1 du code de l'environnement, le préfet peut mettre en oeuvre les mesures énumérées à l'article L.514-1 du même code ; qu'ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, de tels dangers et inconvénients ont été constatés sur le dépôt en cause auxquels, cela n'est pas contesté, la société X, exploitante du site n'a pas remédié ; qu'ainsi, la société X ne peut utilement arguer de la cessation d'exploitation par ses soins du site en question pour tenter de s'exonérer de ses obligations ;

Considérant, enfin, que la circonstance alléguée par la société requérante de ce que la décharge en cause présentait une utilité publique en l'absence d'une station d'épuration sur le territoire de la commune de LA CIOTAT est sans influence sur la légalité de l'arrêté contesté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée par la société X devant le Tribunal administratif de Marseille doit être rejetée ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la société X une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé en date du 16 novembre 2000 du Tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société X devant le Tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 3 : Le surplus de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société X et à la ministre de l'environnement et du développement durable.

Copie pour information en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré à l'issue de l'audience du 26 février 2004, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. CHERRIER et Mme BUCCAFURRI, premiers conseillers,

assistés de Mme EJEA, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 18 mars 2004.

Le président, Le rapporteur,

signé signé

Marc ROUSTAN Isabelle BUCCAFURRI

Le greffier,

signé

Françoise EJEA

La République mande et ordonne à la ministre de l'environnement et du développement durable en ce qui la concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 01MA00164 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01MA00164
Date de la décision : 18/03/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. HERMITTE
Avocat(s) : FERRAN LECOQ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-03-18;01ma00164 ?
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