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26/02/2004 | FRANCE | N°00MA00224

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 26 février 2004, 00MA00224


Vu la requête, transmise par télécopie, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 2 février 2000 sous le n° 00MA00224, présentée pour la SOCIETE OWNMANOR, domiciliée au lieu-dit Tamaricciu, Route de Palombaggia, à PORTO VECCHIO (20137), représentée par Monsieur Georges Durand, demeurant 29, Marina Y...
Z... à PORTO VECCHIO (20137), par Me Bernard X..., avocat au barreau de Nice ;

La SOCIETE OWNMANOR demande à la Cour d'annuler le jugement n° 98 314/98-1417 en date du 20 décembre 1999 par lequel le magistrat délégué du Tribunal adminis

tratif de Bastia l'a condamnée, sur déféré du préfet de la Corse du Sud, à ...

Vu la requête, transmise par télécopie, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 2 février 2000 sous le n° 00MA00224, présentée pour la SOCIETE OWNMANOR, domiciliée au lieu-dit Tamaricciu, Route de Palombaggia, à PORTO VECCHIO (20137), représentée par Monsieur Georges Durand, demeurant 29, Marina Y...
Z... à PORTO VECCHIO (20137), par Me Bernard X..., avocat au barreau de Nice ;

La SOCIETE OWNMANOR demande à la Cour d'annuler le jugement n° 98 314/98-1417 en date du 20 décembre 1999 par lequel le magistrat délégué du Tribunal administratif de Bastia l'a condamnée, sur déféré du préfet de la Corse du Sud, à remettre en état les lieux illégalement occupés sur le domaine public maritime sur la plage de Palombaggia dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement, sous peine d'astreinte de 500 francs par jour de retard, et a autorisé l'administration à faire exécuter la remise en l'état des lieux aux frais de la société ;

Classement CNIJ : 24-01-03-01-04-02-02

24-01-03-01-45-015

C

Elle fait valoir que :

- à partir de la tempête exceptionnelle de décembre 1997, la propriété en cause a fait l'objet d'une érosion majeure portant atteinte à la clôture et permettant à la mer de pénétrer dans les terres et se frayer un chemin dans ces mêmes terres, ;

- devant l'urgence et la carence de l'Etat à entretenir son propre bien, elle a décidé de procéder, à ses propres frais, à la protection des lieux sans avoir l'intention de s'approprier ceux-ci ;

- elle pouvait protéger les terres dans les limites de sa propriété privée ;

- la clôture et les enrochements objets de la contravention n'ont jamais été recouverts par les plus hauts flots et qu'ils ont été constitués sur le domaine privé ;

Vu l'exemplaire original de la requête, enregistré le 3 février 2000 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 23 mai 2000, le mémoire en observations en défense présenté par l'Association pour le libre accès aux plages et la défense du littoral, représentée par son président, et par lequel elle conclut à la confirmation du jugement et à ce que la SOCIETE OWNMANOR soit condamnée à lui verser la somme de 3.000 francs en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la limite des plus hautes eaux a subi des variations importantes depuis vingt-cinq à trente ans, avec une tendance au recul du rivage ; que la société reconnaît dans sa requête que la limite du domaine public maritime a fluctué au détriment de la plage et des propriétés riveraines de la mer ; que les ouvrages réalisés ont bouleversé l'environnement, la plage et ses abords, avec déplacement important de pierres, cailloux et rochers ; que l'agent assermenté avait qualité et compétence pour établir la limite du domaine public maritime et constater que des ouvrages litigieux avaient été réalisés sur la partie publique ;

Vu, enregistré le 29 août 2000, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient, d'une part, que :

- l'Etat n'a pas d'obligation de réalisation ou d'entretien de d'ouvrages de défense contre les eaux ;

- rien ne s'oppose à la construction d'ouvrages protecteurs par les riverains sur des emprises de leur propriété non recouvertes par le plus haut flot ;

- de tels ouvrages peuvent être édifiés sur le domaine public, mais à condition d'avoir été autorisés par l'administration gestionnaire et de faire l'objet d'un titre d'occupation adapté, ce qui n'est pas le cas pour le société requérante ;

Il soutient, d'autre part, que :

- le phénomène d'érosion constaté après la tempête de 1997 démontre que les travaux en cause sont implantés sur le domaine public maritime ;

- les enrochements en cause sont, de façon régulière, recouverts par le plus haut flot ;

Vu, enregistré le 8 janvier 2002, le mémoire présenté par l'Association pour le libre accès aux plages et la défense du littoral, qui déclare persister dans ses précédentes écritures, en faisant valoir les mêmes moyens ;

Elle soutient que la société a réalisé les travaux litigieux sans autorisation ni contrôle, sur la partie publique de la plage, dans la portion recouverte par les plus hautes eaux ; que la limite du domaine public maritime résulte du constat de l'agent assermenté en date du 16 février 1998 ; que les constats de l'huissier et de l'expert géomètre ne peuvent que déterminer les limites correspondant à l'extrait cadastral au jour de leur visite sans avoir qualité pour définir la limite du domaine public ;

Vu, enregistré le 9 janvier 2002, le mémoire complémentaire présenté pour la SOCIETE OWNMANOR, qui déclare persister dans ses précédentes écritures, en faisant valoir les mêmes moyens :

Elle fait valoir que la question de la délimitation du domaine public maritime était une préoccupation de la puissance publique depuis fort longtemps mais que rien n'a été fait, l'inaction des services de l'Etat l'ayant obligé à intervenir au plus vite face à l'urgence ;

Vu, enregistré le 29 mai 2002, le mémoire complémentaire présenté pour le SOCIETE OWNMANOR, qui déclare persister dans ses précédentes écritures, en faisant valoir les mêmes moyens ;

Elle fait valoir que la décision de l'administration de lancer une procédure de délimitation constitue une preuve de sa mauvaise foi ; qu'il s'est écoulé une période de 25 ans sans que l'Etat s'intéresse à cette question ;

Vu le procès-verbal de contravention de grande voirie ;

Vu l'ordonnance royale d'août 1681 sur la marine ;

Vu la loi du 28 Floréal An X ;

Vu la loi du 16 septembre 1807 relative au dessèchement des marais ;

Vu le code du domaine de l'Etat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 janvier 2004 :

- le rapport de Mme BUCCAFURRI, premier conseiller ;

- les observations de Me A... substituant Me X... pour la société OWNMANOR ;

- et les conclusions de M.HERMITTE, premier conseiller ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du titre VII du Livre IV de l'ordonnance sur la marine d'août 1681 : Sera réputé bord et rivage de la mer tout ce qu'elle couvre et découvre pendant les nouvelles et pleines lunes et jusqu'où le grand flot de mars se peut étendre sur les grèves ; que ces dispositions doivent être entendues comme fixant la limite du domaine public maritime, quel que soit le rivage, au point jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles ; qu'il appartient au tribunal administratif saisi d'un procès-verbal de contravention de grande voirie, et, en appel, à la cour administrative d'appel, de reconnaître les limites du domaine public naturel et de dire si les terrains sur lesquels ont été commis les faits en raison desquels le procès-verbal a été dressé se trouvent ou non compris dans ces limites ;

Considérant que la SOCIETE OWNMANOR a fait l'objet d'un procès verbal de contravention de grande voirie affirmé le 24 février 1998 ; que le Tribunal administratif de Bastia a condamné la SOCIETE OWNMANOR à remettre en état les lieux illégalement occupés dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement sous peine d'astreinte de 500 francs par jour de retard et a autorisé l'administration à faire exécuter la remise en l'état des lieux aux frais de la société ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des observations en défense présentées par le préfet en première instance et non contestées, que les terrains sur lesquels la SOCIETE OWNMANOR a effectué les travaux ayant fait l'objet du procès-verbal de contravention de grande voirie font l'objet d'un phénomène d'érosion constant depuis 1994 et que les plus hautes mers ont recouvert les terrains en litige en 1994, 1995, 1997 et 1998 ; qu'ainsi, il est établi que les travaux effectués par la SOCIETE OWNMANOR sur la plage de Palombaggia se situent à l'intérieur de la limite atteinte à plusieurs reprises par les plus hautes mers en dehors de circonstances météorologiques exceptionnelles ; qu'il suit de là qu'est sans influence sur l'appartenance de ces terrains au domaine public maritime la circonstance selon laquelle les plans établis par le géomètre expert désigné par la société requérante feraient état de la non appartenance des terrains en cause au domaine public ; qu'ainsi, les travaux en cause ont été effectués sur le domaine public maritime ;

Considérant, en second lieu, que l'article 2, titre VII, livre IV de l'ordonnance royale d'août 1681 fait défenses à toutes les personnes de bâtir sur les rivages de la mer, d'y planter aucun pieu, ni faire aucun ouvrage qui puissent porter préjudice à la navigation, à peine de démolition des ouvrages, de confiscation des matériaux et d'amende arbitraire ; qu'il est constant que les travaux ont été effectués sans autorisation de l'administration ; qu'à cet égard, le silence observé par l'administration aux demandes de travaux effectuées par la société requérante ne saurait être regardé comme une acceptation tacite de ceux-ci ; que la SOCIETE OWNMANOR ne peut, en outre, utilement invoquer les dispositions de l'article 33 de la loi susvisée du 16 septembre 1807 pour justifier les travaux litigieux effectués sans autorisation sur des terrains appartenant au domaine public maritime ; que, par conséquent, les travaux en cause, effectués sans autorisation de l'administration, constituent une occupation illégale du domaine public maritime ; que cette occupation illégale du domaine public maritime est constitutive d'une contravention de grande voirie ; que, dès lors, la SOCIETE OWNMANOR n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat-délégué du Tribunal administratif de Bastia a fait droit à la demande du préfet de la Corse-du-Sud et l'a condamnée à la remise en l'état des lieux en leur état primitif dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement sous peine d'astreinte de 500 francs par jour de retard et a autorisé l'administration à faire exécuter la remise en l'état des lieux aux frais de la société ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'Association pour le libre accès aux plages et la défense du littoral sur ce fondement ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par la SOCIETE OWNMANOR est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'Association pour le libre accès aux plages et la défense du littoral sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera adressé au préfet de Corse-du-Sud pour notification à la SOCIETE OWNMANOR dans les conditions prévues à l'article L.774-6 du code de justice administrative. Il sera notifié à l'Association pour le libre accès aux plages et la défense du littoral et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Délibéré à l'issue de l'audience du 15 janvier 2004, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

Mme BUCCAFURRI et Mme FEDI , premiers conseillers ;

Assistés de Mme EJEA, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 26 février 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Marc ROUSTAN Isabelle BUCCAFURRI

Le greffier,

Signé

Françoise EJEA

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 00MA00224 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA00224
Date de la décision : 26/02/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. HERMITTE
Avocat(s) : ASSO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-02-26;00ma00224 ?
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