Vu la requête transmise par télécopie, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 4 novembre 1999 sous le n° 99MA02133, présentée pour M. Jacques X, demeurant à ..., par Me TEISSIER DU CROS, avocat ;
M. X demande à la Cour :
1'/ d'annuler le jugement n° 95-550 en date du 20 mai 1999 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le maire du LAVANDOU sur sa demande d'indemnité de 2 400 000 F ainsi qu'à la condamnation de la commune du LAVANDOU à lui payer ladite indemnité, portée à 3 525 000 F, assortie des intérêts de droit à compter du 8 août 1994, à la capitalisation des intérêts à compter des 11 septembre 1997 et 29 septembre 1998, outre la somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Classement CNIJ : 60-04-01-03-01
C
2'/ de faire droit à sa demande de première instance ;
3°/ d'ordonner, en outre, la capitalisation des intérêts à la date d'enregistrement de la présente requête ;
4'/ de condamner la commune du LAVANDOU à lui payer respectivement une somme de 10 000 F au titre des frais engagés en première instance et 10 000 F au titre des frais exposés en appel, sur le fondement des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Il fait valoir qu'il a déposé le 29 janvier 1980 une demande d'accord préalable d'ouverture d'un camping sur une parcelle alors cadastrée Section D n° 473 à CAVALIERE, sur le territoire de la commune du LAVANDOU, d'une superficie de 9 ha 25 a 75 ca, appartenant à Y qui lui avait consenti une promesse de vente ; que cette demande a fait l'objet d'un accord préalable ; qu'il a ensuite déposé le 15 décembre 1980 une demande d'accord définitif ; que l'ouverture du terrain de camping a fait l'objet d'une autorisation tacite le 15 mars 1981 qui a été rapportée par un arrêté préfectoral du 29 juillet 1981 qui a été annulé par un jugement du 24 juillet 1984 du Tribunal administratif de Nice ; qu'entre-temps, la SCI DU COTEAU DES CHENES, constituée le 9 décembre 1982 entre lui-même et ses trois enfants, a acheté la parcelle en cause, par un acte du 18 mars 1983 ; que, dans le cadre d'une médiation relative à cette procédure contentieuse, le maire du LAVANDOU lui a proposé, en sa qualité de gérant de la SCI, un arrangement consistant pour cette dernière à consentir à la commune la vente d'une partie de sa propriété, d'une superficie de 6 ha 56 a 10 ca, au prix de 7 F le m² pour l'aménagement d'un golf et pour la commune d'opérer le classement de la partie restante du terrain, soit 2 ha 76 a 72 ca, désormais cadastrée n° D 1741, en zone Uda du plan d'occupation des sols (POS) avec une possibilité du coefficient d'occupation des sols (COS) de 0,10, de maintenir l'utilisation du terrain à la construction du golf et l'interdiction de tout camping dans les terrains aux alentours ; que cet arrangement a été formalisé par un échange de lettres des 27 février et 12 juin 1985, par une promesse de vente du 15 juin 1985 et la clause urbanisme de l'acte de vente de la portion de la parcelle cédée à la commune en date du 29 avril 1986 ; qu'afin de s'assurer du sérieux des engagements de la commune, la SCI a sollicité un certificat d'urbanisme ; qu'un certificat d'urbanisme lui a été délivré le 2 février 1993 qui faisait état du sursis à statuer en raison de la révision du POS pour sa mise en harmonie avec les dispositions de la loi littoral ; qu'un nouveau certificat d'urbanisme en date du 2 août 1994 a confirmé le sursis à statuer ; qu'enfin, un troisième certificat d'urbanisme lui a été délivré négatif le 5 septembre 1996, motivé par la loi littoral ; qu'il a donc sollicité en son nom propre une indemnisation pour le préjudice subi du fait de la promesse administrative non tenue ; qu'à cet égard, sa demande se fondait sur ce terrain de la responsabilité et que, s'il a invoqué la théorie civiliste de la novation, c'était uniquement afin d'expliquer qu'en cas de condamnation de la commune l'indemnité qu'il réclamait pour lui-même et celle réclamée, dans une instance connexe par la SCI DU COTEAU DES CHENES, ne pouvaient en tout état de cause se cumuler ;
Il soutient, en premier lieu, que sa demande formulée en son nom propre, est fondée sur la faute commise par le maire du LAVANDOU en l'incitant, par une promesse non viable à une société civile dont il était associé avec ses enfants, à abandonner son droit de camping sans contrepartie et ainsi à s'appauvrir ; qu'il maintient donc son moyen de survivance de l'obligation initiale en l'absence de novation et de survivance des droits acquis tirés de l'autorisation tacite du 15 mars 1981, qui n'ont pas été éteints par l'entrée en vigueur du nouveau régime du camping issu du décret n° 84-227 du 29 mars 1984 ; que, dès lors, qu'il fonde son action sur une faute de service du maire et non la responsabilité contractuelle de la commune, la circonstance qu'il était tiers à ladite convention est sans conséquence sur la faute de service susévoquée ; que le jugement précité du Tribunal administratif de Nice du 24 juillet 1984 est devenu définitif puisque le Conseil d'Etat a rejeté le recours du ministre formé en appel ; que, contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal administratif, la question du camping n'est pas étrangère à la commune dès lors que si l'autorisation tacite a été accordée par l'Etat, cette compétence a été ensuite transférée à la commune ; qu'il importe peu que la SCI soit devenue propriétaire du terrain dès lors que le droit d'exploiter le camping est dissocié de la propriété ;
Il soutient, en deuxième lieu, en ce qui concerne le préjudice, qu'il a justifié en première instance des dépenses qu'il a dû prendre en charge ; que, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal qui a considéré que la non réalisation du camping n'était pas imputable à la commune, cette non réalisation est due à ce qu'il a abandonné de plein gré son droit sur la foi de la promesse du maire de la commune ; qu'en effet, l'arrangement conclu en 1985 impliquait l'abandon du camping ; que le préjudice qu'il a subi réside dans le fait qu'il s'est dépouillé du droit qu'il détenait sur le terrain en cause en raison de l'existence d'une promesse illicite et insusceptible de réparation à son bénéficiaire ; que s'il n'avait pas été induit en erreur, il aurait achevé les travaux d'aménagement du camping et l'exploiter ;
Vu l'exemplaire original de la requête susvisée, enregistrée le 5 novembre 1999 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense transmis par télécopie, enregistré le 4 mars 2000, présenté pour la commune du LAVANDOU, représentée par son maire en exercice, par Me ASSO, avocat et par lequel elle conclut au rejet de la requête et à ce que M. X soit condamné au paiement d'une somme de 10 000 F sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Elle soutient, en premier lieu, que le Tribunal administratif a estimé que M. X était tiers par rapport à la convention conclue entre la SCI DU COTEAU DES CHENES et la commune du LAVANDOU ;
Elle soutient, en deuxième lieu, que le requérant n'établit pas l'existence d'un lien entre la renonciation à l'ouverture du camping et la vente de la parcelle D 1740 et ne justifie pas la réalité de son préjudice ni de son caractère certain et qu'en tout état de cause les frais invoqués sont atteints par la prescription quadriennale ;
Vu l'exemplaire original du mémoire susvisé, enregistré le 9 mars 2000 ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 octobre 2001, présenté pour M. X et par lequel il conclut aux mêmes fins que sa requête et par les mêmes moyens ; il conclut, en outre, à ce que les intérêts soient capitalisés à la date d'enregistrement du présent mémoire ;
Il soutient, en outre, que l'exception de prescription quadriennale, évoquée au mode conditionnel, n'est pas régulièrement invoquée par l'avocat de la commune et n'est pas fondée ; qu'il y a bien un lien de cause à effet entre la vente de la parcelle et sa renonciation aux droits qu'il détenait de l'autorisation de camping ; que ce lien ressort de la promesse de vente qui interdit expressément toute forme de camping et de la délibération des associés ; qu'il a justifié de son préjudice en première instance par la production d'un mémoire qu'il joint et auquel il entend se référer ;
Vu le mémoire transmis par télécopie, enregistré le 22 janvier 2004, présenté pour la commune du LAVANDOU et par lequel elle conclut aux mêmes fins que son mémoire susvisé et par les mêmes motifs ;
Vu l'exemplaire original du mémoire susvisé enregistré le 27 janvier 2004 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2004 :
- le rapport de Mme BUCCAFURRI, premier conseiller ;
- les observations de Me TEISSIER DU CROIS pour M. Jacques X ;
- les observations de Me PHILLIP-GILLET substituant Me ASSO pour la commune du LAVANDOU ;
- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;
Considérant que M. X a déposé le 29 janvier 1980 une demande d'ouverture de camping, réitérée le 15 décembre 1980 en raison de la décision de rejet du préfet du VAR en date du 18 décembre 1980, sur un terrain sis au LAVANDOU lieudit CAVALIERE, appartenant à Y et objet entre les parties d'une promesse de vente ; que, par un jugement en date du 24 juillet 1984 devenu définitif, le Tribunal administratif de Nice a décidé que l'absence de réponse dans le délai de trois mois sur la demande d'ouverture d'un camping avait fait naître une autorisation tacite et que le préfet, alors dessaisi, ne pouvait légalement rejeter cette demande ; que la SCI DU COTEAU DES CHENES, dont M. X est le gérant, a acquis, le 18 mars 1983, la propriété en cause d'une superficie de 9 ha 25 a 75 ca ; que, dans le cadre d'une médiation relative à la procédure contentieuse susvisée, qui opposait M. X, en son nom propre, et l'Etat, le maire du LAVANDOU a proposé à M. X, agissant ès-qualité de gérant de la SCI DU COTEAU DES CHENES, un arrangement consistant pour la société à consentir à la commune la vente d'une partie de sa propriété, d'une superficie de 6 ha 56 a 10 ca, au prix de 7 F le m² pour l'aménagement d'un golf et pour la commune à opérer le classement de la partie restante du terrain, soit 2 ha 76 a 72 ca, désormais cadastrée n° D 1741, en zone Uda du plan d'occupation des sols (POS) avec une possibilité du coefficient d'occupation des sols (COS) de 0,10 pour la réalisation d'un lotissement, à maintenir l'utilisation du terrain à la construction du golf et à interdire toute forme de camping dans les terrains aux alentours ; que ledit arrangement a été formalisé par un échange de lettres des 27 février et 12 juin 1985, par une promesse de vente conclue le 15 juin 1985 entre la SCI DU COTEAU DES CHENES et la commune ainsi que par acte de vente en date du 29 avril 1986 de la portion de la parcelle cédée à la commune ; qu'en vertu d'une délibération en date du 20 juin 1985 du conseil municipal de la commune du LAVANDOU approuvant la modification du POS, le terrain restant la propriété de la SCI requérante a été classé en zone UD a avec un coefficient d'occupation des sols (COS) de 0,10, les terrains périphériques étant classés en zone NB ou ND et le terrain cédé à la commune réservé à la création d'un golf ; qu'afin de s'assurer du sérieux des engagements de la commune, la SCI DU COTEAU DES CHENES a sollicité une première fois la délivrance d'un certificat d'urbanisme pour le terrain cadastré D 1741 ; qu'un certificat d'urbanisme lui a été délivré le 2 février 1993 faisant état de la possibilité d'un sursis à statuer en raison de l'engagement d'une procédure d'une révision du plan d'occupation des sols (POS) afin d'assurer sa compatibilité avec les dispositions de la loi littoral ; que la même réponse lui a été opposée le 2 août 1994 après que ladite société ait à nouveau sollicité un certificat d'urbanisme ; qu'après avoir réitéré sa demande, un certificat d'urbanisme négatif en date du 5 septembre 1996 lui a été délivré ; que M. X, estimant que la commune du LAVANDOU avait rompu fautivement ses promesses antérieures à l'égard de la SCI et que ce comportement lui occasionnait un préjudice à titre personnel, a demandé au Tribunal administratif de Nice de condamner la commune du LAVANDOU à l'indemniser de son préjudice, évalué à la somme de 3 525 000 F ;
Sur la responsabilité de la commune :
Considérant qu'eu égard à ses écritures d'appel, M. X doit être regardé comme n'invoquant plus la responsabilité contractuelle de la commune mais uniquement la responsabilité pour faute de la commune qui l'aurait incité, par une promesse non valable faite à la SCI dont il était le gérant, à abandonner les droits qu'il détenait de l'autorisation de camping et ainsi l'aurait placé dans l'incapacité d'aménager un camping sur le terrain D. 1741, propriété de la SCI DU COTEAU DES CHENES, et sur lequel devait s'implanter un lotissement en application des engagements conclus entre ladite société et la commune du LAVANDOU ;
Considérant que, par décision de ce jour, la Cour de céans a, statuant sur la requête indemnitaire de la SCI DI COTEAU DES CHENES tendant à la réparation du préjudice dont elle estimait avoir été victime du fait de la non réalisation par la commune du LAVANDOU des engagements qu'elle estimait légaux de la commune à son égard, rejeté ladite demande en relevant la nullité des engagements ainsi pris par le maire ; que, toutefois, le préjudice allégué par M. X, qu'il aurait subi à titre personnel, et qui tient à l'impossibilité d'aménager un camping sur le terrain D. 1741, propriété de la SCI DU COTEAU DES CHENES, et sur lequel devait s'implanter un lotissement en application des engagements conclus entre ladite société et la commune du LAVANDOU, ne peut être regardé comme la conséquence directe de l'illégalité des engagements souscrits au nom de la commune par le maire du LAVANDOU mais résultent à titre exclusif de la décision de la SCI DU COTEAU DES CHENES de conclure un tel accord avec la commune ; que, par suite, le lien de causalité entre l'engagement fautif du maire et le préjudice allégué par M. X n'est pas établi ;
Considérant, d'autre part, que si M. X a invoqué devant les premiers juges le moyen tiré de ce qu'une novation d'obligation de créancier et de débiteur serait intervenue à son profit entre l'Etat et la commune du LAVANDOU, c'est à bon droit que les premiers juges, après avoir rappelé qu'une novation ne se présume pas, ont rejeté le moyen dont s'agit dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'une telle novation soit intervenue ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune du LAVANDOU, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à payer à M. X une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner M. X à payer à la commune du LAVANDOU une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions formulées par la commune du LAVANDOU sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, à la commune du LAVANDOU et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.
Délibéré à l'issue de l'audience du 29 janvier 2004, où siégeaient :
M. ROUSTAN, président de chambre,
Mme BUCCAFURRI et Mme FEDI, premiers conseillers,
assistés de Mme EJEA, greffier ;
Prononcé à Marseille, en audience publique le 12 février 2004.
Le président, Le rapporteur,
Signé Signé
Marc ROUSTAN Isabelle BUCCAFURRI
Le greffier,
Signé
Françoise EJEA
La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
N° 99MA02133 2