Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 août 2001, sous le n° 01MA01834, présentée par Maître Carrel, avocat à la Cour, pour M. Mhadji X, demeurant chez Melle Zaïnaba Y, ... ;
M. X demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 00 3865 et 00 3866 en date du 12 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 21 juin 2000 par laquelle le préfet des Bouches du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et décidé qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution de cette décision ;
Classement CNIJ : 335-01-03
C
2°/ d'annuler cette décision ;
3°/ d'enjoindre au préfet des Bouches du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 500 F par jour de retard ;
4°/ de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10.000 F au titre des frais irrépétibles exposés en appel et 5.000 F au titre des frais irrépétibles exposés en première instance en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient :
- que la décision attaquée a été prise sans consultation préalable de la commission du séjour des étrangers ;
- que le jugement contesté s'est fondé à tort sur l'article 12bis 3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 qui n'était pas invoqué par le demandeur ;
- que l'intéressé remplit les conditions prévues par l'article 12bis 7° de la même ordonnance et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2001, présenté par le ministre de l'intérieur ;
Le ministre demande à la Cour le rejet de la requête ;
Il soutient que le requérant n'apporte aucun élément nouveau en appel ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2004 :
- le rapport de M. Pocheron, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Louis, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 12bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit :...7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité comorienne, né le 9 novembre 1964, et dont il n'est pas contesté qu'il est entré en France en 1991, vivait en concubinage de manière certaine avec une compatriote en situation régulière depuis 1998, mère de deux enfants nés en France et reconnus par le requérant cette même année 1998 ; que le couple exerce sur les enfants l'autorité parentale conjointe ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée du séjour de M. X en France et à la situation de son foyer, la décision litigieuse a, nonobstant, dans les circonstances particulières de l'espèce, la durée relativement brève de la vie maritale des intéressés, porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que la décision attaquée a été prise en violation des dispositions précitées et à demander l'annulation de ladite décision en date du 21 juin 2000 par laquelle le préfet des Bouches du Rhône a refusé de lui délivrer une carte de séjour portant la mention vie privée et familiale ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
Considérant que la présente décision implique nécessairement que soit délivrée à M. X une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ; qu'il y a des lors lieu d'enjoindre au préfet des Bouches du Rhône de procéder à cette délivrance dans un délai de trois mois à compter du jour de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu en l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à M. X une somme de 1.500 euros au titre des frais exposés par celui-ci en première instance et en appel et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 12 juin 2001 et la décision du préfet des Bouches du Rhône en date du 21 juin 2000 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches du Rhône de délivrer à M. Mhadji X une carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale dans un délai de trois mois à compter de la date de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1.500 euros à M. Mhadji X au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Mhadji X est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mhadji X, au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, et au préfet des Bouches du Rhône.
Délibéré à l'issue de l'audience du 12 janvier 2004, où siégeaient :
Mme Bonmati, président de chambre,
M. Pocheron et M. Alfonsi, premiers conseillers,
assistés de Mme Ranvier, greffier ;
Prononcé à Marseille, en audience publique le 9 février 2004.
Le président, Le rapporteur,
Signé Signé
Dominique Bonmati Michel Pocheron
Le greffier,
Signé
Patricia Ranvier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
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N° 01MA01834