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15/01/2004 | FRANCE | N°03MA01473

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 3, 15 janvier 2004, 03MA01473


Vu 1°/ la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 25 juillet 2003 sous le n° 03MA01473, présentée par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ;

Le ministre demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 03-1487 du 28 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a, sur la protestation de M. X agissant en qualité de mandataire des Y, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 janvier 2003 pour la désignation des membres du comité local des pê

ches maritimes et des élevages marins de Sète ;

2'/de rejeter la protestation...

Vu 1°/ la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 25 juillet 2003 sous le n° 03MA01473, présentée par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ;

Le ministre demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 03-1487 du 28 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a, sur la protestation de M. X agissant en qualité de mandataire des Y, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 janvier 2003 pour la désignation des membres du comité local des pêches maritimes et des élevages marins de Sète ;

2'/de rejeter la protestation formée par M. X devant le Tribunal administratif de Montpellier ;

Classement CNIJ : 28-06-04

C

Il soutient :

- que les premiers juges ont commis une erreur de droit, résultant d'une erreur d'interprétation de l'article 15 du décret n° 92-376 du 1er avril 1992, en estimant que les votes déposés directement dans la boîte aux lettres de la direction régionale des affaires maritimes n'auraient pas dû être écartés ;

- que ce décret prévoit expressément que les votes par correspondance doivent être adressés par la poste au plus tard le jour du scrutin et doit être interprété comme n'autorisant pas, ce jour-là, le dépôt des bulletins dans un autre endroit que le seul bureau de vote disposant d'une urne ;

- que l'annulation des votes en litige par la commission électorale a été effectuée à la demande de plusieurs mandataires de listes présentant des candidats à l'élection, dont M. X ;

- que l'ensemble du corps électoral avait connaissance des deux procédures de vote, rappelées dans les arrêtés préfectoraux des 1er octobre et 5 novembre 2002 ainsi que dans le descriptif de la procédure de vote envoyé à chaque électeur ;

- que les témoignages retenus par les premiers juges ont un caractère partial ;

- que même d'après l'interprétation que les premiers juges ont fait du décret du 1er avril 1992, ce n'est pas la totalité des 260 bulletins annulés par la commission électorale dont la validité pourrait être contestée mais seulement ceux qui ont été déposés dans la boîte aux lettres de la direction régionale des affaires maritimes le jour du scrutin ;

- que s'agissant du moyen tiré de la mauvaise réception du matériel électoral, la validité des listes électorales ne peut être mise en cause, dès lors notamment que leur qualité dépend de la responsabilité des professionnels ;

- que toutes les précautions ont été prises pour éviter les doubles votes ;

- que M. X ne peut se prévaloir, en ce qui concerne la diffusion des listes d'émargement, d'avantages ou de traitement de faveur indûment accordés à certaines listes plutôt qu'à d'autres ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré au greffe le 19 novembre 2003, le mémoire en défense présenté par M. X, mandataire des Y ; M. X conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de prendre toutes mesures nécessaires à l'organisation de nouvelles élections au comité local des pêches et des élevages marins de Sète dans le délai imposé par le jugement attaqué ;

Il fait valoir :

- que le préfet de l'Hérault n'était pas compétent pour prendre l'arrêté du 1er octobre 2002 fixant les conditions de vote ; que cet arrêté est entaché d'une erreur de droit en ce qu'il a restreint les possibilités de vote ouvertes par le décret n° 92-376 du 1er avril 1992 ;

- que l'administration ne peut pas se fonder sur des normes réglementaires pour justifier l'invalidation de 260 bulletins de vote quand, dans les faits, elle a appliqué des règles différentes ;

- que les témoignages versés au dossier, qui n'émanent pas tous de membres du syndicat CGT, sont dignes de foi ;

- que c'est à juste titre que les premiers juges ont pris en compte la totalité des bulletins invalidés ; qu'en tout état de cause, la prise en considération des seuls votes invalidés qui sont parvenus le jour du scrutin aurait été susceptible de faire basculer les résultats de l'élection ;

- que nombre d'électeurs n'ont pas reçu le matériel électoral du fait que les listes électorales étaient basées sur un fichier obsolète ;

- que la distribution de ce matériel électoral aux personnes ne l'ayant pas reçu a été effectuée sans les précautions nécessaires pour éviter les votes frauduleux ;

- qu'une liste des non votants a été communiquée au mandataire d'une des listes en présence le jour du scrutin ;

Vu 2°/ la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 25 août 2003 sous le n° 03MA01716, présentée par Z, demeurant 15 Quai d'Alger à Sète (34200), représentant de la Fédération des Activités Maritimes Artisanales ;

A demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 03-1487 du 28 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a, sur la protestation de M. X agissant en qualité de mandataire des Y, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 janvier 2003 pour la désignation des membres du comité local des pêches maritimes et des élevages marins de Sète ;

2'/ de rejeter la protestation formée par M. X devant le Tribunal administratif de Montpellier ;

A soutient que c'est à tort que, pour annuler les élections, les premiers juges se sont fondés sur le faible écart de suffrages entre deux des listes en présence, dès lors que, même si les bulletins de vote invalidés à tort avaient été pris en considération, les résultats de l'élection à la présidence du conseil du comité local des pêches maritimes n'en auraient pas été modifiés ;

Vu, enregistré au greffe le 13 octobre 2003, le mémoire en défense présenté par M. X, mandataire des Y ; M. X conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir :

- que la requête est tardive et n'est pas motivée ;

- que le moyen invoqué par le requérant découle d'une erreur d'interprétation du jugement attaqué ; que l'invalidation des 260 bulletins en cause a des conséquences non seulement sur la nomination du président du conseil du comité local des pêches maritimes mais également sur la composition du conseil du comité régional des pêches du Languedoc-Roussillon et sur la répartition des sièges attribués aux syndicats en fonction de la représentation obtenue lors des élections aux comités locaux des pêches maritimes ;

- que cette invalidation a été prononcée dans des conditions irrégulières ;

- que un grand nombre d'électeurs n'ont pas reçu le matériel électoral du fait que les listes électorales étaient basées sur un fichier obsolète ;

- que la distribution de ce matériel électoral aux personnes ne l'ayant pas reçu a été effectuée sans les précautions nécessaires pour éviter les votes frauduleux ;

- qu'une liste des non votants a été communiquée au mandataire d'une des listes en présence le jour du scrutin ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 91-411 du 2 mai 1991 ;

Vu le décret n° 92-335 du 30 mars 1992 ;

Vu le décret n° 92-376 du 1er avril 1992 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 décembre 2003 :

- le rapport de M. CHERRIER, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;

Considérant que les requêtes n° 03MA01473 et 03MA01716 sont dirigées contre un même jugement du Tribunal administratif de Montpellier et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par un seul arrêt ;

Considérant que le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales et A relèvent appel du jugement en date du 28 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a, sur la protestation de M. X agissant en qualité de mandataire des Y, annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 janvier 2003 pour la désignation des membres du comité local des pêches maritimes et des élevages marins de Sète ;

Considérant qu'aux termes de l'article 15 du décret du 1er avril 1992 susvisé : Le vote a lieu par correspondance. Les bulletins peuvent également être déposés auprès de la commission électorale par l'électeur le jour du scrutin. Dans le cas de vote par correspondance, les bulletins sont adressés par la poste, de telle façon qu'ils parviennent à la commission au plus tard le jour du scrutin. Le bulletin de vote est placé sous double enveloppe. L'enveloppe extérieure porte mention du nom, des prénoms, de la signature, de l'adresse du votant, du collège ou de la catégorie et du comité concerné. L'enveloppe intérieure ne doit porter, à peine de nullité du vote, aucune mention permettant d'identifier le votant, et elle doit être close. La commission électorale enregistre le nom des votants ; qu'aux termes de l'article 39 du décret du 30 mars 1992 susvisé : Dans chaque comité local, les représentants des équipages et des salariés des entreprises de pêche maritime et d'élevage marin, ainsi que ceux des chefs de ces entreprises sont élus au scrutin de liste à la représentation proportionnelle et au plus fort reste par les collèges électoraux définis ci-dessous ;

Considérant que la commission électorale a écarté comme irrecevables 260 bulletins sur les 616 reçus au motif qu'ils n'ont été ni transmis par la voie postale ni retrouvés dans les urnes mais ont été déposés directement dans la boîte aux lettres de la direction régionale des affaires maritimes du Languedoc-Roussillon, où siégeait ladite commission ;

Considérant que le décret du 1er avril 1992 précité ne précise pas les modalités selon lesquelles les bulletins doivent être déposés auprès de la commission électorale le jour du scrutin ; que s'il appartenait à l'autorité préfectorale de préciser pour des raisons pratiques le lieu de ce dépôt, la commission électorale ne pouvait subordonner la validité des 99 bulletins déposés directement le 16 janvier 2003 dans la boîte aux lettres susmentionnée au respect d'une condition non prévue par ce décret et que ladite autorité n'avait pas compétence pour fixer ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces bulletins n'auraient pas respecté l'ensemble des prescriptions du décret du 1er avril 1992, notamment celles destinées à garantir la régularité et le secret du vote des électeurs ;

Considérant, en outre, que si les arrêtés préfectoraux en date des 1er octobre et 5 novembre 2002 relatifs à l'organisation des élections en litige mentionnaient que les bulletins de vote des électeurs seront reçus par correspondance au siège de la commission jusqu'au jeudi 16 janvier 2003 inclus et à l'urne le même jour et si le descriptif de procédure de vote adressé à chaque électeur indiquait la possibilité de voter à l'urne au siège de la commission électorale , le nombre de bulletins invalidés est de nature, par son importance même par rapport au total des votants, à faire regarder comme dignes de foi les témoignages produits par M. X d'où il ressort qu'une partie des électeurs avaient été informés par l'administration de la possibilité d'effectuer un dépôt direct dans la boîte aux lettres de la direction régionale des affaires maritimes du Languedoc-Roussillon non seulement le jour du scrutin mais aussi dans les jours précédant celui-ci ;

Considérant qu'il suit de ce qui précède que ladite commission doit être regardée comme ayant écarté dans des conditions irrégulières les 260 bulletins qu'elle a déclarés irrecevables ;

Considérant qu'eu égard, d'une part à la proportion que représentent ces bulletins dans le nombre de votants et d'autre part aux faibles écarts entre les suffrages obtenus par les listes de candidats, les irrégularités susmentionnées doivent être regardées comme ayant été de nature à altérer la répartition des sièges entre les organisations professionnelles ou syndicales en présence dans la totalité des collèges électoraux à l'exception de la catégorie des chefs d'entreprise d'élevage marin dans laquelle aucun vote n'a été invalidé, sans que A puisse utilement faire valoir que, du fait que le conseil du comité local des pêches maritimes de Sète est partiellement composé de membres non élus, l'issue de l'élection du président de ce conseil, acquise le 5 mai 2003 par 13 voix contre 10, aurait de toute façon été la même ; que le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ne peut davantage soutenir de façon utile que l'annulation des votes en litige par la commission électorale a été effectuée à la demande de plusieurs mandataires de listes présentant des candidats à l'élection, dont M. X ; qu'il suit de ce qui vient d'être dit que le jugement attaqué n'a annulé à tort que les seules opérations électorales relatives à la catégorie des chefs d'entreprise d'élevage marin ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie dans cette mesure par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. X ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les autres irrégularités invoquées par M. X, à les supposer même établies, auraient eu une incidence sur le résultat du scrutin dans la catégorie des chefs d'entreprise d'élevage marin ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que A, dont la requête est suffisamment motivée et a été introduite dans le délai indiqué par le tribunal administratif, et le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales ne sont fondés à demander l'annulation du jugement attaqué qu'en tant qu'il annule les opérations électorales concernant la catégorie susmentionnée ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que l'annulation résultant du présent arrêt implique nécessairement que soient organisées de nouvelles élections au comité local des pêches maritimes de Sète aux fins de pourvoir les sièges réservés aux collèges et catégories autres que la catégorie des chefs d'entreprise d'élevage marin ; que, dès lors, au cas où l'injonction prononcée par les premiers juges n'aurait pas déjà été exécutée, il y a lieu d'enjoindre à l'administration de faire procéder à ces élections dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Montpellier en date du 28 mai 2003 est annulé en tant qu'il annule les opérations électorales qui ont eu lieu le 16 janvier 2003 en vue de la désignation des représentants des chefs d'entreprise d'élevage marin au comité local des pêches maritimes et des élevages marins de Sète.

Article 2 : Le surplus des requêtes susvisées du ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales et de A est rejeté.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault, au cas où l'injonction prononcée par les premiers juges n'aurait pas déjà été exécutée, de faire procéder, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, à de nouvelles élections au comité local des pêches maritimes de Sète aux fins de pourvoir les sièges réservés aux collèges et catégories autres que la catégorie des chefs d'entreprise d'élevage marin.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à A, à M. X es qualité de mandataire des Y , au préfet de l'Hérault et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

Délibéré à l'issue de l'audience du 22 décembre 2003, où siégeaient :

M. LAFFET, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. CHERRIER et Mme BUCCAFURRI, premiers conseillers,

assistés de Mme GUMBAU, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 15 janvier 2004.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Bernard LAFFET Philippe CHERRIER

Le greffier,

Signé

Lucie GUMBAU

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

'''MA01473 -03MA01716 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03MA01473
Date de la décision : 15/01/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAFFET
Rapporteur ?: M. CHERRIER
Rapporteur public ?: M. HERMITTE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-01-15;03ma01473 ?
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