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04/12/2003 | FRANCE | N°99MA01380

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre - formation a 3, 04 décembre 2003, 99MA01380


Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 juillet 1999, sous le n° 99MA01380, la requête présentée pour :

- M. David X, demeurant ... ;

- M. Eric X, demeurant ... ;

- Mme Michelle X, demeurant ... ;

- M. Rémi X, demeurant ... ;

- M. Léon Z, demeurant ... ;

par Me Maurel, avocate ;

Classement CNIJ : 60-01-02-01-03-01-01

60-04-01

C

Les requérants demandent à la Cour :

- d'infirmer le jugement du Tribunal administratif de Nice du 21 mai 1999, en ce qu'il considère que

le décès de M. Pierre X n'est pas directement lié à l'accident dont il a été victime du fait de l'explosion d'un transform...

Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 juillet 1999, sous le n° 99MA01380, la requête présentée pour :

- M. David X, demeurant ... ;

- M. Eric X, demeurant ... ;

- Mme Michelle X, demeurant ... ;

- M. Rémi X, demeurant ... ;

- M. Léon Z, demeurant ... ;

par Me Maurel, avocate ;

Classement CNIJ : 60-01-02-01-03-01-01

60-04-01

C

Les requérants demandent à la Cour :

- d'infirmer le jugement du Tribunal administratif de Nice du 21 mai 1999, en ce qu'il considère que le décès de M. Pierre X n'est pas directement lié à l'accident dont il a été victime du fait de l'explosion d'un transformateur EDF ;

- condamner EDF et son assureur à verser :

- 1.603.548 francs à titre patrimonial à Eric et David X sous déduction de la provision de 300.000 francs versée ;

- 100.000 francs de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi par chacun d'eux ;

- à Mme X épouse Z, soeur du défunt, 100.000 francs en réparation de tous ses préjudices, et 8.306 francs en remboursement des frais d'obsèques ;

- à M. Rémi X, frère du défunt, 25.000 francs au titre du préjudice moral ;

- à M. Z, beau-frère du défunt, 30.000 francs au titre du préjudice moral ;

- 20.000 francs aux requérants en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratives et des cours administratives d'appel ;

Ils soutiennent :

- que contrairement à ce que le tribunal administratif a jugé, le décès de M. Pierre X présente un lien direct avec l'accident dont il a été victime dans la nuit du 17 au 18 octobre 1993, en raison de l'explosion d'un transformateur appartenant à EDF ;

- que les conclusions des deux médecins experts sont formelles sur ce point ; que la responsabilité d'EDF a déjà été retenue puisqu'une provision a déjà été allouée ; qu'au moment de l'accident, M. X ne souffrait d'aucune affection et ne suivait aucun traitement ; que les brûlures thoraciques sont directement à l'origine du cancer du poumon dès lors qu'il a été impossible de soumettre le blessé à une chimiothérapie ;

- que le préjudice de Pierre X, compte tenu du pretium doloris, devrait être évalué à 300.000 francs ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement dans sa partie relative au remboursement des frais hospitaliers ;

- qu'il y a lieu d'allouer aux fils du défunt, étudiants, 600.000 francs à chacun, tous chefs de préjudice confondus ;

- que le tribunal a écarté à tort l'indemnisation des troubles dans les conditions d'existence de Mme Michelle Z, alors qu'elle a dû prendre en charge sa mère invalide et payer les frais d'obsèques de son frère ;

- que le frère et beau-frère du défunt ont droit à l'indemnisation du préjudice moral ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense présenté pour EDF le 23 novembre 1999, et son assureur la compagnieAXA, qui demandent à la Cour de confirmer le jugement du tribunal administratif, en ce qu'il a déclaré non établi le lien entre l'explosion du transformateur et le décès de M. X ; en ce qu'il a condamné EDF à verser à Messieurs David et Eric X la somme de 205.013, 68 francs sur justification des versements effectués par les fils du défunt ; qu'à défaut, ceux-ci devraient restituer à EDF la somme de 98.550, 32 francs ; de confirmer encore le jugement en ce qu'il a débouté Mme Michelle Z, M. René X et M. Léon Z, et de condamner tout succombant aux dépens d'appel au paiement de 20.000 francs au titre des frais irrépétibles ;

Il soutient :

- que l'action contre l'assureur relevant du tribunal de grande instance, les conclusions contre la compagnie AXA sont irrecevables comme portées devant une juridiction incompétente ;

- que le préjudice doit être limité au préjudice corporel consécutif à l'accident qui n'est pas la cause du décès ;

- que M. X est tiers par rapport à l'ouvrage ; qu'il a droit à la réparation de son préjudice ; que EDF a engagé une procédure de référé civil à l'encontre des tiers responsables dès lors que l'expertise fait apparaître que l'explosion est due à une fuite d'eau dans l'appartement d'une dame A dans la copropriété de l'immeuble La Concorde, qui a pénétré le local non étanche où était situé le transformateur ;

- que le cancer du poumon décelé à l'occasion de l'hospitalisation de M. X était à une phase avancée rendant l'issue fatale ;

- que l'accident a été le révélateur du cancer et a retardé son traitement ; que le traumatisme de l'explosion a peu d'influence sur l'évolution de la maladie ;

- que le recours à la chimiothérapie n'aurait pu permettre qu'une survie plus longue de quelques mois ;

- que M. X étant décédé trois mois après la date de consolidation de ses blessures, il ne peut y avoir d'incapacité permanente partielle ; que M. X ne percevait aucun revenu, que ses ayants droits ne peuvent prétendre à une quelconque indemnisation de l'incapacité temporaire totale ;

Vu le mémoire présenté le 4 janvier 2000 pour les ayants droits de M. X qui soutiennent :

- qu'ils abandonnent leurs conclusions relatives à la mise en cause la compagnie AXA GLOBAL RISQUES ;

- qu'on ne peut comme EDF le fait, nier à la fois le lien de causalité entre l'accident et le décès, et nier l'existence d'une incapacité temporaire totale et d'une incapacité permanente partielle du fait de l'accident ;

- que M. X était en bonne santé au moment de l'accident et ne présentait aucun signe avant coureur d'un cancer, lequel si situe précisément à l'endroit des brûlures du thorax ; que l'accident a interdit le recours à la chimiothérapie ;

- que seul le docteur PADILLA a vu M. X vivant et a pu déterminer une incapacité permanente partielle égale à 30%, à la date de consolidation des blessures, le 18 février 1994 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance du 25 avril 1994, par laquelle le magistrat délégué chargé des référés du Tribunal administratif de Nice a alloué à M. X une provision de 300.000 francs ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2003 :

- le rapport de M. CHAVANT, premier conseiller ;

- les observations de Me POMATTO ;

- et les conclusions de M. TROTTIER, premier conseiller ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Pierre X, 54 ans, demeurant 2 chemin de l'Ecole à Cannes La Bocca a été gravement blessé dans la nuit du 17 au 18 octobre 1993, par l'explosion d'un transformateur EDF implanté au rez-de-chaussée de l'immeuble où il habitait, sans qu'on puisse relever une faute quelconque de la victime, qui présente la qualité de tiers par rapport à l'ouvrage ; que, par suite, la responsabilité d'EDF est totalement engagée à son égard quelles que puissent être les causes du sinistre ;

Sur le préjudice de M. Pierre X :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal, qui a pu examiner M. X le 6 mai 1994, que celui-ci est décédé le 20 mai 1994 des suites de l'évolution de son cancer bronchique ; que si ce cancer du lobe supérieur droit du poumon a été révélé lors du séjour de M. X dans le service de pneumologie à l'hôpital des armées Sainte-Anne, il préexistait à l'accident, même si M. X, atteint d'un tabagisme important, ne suivait aucun traitement, et si cette maladie a pu être activée par le traumatisme subi, comme l'indique l'avis du sapiteur ; que l'expert indique encore que l'accident a été à la fois le révélateur du cancer et le retardataire de son traitement dans la mesure où il interdisait le recours à la chimiothérapie ; que par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les brûlures subies seraient la cause directe de sa maladie et à l'origine de son décès ; que, toutefois, l'accident est à l'origine de souffrances dont M. X est fondé à demander réparation ;

Considérant que l'expert a évalué à 30% l'incapacité permanente partielle de M. X, l'incapacité temporaire totale a été fixée à 3 mois, la date de consolidation au 18 février 1994, les douleurs considérées comme importantes (6/7), et le préjudice esthétique moyen (4/7) ; qu'il résulte de l'instruction que M. X n'a subi aucune perte de revenus du fait de l'incapacité temporaire totale ; que si les requérants allèguent que la somme de 200.000 francs allouée par les premiers juges à M. X, tous chefs de préjudices confondus, hors frais d'hospitalisation, serait manifestement insuffisante, ils n'apportent à l'appui de cette allégation aucune précision, ni aucun élément pour justifier leur réclamation d'une somme de 300.000 francs ; qu'il y a lieu de rejeter leurs conclusions sur ce point ;

Sur le préjudice subi par les héritiers de M. X :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le décès de M. X n'étant pas la conséquence directe de l'accident dont il a été victime, les préjudices qui résultent de celui-ci, tant pour ses fils, que pour sa mère, sa soeur, son frère et son beau-frère ne sont pas indemnisables, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges ;

Considérant que Mme Ida B, mère du défunt, était infirme et soignée par son fils avant l'accident ; qu'à la suite de l'hospitalisation de ce dernier, elle a subi des troubles dans les conditions d'existence dont il sera fait une juste appréciation en fixant à 10.000 euros la réparation de ce préjudice ;

Sur les conclusions tendant à l'octroi de frais irrépétibles :

Considérant qu'aux termes de l'article L761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties tendant à l'application de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : EDF est condamné à verser aux ayants droits de Mme Ida B une somme globale de 10.000 euros.

Article 2 : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nice est réformé en ce qu(il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. David X, M. Eric X, Mme Michelle X, M. René X, M. Léon Z, à EDF, et à Me PADILLA, expert.

Copie en sera adressée à Me Maurel, Me POMATTO, à l'hôpital d'instruction des armées Sainte-Anne à Toulon (Var), à l'hôpital Léon Bérard à Hyères (Var), au préfet du Gard, et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Délibéré à l'issue de l'audience du 6 novembre 2003, où siégeaient :

M. DARRIEUTORT, président de chambre,

M. GUERRIVE, président assesseur,

M. CHAVANT, premier conseiller,

assistés de Melle MARTINOD, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 4 décembre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Jean-Pierre DARRIEUTORT Jacques CHAVANT

Le greffier,

Signé

Isabelle MARTINOD

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 99MA01380


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA01380
Date de la décision : 04/12/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. CHAVANT
Rapporteur public ?: M. TROTTIER
Avocat(s) : SCP MAUREL ET VAN ROLLEGHEM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-12-04;99ma01380 ?
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